Papeda (citrus)

Espèces, ou regroupements d'espèces d'agrumes
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Papeda est un qualificatif employé chez les agrumes pour nommer soit des espèces, soit des regroupements d'espèces.

Swingle en avait fait un sous-genre (1943) et Tanaka une sous-section de son sous-genre Archicitrus, l'un et l'autre devenus obsolètes. Papeda Hassk. (1842) est le nom d'espèce admis synonyme de C. hystrix (le combava)[1].

Ichang papeda en novembre (Portugal).

Dénomination modifier

Le mot papeda ou papede[2] est un gruau de sagou spécialité de la cuisine papoue[3] employé aux Moluques, à Amboine, au Sulawesi central et en Papouasie occidentale.

Il désigne aussi des végétaux. A Java[4], Sumatra et à Amboine[5] daun papede est une Araliaceae (Nothopanax scutellarium Merr.)[6], et aussi localement le combava (Citrus hystrix)[7].

Les taxonomistes l'utilisent depuis Georges Eberhard Rumpf qui décrit dans sa Het Amboinsche kruidboek (1741) le Limo Agrestis. Lemon Papeda, en néerlandais Wilde Papeda-Lemoen présent des Célèbes à Amboine[8]. Limo agrestis indica synonyme Limon papeda Rumph. est resté comme un « agrume au jus acide si âcre, qu'il ne peut pas être mangé» (Johann Friedrich Zückert, 1769)[9]. Et ensuite ont été nommés Papeda de nombreux agrumes sauvages ou cultivés amères difficilement mangeables.

 
Dans la phylogénie de Farid Agouillal et al. (2017) la proximité de C. micrantha, C. hystrix et C. macroptera est patente mais ensuite Fortunella ou C. aurantifolia interdisent l'existence d'un sous-genre[10]

Les papeda modifier

Espèces modifier

9 espèces du genre Citrus ont le qualificatif papeda:

Le combava modifier

Gallesio (1811) rapproche le Limo agrestis indica (Limon papeda Rumph) du combava Citrus hystrix. DC, Hasskarl crée (1843) de son côté Papeda rumphii Hassk ou Papeda Hassk[11]. Miquel (1859) rajoute à la confusion et crée l'espèce C. papeda à partir de Limo agrestis vel Papeda Rumph. et Loosjes (1876) nomme Djěrouk pourout le C. papeda Miq. Cette incohérence entraine jusqu'à nos jours une nébuleuse papeda fourre-tout d'agrumes amères le plus souvent sauvages ou sauvages-cultivés d'Asie du sud-est et d'Océanie.

Le combava est un agrume sauvage cultivé pour sa feuille largement utilisée en cuisine thaï et britannique.

Les papeda sauvages d'Asie du Sud-est, de Polynésie et Nouvelle-Calédonie modifier

 
Le combava synonyme Papeda Hassk

Les padeda chinois modifier

  • Le papeda l'Ichang (Citrus ichangensis = Citrus cavaleriei ) est un groupe d'agrumes chinois sauvages et cultivé comme agrume décoratif. L'hybride Citrus ichangensis Papeda Tahizu est une curiosité botanique obtenue en Europe et papeda ichang x poncirus trifoliata une hybridation recherchée pour sa rusticité.
  • Honghe papeda[12] (Citrus hongheensis Y.M.Ye et al.) espèce sauvage du sud-ouest de la Chine, en voie de disparition (2023)[13].

Ces espèces sont souvent regroupées avec des périmètres variables dans un sous-genre Papeda[14].

Les regroupements modifier

Les méthodes taxonomiques formelles ne sont pas facile à appliquer au genre Citrus: il existe de très nombreux hybrides, une polyploïdie fréquente, de la polyembryonie et des mutations spontanées. Diverses approches dont la chimiotaxonomie et le séquençage de l'ADN et des protéines permettent de dresser de nos jours des phylogénies qui ont rendu les regroupements traditionnels obsolètes. Pour autant ils demeurent dans les usages[15].

L'exploration du génome des Citrus par marqueurs moléculaires et séquençage a montré que Papeda est constitué de 2 groupes polyphylétiques bien distincts : 1/ C. micrantha comme référent et 2/ C. cavaleriei H. Lév. ou C. ichangensis. Ils sont considérés comme deux espèces ancestrales dont dérivent diverses espèces cultivées dont le yuzu. Ollitrault et al. (2020) ont proposé une nouvelle classification prenant en compte les relations phylogénétiques et la compatibilité sexuelle, en s'appuyant sur les anciennes classifications de Tanaka[16], Swingle et Reece[17], et Zhang et Mabberley[18]. Dans le groupe Papeda, deux véritables espèces C. cavaleriei qui comprend chez eux C. ichangensis et C. latipes et C. hystrix qui comprend C. micrantha, C. hystrix (Combava). C. macroptera reste hors du groupe[19].

E. Nicolosi en 2000 écrivait déjà que «la division des sous-genres Citrus et Papeda a disparu»[20], la démonstration que ces ex-genres sont polyphylétiques a été faite en 2022[21].

Le sous-genre Papeda chez Swingle modifier

 
Feuilles ailées de diverses espèce rattachées à Papeda

Pour mémoire, sur la base de la morphologie Swingle (1943) avait distingué les genres Fortunella (kumquats) avec 2 sous-genres, Poncirus (orange trifoliée) et Citrus avec 2 sous-genres Eucitrus et Papeda. Son sous-genre Papeda a 2 sections Papeda et Papedocitrus. Papeda comprenait 4 espèces C. hystrix, C. macroptera, C. micrantha et C. celebica et Papedocitrus comprenait C. ichangensis (Ichang papeda) et C. latipes (Khasi papeda)[22]. La caractéristique des Papeda écrit-il est la présence de «nombreuses gouttelettes d'huile âcre, de pétioles longs et très largement ailés»[23].

Une section du sous-genre Archicitrus chez Tanaka modifier

Tanaka traitait les genres Fortunella et Poncirus à peu près comme Swingle, mais chez Citrus ses 2 sous-genres sont totalement différents: Archicitrus (98 espèces réparties en 5 sections : Papeda (12 espèces), Limonallus (16 espèces), Citrophorum (21 espèces), Cephalocitrus (21 espèces) et Aurantium (21 espèces)) et sous-genre Metacitrus (en 3 sections: Osmocitrus (9 espèces), Acruman (36 espèces) et Pseudofortunella (1 espèce)).

Papedocitrus modifier

H. Chapot (1948) qualifie les Papedocitrus de section intermédiaire entre les Eucitrus et les Eupapeda[24]. Le groupe intermédiaire Papedocitrus (C. ichangensis, C. latipes) non admis (invalide chez Mabberley[25]) a été incéré entre Papeda (C. hystrix, C. micrantha et C. macroptera) et Citrus. Mark A. Berhow (1978) le confirme à la suite de l'analyse des flavonoïdes des feuilles[26]. Clémentine Baccati, François Luro et al. (2021) qui analysent les huiles essentielles qui adjoignent un groupe des hybrides apparentés C. junos , C. macrophylla et C. wilsonii [27].

La nébuleuse papeda modifier

Nombreux agrumes avec (ou sans) touche d'amertume réputés primitifs[28] d'Asie tropicale, de Chine et du Japon sont communément mis dans le même panier Papeda: le yuzu, le kabosu, l'Ichang, l'alemow, le yukou, le sudachi[29]...

Huile essentielles modifier

 
Analyse en composantes principales de HE de feuille du groupement papeda: forte diversité d'ensemble sauf la proximité du combava et de C. micrantha et du yuzu avec le citron d'Ichang[27].
 
Effets de l'inhalation de l'HE de yuzu chez l'humain (2022) trait continu (trait interrompu sujet témoin air naturel): esprit clair, concentrée, non stressé.

En 2021, l'étude comparative de 10 HE de feuille et de zeste par C. Baccati et al. les amène à retrouver les 2 sections de Papeda de Swingle qui travaillait lui aussi sur des données phénotypiques.

Les principales observations sont l'existence d'une très forte diversité: Le limonène qui est le composant majeur de presque tous les échantillons (HE de zeste) ne l'est pas du tout chez C. micrantha et de C. hystrix où le β-pinène joue ce rôle. Ces derniers ont de même le citronellal pour composant majeur de l'HE de feuille. «Les trois représentants de C. ichangensis présentent des profils très différents»: γ-terpinène, géranial, neral et β-pinène chez C. wilsonii; γ-terpinène, β-phellandrène et p -cymène pour le yuzu et enfin géranial, neral et limonène pour C. macrophylla[27].

Comme mentionné les espèces de la nébuleuse Papeda sont la plupart sauvages et rares. Leurs huiles essentielles sont peu disponibles. Seul le combava est cultivé ou récolté à une échelle significative[30] qui donne une visibilité sur l'huile essentielle, les publications actuelles (2023) indiquent un potentiel thérapeutique (antimicrobien, anti-moustiques, antioxydant, antitumorale, anti-inflammatoire et neuroprotectrice)[31].

Le yuzu - cousin des papeda - est l'espèce qui fait l'objet d'une culture sur la plus grande échelle, son huile essentielle est la plus disponible et la plus étudiée. Son inhalation agit sur le cerveau, elle a des effets anti-stress et favorisent la concentration[32]. Elle est un anti-inflammatoire démontré in vitro[33].

H. Kusunose et M. Sawamura ont publié une étude sur les HE d'agrumes amers (sumikan, naoshichi et yuzu) qui montre que les hydrocarbures terpéniques contribuent à l'odeur propre au sumikan (myrcène prédominant) et du naoshichi tous deux proches de l'odeur caractéristique du yuzu[34].

Notes et références modifier

  1. « Papeda | International Plant Names Index », sur www.ipni.org (consulté le )
  2. (en) J. P. B. de Josselin de Jong, Studies in Indonesian Culture ..., Noord-Hollandsche uitgevers-maatschappij, (lire en ligne)
  3. (en) Slamet Riyanto et Hasnan Hanif, Encyclopedia Series For Indonesian Children The Beauty Of Maluku Island That Indonesian Children Need To Know, Penerbit Andi, (ISBN 978-623-8186-03-7, lire en ligne)
  4. (en) Elihu Root Collection of United States Documents: Ser. A.-F.], U.S. Government Printing Office, (lire en ligne), p 333
  5. (id) Budidaya Sayuran Lokal, Nuansa Cendekia, (ISBN 978-602-350-234-9, lire en ligne), p 73
  6. (id) Nafan Akhun, Daftar Tanaman Obat Indonesia & Khasiatnya - PDF Interactive, Nafan Akhun, (lire en ligne)
  7. (en) G. Rehm, Multilingual Dictionary of Agronomic Plants, Springer Science & Business Media, (ISBN 978-0-7923-2970-1, lire en ligne), p 54
  8. (nl) National Central Library of Rome, Het Amboinsche kruidboek. Dat is, beschryving van de meest bekende boomen, heesters, kruiden, landen waterplanten, die men in Amboina, en de omleggende eylanden vind, na haare gedaante, verscheide benamingen, aanqueking, en gebruik mitsgaders van eenige insecten en gediertens, ... door Georgius Everhardus Rumphius, ... Nagezien, (lire en ligne)
  9. Johann Friedrich (médecin) Auteur du texte Zückert, Materia alimentaria in genera, classes et species disposita, (lire en ligne)
  10. « A Review of Genetic Taxonomy, Biomolecules Chemistry and Bioactivities of Citrus Hystrix DC. - ProQuest », sur www.proquest.com (consulté le )
  11. « Papeda rumphii Hassk. GRIN-Global », sur gringlobal.irri.org (consulté le )
  12. (en) John H. Wiersema et Blanca León, World Economic Plants: A Standard Reference, Second Edition, CRC Press, (ISBN 978-1-4665-7681-0, lire en ligne), p 1071
  13. (en) Feng-Juan Mou, Jian-Qin Li, Yue-Yan Li et Ting-Yao Meng, « Notes on the morphological diversity, ethnobotanical uses, and conservation of Citrus hongheensis (Rutaceae): an endemic and endangered Papeda from southwest China », The National Natural Science Foundation of China,‎ (DOI 10.6084/m9.figshare.22015556.v1, lire en ligne, consulté le )
  14. (en) Guohong Albert Wu, Javier Terol, Victoria Ibanez et Antonio López-García, « Genomics of the origin and evolution of Citrus », Nature, vol. 554, no 7692,‎ , p. 311–316 (ISSN 1476-4687, DOI 10.1038/nature25447, lire en ligne, consulté le )
  15. https://agritrop.cirad.fr/585892/1/ID585892.pdf
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  17. « W. T. Swingle, “The Botany of Citrus and its Wild Relatives in the Citrus Industry,” University of California press, Berkely, 1967, pp. 190-430. - References - Scientific Research Publishing », sur www.scirp.org (consulté le )
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  20. (en) E. Nicolosi, Z. N. Deng, A. Gentile et S. La Malfa, « Citrus phylogeny and genetic origin of important species as investigated by molecular markers », Theoretical and Applied Genetics, vol. 100, no 8,‎ , p. 1155–1166 (ISSN 1432-2242, DOI 10.1007/s001220051419, lire en ligne, consulté le )
  21. (en) A. R. Barbhuiya, Mohammed Latif Khan et S. Dayanandan, « Molecular Phylogeny of Citrus species in the Eastern Himalayan Region of Northeast India Based on Chloroplast and Nuclear DNA Sequence Data », dans Molecular Genetics and Genomics Tools in Biodiversity Conservation, Springer Nature, (ISBN 978-981-16-6005-4, DOI 10.1007/978-981-16-6005-4_9, lire en ligne), p. 185–201
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Annexes modifier

Articles connexes modifier

Liens externes modifier