Camping à la ferme

Le camping à la ferme est un terme courant désignant une forme dérivée de camping ou d'accueil en hôtellerie de plein air, situé sur un terrain appartenant à une exploitation agricole, où la famille d'agriculteurs accueille directement ses hôtes. Il est ainsi considéré comme un mode d'accueil chez l'habitant. L'implantation sur l'exploitation favorise la découverte du mode de vie agricole ou rural. En France, tous les campings dit à la ferme dépendent de la réglementation concernant les terrains déclarés et donc sont soumis au code de l'Urbanisme. Ils sont ainsi repris comme terrain de camping classique avec tout ce que cela implique comme obligations telles que assurances, etc. et ne sont pas considérés vis-à-vis-de la loi française comme « accueil chez l'habitant ». Réf: articles R.421-19, R.421-23. R.443-6-4 du code de l'Urbanisme français.

Forme d'agritourisme, l'activité de camping permet un complément de revenu à l'agriculteur, et s'accompagne parfois de vente de produits fermiers ou de restauration à la ferme. Les modalités du développement de l'activité peuvent varier selon les pays.

Histoire modifier

L'accueil à la ferme remonte à la fin du XIXe siècle dans le Sud Tyrol ou dans la campagne anglaise sous la forme de chambres d'hôtes[1],[2]. Il s'est par la suite développé en Europe, à partir des années 1960, lorsque l’offre d’hébergement en milieu rural a été complétée par une proposition d’activités de loisirs[1]. Le développement de ce qu'on appelle l'agritourisme repose « quasi exclusivement sur l'hébergement : camping à la ferme, chambres d'hôtes, gîtes ruraux »[1].

Dans la deuxième moitié du XXe siècle, le géographe Roger Béteille note une multiplication de grands terrains de campings en milieu agricole, proposant divers types d'hébergements à tendances pérennes, dans « le Bassin de Londres, les Midlands ou les campagnes périphériques des principales agglomérations du Benelux »[3]. L'activité se développe dans les décennies suivantes sans pour autant prendre de grandes proportions[4]. Cet accueil paysan se fait principalement à proximité des grandes agglomérations, dans les arrière-pays immédiats des zones touristiques littorales ou dans l'espace montagnard[4].

Structure d'accueil modifier

Terrain de camping et hébergements modifier

Un terrain de camping à la ferme propose des emplacements à la location sur lesquels les voyageurs peuvent séjourner avec leurs tentes, caravanes ou autocaravanes.

L'installation sur le terrain de l'exploitation agricole revêt une forme de recherche de calme, dans un cadre campagnard, contrairement aux campings traditionnels des stations balnéaires ou de lieux touristiques majeurs[5]. Les touristes perçoivent le camping dans un cadre agricole comme « une recherche d’authenticité et d’œuvre de salut »[6]. Il semble également que les campeurs recherchent une sorte d'authenticité dans l'accueil et les paysages agricoles[5]. En effet, sa localisation sur l'exploitation permet également aux vacanciers la découverte du mode de vie agricole ou rural et de ses activités spécifiques[5].

Le nombre d'emplacements limités, comme le stipulent les législations françaises ou belges (voir ci-après), reste un critère privilégié dans la mesure où l'activité touristique reste annexe par rapport à l'activité principale.

Équipements modifier

Le terrain d'accueil propose selon les normes en vigueur dans chaque pays ou région, des installations d'hygiène mises à disposition des campeurs (point d'eau potable, toilettes, douches avec eau chaude, lavabo, poubelles), des points d'accès à l'électricité.

En fonction des normes de sécurité en vigueur pour les établissements recevant du public, et des commissions de sécurité locales on peut remarquer entre autres la présence d'extincteurs et de plans d'évacuation (incendie, inondation…).

Un complément de revenu pour l'agriculteur modifier

Le camping à la ferme est à placer dans un contexte de diversification des activités, que l'on nomme parfois tourisme à la ferme[7]. En France, le « tourisme à la ferme » est défini par « les activités de restauration seule (...), d’hébergement seul (camping à la ferme, gîte rural, gîte d’étape, gîte de groupe, chambre d’hôte, etc.), de restauration et hébergement. »[8]. On place également cette activité dans le tourisme rural, prenant la forme d'agritourisme[9],[1] et de tourisme vert[10]. Pour le géographe Roger Béteille, dans un article comparant des régions françaises et britanniques, paru en 1997, rappelle que la diversification est souvent mise en place afin de pallier une baisse des revenus en temps de crise[11]. Le choix du camping à la ferme pour l'exploitant est assez ancien et est perçu comme une forme de diversification peu contraignante[12]. Toutefois cette activité d'accueil en camping ne peut se faire qu'en complément d'une activité agricole peu absorbante pour les agriculteurs et ne se limiterait qu'à la période estivale la plupart du temps[13].

Le camping à la ferme dans les pays modifier

Union européenne modifier

Un rapport pour la Commission européenne de 1993 faisait un état des lieux de la pratique du camping à la ferme dans l'espace européen, observant qu'elle était « peu présente en Irlande (la préférence est donnée aux hébergements en dur à la ferme et à la petite hôtellerie), en Grèce (le camping est peu encouragé pour des raisons d'ordre environnemental), en Italie et au Portugal ; il connaît en revanche un large développement aux Pays-Bas (principale forme de l'accueil à la ferme), en Allemagne (5 % des exploitations agricoles), en France (sous les deux formes du camping à la ferme traditionnel et des aires naturelles de camping), en Grande-Bretagne ; il est aussi présent en Belgique et en Espagne »[14]. Toutefois, ce rapport classe le camping à la ferme dans le camping rural, l'associant avec les campings ruraux privés et les campings ruraux municipaux[14]. Un tableau permettait ainsi de présenter les différentes classifications nationales à cette période (p. 33).

Belgique modifier

En Wallonie, la Réglementation relative aux terrains de camping touristique et aux terrains de caravanage ne considère que la notion de « terrains de camping touristique » comme appellation protégée depuis la réglementation de 1991[15]. Le Code wallon du Tourisme organise le camping à la ferme sur son territoire et donne une définition stricte quant à sa localisation sur un « terrain de camping à la ferme » appartenant à une exploitation agricole, mais excluant la présence de caravanes de type résidentiel[16]. L'Atlas - Lexique administratif et juridique wallon considère que la « caravane de type résidentiel » comprend uniquement les caravanes, ainsi que les « caravanes dites « chalets » caractérisées par un revêtement en bois ou en matériaux y ressemblant par l’aspect »[17]. Un agriculteur souhaitant développer une activité de camping doit adhérer à une association spécifique de tourisme à la ferme ayant reçu un agrément[18]. Par ailleurs, la durée d'ouverture du camping à la ferme est également soumise à des périodes précises[16].

Le code précise que le terrain doit se situer à une « distance raisonnable des bâtiments agricoles », pour être à proximité des équipements d"hygiène et pour rester sur le territoire de la ferme[18],[16]. Le terrain de camping ne peut accueillir qu'un certain nombre de touristes selon la période (durant l'été 60 personnes pour 20 hébergements, en dehors de cette période 45 personnes pour 15 hébergements)[16].

France modifier

Origine modifier

La création du concept de camping à la ferme en France est revendiqué par le Comité d’action et de rénovation rurale du Naucellois (CARRNAU) et son président Paul Cousty en 1968[19],[20],[21]. Il se développe à partir de 1972 dans l'Avesnois[22],[23].

À la fin des années 1970, le gouvernement réglemente le camping à la ferme avec la législation sur les aires naturelles de camping[24]. Dans un rapport de , le conseil économique et social constate l'existence de 1 021 campings à la ferme en France, pour 21 000 emplacements. Les campings à la ferme sont alors limités à cinq installations (tente ou caravane) pour vingt lits maximum. Les agriculteurs proposant cette offre bénéficient d'une subvention du ministère de l'Agriculture donnant droit à un taux réduit de TVA[24]. Ces avantages sont parfois dénoncés comme la pertinence de leur existence, notamment dû à l'absence de contrôle[25],[26],[27]. Le camping à la ferme est conçu comme un moyen de développer le tourisme dans les zones rurales et de lutter contre le camping sauvage[24]. En 1984, l'INSÉÉ recense une capacité d'hébergement en camping à la ferme de 277 056[28]. En 1988, 123 503 emplacements sont disponibles dans les campings à la ferme déclarés en France, dont 68 485 dans des communes rurales[29].

État des lieux modifier

En , selon une étude menée par les journalistes de Libération, le territoire français comptait 11 600 campings, dont 2 300 appartenaient au monde rural (campings communaux) ou à la ferme[10]. Le Service central des enquêtes et études statistiques (SCEES) du Ministère de l'Agriculture indiquait, à travers sa publication Agreste - Primeur, que « Moins de 2 % des exploitations proposaient un hébergement » en 2002[30] (1,9 %)[31], chiffre un peu plus élevé que celui observé en 1988 (1,5 %)[31]. D'après le recensement agricole de 2005, on observe une certaine évolution avec environ 17 700 exploitations agricoles, soit 3 % de l'ensemble des exploitations que compte le territoire, ont une activité annexe liée au tourisme, dont les deux tiers offrent un mode d'hébergement et 16 % une activité de restauration[32].

En 2014, la Fédération française de camping et de caravaning (FFCC) comptabilise 9842 campings[33]. La FFCC dénombre 1461 terrains dits ruraux correspondant aux aires naturelles et campings à la ferme, proposant ainsi 23 415 emplacements[33].

Réseaux modifier

L'agriculteur loueur adhère à un des deux réseaux existant et à leurs règlements, le nombre d'emplacements relativement grands et espacés est limité à six maximum. Le cahier des charges d'un camping à la ferme, appelé également campings en ferme d'accueil[34], ou camping rural est de cinq emplacements maximum pour le réseau Bienvenue à la ferme et de six pour le réseau Accueil paysan. Le contact avec l'agriculteur ou l'agricultrice et éventuellement sa famille est privilégié. Il permet aux campeurs de découvrir l'activité de l'exploitant agricole et la région. Certains sont échus à l'écotourisme ou au naturisme. Le gérant peut parfois proposer des aires de jeux, des abris de détente, une salle d'activité et des animations[34].

La marque Bienvenue à la ferme propose une appellation non réglementaire « campings en ferme d'accueil »[34]. En 2005, elle regroupe 435 campings[34]. Il s'agit en réalité d'une marque collective que l'association Agriculture et tourisme gère, association affiliée à la Fédération Française de Camping et de Caravaning[34] Le cahier des charges est ainsi spécifique à cette marque[34].

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • Samuel Arlaud et Olivier Dehoorne, « Les agriculteurs face au tourisme : quelle place pour le tourisme à la ferme en France ? », dans Jean Soumagne (sous la dir.), Les nouveaux espaces ruraux de l'Europe atlantique : hommage au professeur Roger Béteille, Maison des Sciences de l'Homme et de la Société - Université de Poitiers, , 479 p. (ISBN 978-2-9513050-4-5).
  • Roger Béteille, « Une formule récente d'accueil touristique en milieu rural : le camping à la ferme dans le Naucellois (Aveyron) », Espaces, revue de l'Association pour la culture par les loisirs et le tourisme, 7e série,‎ 4e trimestre 1971, p. 29-36
  • Roger Béteille, « La diversification des exploitations agricoles à travers quelques évolutions régionales récentes », Norois, no 173,‎ , p. 141-154 (ISBN 978-2-13051-508-1, lire en ligne)
  • Jacques Blanchet (dir.) et Véronique Déaud (dir.), Les pluriactifs en agriculture : entre traditions et innovations, Paris, France agricole, , 157 p.
  • Michel Bonneau, « La géographie du camping rural : l'exemple des régions de l'Ouest », Espaces, revue de l'Association pour la culture par les loisirs et le tourisme, 7e série,‎ 4e trimestre 1971, p. 37-45
  • Danièle Capt et Anne-Marie Dussol, « Exploitations diversifiées : un contenu en emploi plus élevé », Agreste Cahiers, no 2,‎ , p. 11-18 (lire en ligne)
  • Emmanuelle Marcelpoil et Jacques Perret, « La richesse des pratiques de tourisme à la ferme » (pages 43-52), in Jean-Jacques Tolron, Aménités rurales. Une nouvelle lecture des enjeux territoriaux, Éditions Quæ, coll. « Hors-série de la revue Ingénieries - eau, agriculture, territoires », , 195 p. (ISBN 978-2-85362-681-1)
  • André Rauch, « Les loisirs sous la tente. Traditions et innovations d’une pratique sociale », Ethnologie française, no 4,‎ , p. 599 - 605 (ISBN 978-2-13051-508-1, lire en ligne)
  • Olivier Sirost, « Camper ou l’expérience de la vie précaire au grand air », Ethnologie française, no 4,‎ , p. 581 - 589 (ISBN 978-2-13051-508-1, lire en ligne)
  • « Le tourisme à la ferme reste marginal », Agreste - Primeur, no 107,‎ , p. 11-18 (lire en ligne)

Vidéographie modifier

Articles connexes modifier

Notes et références modifier

  1. a b c et d René Béteille, « L’agritourisme dans les espaces ruraux européens », dans Annales de Géographie, (lire en ligne), p. 584-602.
  2. Jacky Herbin, Le Tyrol ou la réussite exemplaire du tourisme autrichien : Thèse d'État Lettres et sciences humaines, Grenoble, Université de Grenoble I, .
  3. Béteille 1997, p. 146.
  4. a et b Béteille 1997, p. 148.
  5. a b et c ABE 1982.
  6. Sirost 2001, p. paragraphe 5.
  7. Capt, Dussol 2014, p. 11.
  8. Capt, Dussol 2014, p. 18.
  9. Lexitour. Les 1700 mots des métiers du tourisme, Éditions Bréal, , 156 p. (ISBN 978-2-84291-900-9), p. 10.
  10. a et b Rauch 2001, p. paragraphes 30-31.
  11. Béteille 1997, p. 141.
  12. Béteille 1997, p. 147.
  13. Béteille 1997, p. 150-151.
  14. a et b Suzanne Thibal (Rapporteur Général, Secrétaire général d'EUROTER), Pour une signalétique européenne harmonisée dans le domaine du tourisme rural et analyse des circuits d'information, Editions OPOCE, 1993, (ISBN 92-826-5987-9), 227 pages, p. 31 et suivantes, Lire en ligne.
  15. Directions du Commissariat général au Tourisme en Wallonie, « Cellule campings, Villages de vacances et Motor-homes », Hébergements touristiques en Wallonie, sur site officiel du Commissariat général au Tourisme CGT e-administration (consulté en ).
  16. a b c et d « Code wallon du Tourisme », Code wallon du Tourisme, sur site du Portail de Wallonie - Le droit en Wallonie - wallex.wallonie.be (consulté en ) : « Code wallon du Tourisme est établi le 1er avril 2010, puis modifié le 23 septembre 2010 ».
  17. « Caravane de type résidentiel », Accueil > Lexique, sur site de l'Atlas - Lexique administratif et juridique - atlas.wallonie.be (consulté en ), Décret du 18 décembre 2003 relatif aux établissements d’hébergement touristique, Art.2. 17°,(M.B. du 11/03/2004, p. 13669).
  18. a et b Francis Haumont, L' urbanisme : Région wallonne, Larcier, , 1041 p. (ISBN 978-2-8044-0299-0), p. 998-1005.
  19. Daniel (1958- ) Auteur du texte Crozes, 20 siècles d'histoire naucelloise : Daniel Crozes, (lire en ligne)
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  21. Roger Béteille, « Difficultés et promesses de modernisation d'un canton du Ségala : le Naucellois (Aveyron) », Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest. Sud-Ouest Européen, vol. 43, no 1,‎ , p. 45–69 (DOI 10.3406/rgpso.1972.3316, lire en ligne, consulté le )
  22. Jean-Michel Dewailly, « Tourisme et espace rural dans la Région du Nord », Hommes et Terres du Nord, vol. 2, no 1,‎ , p. 21–36 (DOI 10.3406/htn.1973.1457, lire en ligne, consulté le )
  23. « Cousty : le camping à la ferme », sur ladepeche.fr (consulté le )
  24. a b et c France Conseil économique Auteur du texte et France Conseil économique et social Auteur du texte, « Journal officiel de la République française. Avis et rapports du Conseil économique », sur Gallica, (consulté le )
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