Inspection de l'armée

Une inspection de l'armée (en allemand : Armee-Inspektion), traduisible aussi en « inspection d'armée »[1], est une autorité militaire au-dessus du niveau du corps d'armée dans l'Armée de terre de l'Empire allemand.

Carte de l'Empire allemand en 1914, montrant les huit inspections d'armée (Armee-Inspektionen) et les 24 régions de corps (Korpsbereiche).

En temps de paix, la tâche des inspections d'armée consiste exclusivement à surveiller les corps d'armée subordonnés. En cas de mobilisation, tel celle d'août 1914 au début de la Première Guerre mondiale, toutes les inspections de l'armée sont converties en « haut-commandement d'armée » (un Armeeoberkommando), c'est-à-dire un état-major mis à la tête d'une des armées allemandes.

Fonctions modifier

Avec l'introduction de la « loi militaire de l'Empire » (Reichs-Militärgesetzes) du , un cadre contraignant pour le système militaire est posé pour l'Empire allemand, qui n'a été fondé que trois ans plus tôt. Les articles 2 et 3, qui réglementent l'organisation de l'armée de terre, prévoient déjà la création d'inspections d'armée[2].

En cas de guerre, les inspecteurs d'armée, qui ont le grade de Generaloberst, doivent prendre le commandement des armées à constituer. En temps de paix, cependant, ils n'ont aucune autorité sur les généraux commandants, qui en fait ne sont pas sous leurs ordres[3]. Mais comme ils doivent inspecter leurs unités, ils ont l'occasion de se renseigner sur les troupes qu'ils peuvent commander pendant la guerre[4].

Histoire modifier

Dans le royaume de Prusse, le , une organisation permanente des troupes en temps de paix en trois « détachements d'armée » (Armee-Abteilungen) est prévue. Au début de la guerre franco-allemande de 1870, elle correspond aux trois armées prussiennes qui sont concentrées en Rhénanie en juillet 1870 :

Après le traité de Francfort, le décret ministériel du crée quatre « inspections d'armée », chacune dirigée par un inspecteur[5]. Le jour où les troupes allemandes reviennent à Berlin, les quatre nouveaux inspecteurs de l'armée sont nommés le . Il s'agit du prince héritier de Saxe (pour la 1re inspection de l'armée), du grand-duc de Mecklembourg-Schwerin (2e inspection de l'armée), le prince Frédéric-Charles de Prusse (3e inspection de l'armée) et le prince héritier de l'Empire allemand (4e inspection de l'armée)[6].

Les effectifs de l'Armée de terre allemande augmentant progressivement, l'ordre du cabinet du instaure une 5e inspection de l'armée sous les ordres du grand-duc de Bade[6]. Avec l'ordre du cabinet de , la 6e inspection de l'armée est créée ; avec celui du , la 7e ; et enfin avec celui du , la 8e inspection de l'armée.

Structure des inspections d'armée en 1914[7]
Inspections Sièges Inspecteurs Corps Unités créées lors de la mobilisation
1re Dantzig Generaloberst Maximilian von Prittwitz * 1er corps d'armée (Königsberg)
* 17e corps d'armée (de) (Dantzig)
* 20e corps d'armée (Allenstein)
8e haut-commandement d'armée
2e Berlin Generaloberst Josias von Heeringen * Corps de la Garde (Berlin)
* 12e corps d'armée (1er saxon : Dresde)
* 19e corps d'armée (de) (2e saxon : Leipzig)
3e haut-commandement d'armée
3e Hanovre Generaloberst Karl von Bülow * 7e corps d'armée (Münster)
* 9e corps d'armée (de) (Hambourg-Altona)
* 10e corps d'armée (de) (Hanovre)
2e haut-commandement d'armée
4e Munich Generaloberst Rupprecht de Bavière * 3e corps d'armée (de) (Berlin)
* 1er corps d'armée bavarois (de) (Munich)
* 2e corps d'armée bavarois (Wurtzbourg)
* 3e corps d'armée bavarois (de) (Nuremberg)
6e haut-commandement d'armée
5e Karlsruhe Generaloberst Frédéric II de Bade * 8e corps d'armée (de) (Coblence)
* 14e corps d'armée (de) (Karlsruhe)
* 15e corps d'armée (de) (Strasbourg)
7e haut-commandement d'armée
6e Stuttgart Generaloberst Albert de Wurtemberg * 4e corps d'armée (de) (Magdebourg)
* 11e corps d'armée (de) (Cassel)
* 13e corps d'armée (de) (Stuttgart)
4e haut-commandement d'armée
7e Sarrebruck Generaloberst Hermann von Eichhorn * 16e corps d'armée (Metz)
* 18e corps d'armée (de) (Francfort)
* 21e corps d'armée (Sarrebruck)
5e haut-commandement d'armée
8e Berlin Generaloberst Alexandre von Kluck * 2e corps d'armée (de) (Stettin)
* 5e corps d'armée (de) (Posen)
* 6e corps d'armée (de) (Breslau)
1er haut-commandement d'armée

Lorsque la guerre éclata en 1914, l'Armée allemande compte au total huit inspections d'armée avec 25 corps d'armée d'active[8] (le corps de la Garde se rajoutant aux 24 autres). La mobilisation d'août 1914 rajoute 14 corps de réserve[9], faisant des huit inspecteurs les commandants des huit armées mise sur pied, dont la composition n'est pas celle des inspections[10].

Notes et références modifier

  1. Laparra 2006, p. 46-47.
  2. (de) Hugo Preus, « Friedenspräsenz und Reichsverfassung - Eine staatsrechtliche Studie », dans Detlef Lehnert & Dian Schefold (dir.):, Hugo Preuß : Gesammelte Schriften, t. 2, Tübingen, (DNB 1200297059), p. 356.
  3. Jean-Claude Laparra et Pascal Hesse, L'envers des parades : Le commandement de l'armée allemande, réalités et destins croisés, 1914-1918, Saint-Cloud, SOTECA 14-18, , 387 p. (ISBN 978-2-916385-77-8), p. 239.
  4. Matuschka 1979, p. 157.
  5. (de) Rudolf Absolon, Die Wehrmacht im Dritten Reich, vol. 1 : 30. Januar 1933 bis 2. August 1934 : mit einem Rückblick auf das Militärwesen in Preußen, im Kaiserreich und in der Weimarer Republik, Munich, Boldt-Verl. im Oldenbourg-Verl., , 445 p. (ISBN 978-3-486-41070-9), p. 5, Fn.25.
  6. a et b Jany 1967, p. 268.
  7. Matuschka 1979, p. 158.
  8. Jany 1967, p. 297.
  9. Laparra 2006, p. 56.
  10. Laparra et Hesse 2011, p. 240.

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • (de) Curt Jany, Geschichte der preussischen Armee, vol. 4 : Die Königlich Preußische Armee und das Deutsche Reichsheer 1807 bis 1914, Osnabrück, Biblio Verlag, , 343 p. (ISBN 978-3-7648-1475-5).
  • (de) Edgar Graf von Matuschka, « Organisationsgeschichte des Heeres 1890–1918 », dans Handbuch zur deutschen Militärgeschichte 1648-1939, vol. 3 : Von der Entlassung Bismarcks bis zum Ende des Ersten Weltkrieges : 1890 - 1918, Munich, Bernard und Graefe vom Militärgeschichtlichen Forschungsamt, (réimpr. 1983) (DNB 800270134), p. 157-311.
  • Jean-Claude Laparra, La machine à vaincre, de l'espoir à la désillusion : histoire de l'armée allemande, 1914-1918, Saint-Cloud, 14-18 éditions, , 323 p. (ISBN 2-9519539-8-4).

Liens externes modifier

Articles connexes modifier