Pierre Dubois (prêtre)

Pierre Albert Louis Dubois Desvignes
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Biographie
Naissance
Décès
Nationalité
Activité

Albert Louis Pierre Dubois Desvignes, né le à Plombières-lès-Dijon et mort le dans la ville de Santiago au Chili, est un prêtre catholique français naturalisé chilien, défenseur des droits de l'Homme sous la dictature d'Augusto Pinochet[1].

Biographie modifier

Né dans une famille catholique à Plombières, près de Dijon, Pierre Dubois est ordonné prêtre du diocèse de Dijon en 1955. Désireux de s'engager auprès des plus pauvres, il part au Chili en 1963 comme conseiller du Mouvement ouvrier d'action catholique et de la Jeunesse ouvrière catholique dans les communes actuelles de Pudahuel et de Quinta Normal. Au sein de l'archidiocèse de Santiago, il a d'abord été affecté à des paroisses de la población (quartier populaire) de José María Caro (es) et à la paroisse du Sacré-Cœur de Jésus à Lo Espejo[2],[3],[4].

Ministère à La Victoria modifier

Sa contribution pastorale la plus significative s'est déroulée dans le quartier populaire de La Victoria, paroisse qu'il partage avec André Jarlan[5]. La Victoria est alors l'un des foyers de la résistance au régime de Pinochet. Pendant la dictature militaire, Pierre Dubois a été un protecteur des opposants au régime et un contributeur régulier du Vicariat de la Solidarité, une organisation catholique chilienne de défense des droits de l'Homme. L'épisode le plus tendu de son apostolat remonte au , où il s'est interposé avec les forces de l'ordre sur une barricade, les bras en croix, au cours d’une descente des "Carabineros" contre la population du quartier, à la suite de quoi Pierre Dubois fut arrêté et détenu. Quelques mois plus tard, dans la nuit du , le père André Jarlan fut abattu d'une balle dans la nuque[6].

Expulsion du Chili modifier

En septembre 1986, peu de temps après l'attentat manqué du FPMR contre Augusto Pinochet, Pierre Dubois est de nouveau arrêté ainsi que deux missionnaires franciscains. Selon les documents officiels, Alberto Cardemil, alors sous-secrétaire à l'Intérieur, aurait envoyé au ministère des Affaires étrangères les dossiers des prêtres français Pierre Dubois, Jaime (Jacques) Lancelot et Daniel Caruette, en vue de leur expulsion du Chili[7]. Selon un document du Vicariat de la Solidarité qui relate la perquisition au domicile de Pierre Dubois, il a été frappé à coups de crosse par les carabiniers et les agents de la police secrète avant d'être embarqué dans une camionnette, puis détenu au commissariat local où il a de nouveau subi des insultes et des coups. Le , les trois prêtres français embarquent dans un vol Varig pour la France[8].

De retour dans son diocèse d'origine[4], Pierre Dubois continue son travail auprès des exilés chiliens en organisant la « Pastorale de l'Exil » en Belgique, en France et en Suisse.

En 1990, après la fin de la dictature, il revient au Chili sur l'invitation du président Patricio Aylwin, mais les autorités ecclésiastiques lui interdisent de retourner vivre à La Victoria. Il n'y parviendra qu'en 2009[9].

Naturalisation modifier

En 1996, un groupe de députés de centre-gauche appartenant à la Concertation des partis pour la démocratie ont présenté un projet de loi visant à accorder par faveur spéciale la nationalité chilienne à Pierre Dubois, entre autres pour son travail auprès des populations marginales du Grand Santiago. Ce projet a été voté par la Chambre des députés en date du puis transmis au Sénat pour révision[10]. La Chambre Haute fit échouer la procédure, affirmant que le prêtre était « un personnage conflictuel et non unitaire ». L'opposition à la naturalisation du prêtre était menée par le sénateur Sergio Fernández, qui avait été ministre sous la dictature et qui avait lui-même signé le décret d'expulsion de Pierre Dubois.

Par la suite, le , la naturalisation de Pierre Dubois a été approuvée et publiée au Journal officiel chilien le de la même année.

Auparavant, en 2000, Pierre Dubois a été élevé à la dignité de chevalier de la Légion d'honneur[11].

Fin de vie modifier

Pierre Dubois continue à s'engager auprès des plus marginalisés et des plus vulnérables. En 2009, il regagne la población de La Victoria. Atteint de la maladie de Parkinson, il décède au matin du à l'âge de 80 ans dans le quartier de La Victoria qui lui était cher et où il avait exercé la plus mémorable partie de son ministère[12].

Ses obsèques ont eu lieu le dans la cathédrale de Santiago lors d'une cérémonie présidée par Mgr Ricardo Ezzati. Le cortège funèbre qui l'accompagne depuis La Victoria jusqu'au centre de Santiago est suivi par des milliers de personnes[9],[13].

Réactions après sa mort modifier

À la suite du décès de Pierre Dubois, Michelle Bachelet a publié un message dans laquelle elle le décrivait comme « un homme exceptionnel, un homme qui s'est donné entièrement à la défense de la vie, un combattant infatigable [...], un symbole de la non-violence et de la protection des gens sans défense »[14].

Ricardo Lagos a décrit le père Dubois comme un atout précieux dans l'histoire récente du Chili.

Les habitants de La Victoria ont rappelé les innombrables fois où Pierre Dubois les a défendus au prix de sa vie, surtout aux heures les plus graves, comme les manifestations contre la dictature militaire dans les années 1980.

Par une comparaison jugée déplacée dans la presse et les réseaux sociaux, le président alors en exercice Sebastián Piñera a fait polémique en comparant l'œuvre de solidarité de Pierre Dubois à La Victoria avec la solidarité exercée au travers du Téléthon[15].

Notes et références modifier

  1. La population de "La Victoria" est morte (Père Pierre Dubois)
  2. Décès du prêtre Pierre Dubois, grand défenseur des droits de l'homme au Chili, à l'âge de 80 ans.
  3. http://giltzarria.unblog.fr/2012/11/22/le-pere-pierre-dubois-grand-resistant-a-pinochet-est-decede-a-la-victoria/ Article de Jac Forton, initialement publié dans la revue Espace Latinos, no 273. Consulté le 06/10/2020
  4. a et b https://eglise.catholique.fr/espace-presse/communiques-de-presse/366163-hommage-au-pere-pierre-dubois/ consulté le 06/10/2020
  5. Témoignage d'André Jarlan par Pierre Dubois 1994}
  6. https://www.emol.com/noticias/nacional/2012/09/28/562215/muere-padre-pierre-dubois.html consulté le 06/10/2020
  7. (es) « Documentos revelan que Cardemil distribuyó fichas de opositores a la dictadura », sur Cooperativa.cl (consulté le ).
  8. https://web.archive.org/web/20121002070140/http://www.cambio21.cl/cambio21/site/artic/20120929/pags/20120929154917.html consulté le 06/10/2020
  9. a et b http://giltzarria.unblog.fr/2012/11/22/le-pere-pierre-dubois-grand-resistant-a-pinochet-est-decede-a-la-victoria/ consulté le 06/10/2020
  10. Chambre des Députés - 342e Législature, Ordinaire. Séance 32, le jeudi 31 août 2000 (ordinaire, de 10 h 47 à 13 h 31)
  11. https://jorfsearch.steinertriples.ch/doc/JORFTEXT000000580150 consulté le 06/10/2020
  12. (es) Cooperativa.cl, « En la población La Victoria falleció el padre Pierre Dubois », sur cooperativa.cl, (consulté le ).
  13. https://araucaria-de-chile2.blogspot.com/2012/10/deces-du-p-pierre-dubois-opposant-la.html consulté le 06/10/2020
  14. https://www.latercera.com/noticia/michelle-bachelet-envia-carta-por-fallecimiento-de-sacerdote-pierre-dubois-fue-un-luchador-incansable/ consulté le 06/10/2020
  15. https://devtest.eldinamo.cl/pais/2012/10/01/presidente-pinera-destaca-solidaridad-de-sacerdote-pierre-dubois-y-la-compara-con-la-teleton/ consulté le 06/10/2020

Liens externes modifier