Roland

chevalier franc, comte des Marches de Bretagne, chargé de défendre la frontière du royaume des Francs contre les Bretons, et – selon la légende – neveu de Charlemagne, personnage principal de la Chanson de Roland
Roland
Statue de Roland à Brême (Allemagne).
Fonction
Préfet de la Marche de Bretagne
jusqu'en
Titre de noblesse
Comte
Biographie
Naissance
Décès
Activité
Autres informations
Arme
Personne liée
Monture

Roland ou Hruotland (Hruodland en francique), dit « Roland le Preux », mort en 778 à Roncevaux, est un guerrier franc, préfet de la marche de Bretagne (praefectus britannici limitis)[1], chargé de défendre la frontière du royaume des Francs contre les Bretons. Neveu de Charlemagne — selon la légende —, il a notamment donné son nom à la brèche de Roland[2] et à la Chanson de Roland. Il est considéré comme un des douze preux de Charlemagne.

Le personnage de Roland est associé à son épée Durandal, à son cheval Veillantif et à son cor, un olifant.

Personnage historique modifier

 
La mort de Roland au col de Roncevaux.
Enluminure de Jean Fouquet, Grandes Chroniques de France, Paris, BnF, Département des Manuscrits, XVe siècle.
 
Armoiries imaginaires selon Michel Pastoureau : D'or au lion de gueules, à la bordure engrêlée de sable[3].
 
Charlemagne embrasse Roland.
Chanson d'Aspremont, British Library, Lansdowne Ms. 782 fo 22 vo, XIIIe siècle.

Selon la Vita Karoli Magni, œuvre écrite entre les années 829 et 836 par Éginhard, moine et chroniqueur, les Vascons massacrèrent Roland et toute son armée au cours de la bataille de Roncevaux[4].

Le roi Charles Ier, futur Charlemagne, conduisit effectivement ses troupes à Saragosse en Espagne à la demande du wali de la ville, Soliman ibn al-Arabi, mais ce dernier ayant été remplacé entre-temps, Charles trouva les portes de la ville closes. Pour compenser cet échec, l'aile occidentale de l'armée franque, conduite par le roi, s'en prit à la ville navarraise de Pampelune, qui avait pourtant résisté à la pression musulmane, mais dont les Francs rasèrent les défenses. Le [5],[6], en représailles, des Vascons rattrapèrent et anéantirent l'arrière-garde de l'armée du roi Charles, lourdement armée, alors qu'elle progressait dans une vallée encaissée depuis Roncevaux. Roland et quelques autres nobles y trouvèrent la mort, ainsi que le comte du palais Anselme le preux, et les Vascons reprirent le butin de Pampelune[7].

Légende modifier

 
Roland par Colin Nouailher, vers 1541, Metropolitan Museum of Art.
 
Vestiges de la basilique Saint-Romain de Blaye où la légende situe le tombeau de Roland.

Trois cents ans plus tard, vers la fin du XIe siècle, des récits tels que la Chanson de Roland remplacent les Vascons par des Sarrasins, et la mort de Roland devint un symbole de l'affrontement entre chrétiens et musulmans. Roland devint l'un des Paladins de Charlemagne et son histoire était contée dans de nombreux récits de la Matière de France.

Selon une légende qui a pris naissance avec le développement de la Reconquête et celle du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle, le tombeau du comte Roland, seigneur de Blaye, se trouverait à Blaye, dans la basilique Saint-Romain, nécropole des rois Mérovingiens d'Aquitaine, aujourd'hui détruite mais dont les fouilles archéologiques sont visibles[8].

Comme beaucoup de personnages antérieurs à l'apparition de l'héraldique, Roland s'est vu attribuer des armes imaginaires assez tardivement. Elles sont D'or au lion de gueules, à la bordure engrêlée de sable[3],[9].

Pyrénées modifier

 
La « brèche de Roland ».
 
Roland à Roncevaux, huile sur toile de Gustave Doré, collection particulière, Paris.

Les légendes liées à Roland font partie de la mythologie pyrénéenne. Roland est devenu un géant et a laissé des traces de son passage un peu partout sur les deux versants de la chaîne montagneuse.

La légende attribue la brèche de Roland[10], gigantesque entaille naturelle dans la paroi des falaises situées sur le pourtour du cirque de Gavarnie, aux coups portés par le héros pour briser son épée Durandal qui renfermait dans sa garde une dent de saint Pierre. D'autres légendes évoquent une redécouverte de Durandal ; en 1845, selon le voyageur anglais R. Ford, elle était visible à Madrid ; quand Fulcanelli écrivit Le Mystère des cathédrales (1922), Durandal se trouvait dans un coffre scellé dans la roche et enchaîné, à Rocamadour ; en 1968, selon le professeur Gómez Tabanera, dans un petit village des Pyrénées (sans autre précision), les femmes stériles désirant avoir un enfant se passaient sur le ventre « l'épée de Roland »[11].

Au sud, dans le Haut Aragon, le Salto de Roldán (« saut de Roland ») est constitué par deux sommets éloignés, séparés par un précipice que son cheval aurait franchi d'un bond (Veillantif, le cheval de Roland, était à la mesure de son maître, et ses traces sont multiples). Il existe de nombreux Pas de Roland, passages taillés dans la roche. On ne compte plus les rochers qui ont servi à Roland pour jouer au palet, les marques de ses pas creusées dans la roche, etc.

Au Pays basque, l'enfance de Roland est un thème récurrent[12] : un berger trouve un enfant nouveau-né qui tète une de ses vaches. L'enfant grandit et révèle une force phénoménale. Devenu adulte, il se fait forger un makila de fer, « gros comme une poutre ». Il s'en va combattre les Mairiak, dans ce cas clairement désignés comme les Maures. Il est souvent accompagné d'Olivier (le Daim) mais aussi de Samson avec qui il rivalise d'exploits. On retrouve souvent les caractéristiques et les thèmes attribués à Jean de l'Ours : la force surhumaine exercée involontairement contre les camarades d'école, la canne de fer, les compagnons.

Alpes modifier

Roland et son cheval Veillantif sont connus aussi en Isère au travers de la légende des trois pucelles : des pitons rocheux du Vercors dominant Grenoble[13].

Notes et références modifier

  1. Michel Kaplan, Christophe Picard et Michel Zimmermann, Le Moyen Âge, IVe – Xe siècle, Paris, Editions Bréal, coll. « Grand Amphi », , 432 p. (ISBN 978-2-85394-731-2, lire en ligne), p. 185
  2. Au sud du cirque de Gavarnie, aujourd'hui dans le département des Hautes-Pyrénées.
  3. a et b Michel Pastoureau, L'Art de l'héraldique au Moyen Âge, Paris, éditions du Seuil, , 237 p. (ISBN 978-2-02-098984-8), p. 197.
  4. Passage extrait de la Vita Karoli Magni qui parle de Roland, préfet des Marches de Bretagne (Hruodlandus Brittannici limitis praefectus)
  5. Philippe Sénac, Les Carolingiens et al-Andalus, p. 15 [lire en ligne]
  6. Philippe Sénac, Les Carolingiens et al-Andalus - L'épitaphe d'Eggihard] p. 139
  7. Jules Horrent, « La bataille des Pyrénées de 778 » dans Le Moyen Âge tome LXXVII, no 2, 1972, p. 197-227, et « L'équipée espagnole de Charlemagne en 778 avant et après la bataille des Pyrénées » dans Mélanges de langue et de littérature médiévales offerts à Pierre Le Gentil, ed. Sedes, Paris 1973, (ISBN 0-271-81553-1), p. 377-397.
  8. « Blaye et ses personnalités », sur blaye.fr (consulté le )
  9. R. Lejeune et R. Stiennon, La légende de Roland dans l'art du Moyen Âge, Bruxelles, 1966.
  10. Il existe d'ailleurs une autre Brèche de Roland, dans le Massif Central, entre le Puy Mary et le Puy de Peyre-Arse.
  11. Alberto Serrano Dolader, Guía mágica de la provincia de Huesca, IberCaja, 1994
  12. Jean-François Cerquand, Légendes et récits populaires du Pays basque : La légende de Roland, Léon Ribaut, , p. 16-17.
  13. Paul Berret, Sous le signe des dauphins, "La légende des Trois Pucelles", éditions Didier & Richard

Voir aussi modifier

Sur les autres projets Wikimedia :

Bibliographie modifier

Œuvres modifier

  • La Chanson de Roland (1070 ss.), édi. par C. Segre, Droz, Genève, 1989, 2 vol. ; trad. P. Jouin, Gallimard, coll. « Folio », 1979.
  • Luigi Pulci, Morgant le Géant (1460-1470), Oudot, 1625.
  • Boiardo, Le Roland amoureux (1486), trad. Alain-René Lesage, Publications de l'Université de Saint-Étienne, 2001, 351 p.
  • Arioste, Roland furieux (1532), texte et trad. Michel Orcel, Seuil, 2000, 2 t.
  • Alfred de Vigny, Poèmes antiques et modernes, Le Cor, 1826.
  • Auguste Mermet, Roland à Roncevaux (1864), livret d'opéra.
  • René Barjavel, Roland, le chevalier plus fier que le lion, Éd. Denoël, 1942 pour l'édition originale (lire en ligne).
  • Jean-Marcel Paquette, La Chanson de Roland, Métamorphoses du texte, Essai d’analyse différentielle des sept versions, Orléans, Éditions Paradigme, 2014, 112 pages et tableaux synoptiques.

Études modifier

  • Paul Aebischer, « Roland : mythe ou personnage historique ? », Revue belge de philologie et d'histoire, t. XLIII, fasc. 3 : « Langues et littératures modernes »,‎ , part. I (« Articles »), art. no I.2, p. 849-901 (DOI 10.3406/rbph.1965.2583, lire en ligne).
  • (en) Robert Francis Cook, The Sense of the Song of Roland, Ithaca (New York) et Londres, Cornell University Press, , 266 p. (ISBN 0-8014-1930-1).
  • Hans-Erich Keller, Autour de Roland : recherches sur la chanson de geste, Paris, Honoré Champion, coll. « Nouvelle bibliothèque du Moyen Âge » (no 14), , 376 p. (ISBN 2-85203-085-3).
  • (en) Adriana Kremenjas-Danicic (dir.), Les Sentiers européens de Roland, Dubrovnik, Maison de l'Europe de Dubrovnik, , 485 p. (ISBN 953-95338-0-5).
  • Aline Laradji, La légende de Roland : de la genèse française à l'épuisement de la figure du héros en Italie, Paris, L'Harmattan, coll. « Critiques littéraires », , 340 p. (ISBN 978-2-296-07027-1, présentation en ligne).
  • Rita Lejeune et Jacques Stiennon, La légende de Roland dans l'art du Moyen Âge, Bibliothèque de la Faculté de Philosophie et Lettres de l'Université de Liège, 1966, 2 vol.
  • François Suard, Roland ou les avatars d'une folie héroïque, Paris, Klincksieck, coll. « Les grandes figures du Moyen Âge » (no 5), , 404 p. (ISBN 978-2-252-03829-1, présentation en ligne).
  • (de) Volker Turnau, "Paladin" Roland : Herkunft und Bedeutung eines Idols, Hambourg, tredition, , 236 p. (ISBN 978-3-7345-1935-2)« ... Mit der "divisio" des Jahres 772 wurde Roland durch Karl d. Gr. eine Trierer Grafschaft geschaffen, die bis 902 bestand hatte. ... »

Télévision modifier

Articles connexes modifier

Liens externes modifier