Pierre-André Taguieff
Pierre-André Taguieff, né le à Paris, est philosophe, politologue et historien des idées[1],[2]. Il est chercheur honoraire au CNRS[3].
Président Fondation du 2-Mars | |
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La Force du préjugé (), Sur la Nouvelle Droite (d) () |
Il a notamment travaillé au Centre de recherches politiques de Sciences Po (CEVIPOF) et à l'Institut d'études politiques de Paris. Il a été membre fondateur du cercle de réflexion le Cercle de l'Oratoire et du comité de rédaction de sa revue, Le Meilleur des mondes. Il a également participé au comité de rédaction de la revue Des Lois et des hommes.
Taguieff est l’auteur de nombreux ouvrages touchant à la fois aux domaines de la théorie politique, de l'histoire des idées, de la philosophie politique et de la théorie de l'argumentation. Ces ouvrages traitent, entre autres, du racisme, de l'antisémitisme et des idéologies d'extrême droite. Il s'est fait connaître d'abord par ses travaux sur le racisme et l'antiracisme (La Force du préjugé, Essai sur le racisme et ses doubles[4]), puis par des articles et ouvrages sur les Protocoles des Sages de Sion, le populisme, la Nouvelle Droite et le Front national.
Ses nombreuses prises de position dans le débat public sur les sujets liés à Israël, en particulier dans les colonnes du quotidien Le Figaro ou sur sa page Facebook, ont suscité des polémiques et ont conduit l'historien Daniel Lindeberg à le considérer comme un "nouveau réactionnaire".
Biographie
modifierNé d’un père russe et d’une mère d’origine polonaise, Pierre-André Taguieff a très tôt été passionné par la culture juive (notamment musicale), bien que n'étant pas juif lui-même, comme il l'a déclaré publiquement à plusieurs reprises. Si ses parents ne sont pas juifs, « tous les amis de la famille étaient des juifs d'Europe de l’Est, marqués par l'expérience nazie »[5]. Il est l'ex-époux de la chanteuse yiddish Talila, avec qui il a eu une fille[6].
Durant les années 1970, il milite dans plusieurs mouvements antiracistes comme le Mouvement contre le racisme, l'antisémitisme et pour la paix (MRAP), la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (LICRA) et la Ligue des droits de l'Homme (LDH). En 1972, il devient professeur de philosophie en lycée, puis en école normale d'instituteurs. Vers la fin des années 1970, il commence à étudier la Nouvelle Droite et s'intéresse au parcours de son chef de file, Alain de Benoist. De 1978 à 1984, il occupe un poste de chargé de cours en psychologie générale à l'université Paris-VII. Il entre au CNRS en 1984, ayant collaboré au laboratoire Lexicométrie et textes politiques de l'École normale supérieure de Fontenay-Saint-Cloud à partir de 1980. Il enseigne également au Collège international de philosophie. Ses premiers articles sur la Nouvelle Droite et le Front national paraissent dans différentes revues[7].
À partir de 1985, il est membre du comité de rédaction de Politica hermetica (fondée par l'historien Victor Nguyen) avec, notamment, le sociologue et historien Émile Poulat. Son premier ouvrage « non militant », La Force du préjugé, paru en 1988, tente de penser le racisme avec son contraire (l'antiracisme) et d'en proposer une critique pour mieux le combattre ; repenser la notion de racisme avec des concepts plus nuancés donnait des résultats inédits et stimulait la réflexion sur la question de l'antiracisme et de ses emprunts involontaires d'éléments à l'idéologie qu'il prétend combattre[8]. Durant cette période, Taguieff dirige la collection « Histoire des idées, théorie politique et recherches en sciences sociales » aux éditions Kimé, et, avec Christian Plantin, la collection « Argumentation, Sciences du langage »[9].
En 1989, Jean-Christophe Cambadélis s'inspire de ses analyses lorsqu'il lance le « Manifeste contre le national-populisme » (expression introduite par Gino Germani, reprise et popularisée par Taguieff pour désigner le Front national). Parallèlement, SOS Racisme lui confie la présidence de son Observatoire de l'antisémitisme dont l'objectif était de recenser et d'analyser les activités antisémites en France. En 1991, il devient l'analyste officiel du rapport annuel de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme pour ce qui relève de la lutte contre le racisme et la xénophobie[10]. Au même moment, il prend la direction de la collection « Pensée politique et sciences sociales » des éditions Berg International.
De 1994 à 1995, Taguieff est titulaire de la chaire Chaïm Perelman du Centre Perelman de philosophie du droit de l'université libre de Bruxelles. Par la suite, il enseigne à l'École des hautes études en sciences sociales, ainsi qu'à l'Institut d'études politiques de Paris (cycle supérieur). En 1999, il compte parmi les membres fondateurs d'un think tank républicain, la Fondation du 2-Mars (ex-Fondation Marc-Bloch), qu'il préside de 2001 à 2003. Il devient également conseiller politique de Jean-Pierre Chevènement, avec lequel il prendra ses distances à partir de 2003.[réf. nécessaire]
En 2002, il compte parmi les experts de la « Commission sur le racisme et le négationnisme à l'université Jean-Moulin Lyon III » (créée par le ministre de l'Éducation Jack Lang et dirigée par l'historien Henry Rousso). Celle-ci avait pour objectif d'enquêter sur différents événements ou propos jugés négationnistes reprochés à certains étudiants et professeurs de la faculté de Lyon-III. Cette nomination a fait l'objet de critiques, notamment de la part de l'écrivain Didier Daeninckx[11], parce que Taguieff avait auparavant signé une pétition de soutien à l'un des professeurs mis en cause[12], et de SOS Racisme[13], qui avait pourtant eu recours à l'expertise de Taguieff lors de la création de son propre « observatoire de l'antisémitisme » (voir ci-dessus).
Le , Taguieff est chargé d'établir un rapport officiel sur l'antisémitisme dans les écoles publiques françaises destinés aux ministres Luc Ferry et Jean-Louis Borloo. Également conseiller du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) et membre de l'Association citoyenne pour le Proche-Orient (ACPRO), il signe, avec d'autres intellectuels et artistes tels Alain Finkielkraut, Jacques Julliard, Bernard Kouchner, le journaliste Ghaleb Bencheikh et le cinéaste Élie Chouraqui, un appel controversé « contre les ratonnades anti-blancs »[14].
Travaux
modifierSur la Nouvelle Droite
modifierEn 1993, Taguieff a été accusé par Roger-Pol Droit dans Le Monde de « banalisation de l'extrême droite » et de manque de « vigilance » parce qu'un recueil[15], auquel il collabora avec Alain de Benoist, fut publié (abrégé) en Italie dans une maison d'édition dirigée par Marco Tarchi, chef de file de la Nouvelle Droite dans ce pays[16]. Le Monde omettait de préciser que le texte litigieux était en réalité « un piratage » non autorisé par l'auteur. Cette dénonciation s'appuyait aussi sur le fait que Taguieff avait fréquenté des militants de la Nouvelle Droite d'Alain de Benoist dans le cadre de ses travaux et publié des articles dans des revues du mouvement (Éléments, Krisis) aux côtés d'autres intellectuels qui, aux yeux des « vigilants », auraient dû s'abstenir : Jacques Julliard, Serge Latouche, Alain Caillé, Ignacio Ramonet, etc.
Cette attaque s'inscrivait dans le cadre d'un « Appel à la vigilance » (également publié dans Le Monde) signé par plusieurs intellectuels et universitaires renommés (dont beaucoup furent, selon Taguieff, manipulés par les initiateurs dudit appel : certaines de leurs signatures seront d'ailleurs retirées[réf. nécessaire]) faisant allusion à Pierre-André Taguieff sans toutefois que son nom fût mentionné[17]. Une contre-pétition de soutien à Taguieff fut lancée à l'initiative de Patrick Weil et permit à une série de chercheurs et de collègues de dénoncer le « conformisme » de la première pétition en rappelant la difficulté de travailler sur des « sujets chauds » et les risques que ces recherches peuvent entraîner. Dans le Nouvel Observateur, Jacques Julliard dénonce « la campagne menée par Le Monde contre Pierre-André Taguieff », la qualifiant littéralement de « honte »[18].
Pour Luc Ferry, Pierre-André Taguieff prend encore dans cet ouvrage « le risque d'irriter les gardiens du temple ». « A l'encontre d'un certain nombre d'autres intellectuels de gauche » et suivant le conseil donné par Raymond Aron, Pierre-André Taguieff s'efforce de combattre les idées d'Alain de Benoist « par des idées, non par des bâtons ou du vitriol ». Selon lui, son livre est sans équivalent sur l'histoire et les idéologies du GRECE, sur les revues de la Nouvelle Droite et sur l'itinéraire d'Alain de Benoist[19].
Populisme, antisémitisme, racisme et antiracisme
modifierTaguieff est insatisfait du concept d'« extrême droite » qu'il trouve essentiellement polémique[20] car bien souvent cette « extrême droite » ne défend en rien des positions « de droite » qui auraient été poussées à « l'extrême »[21]. Il propose une analyse du Front national faisant l'économie de cette notion, au profit de celle de « national-populisme »[22], qui connaîtra une fortune certaine dans les travaux ultérieurs sur le parti de Jean-Marie Le Pen[23],[24], y compris en anglais (national populism). Ces recherches s'accompagnent également d'une opposition — exprimée publiquement à plusieurs reprises — à l'« ethno-nationalisme » du FN et à ses positions sur l'immigration[25],[26].
En 2019, la publication aux éditions du Cerf de L’Émancipation promise dresse selon certains un violent réquisitoire contre les valeurs républicaines car, estimant qu’érigées « en absolus, la liberté, l’égalité et la fraternité se transforment en idoles sanguinaires au nom desquelles des multitudes sont sacrifiées », Taguieff pourfend l’écologie et prend la défense du capitalisme, estimant que « le secret de l’antisémitisme moderne » serait la « haine du capitalisme ». Le journaliste Joseph Confavreux (Mediapart) interroge la rupture intellectuelle introduite par ce livre dans la trajectoire de ce chercheur qui fut l'un des premiers à avoir analysé les arguments de la « Nouvelle Droite » et qui désormais endosserait les thèses différentialistes de celle-ci[27]. Cette interprétation du livre est cependant elle-même très éloignée de la présentation du livre par son auteur. Dans un entretien au magazine La Vie, Taguieff explique son propos. Autant la notion d'« émancipation » appliquée à un objet précis a du sens (émancipation des esclaves, émancipation des juifs), autant le substantif utilisé seul est un concept confus qu'il convient d'interroger dans les différents contextes de son emploi[28].
Sur les théories du complot
modifierGuillaume Weill-Raynal a critiqué ce qu'il considère comme les amalgames de Taguieff prétendant fustiger les amalgames[29].
Thèse sur l'islamo-gauchisme
modifierDans un article académique publié en 2004[30], qui prolonge des thèses de son essai La nouvelle judéophobie publié deux ans plus tôt, Taguieff décrit un phénomène nouveau en France qu’il appelle « islamo-gauchisme » : « La convergence inédite des islamistes radicaux portés par le fanatisme antioccidental et des nouveaux gauchistes s’efforçant de réactiver l’utopie communiste par une exploitation démagogique du mouvement « anti-mondialisation »[30]. Selon Taguieff « l’engagement total en faveur de la « cause palestinienne » serait le « moteur passionnel » de cette mouvance née dans le contexte de la seconde intifada[30]. Il observe ce rapprochement entre « tiers mondistes » et militants islamiques lors de rassemblements de soutien aux Palestiniens. À partir de 2016, alors que le terme s'est fortement diffusé dans les médias grand public et dans les discours de personnalités politiques de droite[31], Taguieff estime que « [son] sens devient de plus en plus vague à mesure qu'il devient un terme polémique »[32].
Prises de position dans le débat public
modifier« Nouveaux réactionnaires »
modifierEn 2002, Taguieff est classé parmi les « nouveaux réactionnaires » dans un pamphlet de Daniel Lindenberg (Le Rappel à l'ordre). Taguieff répond que Lindenberg ne prend pas la peine de discuter les thèses de penseurs tels que Pierre Manent, Marcel Gauchet, Alain Finkielkraut, Alain Besançon, Shmuel Trigano, Jean-Claude Milner ou Alain Badiou, il se contente d'épingler des noms sur sa liste noire[33].
En 2009, un livre d'Ivan Segré[34] englobe Pierre-André Taguieff dans « un courant intellectuel significatif », né en France à la fin du XXe siècle et qualifié de « réactionnaire philosémite », incluant Élie Chouraqui, Raphaël Draï, Alain Finkielkraut, Gilles-William Goldnadel, André Kaspi, Robert Misrahi, Shmuel Trigano, Yves-Charles Zarka[35]. Selon Segré, le point commun entre ces intellectuels serait une idéologie fondée sur l'existence d'un conflit civilisationnel qui met en opposition un Occident déclinant et un monde islamique triomphant. Dans ce conflit, Israël (rangé dans le camp occidental) serait en première ligne pour la défense de l'Occident contre l'islam, ce qui justifierait en soi un soutien inconditionnel à l'État juif.
Aux élections législatives de 2024, Taguieff signe un appel à faire barrage au second tour au Nouveau Front Populaire[36].
Polémique sur la « Nouvelle judéophobie »
modifierGuillaume Weill-Raynal a critiqué une thèse de Taguieff[37] selon laquelle « les "milieux médiatiques (surtout de gauche)" seraient aveugles à la double montée de l'islamisme et de la judéophobie maghrébine »[38], car Taguieff ne le justifierait que par « une série d'articles parus dans le "milieu médiatique de gauche", celui-là même qu'il accuse de silence coupable ! »[38]. Toutefois, s'il dénonce que les médias ont insuffisamment parlé des actes judéophobes de 2000-2002, son livre pointe surtout « l'aveuglement », la difficulté à gauche de prendre au sérieux la diffusion de thèmes anti-juifs quand ils s'inscrivent dans un combat jugé juste (la cause palestinienne) par une population réputée victime d'injustices sociales (migrations outre-méditerranéennes)[39]. Dès son ouvrage sur Les Protocoles des Sages de Sion (paru en 1992), il s’est interrogé : comment penser (identifier, expliquer) la judéophobie de certains textes ou propos antisionistes, sans tout confondre et paraître vouloir dénoncer toute critique d’Israël ? Dans ce dernier ouvrage il propose une typologie utile. On devrait distinguer quatre critiques du sionisme. Ce sont la critique du nationalisme juif (type 1), la critique d’une politique gouvernementale (type 2), la critique d’un projet historique qui aurait débouché sur un drame historique dont les victimes sont les Palestiniens (type 3), la critique du sionisme comme « complot mondial » visant à la domination sur les affaires du monde (type 4). P-A. Taguieff observe que les types 1 et 2 ne posent pas de problèmes, tandis que le 4 est un puissant vecteur de judéophobie. Le type 3 peut, ou pas du tout, être le support de racisme anti-juif. Tout dépend du contexte, de l’énonciateur, des récepteurs, etc.[40]
Nonna Mayer (collègue de Taguieff au CEVIPOF), dans un article publié en 2004 reconnaissait que « depuis l’automne 2000 [et donc jusqu'en 2004], la France connaît une hausse sans précédent des actions antisémites [...] à un niveau nettement supérieur à celui qu’on observait dans les années 1990. Depuis 2000, actions et menaces antisémites sont majoritaires par rapport aux autres formes de racisme recensées »[41]. Mais, en dépit de cette introduction, elle infirmait les thèses de Taguieff par l'analyse statistique d'un sondage d'opinion « auprès d’un échantillon national de 1 052 individus », à qui l'on a demandé s'ils estimaient que « les Juifs ont trop de pouvoir en France » et quelle était leur « sympathie éprouvée pour Sharon, Bush, Arafat et Blair »[41]. Sur la base des réponses données à ce sondage, elle concluait à l'époque « qu’au sein de la population française dans son ensemble, l’antisémitisme au sens classique de préjugé contre les Juifs ne progresse pas, au contraire », et que loin de se parer, « comme le suggère Pierre-André Taguieff, des couleurs de l’antiracisme, en prenant la défense des Arabes et des musulmans [...] il touche les mêmes milieux qu’hier »[41]. « C’est, encore et toujours, à l’extrême droite qu’on trouve le plus de racistes et d’antisémites, chez les proches du FN et les électeurs de Jean-Marie Le Pen »[41].
Alain de Benoist, critiquant Prêcheurs de haine. Traversée de la judéophobie planétaire, déplore un livre où l'auteur « règle visiblement des comptes » et se laisse aller à « des attaques ad hominem et des procès d’intention » contre des personnalités n'ayant jamais exprimé le moindre propos judéophobe. Ce faisant, Pierre-André Taguieff abandonne, selon de Benoist, la position d’observateur qui était la sienne dans les ouvrages précédents pour devenir un simple partisan[42].
Régulièrement accusé d'engagement partisan et de confondre antisionisme et antisémitisme quoiqu'il distingue ces deux formes de la judéophobie[43], en 2006 il répond fermement aux critiques du livre de Cécilia Gabizon et Johan Weisz, OPA sur les Juifs de France : enquête sur un Exode programmé : « Le phénomène le plus inquiétant, ce n’est pas cette prétendue “OPA” israélienne, ni la relative droitisation des juifs de France, c’est la réalité des violences antijuives »[44].
À l'automne 2010, une polémique naît à la suite de propos attribués à Pierre-André Taguieff à l'encontre de l'ancien diplomate Stéphane Hessel. Le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP) dénonce une phrase laissée peu de temps sur Facebook : « Quand un serpent venimeux est doté de bonne conscience, comme le nommé Hessel, il est compréhensible qu’on ait envie de lui écraser la tête »[45]. L'hebdomadaire Politis relève d'autres propos outranciers de Pierre-André Taguieff à l'encontre de Stéphane Hessel[46]. De même, Pierre Haski publie un article sur le sujet dans L'Obs[47]. Dans une réponse à cet article et aux reproches du MRAP, Taguieff affirme qu'il paraphrasait Voltaire et souligne que la phrase était extraite d'une conversation entre amis vite effacée. Dans cette même réponse, il reproche à Hessel d'avoir choisi d'« appeler à la haine contre Israël »[48].
« Islamophobie »
modifierTaguieff condamne l'usage du mot islamophobie, « qui favorise les usages polémiques[49] », et il a défendu au printemps 2002 l'ouvrage d'Oriana Fallaci, La Rage et l'Orgueil, dans lequel elle affirme notamment que les musulmans « se multiplient comme des rats », ou encore qu'« au lieu de contribuer au progrès de l’humanité, [les fils d'Allah] passent leur temps avec le derrière en l'air à prier cinq fois par jour. »[50]. Ce livre a suscité de vives réactions dénonçant son caractère anti-musulman[51], voire xénophobe. Vincent Geisser y voit un « pamphlet islamophobe » et un « ouvrage haineux »[52], Françoise Giroud qualifie quant à elle l'ouvrage de « pages lourdes de haine et de mépris »[53]. Pour Pierre-André Taguieff, « Fallaci vise juste, même si elle peut choquer par certaines formules […] Ce livre ne s’embarrasse pas de formules politiquement correctes, Oriana Fallaci se fiche des convenances, elle s’efforce de dire des vérités terriblement gênantes »[54]. Ces propos plutôt élogieux envers un ouvrage que certains considèrent comme raciste feront l'objet de nombreuses critiques[55].
Ces propos sont contestés par l'historien israélien Shlomo Sand, qui affirme que les partis politiques ayant « le vent en poupe » et les « « best-sellers » ces derniers temps » (notamment de Houellebecq, Finkielkraut, Zemmour) s'en prennent aux musulmans et non aux juifs[56]. Le sociologue Vincent Geisser[57] le critique également dans son livre La nouvelle islamophobie répondant à La Nouvelle Judéophobie de Taguieff[58] : il considère qu'« une telle posture en vient finalement à déterminer la dose d’islamophobie admissible et tolérée par notre société française : au-delà d’un certain seuil (affaire Fallaci), celle-ci est blâmable car elle rappelle un peu trop l’antisémitisme intellectuel de l’entre-deux guerres (comme en témoigne la référence récurrente à Céline dans la plupart des prises de positions) ; mais, en deçà, elle devient légitime et même souhaitable, car elle contribue à stimuler la « liberté de penser », et par là même renforce nos valeurs laïques et républicaines ».
Publications
modifier- La Force du préjugé. Essai sur le racisme et ses doubles, Paris, La Découverte, « Armillaire », 1988 ; rééd., Paris, Gallimard, « Tel », 1990 (ISBN 2-07-071977-4)
- (dir.), Face au racisme, t. 1, Les Moyens d'agir ; t. 2, Analyses, hypothèses, perspectives, Paris, La Découverte, « Cahiers libres, essais », 1991 ; rééd. Paris, Éditions du Seuil, « Points essais », 2 t., 1993 (ISBN 2-02-020981-0)
- (en codirection avec Gil Delannoi), Théories du nationalisme. Nation, Nationalité, Ethnicité, Paris, Kimé, « Histoire des idées, théorie politique et recherches en sciences sociales », 1991 (ISBN 2-908212-10-2)
- Les Protocoles des Sages de Sion. Faux et usages d'un faux, t. I, Introduction à l'étude des « Protocoles » : un faux et ses usages dans le siècle ; (dir.) t. II Études et documents, Paris, Berg International, « Faits et représentations », 1992 ; rééd. revue corrigée et augmentée, Berg International et Paris, Fayard, 2004 (ISBN 2-213-62148-9)
- Sur la Nouvelle Droite. Jalons d'une analyse critique, Paris, Éditions Descartes et Cie, 1994 (ISBN 2-910301-02-8)
- Les Fins de l'antiracisme, Paris, Michalon, 1995 (ISBN 2 84186 001 9)
- La République menacée. Entretien avec Philippe Petit, Paris, Textuel, « Conversations pour demain », 1996 (ISBN 2-909317-20-X)
- Le Racisme. Un exposé pour comprendre, un essai pour réfléchir, Paris, Flammarion, «Dominos», 1997 (ISBN 2-08-035456-6)
- (avec Michèle Tribalat), Face au Front national. Arguments pour une contre-offensive, Paris, La Découverte, 1998 (ISBN 2-7071-2877-5)
- La Couleur et le Sang : doctrines racistes à la française, Paris, Mille et une nuits, « Les petits libres », 1998 ; rééd. augmentée et refondue, Mille et une Nuits, « Essai », 2002 (ISBN 2-84205-640-X)
- (avec Grégoire Kauffmann et Michaël Lenoire, dir.), L'Antisémitisme de plume (1940-1944) : la propagande antisémite en France sous l'Occupation. Études et Documents, Paris, Berg International, « Pensée politique et sciences », 1999 (ISBN 2-911289-16-1)
- L’Effacement de l’avenir, Paris, Galilée, « Débats », 2000 (ISBN 2-7186-0498-0)
- Résister au bougisme. Démocratie forte contre Mondialisation techno-marchande, Paris, Mille et une nuits, « Essai », 2001 (ISBN 2-84205-584-5)
- Du progrès. Biographie d’une utopie moderne, Paris, EJL, « Librio », 2001 (ISBN 2-290-30864-1)
- Nationalismes en perspective, avec Gil Delannoi, Berg International, 2001 (ISBN 2-911-28937-4)
- La Nouvelle Judéophobie, Paris, Mille et une nuits, « Essai », 2002 (ISBN 2-842-05650-7)
- L'Illusion populiste : de l'archaïque au médiatique, Paris, Berg International, « Pensée politique et sciences sociales », 2002 ; rééd. revue et augmentée et précédée d'une nouvelle préface, sous le titre : L'Illusion populiste. Essais sur les démagogies de l'âge démocratique, Paris, Flammarion, « Champs », 2007 (ISBN 978-2-08-120365-5)
- (dir.), Le Retour du populisme. Un défi pour les démocraties européennes, Paris, Encyclopædia Universalis, « Le tour du sujet », 2004 (ISBN 2-85229-780-9)
- Le Sens du progrès. Une approche historique et philosophique, Paris, Flammarion, « Champs », 2004 ; 2006 (ISBN 2 08 080167 8)
- Prêcheurs de haine. Traversée de la judéophobie planétaire, Paris, Mille et une nuits, « Essai », 2004 (ISBN 2842057201)
- La République enlisée. Pluralisme, Communautarisme et Citoyenneté, Paris, Éditions des Syrtes, 2005 (ISBN 2-84545-092-3)
- La foire aux illuminés : ésotérisme, théorie du complot, extrémisme, Paris, Éditions Mille et Une Nuits, coll. « Essai », , 612 p. (ISBN 2-84205-925-5, présentation en ligne).
- L'Imaginaire du complot mondial. Aspects d'un mythe moderne, Paris, Mille et une nuits, 2007 (ISBN 2-84205-980-8)
- Les Contre-réactionnaires : le progressisme entre illusion et imposture, Paris, Denoël, 2007 (ISBN 978 2 20725321 2)
- La Bioéthique ou le juste milieu. Une quête de sens à l'âge du nihilisme technicien, Paris, Fayard, « Essais », 2007 (ISBN 2-213-62723-1)
- Julien Freund, au cœur du politique, Paris, La Table ronde, 2008 (ISBN 2-710-32947-6)
- La Judéophobie des Modernes : des Lumières au Jihad, Paris, Odile Jacob, , 686 p. (ISBN 978-2-7381-1736-6, présentation en ligne).
- La Nouvelle Propagande antijuive. Du symbole al-Dura aux rumeurs de Gaza, Paris, PUF, 2010 (ISBN 2130575765)
- « Aux origines du slogan : “Sionistes assassins !”, le mythe du meurtre rituel et le stéréotype du Juif sanguinaire », in Les Études du CRIF, no 20,
- Israël et la question juive, Paris, Les Provinciales, 2011
- Wagner contre les juifs, 2012
- Court traité de complotologie, Paris, Mille et une nuits, 2013
- Dictionnaire historique et critique du racisme, Pierre-André Taguieff (dir.), Paris, PUF, 2013 (ISBN 978-2-13-055057-0)
- Du diable en politique. Réflexions sur l'antilepénisme ordinaire, Paris, CNRS, 2014 (ISBN 978-2271080639)
- La revanche du nationalisme : Néopopulistes et xénophobes à l’assaut de l’Europe, Paris, PUF, (présentation en ligne, lire en ligne)
- Des Putes et des Hommes. Vers un ordre moral androphobe, Paris, Éditions Ring, 2016
- Céline, la race, le juif. Légende littéraire et vérité historique, avec Annick Duraffour, Paris, Fayard, 2017 (ISBN 2213700494)
- L'islamisme et nous. Penser l'ennemi imprévu, CNRS éditions, 250 p, 2017 (ISBN 978-2-271-11460-0).
- Macron : mirage ou miracle ?, éditions de l'Observatoire, 2017, 362 p.
- « Race » : un mot de trop ?, CNRS éditions, 2018
- Avec Annick Duraffour, Céline contre les Juifs ou L'École de la haine, Paris, Conseil représentatif des institutions juives de France, coll. « Études du CRIF », no 48, 2018, 56 p. (lire en ligne)
- Le Grand abandon : les élites françaises et l'islamisme, Yves Mamou, Pierre-André Taguieff (préf.), Paris, L'Artilleur, 2018 (ISBN 9782810008353)
- L'Émancipation promise : Exigence forte ou illusion durable ?, Paris, Éditions du Cerf, 2019 (ISBN 978-2-204-10629-0)
- Criminaliser les Juifs : le mythe du meurtre rituel et ses avatars (antijudaïsme, antisémitisme, antisionisme), Paris, Hermann, 2020, (ISBN 979-10-370-0228-0)
- Hitler, les Protocoles des sages de Sion et Mein Kampf : antisémitisme apocalyptique et conspirationnisme, Paris, PUF, coll. « Hors collection / Histoire et art », , 255 p. (ISBN 978-2130824923).
- L'imposture décoloniale : Science imaginaire et pseudo-antiracisme, Paris, Éditions de l'Observatoire, 2020 (ISBN 979-10-329-1414-4).
- La pandémie par-delà les peurs : réinventer l'état-nation ?, Éditions de l'Observatoire, 2020.
- Liaisons dangereuses : Islamo-nazisme, islamo-gauchisme, Hermann, , 120 p. (ISBN 979-1-0370-0697-4).
- L'antiracisme devenu fou : le "racisme systémique" et autres fables, Paris, Hermann, coll. « Questions sensibles », , 299 p. (ISBN 979-1-0370-1015-5).
- Les nietzschéens et leurs ennemis : pour, avec et contre Nietzsche, Paris, Les éditions du Cerf, 2021, 490 p. (ISBN 978-2-204-14265-6)[59]
- Qui est l'extrémiste ?, Paris, Intervalles, coll. « Le Point sur les idées », , 164 p. (ISBN 978-2-36956-317-4).
- Pourquoi déconstruire ? : Origines philosophiques et avatars politiques de la French Theory, Paris, H&O, , 288 p. (ISBN 978-2845474000).
- Le grand remplacement ou la politique du mythe : généalogie d'une représentation polémique, Paris, Éditions de l'Observatoire, coll. « Essais », , 336 p. (ISBN 979-10-329-2615-4, présentation en ligne).
- Le Nouvel Âge de la bêtise, L'Observatoire, 2023.
- Le Nouvel Opium des progressistes, Gallimard, coll. « Tracts », , 64 p. (ISBN 9782073063243)
- « Le méga-pogrom jihadiste du 7 octobre 2023 : origines et modes d'emploi », Cités, vol. 1, no 97, , p. 203-213 (lire en ligne )
- Sous la dir. Daniel Salvatore Schiffer, L'humain au centre du monde - Pour un humanisme des temps présents et à venir. Contre les nouveaux obscurantismes, 2024, Éditions du Cerf, 392 pages. Co-auteur.
Distinctions
modifier- 1992 : prix Bernard-Lecache[60].
Notes et références
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- Alexandra Schwartzbrod, « Le chant retrouvé », Libération, .
- Par exemple, il consacre en 1983 un article au sujet du GRECE, de la Nouvelle Droite et de leur stratégie idéologique et politique à travers la figure d'Antonio Gramsci : Taguieff, Pierre-André, « Le retournement du gramscisme », Politique aujourd'hui, 1, juillet-sept 1983, pp 75-92
- La Force du préjugé, III-10 : « De l'antiracisme : type idéal, corruption idéologique, effets pervers ».
- Sur cairn.info.
- Emmanuel Lemieux, Pouvoir intellectuel, les nouveaux réseaux, Paris, Éditions Denoël, 2003, p. 536.
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- (Vincent Geisser, La nouvelle islamophobie, La Découverte, 2003, 122 p. (ISBN 9782707140609) p. 43 et suiv.)
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- Vincent Geisser, La nouvelle islamophobie, La Découverte, 2003, 122 p. (ISBN 9782707140609) p. 43 et suiv.
- Voir notamment Mouloud Haddad, « Vincent Geisser, La nouvelle islamophobie », Archives de sciences sociales des religions, no 134, , Lire en ligne.
- « Notice bibliographique de Les nietzschéens et leurs ennemis (2021) », sur Bibliothèque nationale de France (consulté le )
- Voir sur crif.org.
Voir aussi
modifierBibliographie
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- (en) Christopher Flood, « National republican politics, intellectuals and the case of Pierre-André Taguieff », dans Modern & Contemporary France, vol. 12, no 3, 2004, p. 353-370
- Manuel Diatkine, Pierre-André Taguieff, l´Antiracisme en débat, Paris, l´Harmattan, 2019, préface de Dominique Schnapper (ISBN 978-2-343-18142-4)
- Vincent Geisser, La Nouvelle Islamophobie, Paris, La Découverte, « Sur le vif », 2003 (ISBN 2707140600)
- Emmanuel Lemieux, Pouvoir intellectuel : les nouveaux réseaux, Paris, éd. Denoël, 200 (ISBN 2207250504), p. 523-540, à propos de l’affaire des « vigilants »
- Pierre Milloz, L'Immigration, rapport Milloz II : réplique à Pierre-André Taguieff et à Michèle Tribalat, Paris, Éditions Objectif France, 1999
- Emmanuel Poncet, « L'anti-anti portrait de Pierre-André Taguieff », dans Libération, mardi
- Élisabeth Schemla et Pascal Boniface, Halte aux feux antisémitisme, médias, islamophobie, communautarisme, banlieues…, Paris, Flammarion, 2006 (ISBN 2080690094), sur la « nouvelle judéophobie »
- Guillaume Weill-Raynal, Une haine imaginaire ? Contre enquête sur le « nouvel antisémitisme », Paris, Armand Colin, 2005 (ISBN 2-200-26912-9)
- Sébastien Fontenelle, La Position du penseur couché : répliques à Alain Finkielkraut, Paris, Éditions Privé, 2007 (ISBN 2350760294)
- « Universalisme et racisme évolutionniste », propos recueillis par Nicolas Bancel, dans Hommes et migrations, no 1207, mai
- Elisabeth Kosellek, « Prêcheurs de Haine : entretien avec Pierre-André Taguieff », Centre de recherches politiques de Sciences Po, (lire en ligne [PDF])
- Annick Duraffour (dir.), Philippe Gumplowicz (dir.), Grégoire Kauffmann (dir.), Isabelle de Mecquenem (dir.) et Paul Zawadzki (dir.), La Modernité disputée : textes offerts à Pierre-André Taguieff, Paris, CNRS Éditions, , 784 p. (ISBN 978-2-271-12952-9, présentation en ligne).
- Edwy Plenel, L'appel à la vigilance : Face à l'extrême droite, Paris, La découvert, 2023, pp.75-80
Articles connexes
modifier- Antisionisme
- Antipopulisme
- Communautarisme
- Histoire des idées
- Polémiques autour de l'altermondialisation
- Théorie du complot juif
Liens externes
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- Ressources relatives à la recherche :
- Ressource relative à plusieurs domaines :
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :
- « « La théorie du complot » en version France Culture (par P.-A. Taguieff, savant) », par Patrick Champagne et Henri Maler pour Acrimed,