Prieuré hospitalier de Saint-Jean en l'Île-lez-Corbeil

prieuré hospitalier situé dans l'Essonne, en France

Prieuré hospitalier de Saint-Jean en l'Île-lez-Corbeil
Présentation
Fondation Drapeau des chevaliers hospitaliers Hospitaliers (XIIe siècle)
Protection Logo monument historique Classé MH (2007)
Géographie
Pays Drapeau de la France France
Région Île-de-France
Ville Corbeil-Essonnes
Géolocalisation
Coordonnées 48° 36′ 14″ nord, 2° 28′ 31″ est
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Prieuré hospitalier de Saint-Jean en l'Île-lez-Corbeil

Le prieuré hospitalier de Corbeil est un prieuré de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Il s'agit du plus ancien prieuré du grand prieuré de France qui date de 1223 avant d'être transféré à Paris en 1315 à la Prieuré hospitalier du Temple à la suite de la dévolution des biens de l'ordre du Temple[1]. Des bâtiments du prieuré, qui date de 1184-1185, il ne reste que la chapelle Saint-Jean-en-l'Île.

Il est situé à Corbeil-Essonnes, au sud de l’agglomération parisienne et au nord-est du département de l’Essonne, à la frontière entre les régions naturelles du Hurepoix à l’ouest, du Gâtinais au sud et de la Brie française au nord-est.

Origines modifier

Dans la seconde moitié du XIIe siècle, les Hospitaliers de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem s'installent dans l'île de Corbeil. En 1176, Thierry Galeran donne à l'Ordre tout ce qu'il possède au vieux Corbeil, clos de vignes, pressoir, avec les droits de justice et des censives[2],[3]. En 1184, Alice de Bergeres donne à titre d’aumône, huit arpents de terre dans l'île de Créteil pour y construire leur commanderie avec une chapelle[4],[3]. L'année suivante, Cécile de Bruyères fait don aux frères de l'Ordre de deux arpents de prés à Corbeil[5],[6].

En 1188, c'est Alix, mère de Philippe-Auguste, qui donne deux moulins et le droit exclusif de fouler du drap en interdisant à quiconque et s'interdisant de construire un moulin à fouler[7],[6]. En 1192, un autre moulin leur est donné par Milon de Savigny[8],[6]. L'Ordre acquiert un four banal à Pont-sur-Essonne et à Lanorville des rentes foncières[9],[6].

En 1223, la reine de France Ingeburge, veuve de Philippe Auguste, fonde le prieuré en transformant la Commanderie. Les commanderies furent transférées au prieuré hospitalier de Saint-Jean de Latran hormis celles qui restent au prieuré de Corbeil pour assurer des revenus suffisants. Une bulle du pape Honorius III confirme la fondation sur la base que Garin de Montaigu, grand maître, accepte de la reine. L'Ordre devra donner treize prêtres pour prier la reine et le roi mort. Trois de ces religieux doivent dire trois messes de requiem, qu'il sera choisi parmi les treize un prieur capable de traiter les affaires du couvent, en échange de quoi elle assurera pour leur entretien une pension annuelle de douze livres[10]. En 1224, elle dote la commanderie de nombreux biens entre autres une rente de cinquante mesures de blé sur les moulins de Corbeil[11]. Elle fait édifier l'église et des bâtiments où elle se retire. L'Ordre rattache le membre de Tigery pour augmenter les revenus du prieuré[12],[13].

En 1224 toujours, le roi Louis VIII le Lion donne, au nom de sa mère, la reine Ingeburge, au prieur de Saint-Jean en l'Île, un droit de minage sur tous les grains qui se vendaient au marché ou sur le port dans toute la prévôté de Corbeil qui rapportait plus de 50 muids de grains par an[14],[15]. En 1267, Marguerite de la Grange donne aux Templiers, dans le faubourg Saint-Jacques à Corbeil, un pressoir et plusieurs maisons[16],[17].

Prieuré modifier

Le prieuré hospitalier de Saint-Jean en l'Île-lez-Corbeil est composé de plusieurs bâtiments renfermés dans les murs d'un enclos. Au centre, il y avait la chapelle Saint-Jean en l'Île, à gauche, le cloître et les habitations des religieux, à droite, la commanderie et en face, le palais du prieur qui servait aux réunions des chapitres prieuraux[18]. Autour du prieuré, sur les bords de la rivière d'Estampes, il y avait une prairie de plus de 100 arpents qui allait jusqu'à Chantemerle[19].

En 1353, Le prieuré est dans une mauvaise passe, la mortalité était importante à Corbeil et il se vit amputer de ces principaux revenus, le cens étant réduit à minima[13]. Guillaume de Mailg, prieur, réunit un chapitre prieural qui décide pour augmenter les revenus du prieuré d'adjoindre la commanderie de Savigny-le-Temple dont les revenus devaient compenser les manques de Corbeil[20]. En 1370, Robert de Juilly, prieur, lui fit de nouveau adjoindre, avec l'autorisation du grand maître, une partie des revenus de la commanderie d'Eterpigny mais il fallut encore y ajouter les biens de la commanderie de Melun quand celle-ci a été supprimée[20].

En 1440, donation aux Hospitaliers, par Jean de L'Isle et sa femme Isabeau, de l'hôtel de La-Queue-du-Renard, entre la rue du Blanc-Pignon et celle des Rosiers, sous condition de faire célébrer dans l'église du prieuré, après leur mort, un service solennel pour le repos de leur âmes et ce à perpétuité[18].

Mais en fait, tout cela venait d'une mauvaise gestion due à l'inobservation du règlement et surtout par un manque de surveillance des prieurs. Ils avaient pris l'habitude de nommer le prieur de Créteil mais ils laissèrent par la suite les religieux élire ce prieur qui jouissait du temporel comme un véritable prieur[20]. Cet abus fut dénoncé à Malte auprès du pilier de la langue de France où il fut décidé, en 1631, de rattacher le prieuré de Corbeil comme apanage du trésorier général de l'Ordre. Le pape Pie IV approuve la décision en 1636 que Louis XVI fini par approuver par lettres patentes le [20].

L'absence régulier des trésoriers, du fait de leurs charges, les obligeaient à nommer un mandataire. Les chevaliers de Rocourt et de Talhouet furent accusés, en 1664, par de très graves plaintes. Le chevalier de Rocourt fut accusé d'avoir laissé un nommé Joselin prendre des terres du prieuré pour les incorporer à son domaine de Chantemerle. Le chevalier de Talhouet, successeur de De Rocourt, d'avoir toléré l'usurpation et de laisser tomber en ruine le prieuré qu'il ne visitait jamais[18]. Le pilier et les chevaliers de la langue de France ordonnèrent au prieur de France de faire une enquête. Il chargea le chevalier de Fleurigny de celle-ci pendant que Talhouet écrivait un long rapport pour se disculper. Il fut finalement convenu que de Tahouet ne toucherait aucun revenu du prieuré de Corbeil aussi longtemps que les bâtiments ne fussent remis en l'état[21],[18].

Chapelle Saint-Jean en l'Île modifier

Le plan de la chapelle, en forme de la croix latine, se compose d'une nef unique, d'un transept et d'un chœur. La nef est voûtée sur croisées d'ogives. Le chœur se termine par une abside à sept pans percés de grandes fenêtres en forme de lancettes. L'intérieur comprend un décor sculpté. La chapelle a perdu sa flèche et son toit d’origine.

Un procès-verbal de la visite en 1495 nous donne une idée de l'église « sumptueusement ediffiée et grande et à croisées, bien entretenue de murailles, verrieres et coverture, avecq un beau clochier couvert partie d'ardoises et de plomb à deux cloches grosses[18]. » Dans une visite de 1456, l’intérieur est décrit « au milieu du grant hostel est assis un tabernacle et ciboire dedans, ouquel repose le begnoist corps de notre Seigneur en hostie estans en une boiste d'ivoire, avecque ça une couppe d'argent dorée et une croix dessus et ung crucifix ferré de leton pesant un marc et demi ou environ. »
« Sur ledit grand hostel, une table de bois doré belle et notable et bien ouvrée, en quoy est l'Assomption Nostre-Dame et les Apostres et sur ladite table à chascun bout une Sainte-Ymaige de nostre Dieu et de Saint Jehan-Baptiste. »
« Sur la tombe de la Royne deux petits chandeliers de cuivre de vielz estat[22]. »

En 1793, le prieuré est annexé à une poudrerie et la chapelle transformée en usine à charbon de bois. Les autres bâtiments sont détruits. Les explosions successives endommagent la chapelle mais les protestations des riverains firent fermer la poudrerie vers 1820. La chapelle devint alors un lieu de stockage pour les balles de coton d'une filature avant d’être restaurée et transformée en musée.

L'église Saint-Jean-en-l'Île est classée au titre des monuments historiques en 2007[23]. Aujourd'hui, la chapelle sert de lieu d'exposition temporaire.

Possessions modifier

Le prieuré était propriétaire de vignes au clos Lecomte, à Boucornu, aux roches de Saint-Jean et aux Tarterêts, dont le vin était consommé au prieuré[19].

Il possédait 200 arpents de terre arable aux Coquibus, à Essonnes près du bois des Granges, à Villabé, à la Coudraye, à la Saussaie et aux masures de Vaux plus 210 arpents de bois dans la forêt de Senard au bois de Hôpital vers Tigery, le bois Saint-Jean ou de la motte du Parc sur la route de Mongeron, 520 arpents dans la forêt de Rougeau et 104 arpents au bois de Langlée entre Breviande et Boissise-la-Bertrand[19].

Le prieur de Corbeil possédait la haute, moyenne et basse justice sur tout le domaine du prieuré, les cens et les redevances foncières sur plusieurs maisons de Corbeil, Chantemerle et Fontenay-en-Brie, les droits de dime à Mormant et à Vilbert[19].

Les revenus du prieuré étaient de 21 500 livres en 1783[24].

Les commanderies de Savigny-le-Temple, Melun, Ozouer-le-Voulgis et les membres de Tigery, Hôtel des Clos, Champagne, Montauger et Clos-Bruneau relevaient du prieuré hospitalier de Saint-Jean en l'Île-lez-Corbeil.

Commandeurs modifier

Liste des commandeurs dressée par Mannier[25].

Prieurs de Corbeil modifier

Prieur Date
Frère Ansel 1185
Gilles de Besencourt 1228
Pierre d'Orléans 1239
Frère Girard 1259
Frère Anselme 1287
Renier de Lapion 1295
Thomas Mouton 1355
Jean de Hesdin 1363
Eustache De Laistre ou De Latre 1370
Jean de Fresnoy 1384
Guillaume Guillerault 1396
Urbain Paulmier 1406
Jean Soubaut 1409
Jean Martel 1440
Jean Foulon 1446
Jean Leroy 1470
Nicole Lesbahy 1482
Étienne Bernard 1505
François de Bourdon 1515
Guillaume Quignon 1526
François de Lorraine[n 1] 1544
Pierre Ourier 1562
Michel de Sevre 1576
Jacques de Harlay[n 2] 1599
Léon-François de Neuville d'Alincourt 1629
Chevalier de Villeroy 1632
Jean Hac 1644

Grands Trésoriers, prieur de Corbeil modifier

Prieur Date
Maximilien de Dampont 1644
François de Courcelles-Rouvray 1648
Nicolas de Paris-Boissy 1652
Henri du Châtelet de Moyencourt 1654
Philippe de Meaux-Rocourt 1655
François de Talhouët[n 3] 1661
Artus Chenet de Mus[n 4] 1671
Charles Duval de Coppeauville 1672
Adrien de Vignacourt 1674
Nicolas de Chevestre de Cintray 1690
Jean du Hamel 1700
Charles de Choiseul d'Esquilly[n 5] 1706
Laurent de Martel[n 6] 1716
François-Marie Desbans de Mareuil 1719
Jean-Baptiste de Briçonnet 1721
François Dauvet des Maretz 1724
Louis de Brilhac[n 7] 1743
Eustache de Vauquelin-Deschenes 1749
Jean-François de Bouilly de Turquan[n 8] 1750
Alexandre de Grieu 1758
Anne de la Magdeleine de Ragny[n 9] 1765
François de Paul Lefevre d'Ormesson 1782
Jacques-Armand Rogers Lusignan de Champignelles 1786

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. Bien qu'il ne fasse pas partie de l'Ordre il put devenir prieur du prieuré hospitalier de Saint-Jean en l'Île-lez-Corbeil en vertu d'une dérogation du grand maître et d'une dispense du pape
  2. ambassadeur de l'Ordre en France
  3. commandeur de Moulin et de Loudun du grand prieuré de Champagne
  4. commandeur des Espaux du grand prieuré de Champagne
  5. commandeur de Ruetz du grand prieuré de Champagne
  6. du grand prieuré d'Aquitaine
  7. commandeur des Espaux du grand prieuré d'Aquitaine
  8. commandeur de la Feuillée du grand prieuré d'Aquitaine
  9. commandeur de Ruetz du grand prieuré de Champagne

Références modifier

Nota : les références des Archives nationales ont été reclassées et les références actuelles sont changées[26].

  1. H. J. A. Sire (1994) p. 130-134.
  2. Archives nationales, S 5144, supplément n. 33
  3. a et b Mannier (1872) p. 49
  4. Archives nationales S 5144, supplément n. 6
  5. Archives nationales, S 5144, supplément n. 7
  6. a b c et d Mannier (1872) p. 50.
  7. Archives nationales, S 5144, supplément n. 9.
  8. Archives nationales, S 5147, supplément n. 17.
  9. Archives nationales, S 5147, supplément n. 25 et 27.
  10. Manniers (1872) p. 50-51.
  11. Delaville Le Roulx (1904) p. 155.
  12. Archives nationales, S 5144, supplément n. 63.
  13. a et b Mannier (1872) p. 51.
  14. Archives nationales, S 5760, Terrier de Corbeil de l'année 1665.
  15. Mannier (1872) p. 56
  16. Jean de la Barre, Antiquités de Corbeil, p. 25
  17. Mannier (1872) note 1, p. 55.
  18. a b c d et e Mannier (1872) p. 53
  19. a b c et d Mannier (1872) p. 55.
  20. a b c et d Mannier (1872) p. 52.
  21. Archives nationales, MM 44, p. 59.
  22. Mannier (1872) p. 54.
  23. Notice no PA00087865, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
  24. Mannier (1872) p. 56.
  25. Mannier (1872) p. 47.
  26. inventaire des Archives nationales

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • Eugène Mannier, Les commanderies du grand prieuré de France d'après les documents inédits conservés aux archives nationales à Paris, Paris, (lire en ligne)
  • H.J.A. Sire, The Knights of Malta, Yalle University Press, 1994.

Articles connexes modifier

Liens externes modifier