Rue de l'Ail

rue de Strasbourg, France

Rue de l'Ail
Image illustrative de l’article Rue de l'Ail
La rue de l'Ail, à la hauteur du no 34.
Situation
Coordonnées 48° 34′ 47″ nord, 7° 44′ 52″ est
Pays France
Subdivision administrative Grand Est
Ville Strasbourg
Début rue Jean-Sturm
Fin rue des Tonneliers

Carte

La rue de l'Ail (en alsacien : Knowligass) est une rue de Strasbourg rattachée administrativement au quartier Gare - Kléber.

Situation et accès modifier

Elle va du no 3 de la rue Jean-Sturm (place Saint-Thomas) au no 15 de la rue des Tonneliers[1]. Dans le premier tronçon, elle reçoit la rue du Puits au nord, puis la ruelle de l'Esprit au sud. Elle franchit ensuite la rue de la Division-Leclerc, ouverte au moment de la Grande-Percée, et plusieurs petites rues perpendiculaires, celles de l'Épine et de l'Écurie. Devenue voie privée, la ruelle du Fumier y débouche également entre les nos 30 et 32[2].

Origine du nom modifier

 
Plaque bilingue, en français et en alsacien.
 
L'« homme de pierre » (Der steinerne Mann), selon Adolphe Seyboth.

La dénomination actuelle (« Ail » = Knobloch) trouve son origine dans la corruption d'un patronyme, celui des patriciens Klobelouch qui y possédaient plusieurs immeubles au XIVe siècle[3].

Historique modifier

 
Fragments décorés de rubans, découverts lors des fouilles de Jean-Jacques Hatt en 1954.
(Musée archéologique de Strasbourg)

Au fil des siècles, la voie a ainsi porté successivement différents noms, en allemand ou en français : Kalbesgasse (1240), Spettergasse (1306), Klobelouchesgasse (1310), Spettergasse ou Klobelouchsgasse (1431), Klobelouchsgasse (1508), Steinernemannsgasse (1700), rue de l'Aigle, rue de l'Aile (1785), rue de l'Ail (1792), rue de l'Homme de Pierres (1792), rue des Arts utiles (1794), rue de Jamain (1794), rue de l'Ail (1817), Knoblauch-Gasse (1817), rue de l'Homme de Pierre (1845), Knoblauchgasse (1872), rue de l'Ail (1918), Knoblauchgasse (1940), rue de l'Ail (1945[1]).

L'appellation « rue de l'Homme de Pierre » (Steinermangasse) correspond à la dernière section de la voie, entre la rue de l'Épine et celle des Tonneliers[4].
Selon Adolphe Seyboth, cet « homme de pierre » fait référence à un buste en pierre (probablement celui de Rodolphe Ier de Habsbourg) qui avait été placé contre quatre maisons du quartier – dont le no 19 de la rue de l'Ail[5] – jusqu'en 1794, en mémoire de la bataille de Hausbergen (1262[6]).

En 1953-1954, l'archéologue Jean-Jacques Hatt mène d'importantes fouilles dans la rue de l'Ail, conduisant notamment à la découverte d'un dépotoir de céramique. Les pièces trouvées donnent ainsi un aperçu intéressant concernant les activités d'artisans, notamment de potiers, travaillant en marge du camp légionnaire d'Argentoratum[7].

Au milieu du XIXe siècle, Frédéric Piton décrit la rue de l'Ail comme une « rue calme et silencieuse, bordée de beaucoup d'anciennes maisons chapitrales de Saint-Thomas, ayant toutes trois ou quatre siècles d'existence[5]».

La Seconde Guerre mondiale et la Grande-Percée des années 1932-1936 ont fait disparaître plusieurs maisons à caractère historique[3].

Des plaques de rues bilingues, à la fois en français et en alsacien, ont été mises en place par la municipalité à partir de 1995[8]. C'est le cas de la Knowligass.

Bâtiments remarquables et lieux de mémoire modifier

 
Façade d'angle au no 3.
 
Médaillon sculpté d'un bouquet d'ail au no 7.
  • no 3 : La maison Renaissance, à arcades et colombage, a été partiellement reconstruite à la fin du XVIe ou au début du XVIIe siècle[9]. Sa façade principale et l'oriel Renaissance (1591) donnant sur le no 2 de la rue du Puits font l'objet d'une inscription au titre des monuments historiques depuis 1934[10].
  • no 6 : Sur cet emplacement, une maison est attestée vers 1513 sous le nom de Zum Gulden (« au florin »), puis à partir de 1775 sous celui de Zum Goldgulden (« au florin d'or »). Sa démolition est envisagée au XXe siècle, mais la SCI le Florin d'or l'acquiert en 1976 et la remet en état[11].
  • no 7 : En 1773, un maître maçon fait reconstruire presque entièrement la maison Zum Knobloch dont l'existence est avérée depuis le début du XVIIe siècle[12]. Un siècle plus tard, une clef de cintre du XVIIIe siècle, décorée d'un bouquet d'ail, est réemployée au-dessus de la porte d'entrée d'une maison d'allure wilhelminienne[1]. Ce médaillon sculpté fait l'objet d'une inscription au titre des monuments historiques depuis 1929[13].
  • no 9 : Dès le début du XXe siècle, les travaux préliminaires à la Grande-Percée mentionnent à cet endroit une aile ouest à pans de bois du XIVe siècle, remaniée au XVIe, un bâtiment transversal sud du XVIe siècle, une tour en pierre de 1560 environ. La Ville de Strasbourg la fait démolir en 1933 pour réaliser la deuxième tranche de la Grande Percée[14].
  • no 11 : Le bâtiment d'origine possédait un pignon sur rue du XVe siècle. Les armoiries au-dessus du portail donnant dans la cour étaient accompagnées du millésime 1541. Cependant, la maison se trouvant sur le tracé de la Grande-Percée, la Ville l'acquiert en 1909 et la fait démolir en 1933[15].
  • no 16 : Également dite Zum Neuenburg, cette maison du XVIe siècle, avec des supports d'entre-fenêtres au rez-de-chaussée, appartient à la Société évangélique de Strasbourg depuis le début des années 1890. Elle a abrité le Centre social protestant jusqu'à son transfert au no 2 de la rue Brûlée[1],[16].
  • no 18 : Démolie en 1932 dans le cadre de la Grande-Percée, cette maison gothique dotée d'un pignon à redents[17] a fait l'objet d'une étude approfondie[18]. Les panneaux boisés, le plafond et les consoles ont être pu mis en valeur par le conservateur du musée de l'Œuvre Notre-Dame, Hans Haug, dans la salle gothique au dernier étage du Hirschhof[19], l'édifice en provenance du no 7, rue d'Or.
  • no 17 : Un immeuble moderne remplace le bâtiment détruit en 1944. Seul l'ancien portail du XVIIIe siècle est conservé et remonté au fond de la cour. Ce portail et ses vantaux font l'objet d'une inscription au titre des monuments historiques depuis 1953[20]. Les chapiteaux de l'ancienne chapelle sont également recueillis par le musée de l'Œuvre Notre-Dame au moment de la démolition[21].
  • no 19 : La « maison au Lièvre », devenue « maison aux Trois Lièvres » (Zu den drei Hasen) après l'annexion de la maison voisine, se distingue avant tout par son portail baroque en plein cintre, encadré par une paire de pilastres redoublés, creusés en panneaux plantés de biais. Un fronton reposant sur des chapiteaux ioniques est orné d'un panneau sculpté daté de 1608 et d'un bas-relief composé de trois lièvres, entourés d'un décor très travaillé[3].
    Le mystique allemand Johann Heinrich Jung-Stilling, alors étudiant en médecine à l'université de Strasbourg, a vécu dans cette maison en 1770[3]. Au XIXe siècle, la demeure a appartenu à Victor Stoeber, professeur de médecine[5]. Le portail et ses vantaux font l'objet d'une inscription au titre des monuments historiques depuis 1929[22].
  • no 22 : Vaste maison sobre construite en 1716, elle fait l'angle avec l'actuel no 15 de la rue de la Division-Leclerc.
    En 1770-1771, le jeune Goethe, alors étudiant, y prenait ses repas à la pension des sœurs Lauth[3].
  • no 23 : Édifiée vers 1800, elle fait l'angle avec la rue des Tonneliers. Une baie est surmontée d'une sculpture (non identifiée[23]).
  • no 26 : La maison, qui fait l'angle avec le no 9 de la rue de l'Écurie, a été construite en 1770 pour un marchand. La façade est ornée de mascarons, caractéristiques de l'architecture du XVIIIe siècle[24].
  • no 34 : Maison de patriciens attestée depuis le XIVe siècle, elle a fait l'objet de nombreuses transformations à diverses époques. L'arcade boutiquière a été remaniée, la porte d'entrée avec décoration baroque date du XVIIIe siècle. Les fenêtres des étages seraient du XVIe siècle. La baie géminée aux arcs brisés au niveau des combles est de style gothique, le trumeau et l'appui ont été refaits[9],[25].

Notes et références modifier

  1. a b c et d Maurice Moszberger (dir.), « Ail (rue de l') », in Dictionnaire historique des rues de Strasbourg, Le Verger, Barr, 2012 (nouvelle éd. révisée), p. 70-71 (ISBN 9782845741393)
  2. « Ruelle du Fumier (Strasbourg) », ArchiWiki [1]
  3. a b c d et e Roland Recht, Jean-Pierre Klein et Georges Foessel (dir.), Connaître Strasbourg : cathédrales, musées, églises, monuments, palais et maisons, places et rues, Alsatia, Colmar, 1998 (nouvelle édition remaniée), p. 147-148 (ISBN 2-7032-0207-5)
  4. « Ail (rue de l') : Knoblochsgass », Maisons de Strasbourg. Étude historique sur les maisons de Strasbourg entre le XVIe et le XXe siècle [2]
  5. a b et c Frédéric Piton, Strasbourg illustré, ou panorama pittoresque, historique et statistique de Strasbourg et de ses environs, Strasbourg, chez l'auteur, 1855, p. 229, [lire en ligne]
  6. (de) Adolphe Seyboth, « Knoblochgasse. Rue de l'Ail », in Das alte Strassburg, vom 13. Jahrhundert bis zum Jahre 1870 ; geschichtliche Topographie nach den Urkunden und Chroniken, Strasbourg, 1890, p. 114, [lire en ligne]
  7. Jean-Jacques Hatt, « Les fouilles de Strasbourg en 1953 et 1954. Découverte d'un dépotoir de céramique », Gallia, 1954, tome 12, volume 2, p. 323-343, [lire en ligne]
  8. « L'alsacien a droit de rue à Strasbourg », Libération, 31 mars 1995, [lire en ligne]
  9. a et b Jean-Marie Pérouse de Montclos et Brigitte Parent, Alsace : Le Dictionnaire du patrimoine, Éditions Place des Victoires, Paris, 2011, p. 244 (ISBN 978-2809901870)
  10. « Maison au 3, rue de l'Ail à Strasbourg », notice no PA00085071, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
  11. « 6, rue de l'Ail », Maisons de Strasbourg. Étude historique, ibidem [3]
  12. « 7, rue de l'Ail », Maisons de Strasbourg. Étude historique, ibidem [4]
  13. « Maison au 7, rue de l'Ail à Strasbourg », notice no PA00085072, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
  14. « 9, rue de l'Ail », Maisons de Strasbourg. Étude historique, ibidem [5]
  15. « 11, rue de l'Ail », Maisons de Strasbourg. Étude historique, ibidem [6]
  16. « 16, rue de l'Ail », Maisons de Strasbourg. Étude historique, ibidem [7]
  17. « 18, rue de l'Ail (Strasbourg) », ArchiWiki [8]
  18. Charles Czarnowsky, « Une maison de l'époque gothique, 18 rue de l'Ail à Strasbourg, démolie en 1932 », Cahier d'archéologie et d'histoire d'Alsace, no 132, 1952, p. 121-130
  19. Anne-Doris Meyer, « Hans Haug et le musée de l'Œuvre Notre-Dame », Revue d'Alsace, no 132, 2006, p. 261-280, [lire en ligne]
  20. « Maison au 17, rue de l'Ail à Strasbourg », notice no PA00085074, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
  21. « La série de 10 objets provenant de la rue de l'Ail », Base Joconde[9]
  22. « Maison au 19, rue de l'Ail à Strasbourg », notice no PA00085075, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
  23. « 23, rue de l'Ail (Strasbourg) », ArchiWiki [10]
  24. « Maisons à l'architecture caractéristique du XVIIIe siècle », Maisons de Strasbourg. Étude historique, ibidem [11]
  25. « 34, rue de l'Ail (Strasbourg) », ArchiWiki [12]

Voir aussi modifier

Sur les autres projets Wikimedia :

Bibliographie modifier

  • Maurice Moszberger (dir.), « Ail (rue de l') », in Dictionnaire historique des rues de Strasbourg, Le Verger, Barr, 2012 (nouvelle éd. révisée), p. 70-71 (ISBN 9782845741393)
  • Jean-Marie Pérouse de Montclos et Brigitte Parent, Alsace : Le Dictionnaire du patrimoine, Éditions Place des Victoires, Paris, 2011, p. 244 (ISBN 978-2809901870)
  • Roland Recht, Jean-Pierre Klein et Georges Foessel (dir.), Connaître Strasbourg : cathédrales, musées, églises, monuments, palais et maisons, places et rues, Alsatia, Colmar, 1998 (nouvelle édition remaniée), p. 147-148 (ISBN 2-7032-0207-5)
  • (de) Adolphe Seyboth, « Knoblochgasse. Rue de l'Ail », in Das alte Strassburg, vom 13. Jahrhundert bis zum Jahre 1870 ; geschichtliche Topographie nach den Urkunden und Chroniken, Strasbourg, 1890, p. 113-116, [lire en ligne]

Articles connexes modifier

Liens externes modifier