Filipendula ulmaria

espèce de plantes
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Reine-des-prés

La Reine-des-prés (Filipendula ulmaria), anciennement appelée ulmaire, ou fausse spirée, est une espèce de plantes à fleurs de la famille des Rosacées, originaire de l'Europe et d'Asie. C'est une plante mellifère.

C'est l'espèce type du sous-genre Filipendula subg. Ulmaria.

Dénominations modifier

 
Reine des prés en fleur.

Le nom scientifique Filipendula ulmaria est attribué par Carl von Linné (synonyme : Spiraea ulmaria L.). Filipendula vient du latin filum, « fil », et pendulum, « pendant », en référence aux parties souterraines de la plante formées de tubercules reliés par de minces racines qui évoquent des fils pendants[1].

Son nom vernaculaire de reine-des-prés rappelle que cette plante domine les prairies humides abandonnées et les mégaphorbiaies (où elle détermine leur appauvrissement floristique).

La plante porte plusieurs noms vernaculaires : filipendule ulmaire ou spirée ulmaire, belle des prés, barbe des chênes, barbe de bouc, fleur des abeilles, herbe aux abeilles, ormière, grande potentille, vignette...

Le nom spirée vient de la forme spiralée de ses fruits. L'épithète ulmaria (« ressemblant à l'orme ») fait référence aux folioles des feuilles qui ressemblent à celles de l'arbre[2].

Description modifier

 
Boutons floraux à différents stades de maturité.

Cette belle plante herbacée vivace, velue et feuillue, au port dressé très élégant, mesure de cinquante centimètres à un mètre et demi. Elle a un rhizome rampant. C'est probablement son allure altière qui l'a fait appeler reine-des-prés.

  • La tige est rougeâtre, glabre et anguleuse.
  • Les fleurs sont de multiples fausses ombelles ramifiées, très odorantes, d'un blanc crème.
  • La feuille est imparipennée, vert sombre, glabre au-dessus, feutrée de blanc en dessous.
  • La foliole terminale est palmée, divisée en trois ou cinq parties, les folioles latérales forment de deux à cinq paires le long du pétiole.
  • Les fruits sont enroulés en hélice.

Habitat modifier

 
Reine des prés.

Elle pousse dans les lieux humides, particulièrement au bord des cours d’eau et dans les fossés le long des routes et des chemins. Elle apprécie les prairies humides, les mégaphorbiaies de plaines, les lisières d'aulnaies ou les prés humides, d’où son nom.

Aire de répartition modifier

La reine-des-prés est présente dans toute la France métropolitaine[3]. Elle est rare en région méditerranéenne et absente de Corse. On peut l'observer jusqu'à 1 700 m d'altitude. C'est une plante eurasiatique.

Phytopathologie modifier

 
Rouille provoquée par Triphragmium ulmariae dans une de ses phases de reproduction asexuée nommée « urédie primaire ».
 
Oïdium provoqué par Podosphaera filipendulae.

Triphragmium ulmariae est un agent de la rouille qui produit de remarquables urédies jaune orangé. Ce pathogène est répandu en Europe, en Asie et en Amérique du Nord. Son impact parasitaire sur la mortalité des plantules est très important[4],[5].

Podosphaera filipendulae est un agent de l'oïdium qui produit un mycélium blanc, dense et farineux recouvrant la totalité de la partie aérienne et déformant souvent l'inflorescence. Il s'agit d'un pathogène répandu sur l'ensemble de l'hémisphère nord[6]. Erysiphe ulmaria est une autre espèce plus rare et plus discrète qui provoque également cette maladie cryptogamique. Son mycélium est peu développé, seulement autour des fructifications, et la plante n'est pas déformée[7].

Urocystis ulmariae est un agent du charbon qui produit des sores sous forme de longs renflements dans les pétioles et les nervures des feuilles, se fendant longitudinalement pour exposer la masse de spores brun foncé. Cette espèce est présente en Europe[8].

Utilisation alimentaire modifier

Cette plante a été utilisée comme aromatisant pour les crèmes et les desserts, mais aussi les dentifrices et les boissons. Ses inflorescences restent un excellent condiment, à condition de les avoir fait sécher au moins un an avant utilisation, la maturation permettant aux arômes de se développer. Ses fleurs et feuilles donnent une infusion agréable. Elles peuvent aussi être mises à macérer dans du vin ou de la bière pour les parfumer.

Propriétés médicinales modifier

On recense en France une quarantaine d'emplois en médecine traditionnelle[9]. Grâce à ses flavonoïdes, la reine des prés est principalement utilisée pour son action drainante, aidant à réduire les excès d'eau dans les membres.

  • Propriétés des sommités fleuries : antalgique, anti-inflammatoire, antipyrétique (véritable « aspirine végétale » grâce à ses composants, en particulier les salicylates), diurétique, sudorifique, astringente, tonique, antispasmodique, cicatrisante, digestive.
  • Les feuilles et les fleurs sont diurétiques, fébrifuges, antispasmodiques et antirhumatismales.
  • Les racines et les feuilles sont astringentes, vulnéraires et détersives.

Cette plante, en vente libre autorisée, fait partie de la pharmacopée française.

Au même titre que le saule (Salix alba), la reine des prés est riche en dérivés salicylés. L'extraction de l'acide salicylique de sa racine a permis la synthèse de l'aspirine. Le nom scientifique de l'aspirine, marque déposée par Bayer en 1899, provient d'ailleurs du préfixe A (pour Acétyl, l'acétylation rendant cette molécule tannique moins irritante dans le tube digestif), « spir » pour Spirsaüre (en allemand « acide de la spirée ») et « ine » (suffixe classique en chimie industrielle)[10]. Cette spirée « exhale, à la pression, une odeur de vestiaire sportif : elle est riche en aldéhyde salicylique et en acide salicylique. Ces tannins, proches par l'odeur et par leurs propriétés analgésiantes de l'acétylsalicylate qui constitue l'aspirine, entrent dans la composition des crèmes utilisées par les sportifs contre les contusions » et correspondent pour la filipendule à des rhizodépôts allélochimiques aux effets phytotoxiques (inhibition du développement d'autres espèces végétales de la rhizosphère)[11].

Statut, menaces modifier

Ce n'est pas une plante menacée, mais elle a fortement régressé dans de nombreuses régions en raison du recul des zones humides à la suite des drainages et/ou de leur comblement.

Interactions modifier

La Reine-des-prés est prisée par un papillon de la famille des nymphalidés, le Nacré de la sanguisorbe. Ce dernier y pond ses œufs. Ainsi, une fois les chenilles écloses, elles utilisent la plante comme abri et source de nourriture[12].

Notes et références modifier

  1. François Couplan, Les plantes et leurs noms, éditions Quæ, , p. 104
  2. J.P. Ferrari, Dictionnaire étymologique de la flore française. Lechevalier, 1984
  3. Jean-Claude Rameau, Dominique Mansion et Gérard Dumé, Flore forestière française : guide écologique illustré, t. 1 : Plaines et collines, Paris, Institut pour le développement forestier, , 1785 p. (ISBN 2-904740-16-3 et 978-2904740169, présentation en ligne, lire en ligne)
  4. L. Erickson, J. J. Burdon & W. J. Müller, « The rust pathogen Triphragmium ulmariae as a selective force affecting its host, Filipendula ulmaria », Journal of Ecology, vol. 90,‎ , p. 167–178 (DOI 10.1046/j.0022-0477.2001.00648.x, lire en ligne)
  5. (en) W.N. Ellis, « Triphragmium ulmariae (de Candolle) Link, 1825 », sur Plant Parasites of Europe : leafminers, galls and fungi,
  6. (en) W.N. Ellis, « Podosphaera filipendulae (Zhao) Liu & Braun, 2010 », sur Plant Parasites of Europe : leafminers, galls and fungi,
  7. (en) W.N. Ellis, « Erysiphe ulmariae Desmazières, 1846 », sur Plant Parasites of Europe : leafminers, galls and fungi,
  8. (en) W.N. Ellis, « Urocystis ulmariae (Liro) Vánky, 1985 », sur Plant Parasites of Europe : leafminers, galls and fungi,
  9. La cueillette des savoirs – Capucine Crosnier
  10. Dominique Frémy, Quid, Éditions Robert Laffont, , p. 183
  11. Marc-André Selosse, Les Goûts et les couleurs du monde. Une histoire naturelle des tannins, de l'écologie à la santé, Actes Sud, , p. 71
  12. « Nacré de la sanguisorbe », sur lepido (consulté le )

Voir aussi modifier

Articles connexes modifier

Bibliographie modifier

  • François Couplan et Eva Styner, Guide des plantes sauvages comestibles et toxiques, Les guides du naturaliste, Delachaux et Niestlé. (ISBN 2-603-00952-4)
  • J.C.Rameau, D. Mansion et G. Dumé, Flore Forestière Française (1 Plaines et collines), Institut pour le Développement Forestier 1989 ; 1118-1119p.
  • Dumé (Auteur), Gauberville (Auteur), Mansion (Auteur), Rameau (Auteur), Dominique Mansion (Illustrations), Flore forestière française (guide écologique illustré), tome 1 : Plaines et collines, Institut pour le développement forestier, 2e édition, Nouvelle Flore forestière, 2018, p. 1506-1507

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