Le derecho indiano est le droit colonial appliqué historiquement dans l'empire espagnol américain. C'était un droit tourné vers l'évangélisation[1]. Il avait pour sources à la fois les ordres juridiques amérindiens, les lois créées spécialement par l'Espagne pour ses colonies, et le droit royal castillan, et le Conseil des Indes y jouait un rôle particulier[2]. De 1492 à 1499, il n'y avait que les Capitulations de Santa Fe, puis il y eut une période de restructuration jusqu'en 1511, après laquelle furent faites notamment les Leyes Nuevas et le Requerimiento, et enfin il y eut la phase principale d'élaboration du droit de l'empire hispanique de 1568 à 1680 avec les Lois des Indes[3].

Les colonisateurs espagnols reconnaissaient dans une certaine mesures les nations et dirigeants amérindiens, mais justifiaient leurs conquêtes par le principe médiéval selon lequel le monde appartiendrait aux princes chrétiens[4].

Le système juridique colonial de l'empire espagnol reposait sur une hiérarchisation raciste[5], qui discriminait les unions entre personnes noires, amérindiennes et blanches et déconsidérait les personnes considérées comme métisses et les esclaves affranchis, obligés de s'habiller différemment des colons[6]. Cependant, les mestizos étaient avantagés par rapport aux personnes classées comme inférieures: ainsi, ils avaient accès à l'enseignement primaire, alors que les amérindiens étaient censés obéir aux ordres de n'importe qui, sur le champ[7].

À Oaxaca, une forme de justice criminelle hybride entre droit catholique castillan et droit autochtone de langue zapotèque s'est créée[8].

Institutions modifier

Commerce modifier

Il y avait un monopole commercial espagnol (es) sur le commerce avec les colonies des Indes.

Esclavage légal modifier

Encomiendas modifier

 
Encomienda d'indigènes dans le Tucumán, en Argentine.

L′encomienda était un système proche du servage médiéval[9], qui a été utilisé dans les colonies de l'Empire espagnol pour récompenser les conquistadors par les bénéfices du travail forcé des peuples autochtones non chrétiens conquis.

L'encomienda a été établie pour la première fois en Espagne après la reconquête chrétienne des territoires maures (connue par les chrétiens sous le nom de Reconquista), et elle a été appliquée à plus grande échelle lors de la colonisation espagnole de l'Amérique et des Indes orientales espagnoles. Les peuples conquis étaient considérés comme des vassaux du monarque espagnol. La Couronne accordait une encomienda à un individu particulier. À l'époque de la conquête, au début du XVIe siècle, les concessions étaient considérées comme un monopole sur le travail de certains groupes de peuples indigènes, détenu à perpétuité par le détenteur de la concession, appelé « encomendero », colon ainsi récompensé de ses services par la monarchie espagnole[10] ; dans la pratique, celui-ci disposait librement des terres des autochtones, bien qu'elles appartiennent toujours à la Couronne[11].  ; l'encomienda prenait alors la forme d'un regroupement, sur un territoire donné, d'autochtones « confiés » (« encomendados ») à l'« encomendero », c'est-à-dire obligés de travailler sans rétribution dans des mines, des champs ou sur des chantiers de construction. Hernán Cortés précise que « [t]out Indien insoumis était cependant durement traité. […] tout Indien qui avait tué un Espagnol, toute population qui ne se laissait pas "pacifier", c'est-à-dire qui ne se soumettait pas au pouvoir espagnol et qui n'abandonnait pas ses croyances étaient réduits en esclavage »[12]. En théorie, les travailleurs recevaient des avantages de la part des conquérants pour lesquels ils travaillaient, notamment la protection militaire et l'éducation, religieuse en particulier dans le cadre de l'évangélisation.

À partir des Lois Nouvelles de 1542, l'encomienda prenait fin à la mort de l'encomendero pour être remplacée par le « repartimiento ». Néanmoins, la tentative de mise en application de ces dernières provoque un soulèvement des encomenderos entre 1544 et 1548, menés par Gonzalo Pizarro. Pour rétablir son contrôle sur la région, Charles Quint se résolut à rétablir l’encomienda, qui se généralise pendant deux siècles avant d'être finalement abolie en 1791.

Repartimientos modifier

Le régime des encomiendas a été remplacé par celui des repartimientos.

Voir aussi modifier

Articles connexes modifier

Références modifier

  1. « Huellas del Derecho Indiano en la fundación de San Juan de Vera de las Siete Corrientes – Academia Nacional de la Historia de la República Argentina », (consulté le )
  2. Héctor Grenni, « Las Leyes de Indias: un intento por considerar a los indígenas como personas con derechos. », Teoría y Praxis, no 4,‎ , p. 103–122 (ISSN 1994-733X, DOI 10.5377/typ.v1i4.15460, lire en ligne, consulté le )
  3. José Manuel Pérez-Prendes y Muñoz de Arraco, Lecciones de historia del derecho español, Madrid : Centro de Estudios Ramón Areces, (ISBN 978-84-87191-17-6, lire en ligne)
  4. Beatriz Bernal, « Las características del derecho indiano », Historia Mexicana, vol. 38, no 4,‎ , p. 663–675 (ISSN 0185-0172, JSTOR 25138249, lire en ligne, consulté le )
  5. « ARTEHISTORIA - Historia de España - Ficha Estratificación social », (consulté le )
  6. « La sociedad colonial: el mestizaje en la ciudad de Cartago », (consulté le )
  7. « La colonización de los Austria », (consulté le )
  8. Yanna Yannakakis et Martina Schrader-Kniffki, « Between the “Old Law” And the New: Christian Translation, Indian Jurisdiction, and Criminal Justice in Colonial Oaxaca », Hispanic American Historical Review, vol. 96, no 3,‎ , p. 517–548 (ISSN 0018-2168, DOI 10.1215/00182168-3601670, lire en ligne, consulté le )
  9. Fernand Braudel le qualifie de « pseudo-servage » (dans Civilisation matérielle, économie et capitalisme, tome 3 : Le temps du monde, Armand Colin, 1993, p. 490), et Joseph Pérez le considère comme une « forme rajeunie de régime seigneurial » (dans Histoire de l'Espagne, Fayard, 1996, p.211).
  10. Article « Encomienda » de lEncyclopédie Universalis. Version en ligne consultée le 2 février 2012.
  11. Article « Encomienda » de lEncyclopædia Britannica, version en ligne consultable au 27 août 2010.
  12. Hernan Cortès, La conquête du Mexique, Paris, La Découverte, , 458 p., p. 31

Bibliographie modifier

  • Víctor Tau Anzoátegui, Casuismo y sistema: Indagación histórica sobre el espíritu del Derecho Indiano, Universidad Carlos III de Madrid, (ISBN 978-84-18239-37-3, lire en ligne)
  • Beatriz Bernal Gómez, « El derecho indiano, concepto, clasificación y características », Ciencia jurídica, vol. 4, no 7,‎ , p. 183–193 (ISSN 2007-3577, lire en ligne, consulté le )
  • Norberto C. Dagrossa, Bibliografía de historia del Derecho indiano (lire en ligne)
  • New Horizons in Spanish Colonial Law: Contributions to Transnational Early Modern Legal History, vol. 3, Max Planck Institute for Legal History and Legal Theory, (ISBN 978-3-944773-02-5, lire en ligne)
  • Fernando de Trazegnies Granda, « Pluralismo jurídico en el derecho indiano », THEMIS: Revista de Derecho, no 60,‎ , p. 341–345 (ISSN 1810-9934 et 2410-9592, lire en ligne, consulté le )
  • Víctor Tau Anzoátegui, « Instituciones y Derecho Indiano en una renovada Historia de América », Anuario de Estudios Americanos, vol. 75, no 2,‎ , p. 435 (ISSN 1988-4273 et 0210-5810, DOI 10.3989/aeamer.2018.2.02, lire en ligne, consulté le )
  • Víctor Tau Anzoátegui, El Jurista en el Nuevo Mundo: Pensamiento. Doctrina. Mentalidad, vol. 7, Max Planck Institute for Legal History and Legal Theory, (ISBN 978-3-944773-06-3, lire en ligne)