Le Mari, la Femme et le Voleur

fable de La Fontaine

Le Mari, la Femme et le Voleur est la quinzième fable du livre IX de Jean de La Fontaine situé dans le second recueil des Fables de La Fontaine, édité pour la première fois en 1678.

Le Mari, la Femme et le Voleur
Image illustrative de l’article Le Mari, la Femme et le Voleur
Gravure de Johann Christoph Teucher d'après Jean-Baptiste Oudry, édition Desaint & Saillant, 1755-1759

Auteur Jean de La Fontaine
Pays Drapeau de la France France
Genre Fable
Éditeur Claude Barbin
Lieu de parution Paris
Date de parution 1678
Chronologie


Texte de la Fable modifier

Un Mari fort amoureux,
             Fort amoureux de sa Femme,
Bien qu'il fût jouissant[N 1] , se croyait malheureux.
         Jamais œillade de la Dame,
         Propos flatteur et gracieux,
         Mot d'amitié, ni doux sourire,
         Déifiant le pauvre Sire,
N'avaient fait soupçonner qu'il fût vraiment chéri.
         Je le crois, c'était un mari.
         Il ne tint point à l'hyménée
         Que content de sa destinée
         Il n'en remerciât les Dieux ;
         Mais quoi ? Si l'amour n'assaisonne
         Les plaisirs que l'hymen nous donne,
         Je ne vois pas qu'on en soit mieux.
Notre épouse étant donc de la sorte bâtie,
Et n'ayant caressé son Mari de sa vie,
Il en faisait sa plainte une nuit. Un Voleur
         Interrompit la doléance.
         La pauvre femme eut si grand'peur
         Qu'elle chercha quelque assurance
         Entre les bras de son Époux.
Ami Voleur, dit-il, sans toi ce bien si doux
Me serait inconnu. Prends donc en récompense
Tout ce qui peut chez nous être à ta bienséance ;
Prends le logis aussi. Les voleurs ne sont pas
         Gens honteux, ni fort délicats :
Celui-ci fit sa main. J'infère de ce conte
         Que la plus forte passion
C'est la peur : elle fait vaincre l'aversion,
Et l'amour quelquefois ; quelquefois il la dompte ;
         J'en ai pour preuve cet amant[N 2]
Qui brûla sa maison pour embrasser sa Dame,
         L'emportant à travers la flamme.
         J'aime assez cet emportement ;
Le conte m'en a plu toujours infiniment :
         Il est bien d'une âme Espagnole,
         Et plus grande encore que folle.

— Jean de La Fontaine, Fables de La Fontaine, Le Mari, la Femme et le Voleur, texte établi par Jean-Pierre Collinet, Fables, contes et nouvelles, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1991, p. 374

Notes modifier

  1. Bien qu'il jouissait des droits que donne le mariage
  2. Allusion au comte de Villa Mediana qui provoqua un incendie pour prendre la reine d'Espagne dans ses bras

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