Wali (arabe)

ami de Dieu, tuteur ou guide spirituel musulman

Wali est la transcription de deux mots arabes proches qui partagent la même racine (WLY) et qui signifient gouverner ou être proche de :

  • wāli (arabe : wālin والٍ pl. wulāt وُلاة)°: préfet ; gouverneur ; proconsul ; vice-roi ;
  • walîy (arabe : walīy وَليّ pl. ʾawlyāʾ أَوْلِياء)°: protecteur ; saint patron ; ami de Dieu ; tuteur ; celui qui sert de guide spirituel. Le Coran invite à choisir ses amis (ʾawliyâʾ) parmi les croyants[1].

Le wali désigne aussi le tuteur matrimonial dans le droit musulman.

Wāli modifier

Généralités modifier

Dans les pays de langue arabe, le wāli[2] dirige une wilaya (arabe : wilāya وُلاية). Le terme a été emprunté par le turc sous la forme vali, lequel dirige un vilayet (turc : vilâyet)[3].

Al-Andalus modifier

C'est le titre que portaient au Moyen Âge les gouverneurs arabes de al-Andalus[4], ainsi que ceux de la Sicile avant l'instauration de l'émirat.

Algérie modifier

En Algérie le wali est le représentant de l'État dans les wilayas, il est nommé par décret présidentiel.

Maroc modifier

Au Maroc, le wali — grade de gouverneur au sein du ministère de l'Intérieur — est un haut fonctionnaire. Nommés par le roi[5], ils représentent, dans le cadre de la déconcentration, le pouvoir central au niveau d'une région (collectivité territoriale) du pays, en tant que gouverneur de la wilaya : en tant que tel, il est gouverneur de la préfecture ou province chef-lieu de la région, et son principal rôle est de coordonner l'administration des préfectures ou provinces qui la composent[5].

Tunisie modifier

En Tunisie, le wali est le fonctionnaire à la tête d'un gouvernorat.

Turquie modifier

En Turquie, le vali est un gouverneur de province, équivalent d'un préfet.

Walîy modifier

Dans le Coran, walī (pluriel awliyā') est un terme qui désigne celui qui est proche de Dieu, idée à laquelle vient s’ajouter le sens de protection : « Vous n'avez de protecteur (walīy) que Dieu et Son Envoyé, et ceux qui croient, ce sont eux qui effectuent la prière, acquittent la purification dans la prosternation... (Al-Ma'ida, v. 55, traduction J. Berque). » Mais le mot s'applique aussi à Mahomet qui est le parfait ami / protégé de Dieu, et aussi le parfait ami / protecteur des croyants[6]. Et donc, on le voit, Dieu est aussi walîy, comme le dit le Coran: « Dieu est l'ami ou le protecteur de ceux qui croient »[7]. Walîy est d'ailleurs l'un des 99 noms de Dieu[6], et le terme revient 233 fois dans le Coran[8]

Walîy : Saint modifier

Le walīy Allāh (arabe: ولي الله), le « proche de Dieu » peut être vu plus ou moins comme l’équivalent du saint dans le catholicisme. Pour la chercheuse Rachida Chih, il y a en effet des similitudes claires entre les deux termes: tant dans le christianisme que dans l'islam, les saints sont les amis de Dieu, et ils rapprochent de Dieu ceux qui l'implorent. C'est pourquoi l'idée de sainteté renvoie à celle de proximité (qurb) et de rattachement à Dieu (waliya)[9]. Et ils sont donc les proches de Dieu (al-muqarrabûn) et réciproquement ceux dont Dieu se charge: ils sont ainsi ses protégés[9].

Le saint se distingue par ses grandes qualités d'âme, un certain ascétisme et renoncement matériel mais surtout un grand degré de piété. On lui prête des dons de clairvoyance ainsi qu'un pouvoir de bénédiction.

Au Maghreb en particulier, les marabouts (murābiṭ مرابط) sont des saints locaux reconnus dont le tombeau est l'objet d'un culte populaire. Ce culte des saints est combattu par certains sunnites qui y voient une forme de polythéisme, faisant sortir la personne qui le pratique de l'islam.

Pour les chiites, `Alî est le plus grand des walîy : il est l’ami d’Allah, son lieutenant (au sens de représentant, le terme est parfois traduit par régent). Les onze imams qui lui succèdent seront aussi investis de cette qualité d’« amis d’Allah » (walayâ, وليا). Ils ne reçoivent pas directement le message divin de la bouche de l’ange comme pour Mahomet, mais ils reçoivent son inspiration en songe[10].

Walîy : Tuteur modifier

En Algérie modifier

D'après le code de la famille algérien de 1984, le mariage est contracté par le consentement des futurs conjoints, la présence du tuteur matrimonial (wali) et de deux témoins ainsi que la constitution d’une dot. Ce tuteur est généralement le père. Il ne peut pas empêcher la personne placée sous sa tutelle de contracter mariage si elle le désire et si celui-ci lui est profitable. Il lui est interdit de contraindre au mariage la personne mineure placée sous sa tutelle de même qu’il ne peut la marier sans son consentement.

La nouvelle mouture du code de la famille apportée en 2005 révise ces dispositions ; les femmes n’ont plus besoin du consentement d’un tuteur pour se marier. Il requiert seulement qu’un wali de son choix soit présent au mariage. Le wali agit en tant que protecteur présent pendant que la femme conclut le mariage elle-même[11].

Au Maroc modifier

L'ancien code du statut personnel marocain stipulait que la femme ne pouvait contracter de mariage par elle-même ; elle devait nécessairement passer par l'intermédiaire d'un homme (wali) à qui elle donnait mandat pour la marier. Les tuteurs matrimoniaux n'étaient pas librement choisis par la fiancée ; le tuteur matrimonial est le parent masculin le plus proche de la future mariée. L'ancien code du statut personnel et successoral, dans son article 11, les citait par ordre de priorité. Cependant, le même code stipulait qu'il est interdit à la femme de se marier sans le concours d’un tuteur, que le tuteur n'est pas habilité à refuser de marier une femme ou, au contraire, à la contraindre, et qu'il est mandaté pour un acte bien précis et son rôle doit se borner à servir d’intermédiaire pour transmettre le consentement de son mandant au mariage.

Le nouveau code du statut personnel[12] annule ces dispositions ; la présence du wali ne devient alors nécessaire qu'en cas de minorité d'un des deux époux.

En Turquie modifier

Le terme a été emprunté en turc sous la forme veli, avec le sens “tuteur (d'un enfant)”.

Walîy : Médiateur modifier

Le Diwan al-Madhalim (dīwān al-maẓālim ديـوان المظالم) est le bureau des doléances concernant les administrations du Maroc. Institué en 2001, ce bureau est dirigé par le Wali Al-Madhalim (walīy al-maẓālim ولي المظالم).

Notes et références modifier

  1. Par exemple Coran, al-Baqara, verset 8
  2. Wali figure dans le Littré (wali), le TLFi l'ignore
  3. Le Littré (vilayet) et le TLFi ignorent le mot wilaya mais les deux connaissent le mot venant du turc : vilayet.
  4. Définition de wali dans Littré
  5. a et b « Wali », sur Base de données lexicographiques panfrancophone (consulté le )
  6. a et b Lory 2010.
  7. « Allahu walīu al-ladīna 'amanū ». Al-Baqara, v. 257.
  8. Maurice Gloton, Les 99 noms d'Allâh, Paris, al-Bouraq, 2007 (ISBN 978-2-841-61331-1) p. 145-147.
  9. a et b Rachida CHIH, « Sainteté, maîtrise spirituelle et patronage: les fondements de l'autorité dans le soufisme », Archives de Sciences sociales des Religions, no 125,‎ , p. 79-98 (v. p. 80-81) (DOI https://doi.org/10.4000/assr.1034)
  10. Cf. Mohammad Ali Amir-Moezzi, 2007, Le guide Divin dans le shi'isme originel: Aux sources de l'ésotérisme en islam, Paris, Verdier, coll. « Poche », 2007 [1996].
  11. (en) « Code de la famille algérien », sur Scribd (consulté le ).
  12. Code du statut personnel du Maroc

Bibliographie modifier

Le waliy comme saint modifier

Voir aussi modifier

Articles connexes modifier

Liens externes modifier