Équation du rendu

équation

En informatique graphique, l'équation du rendu est une équation intégrale qui décrit l'équilibre radiatif lumineux sur une surface. Elle énonce que la luminance énergétique quittant un point donné est égale à la somme des luminances énergétiques émise et réfléchie, sous les hypothèses de l'optique géométrique. Elle a été introduite en informatique graphique par David Immel et al.[1] et James Kajiya[2] indépendamment en 1986. Les techniques de rendu physique réaliste tentent de résoudre cette équation afin d'obtenir une image fidèle d'un modèle de scène 3D.

L'équation du rendu décrit la quantité totale de lumière émise à partir d'un point dans la direction de sortie , en fonction de la lumière entrante et de la BRDF.

L'équation du rendu découle du principe physique de conservation de l'énergie. Si désigne la luminance énergétique en une position et une direction données, la lumière sortante est la somme de la lumière émise et de la lumière réfléchie. La lumière réfléchie est elle-même la somme sur l'hémisphère des directions de la lumière entrante multipliée par la BRDF et le cosinus de l'angle d'incidence.

Formulation mathématique modifier

L'équation du rendu s'écrit :

 

où :

  •   est la luminance spectrale totale sortant du point   selon la direction  , à la longueur d'onde   et au temps   ;
  •   est la position dans l'espace ;
  •   est la direction de la lumière sortante ;
  •   est la longueur d'onde de la lumière ;
  •   est le temps ;
  •   est la luminance spectrale émise ;
  •   est l'intégrale sur   ;
  •   est l'hémisphère unitaire centrée en   contenant les valeurs de   pour lesquelles   ;
  •   est la normale à la surface au point   ;
  •   est l'opposé de la direction entrante ;
  •   est la fonction de distribution de réflectance bidirectionnelle, soit la proportion de lumière réfléchie de   vers   au point  , à la longueur d'onde   et au temps   ;
  •   est la luminance spectrale arrivant en   selon la direction  , à la longueur d'onde   et au temps   ;
  •   est le facteur d'atténuation de l'irradiance dû à l'angle d'incidence, qui tient compte de l'étalement du flux lumineux sur la surface lorsque l'éclairement n'est pas perpendiculaire. Ce terme est souvent écrit   avec   l'angle d'incidence.

L'équation du rendu peut être également définie de cette manière:

 

où :

  •   est la luminance sortante de la surface ;
  •   est la luminance émise ;
  •   est la luminance arrivant sur la surface selon la direction   ;
  •   est la BRDF de la surface ;
  •   est l'angle formé par la normale a la surface et par la direction   ;
  •   est le produit scalaire de la normale et de la direction   ;
  •   est l'hémisphère de rayon 1 centrée sur la normale a la surface contenant les valeurs de   pour lesquelles   ;
  •   est l'intégrale sur   ;

L'équation du rendu est linéaire car elle se compose uniquement de multiplications et d'additions. Cette caractéristique permet de factoriser certains termes de l'équation ou de les réarranger pour procéder à des simplifications sous certaines hypothèses pratiques, comme le font de nombreuses méthodes de rendu[3]. Formellement, il s'agit d'une équation intégrale de Fredholm du second type.

Également, on peut remarquer que l'équation du rendu est récursive. En effet, pour calculer la luminance entrante ( ), il faut utliliser l'équation du rendu car la luminance entrante peut être émise par une autre surface.

Applications modifier

Résoudre l'équation du rendu pour obtenir une image à partir d'une scène donnée est l'objectif du rendu physique réaliste. La rastérisation d'une scène 3D permet de résoudre le cas spécial de l'équation du rendu où la lumière entrante provient d'une source lumineuse, et la lumière sortante est collectée par un capteur virtuel ; on parle alors d'éclairage direct. Les algorithmes qui tiennent compte de multiples rebonds de lumière entre les surfaces simulent quant à eux l'éclairage global. Historiquement, la méthode des éléments finis a été appliquée à ce problème, conduisant aux algorithmes de rendu par radiosité. Aujourd'hui, la méthode de Monte Carlo est la plus employée pour l'éclairage global[4]. Elle se décline en de nombreux algorithmes comme le Path Tracing, le Photon Mapping, ou le transport de lumière de Metropolis.

Voici un exemple de programme de Path Tracing qui utilise la méthode de Monte Carlo pour approximer l'équation du rendu:

vec3 trace_scene(ray r) {
    hit_info hit;
    
    if (scene_intersect(r, hit)) {
        r.origin = hit.p;
        r.direction = reflectance_function(hit.n);
        float cos_theta = dot(hit.n, r.direction);
        
        return cos_theta * trace_scene(r);
    }
    
    return vec3(0);
}

Limitations et généralisations modifier

Telle quelle, l'équation du rendu ne décrit pas tous les aspects du transport lumineux car de nombreux phénomènes physiques dépassent son cadre théorique. Plusieurs caractéristiques des surfaces solides ne sont pas modélisées par la BRDF, et échappent donc à l'équation du rendu :

  • La réfraction, qui se produit lorsque la lumière est transmise à travers la surface, par exemple lorsqu'elle atteint un objet en verre ou la surface de l'eau.
  • La transluminescence, où les positions d'entrée et de sortie de la lumière sont différentes. Ce phénomène est très présent à l'intérieur des surfaces organiques telles que la peau ou les champignons. Une BSSRDF peut être employée pour les représenter.

D'autre phénomènes ne peuvent pas être pris en compte dans l'équation du rendu car ils contredisent les hypothèses de l'optique géométrique :

  • La polarisation, où les composantes de la lumière sont réfléchies séparément, par exemple lorsqu'elle se reflète à la surface de l'eau.
  • La phosphorescence, qui se produit lorsque la lumière ou tout autre rayonnement électromagnétique est absorbé à un temps donné et réémis ultérieurement.
  • La fluorescence, où la lumière absorbée est réémise immédiatement mais à des longueurs d'onde différentes.
  • L'effet Doppler, où la lumière arrivant sur une surface se déplaçant à grande vitesse sort avec une longueur d'onde décalée.
  • Les interférence, qui surviennent quand les propriétés ondulatoires de la lumière entrent en jeu lors de la réflexion. C'est le cas sur des surfaces de taille caractéristique comparable aux longueurs d'onde réfléchies.
  • Les effets non linéaires, pour lesquels la conservation de l'énergie ne concerne plus seulement le flux lumineux et la surface mais un système plus large comme l'intérieur d'un laser.

L'équation du rendu peut être généralisée pour décrire des configurations physiques complexes. Par exemple, lorsqu'une scène n'est pas composée uniquement de surfaces séparées par du vide mais contient des milieux participants comme de la fumée ou des nuages, l'équation du rendu est généralisée en l'équation du rendu volumique[5] pour tenir compte des interactions entre les photons et les particules présentes dans le milieu.

Références modifier

  1. (en) David S. Immel, Michael F. Cohen et Donald P. Greenberg, « A radiosity method for non-diffuse environments », ACM SIGGRAPH Computer Graphics, vol. 20, no 4,‎ , p. 133–142 (ISSN 0097-8930, DOI 10.1145/15886.15901, lire en ligne, consulté le )
  2. (en) James T. Kajiya, « The rendering equation », Proceedings of the 13th annual conference on Computer graphics and interactive techniques - SIGGRAPH '86, ACM Press,‎ , p. 143–150 (ISBN 978-0-89791-196-2, DOI 10.1145/15922.15902, lire en ligne, consulté le )
  3. (en) Thorsten-Walther Schmidt, Fabio Pellacini, Derek Nowrouzezahrai et Wojciech Jarosz, « State of the Art in Artistic Editing of Appearance, Lighting and Material: State of the Art in Artistic Editing of Appearance, Lighting and Material », Computer Graphics Forum, vol. 35, no 1,‎ , p. 216–233 (DOI 10.1111/cgf.12721, lire en ligne, consulté le )
  4. (en) Luca Fascione, Johannes Hanika, Daniel Heckenberg et Christopher Kulla, « Path tracing in production: part 1: modern path tracing », ACM SIGGRAPH 2019 Courses, ACM,‎ , p. 1–113 (ISBN 978-1-4503-6307-5, DOI 10.1145/3305366.3328079, lire en ligne, consulté le )
  5. (en) James T. Kajiya et Brian P Von Herzen, « Ray tracing volume densities », ACM SIGGRAPH Computer Graphics, vol. 18, no 3,‎ , p. 165–174 (ISSN 0097-8930, DOI 10.1145/964965.808594, lire en ligne, consulté le )