Tour de potier

machine utilisée dans la création de céramiques aux profils arrondis

Un tour de potier est, dans le domaine de la poterie, une machine utilisée dans la création de céramiques aux profils arrondis.

Potier utilisant un tour de potier pour réaliser un pot.

Historique modifier

 
Tour à entraînement à la main
(Chine, début de la porcelaine)

Origine modifier

La tournette, ou tour lent, apparaît en Chine sur le cours moyen du Fleuve Jaune vers 4 800 à 3 600 av. J.-C. (culture de Yangshao).

L'usage du tour rapide (100 révolutions/minute) est attesté à Suse et à Uruk (Élam, Mésopotamie) vers 3 500 à 3 000 av. J.-C.[1] ; il apparaîtrait dans la culture de Longshan entre 3 000 et 2 000 ans av. J.-C.[2]. Il est aussi attesté au cours de la période thinite (v.3 150 – v.2 700 AEC), en Égypte. La plus ancienne pièce de tour connue est un volant de tour, disque d'argile de 75 cm de diamètre, trouvé à Ur (Mésopotamie) près d'un atelier de potier. Une tombe de la ville d'Uruk a livré un second tour[3].

Pour le IIe millénaire, la Crète de l'âge du bronze a livré de nombreux éléments de tour[3].

Les plus anciennes représentations de tours modifier

Peintures

La tombe de Ti à Saqqarah (Egypte), datée de 2 500 av. J.-C., est ornée de la plus ancienne représentation picturale d'un tour : un potier façonne la lèvre d'un pot de la main gauche pendant que sa main droite fait tourner le tour.

Une tombe de Beni-Hassan (environ 1 900 av. J.-C.) a une fresque représentant quatre potiers au travail[4] : deux potiers, ayant chacun façonné un bol au sommet de la balle d'argile sur leurs tours, sont en train de détacher ces bols de leur balle ; et deux autres potiers sont en train d'achever de tourner leurs vases. Tous actionnent leurs tours de la main gauche[3].

Une peinture dans la tombe de Ken-Amun à Thèbes (vers 1 450 av. J.-C.), montre une grosse pièce en cours de façonnage[3] ; le volant du tour, plus large, est actionné par un aide agenouillé devant le potier[5].

Sculptures

Une statuette égyptienne en pierre calcaire[6] représente un potier accroupi devant son tour ; il active le tour de la main gauche et façonne un vase de la droite ; trois balles d'argile figurent à côté du tour[5].

Une sculpture en bois montre un potier en train de monter un vase ; le tour est actionné par un aide[5].

Ces deux statuettes montrent clairement des tours avec un manchon planté sur un axe[5].

 
Potier à son tour, plaque corinthienne de Penteskouphia, v. 575-550 av. J.-C.
Musée du Louvre

Antiquité modifier

La période grecque a fourni de nombreuses représentations de tours. L'une des célèbres plaquettes votives du sanctuaire de Penteskouphia, près de Corinthe (Grèce) est remarquablement explicite : l'axe fixe du tour est bien visible, terminé en pointe et surmonté d'un manchon. Le potier tient un instrument allongé avec lequel il semble tournasser un vase[5].

À l'époque romaine, le tour à pied n'existe pas encore dans le monde romain ni dans le monde grec[7]. Les tours en usage sont les tours à main ou les tours au bâton[8].

Les traces archéologiques de tours dans l'Antiquité sont rares ; on en trouve à Sallèles-d'Aude (Aude), Chapeau Rouge (Lyon), Beaumont-sur-Oise (Val-d'Oise), Beuvraignes (Somme), La Boissière-École (Yvelines)[7]. Ils sont installés dans des fosses présentant au centre une dépression dans laquelle est fixé l'axe du tour, calé avec des pierres. Les fosses peuvent être circulaires ou bien tendre vers une forme quadrangulaire. Leur fond se trouve généralement tapissé d'argile[9].

Tour à main, tour au bâton modifier

La technologie simplifiée du tour à main n'empêche pas la production de grosses pièces ou la fabrication en série[8].

« Le tour à main ordinaire, en Chine ou au Japon, possède une large et lourde girelle en bois portant quatre entailles près de la circonférence. Lorsque l'élan se ralentit, le tourneur insère adroitement une courte baguette dans l'une de ces entailles et entraîne vigoureusement la girelle, répétant son mouvement environ six fois. Cet élan dure assez longtemps pour tourner une petite pièce, mais doit être constamment renouvelé pour le façonnage d'une grande. »

— Bernard Leach, Le livre du potier (trad. Bernadette Lhôte & Mathilde Bellaigue), Dessain et Tolra, 1974. Cité dans Desbat et al. 2000, p. 27.

Les tours peuvent être à axe fixe : la rotation s'effectue au sommet de l'axe et la girelle n’est pas solidaire de l'axe; ou à axe mobile, avec la rotation s'effectuant depuis la base de l'axe[10].


Tournassage modifier

Le tour sert également au tournassage, le cas échéant - pas nécessairement pour toutes les pièces tournées. Dans ce cas, une fois la pièce ébauchée, elle subit un séchage partiel jusqu'à consistance dite « du cuir ». Puis elle est retravaillée au tour pour amincir les parois, créer des moulures ou creuser les pieds des vases à l'aide d'un instrument tranchant appelé le tournassin ; c'est le tournassage, opération très délicate pour les céramiques à parois fines[8].

Pour tournasser un fond de pot, la pièce est placée à l'envers sur le tour et calée avec un « mandrin » d'argile[8] ou une collerette tronconique. On a retrouvé des collerettes en terre cuite sur le site de l'atelier du Chapeau Rouge à Lyon, dont une associée avec un gobelet en céramique de type « coquille d’œuf » (à parois très fines)[9].

Galerie modifier

 
Blason de la ville d'Oberode (de), Münden, All.

Notes et références modifier

  1. [Prévet 2007] Alain Prévet, La céramique à travers les âges, éd. Jean-Paul Gisserot, coll. « Patrimoine culturel », , 32 p., sur books.google.fr (présentation en ligne, lire en ligne).
  2. (en) Li Zhiyan, Virginia L. Bower and He Li (dir.), Chinese Ceramics : From the Paleolithic Period to the Qing Dynasty, Cambridge et New York, Yale University and Foreign Langage Press, , 687 p. (ISBN 978-0-300-11278-8), p. 71
  3. a b c et d Desbat 2003, p. 137.
  4. Voir la fresque de quatre potiers au travail dans la tombe de Beni-Hassan, dans Desbat 2003, p. 138, fig. 2.
  5. a b c d et e Desbat 2003, p. 138.
  6. Voir la statuette en calcaire, dans Desbat 2003, p. 137, fig. 1.
  7. a et b [Desbat et al. 2000] Armand Desbat, Cécile Batigne-Vallet, Eric Bertrand, Christine Bonnet, Philip Gayte et Michel Lenoble, L'atelier de potiers antique de la rue du Chapeau Rouge à Vaise (Lyon 9e), Lyon, Service archéologique municipal de la Ville de Lyon, , 47 p., sur academia.edu (ISBN 2-9516155-0-7, lire en ligne).
  8. a b c et d Desbat et al. 2000, p. 27.
  9. a et b Desbat et al. 2000, p. 28.
  10. Desbat et al. 2000, p. 29.

Voir aussi modifier

Articles connexes modifier

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Bibliographie modifier

  • [Desbat 2003] Armand Desbat, « Les tours de potiers antiques », Actes du colloque de Niederbronn « Le tournage, des origines à l'an Mil »,‎ , p. 137-154 (lire en ligne [sur artefacts.mom.fr]).