Ville impériale de Sélestat

ancienne cité-État (1281-1679) du Saint-Empire romain germanique passée sous contrôle de la France à partir 1648
Ville impériale de Sélestat
(de) Reichsstadt Schlettstadt
(la) Selestadium civitas imperialis


(398 ans)

Blason
Blason de Sélestat
Description de cette image, également commentée ci-après
Sélestat vers 1644 par Matthäus Merian.
(Herzogin Anna Amalia Bibliothek, Weimar)
Informations générales
Statut Ville d’Empire
État du Drapeau du Saint-Empire Saint-Empire
Capitale Sélestat
Langue(s) Alémanique/alsacien, allemand, français
Religion Catholicisme
Bailliage Grand-Bailliage d'Alsace
Cercle impérial Cercle du Haut-Rhin

Démographie
Population  
~ 4 400 hab.[1]
~ 5 500 hab.[2]
~ 9 650 hab.[3]
Histoire et événements
Partage des droits sur la ville entre le prieur de Sainte-Foy et Frédéric II du Saint-Empire
Obtention de l'intégralité des droits par Rodolphe Ier et immédiateté impériale (statut de « ville d’Empire »)
Alliance avec d’autres villes au sein de la Décapole
Victoire des troupes de Sélestat sur les Écorcheurs de Louis de France à Lièpvre
Bataille de Scherwiller et victoire des troupes d'Antoine de Lorraine sur les rustauds
Prise de la ville par l'armée suédoise de Gustaf Horn lors de la guerre de Trente Ans
Reconnaissance des droits de la France sur les villes impériales de la Décapole (traités de Westphalie)
Occupation française des villes de la Décapole
Annexion par la France et maintien des institutions de la ville sous l'autorité du Roi (traités de Nimègue)
Révolution française et fin de la constitution municipale

Entités précédentes :

Entités suivantes :

La ville impériale de Sélestat (en allemand : Reichsstadt Schlettstadt, en latin : Selestadium civitas imperialis[4]) est une ancienne cité-État du Saint-Empire romain entre et .

Village mentionné pour la première fois en [5], Sélestat dépend du prieuré de Sainte-Foy dont le prieur partage son pouvoir avec le souverain du Saint-Empire à la suite d'un accord le avec l'empereur Frédéric II[6]. Ses habitants se dotent progressivement d'institutions sous l’autorité des Hohenstaufen qui siègent sur le trône impérial et possèdent le duché de Souabe et d'Alsace[7]. Le bourg devient une ville au Moyen Âge notamment par la construction d'un premier mur d'enceinte entre et [8]. Le prieur cède l'intégralité de ses droits de juridiction sur la cité à Rodolphe Ier lors d'un nouvel accord le [9]. Sélestat acquiert par conséquent le statut de « ville d'Empire »[10]. La cité dispose ainsi de l'immédiateté impériale avec droit de siéger à la Diète d'Empire : elle n'est désormais plus un bien personnel du souverain mais un état du Saint-Empire à part entière[11]. Elle intègre le Grand-Bailliage d'Alsace (Reichslandvogtei im Elsass) qui administre les biens impériaux de la région. Les institutions municipales sont définitivement établies avec l'adoption d'une constitution en . La cité est gouvernée par un conseil qui comprend huit bourgmestres, quatorze conseillers et les représentants des quatorze corporations. Un conseil de cent échevins se réunit par ailleurs pour prendre les décisions importantes[12]. Le texte est approuvé par Adolphe Ier en [13], et à nouveau confirmé par Charles IV le . Le conseil obtient également le droit de nommer le prévôt (Schultheiss) pour rendre la justice[14]. L'accès à cette haute fonction est réservé à la bourgeoisie à partir de , au détriment de la noblesse de la ville[15].

Avec les autres villes impériales de la plaine d'Alsace, Sélestat forme en une alliance connue sous le nom de Décapole qui doit garantir une assistance réciproque entre ses dix membres face aux menaces extérieures. En raison de sa situation géographique centrale, la ville accueille à partir de les réunions de la ligue et en conserve les archives[16]. Durant les XIVe et XVe siècles la région subit les conséquences de la guerre de Cent Ans. Lors des périodes de trêve, les troupes de mercenaires ne sont plus payées et pillent alors les territoires voisins du royaume de France. La Haute et la Basse-Alsace sont ravagées en par une armée d'Armagnacs, surnommés les « Écorcheurs » (Schinder) et commandés par le Dauphin Louis de France, futur Louis XI, et le maréchal Philippe de Culant. Grâce à ses fortifications, Sélestat résiste aux attaques des pillards. Lors du départ de ces derniers au printemps , les troupes de la ville leur tendent une embuscade près de Lièpvre pour leur prendre une partie de leur armement et de leur butin[17],[18]. À la même époque l'imprimerie se développe dans la région. Originaire de Sélestat, Johannes Mentelin devient l'un des premiers imprimeurs à Strasbourg avec Heinrich Eggestein vers [19]. La cité devient un foyer de l'humanisme grâce à l'École latine fondée au XVe sièclee et dirigée notamment par Ludwig Dringenberg, Craton Hoffmann, Jérôme Gebwiller puis Hans Sapidus. Cet établissement très réputé forme d'imminents diplomates, historiens et théologiens comme Martin Bucer, Paul Phrygio, Beatus Rhenanus et Jacques Wimpfeling au début du XVIe siècle[20].

La détérioration des conditions sociales et le mécontentement de la population rurale provoquent la guerre des Paysans. Une armée de 6 000 rustauds est rassemblée à Scherwiller, à proximité de Sélestat. Elle est décimée sous les remparts de la ville impériale par les troupes du duc de Lorraine, Antoine, le [21]. La Réforme protestante est introduite à la même époque par des prédicateurs mais n'est pas adoptée par les dirigeants de la cité qui restent catholiques comme la majorité des habitants. Lors de la guerre de Trente Ans la ville est occupée en par les troupes du royaume de Suède conduites par Gutaf Horn[22]. Les villes occupées par les Suédois sont confiées aux armées françaises qui y établissent des garnisons. Les traités de Westphalie de accordent au Roi de France des droits sur la ville impériale et ses alliées. Lors de la guerre de Hollande, les Français s'emparent de la cité et l'occupent à partir de [23].

Le traité de Nimègue du marque la fin de l'indépendance de Sélestat qui est rattachée au territoire français[24]. Les institutions de la ville continuent d'exister sous l'autorité du Roi jusqu'à la Révolution française et la fin de l'Ancien Régime en [25].

Notes et références modifier

Annexes modifier

Bibliographie modifier

  • [Encyclopédie de l'Alsace 1985] « Sélestat », dans Encyclopédie de l'Alsace, t. 11 : Rhin-Strasbourg, Strasbourg, Éditions Publitotal, , p. 6828-6853.
  • [Sélestat 2015] Sélestat ville d'art et d'histoire, Ville de Sélestat, , 190 p.
  • [Dollinger 1991] Philippe Dollinger (dir.), Histoire de l'Alsace, [Toulouse], Privat, (1re éd. 1970), 524 p. (ISBN 2-7089-1695-5 et 978-2-70891-695-1).
  • [Dorlan 2003a] Alexandre Dorlan, Histoire architecturale et anecdotique de Sélestat (Schlestadt) : les transformations d'une place forte alsacienne des origines à nos jours, t. 1, Paris, Le Livre d'histoire, (1re éd. 1912), XIX-480 p. (ISBN 2-84373-270-0)
  • [Dorlan 2003b] Alexandre Dorlan, Histoire architecturale et anecdotique de Sélestat (Schlestadt) : les transformations d'une place forte alsacienne des origines à nos jours, t. 2, Paris, Le Livre d'histoire, (1re éd. 1912), X-580 p. (ISBN 2-84373-271-9)
  • [Grasser 1988] Jean-Paul Grasser, La Décapole, Haguenau, Musée historique, , 128 p. (ISBN 978-2-9032-1815-7 et 2-9032-1815-3).
  • [Himly 1970] François-Jacques Himly, Atlas des villes médiévales d'Alsace, Strasbourg, Fédération des sociétés d'histoire et d'archéologie d'Alsace, , 133 p. (lire en ligne)
  • [Kintz 2017] Jean-Pierre Kintz, La conquête de l’Alsace : le triomphe de Louis XIV, diplomate et guerrier, Strasbourg, La Nuée Bleue, , 604 p. (ISBN 978-2-8099-1509-9).
  • [Livet 1975] Georges Livet, « Sélestat ville de la Décapole », Les Saisons d'Alsace, no 57,‎ , p. 106-117 (ISSN 0048-9018).
  • [Lutz 2002] Jean-François Lutz, « L’administration municipale de Sélestat au XVIIIe siècle », sur theses.enc.sorbonne.fr, (consulté le ).
  • [Mengus et Rudrauf 2013] Nicolas Mengus et Jean-Michel Rudrauf (préf. Philippe Richert), Châteaux forts et fortifications médiévales d'Alsace : dictionnaire d'histoire et d'architecture, Strasbourg, La Nuée Bleue, , 375 p. (ISBN 978-2-7165-0828-5).
  • [Münster 1554] (la) Sebastian Münster, Cosmographia Universalis : Liber III De Germania, Bâle, Heinrich Petri, (lire en ligne).
  • [Nicollier 2012] Béatrice Nicollier, Le Saint-Empire romain germanique au temps des confessions : 1495-1648, Paris, Ellipses, , 256 p. (ISBN 978-2-729-87577-0).
  • [Vogler 2009] Bernard Vogler (dir.), La Décapole : dix villes d'Alsace alliées pour leurs libertés 1354-1679, Strasbourg, La Nuée Bleue, , 397 p. (ISBN 978-2-71650-728-8).
  • [Werlé et Reutenauer 2008] Maxime Werlé et Fabrice Reutenauer, « Sélestat (Bas-Rhin) », dans Archéologie des enceintes urbaines et de leurs abords en Lorraine et en Alsace (XIIe – XVe siècle), ARTEHIS Éditions, coll. « Suppléments à la Revue archéologique de l’Est », (ISBN 978-2-915544-65-7, lire en ligne), p. 287–304.

Articles connexes modifier

Liens externes modifier