Roger Poyé

architecte français
Roger Poyé
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Activité

Roger Gabriel Émile Poyé, né le à Bailleul et mort le à Calais[1], est un architecte et décorateur français qui a principalement œuvré à la reconstruction de Calais au sortir des deux grandes guerres.

Nommé architecte conseil de la ville de Calais en 1928, il effectue principalement un travail d'architecture régionaliste autour de plusieurs programmes d'habitation à bon marché, puis des œuvres aujourd'hui inscrites aux monuments historiques comme la bourse du travail de Calais et l'Automobile Club du Nord de la France[2], réalisées dans le plus pur style Art déco.

Roger Poyé conçoit de nombreux sujets architecturaux pour une clientèle éclectique. Ainsi que le pratiquaient ses contemporains de l'Union des artistes modernes, il dessine les moindres détails de ferronnerie, serrurerie ou appareillages de briques de ses édifices, et en véritable architecte d'intérieur, il conçoit du mobilier et des décors, aménage des magasins, dessine boiseries, mosaïques, vitraux, édite des meubles… en faisant appel à nombre d'artisans et designers, comme le maître verrier Louis Barillet, les décorateurs et peintres Paule et Max Ingrand, le stucateur Georges Borrewater[3], les ébénistes Jules Leleu et Jacques-Émile Ruhlmann, le ferronnier Edgar Brandt ou le sculpteur Robert Coin[4]. Son style, d'abord moderne rationaliste, affirme la fonctionnalité de ses bâtiments depuis leurs façades, en accordant un souci hygiéniste au traitement de la lumière et de la ventilation; Il est aussi emprunt d'un régionalisme largement plébiscité à l'époque, qui va évoluer vers les formes typiquement Art déco qui lui vaudront la reconnaissance du Salon des Architectes Français en 1952.

Biographie modifier

 
Mosaïque de la tombe de son fils, dessinée par Roger Poyé.

Natif de Bailleul en 1885[5],[6], Roger Poyé effectue ses études d'architecture de 1902 à 1906, en suivant les cours d'Henri Sirot, aux écoles académiques de Douai[7].

Il exerce d'abord à Lens où il signe deux maisons pour des négociants de café à Calais.

Il se marie en 1907 avec Jeanne Maillard, enseignante en dessin au lycée Sophie Berthelot de Calais, qui a notamment réalisé l'affiche de la Compagnie des chemins de fer du Nord à l'effigie de la ville.

Entre 1906 et 1913, il participe à des concours d'architecture qui lui permettent de présenter des travaux pour les communes et obtenir le titre d'Architecte agréé, puis d'architecte admis à présenter des projets pour les communes. Après la Grande Guerre, il travaille à la reconstruction de Calais comme architecte de la ville, expose en au musée des arts décoratifs de Paris un projet d'habitat pour propriétaire rural en Artois[8].

Àla mort de son fils ainé survenu à l'âge de 17 ans en 1925, Roger Poyé dessine sa tombe et en conçoit les mosaïques effectuées dans le style d'Isidore Odorico (photo).

En 1926, il devient architecte de l'Office d'Habitation à Bon Marché, et en 1928 architecte conseil de la ville de Calais, mais aussi de Sangatte, Fréthun, Saint-Omer, Saint-Folquin, Nortkerque, Lens, Pont-de-briques, Guides, Les Attaques, Marck, Louches, Lostebarne... où il construit de nombreux immeubles particuliers.

Il construit alors les bureaux et magasins de la Société industrielle d'éclairage et de chauffage de Calais, détruits durant la guerre, où les décors de vitraux (plafonniers et devantures) avaient été réalisés par Barillet sur des oeuvres originales de Jacques Le Chevallier.

 
Intérieur de l'école du Petit Quinquin avec le mobilier Bauhaus dessiné par Roger Poyé, tout comme les coffres à jouets et le théâtre de marionnette, peints par Paule Ingrand.

En 1932, il réalise L'école du Petit Quinquin pour laquelle il dessine jusqu'au mobilier en acier tubulaire chromé et hêtre étuvé, ainsi qu'un théâtre de marionnettes dont les peintures et fresques seront réalisées par Paule Ingrand. Sortie de terre peu avant la villa Cavrois de Mallet Stevens, elle reçois la médaille de bronze au Salon des Artistes Français.

 
Dessin du projet architectural de l'école maternelle du P'tit Quinquin présenté pour le Salon des Artistes Français de 1939.

En 1939, les travaux de la bourse du travail et de la Maternité s'achèvent en pleine déclaration de guerre. Il présente l'école du P'tit Quinquin au Salon des artistes français pour laquelle il obtient le troisième prix d'architecture[9]. Il fera partie de la délégation de notables qui doit reporter aux forces occupantes puisque Calais est alors en zone interdite : son activité est restreinte mais c'est lui qui effectue l'état des lieux de Sangatte en vue du débarquement.

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, sous la direction de Georges Labro, Roger Poyé est nommé architecte en chef adjoint. Il s'emploie à établir le dossier de description des dommages de guerre et à construire des immeubles collectifs. En 1952, il reçoit la médaille d'or qui consacre sa carrière par le Salon des Architectes Français pour les réalisations de l'école du P'tit Quinquin, la Maternité, la bourse du travail, la capitainerie et le bâtiment de la Fédération mutualiste du Pas-de-Calais. Quelques-uns de ses dessins sont présentés cette même année 1952 au Salon du dessin et de la peinture à l'eau, au musée d'Art moderne de Paris[10].

Il travaille à Calais quasiment jusqu'à sa mort en 1958[5] et y forme de nombreux élèves et esquisseurs à l'École des Arts Décoratifs et Industriels où il était vice-président depuis 1922. En artiste complet il était aussi musicien, jouait de l'alto[11] et était membre de la commission de contrôle de l'École Nationale de Musique.

Son œuvre fait l'objet d'une étude universitaire menée sous la direction Richard Klein[12], architecte et Docteur en histoire de l'art, à l'École d'architecture et de paysage de Lille, en 1997[13]. Une exposition rétrospective lui est consacrée à Calais à l'occasion de la manifestation Le Printemps de l'Art Déco se déroulant dans le nord de la France au printemps 2023 où l'ensemble de son oeuvre Art Déco est répertoriée dans un catalogue [14].

Œuvres architecturales modifier

 
Notre-Dame des Armées. Dessin préparatoire à l'encre et au tire-ligne, Roger Poyé.
 
Carte postale, 1939, pour l'inauguration de la bourse du travail de Calais. Dessin de Roger Poyé.
 
La façade de la bourse du travail de Calais, inscrite aux monuments historiques, dont le bas relief est signé Robert Coin.

Habitations à bon marché modifier

  • Groupe Maubeuge - Le Titien, 1927[13].
  • Groupe Edgard Quinet[13], 1929 (surnommé "La Chapelle Poyé", démoli en partie l'été 2020)[15].
  • Groupe Gallieni[13], 1931.
  • Groupe Vincent - Dürer[13], 1926 - 1931.
  • Maisons ouvrières, rue des Fleurs à Calais[13], 1925 et 1930.
  • Maison particulière Mortier[13], 1930, 35 rue Delaroche à Calais.

Maisons individuelles modifier

Principales réalisations en maisons individuelles[13] :

  • la maison Vasseur, 1913, 9 rue du Brésil à Calais ;
  • la maison Hoffart-Letendart, 1914, modifiée en 1926, 70 rue du Pont-Lottin à Calais ;
  • la maison Mmes Paul, 1925, 8 rue Jean Jaurès à Calais ;
  • la maison Marquis, 1926, 28 Rue du Vauxhall à Calais ;
  • la maison Sancier, 1926, 61 rue de Valenciennes à Calais ;
  • la maison Drouin, 1927, 42 rue Jean Jaurès à Calais ;
  • la maison Legros, 1928, 23 rue Delaroche à Calais ;
  • la maison Bourgine, 1929, 28 rue du Bout des Digues à Calais[12].

Édifices religieux modifier

  • Église Notre-Dame de Armées aux Cailloux, 1921 - 1928, 44 rue du Four à Chaux, Calais[16],[17].
  • Église Saint-Joseph, 1923 - 1924 (dont les vitraux, sur fond de motifs abstraits, ont été réalisés par Louis Barillet)[13],[18],[19]
  • Carmel du Sacré-Cœur de Saint-Martin Boulogne.

Bâtiments municipaux à Calais modifier

Principales réalisations pour la municipalité de Calais[13] :

  • le bâtiment de service des officiers du port, et sa station de sauvetage[20], 1931 (démolie en 1984)[21] ;
  • la bourse du travail, 1936-1939 (comprenant notamment un bas-relief de Robert Coin représentant les allégories de la Paix et du Travail, et des fresques monumentales de Max Ingrand et Paule Ingrand[22]) inscrite au titre des monuments historiques[23] ;
  • la caisse primaire de répartition d'assurance, 1933 (détruit) ;
  • la maternité, 1935 - 1952 , devenue école d'infirmiers[24].
  • l'école primaire supérieure des garçons, 25 rue de Vic ;
  • l'école du P'tit Quinquin, 1938 (médaille de bronze au Salon des artistes français)[25] avec notamment un théâtre de marionnettes dessiné par Max Ingrand et du mobilier en chrome et nickel dessiné par Roger Poyé).

Autres réalisations (sélection) modifier

Principales réalisations pour des organismes ou entreprises de Calais :

  • l'agence de la Compagnie d'Eclairage et de Chauffage (détruit) ;
  • le salon de coiffure Paul (détruit) ;
  • la pharmacie Poupelier (partiellement démolie), 1935, angle boulevard Jacquard et rue Neuve[11] ;
  • la pharmacie Duriez, 1924 ;
  • le Phare de Calais (bureaux du journal), 1926 ;
  • l'Automobile Club du Nord de la France, Calais, inscrit au titre des monuments historiques[26];
  • Le Télégramme (bureaux du journal), Boulogne-sur-mer (partiellement démoli).

Concours modifier

  • L'école dite collège universitaire Jean Bart, 1906, Dunkerque (non réalisé)[27], médaille de vermeil[28]

Ce projet est probablement celui qui a permis à Roger Poyé d'obtenir le diplôme d'Architecte agréé. Il n'avait pas passé les concours des Beaux Arts de Paris, qui étaient alors seuls à délivrer le diplôme d'Architecte DPLG.

Notes et références modifier

  1. Archives départementales du Nord, état civil de Bailleul, acte de naissance no 405 de l'année 1885 portant mention marginale du décès. Il est le fils d'un percepteur des contributions directes.
  2. « https://www.calais.fr/fr/Ville-de-Calais/envie-de-bouger/a-visiter-a-voir/patrimoine-&-monuments/carte-patrimoine-et-monuments-historique/56951d2dfd398c7b0e8b56d7/facade-sur-le-boulevard-jacquard », sur www.calais.fr (consulté le )
  3. « Bourse du travail, marché couvert, actuellement salle de spectacle », sur www.pop.culture.gouv.fr (consulté le )
  4. Jean-François Archieri, Cécile Nebout, Atelier Louis Barillet Maître Verrier, Paris, 15, Square des Vergennes, , 246 p. (ISBN 9782862274539), p. 157, 167, 234
  5. a et b « Qui était Roger Poyé ? », La Voix du Nord,‎ (lire en ligne)
  6. « À Calais, démolition annoncée d’un immeuble signé Roger Poyé (1885-1958) », sur Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France
  7. « Les architectes élèves de l'Ecole des beaux-arts, 1793-1907 », sur wikisource,
  8. F. Honoré, « Les maisons de demain dans les régions libérées », L'illustration,‎ , p. 86 à 90
  9. « Le Temps », sur Gallica, (consulté le )
  10. André Chastel, « Salons prolixes et sans visage », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  11. a et b « Rogé Poyé, des lecteurs calaisiens témoignent », sur La Voix du Nord, (consulté le )
  12. a et b Richard Klein, Le Touquet Paris-Plage, la côte d'Opale des années 30, éditions IFA Norma, 1994
  13. a b c d e f g h i et j Ellen Cazin (ill. Florian Kleinefenn), Roger Poyé : Architecture et modernité à Calais, 1911-1958, Musée de Calais, , 48 p. (ISBN 978-2-911716-25-6, OCLC 468361989, BNF 37070893) 
  14. Emmanuelle Villaneau, Architecture et Art Déco à Calais, l'oeuvre de Roger Poyé, Calais, EPAC, , 62 p.
  15. Magazine Patrimoine Architecture et Jardins, « Calais : un bâtiment de Roger Poyé en danger - PAJ - Le magazine digital du patrimoine », sur PAJ-mag.fr, (consulté le )
  16. A. Houdaille, L’Architecture dans le Nord de la France. T. II, Œuvres des architectes A. Houdaille, Roger Poye, L. Quételart, A. Franche, R. Pruvost, Y. et A. Barbotin, 1933 éditions EDARI.
  17. Observatoire du Patrimoine Religieux, « Eglise Notre-Dame-des-Armées », sur patrimoine-religieux.fr
  18. Observatoire du patrimoine Religieux, « Eglise Saint-Joseph », sur patrimoine-religieux.fr
  19. DRAC, « église Saint-Joseph, recensement des vitraux de Louis barillet classés MH », sur www.pop.culture.gouv.fr (consulté le )
  20. Batiment de Service du Port et Station de Sauvetage, La Construction Moderne, revue hebdomadaire, n°19, janvier 1933, couverture
  21. Jean Wiart, avec les clichés de Hector Wiart pris en 1930, « L'ancienne capitainerie n'est plus qu'un souvenir », sur Calais Avant-hier, (consulté le )
  22. « Bourse du travail », sur www.calais.fr (consulté le )
  23. www.pop.culture.gouv.fr
  24. « La maternité sortie de terre aux forceps », sur Calais Avant-hier (consulté le )
  25. La Construction moderne, revue d'architecture, 54e année, n° 30, 18 juin 1939
  26. www.pop.culture.gouv.fr
  27. DRAC, « liasse de plans et dessins attribués à Roger Poyé, concours de 1906. », sur Base Mérimée,
  28. Rapport sur le concours d'architecture, page 283, « Mémoires de la Société dunkerquoise pour l'encouragement des sciences, des lettres et des arts. », sur Gallica, (consulté le )

Annexes modifier

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Bibliographie modifier

  : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Ellen Cazin (ill. Florian Kleinefenn), Roger Poyé : Architecture et modernité à Calais, 1911-1958, Musée de Calais, , 48 p. (ISBN 978-2-911716-25-6, OCLC 468361989, BNF 37070893) 
  • A. Houdaille, L’Architecture dans le Nord de la France. T. II, Œuvres des architectes A. Houdaille, Roger Poye, L. Quételart, A. Franche, R. Pruvost, Y. et A. Barbotin, Strasbourg, 1933

Liens externes modifier