Pères de l'Église
Les Pères de l'Église sont, selon l'historiographie moderne et depuis le XVIe siècle, des auteurs ecclésiastiques, généralement (mais non exclusivement) des évêques, dont les écrits (appelés littérature patristique), les actes et l'exemple moral ont contribué à établir et à défendre de multiples aspects de la doctrine chrétienne. Ceux-ci restent « modelés jusqu'à ce jour par l’exégèse patristique »[1].
Ceux que le Henri de Lubac appelle « nos pères dans la foi » sont des personnages qui satisfont à quatre exigences de l'Église (« notes ») :
- avoir appartenu à la période de l'Église antique (avant le VIIIe siècle) avant que les auteurs scolastiques ne leur succèdent ;
- avoir mené une sainte vie ;
- avoir écrit une œuvre complètement exempte d'erreurs doctrinales, et qui doit constituer une excellente défense de la doctrine chrétienne ou en être une illustration ;
- avoir bénéficié de l'approbation implicite ou explicite de l'Église.
Les auteurs classés comme « hérétiques », comme Arius ou Marcion, ou « schismatiques », comme Novatien, ne font donc pas partie des Pères de l'Église, de même que certains poètes (comme Prudence) ou historiens (comme Grégoire de Tours), auteurs chrétiens d'ouvrages qui ne sont pas dogmatiques. Les fondements de la foi ont été établis grâce à des formations de ces Pères dans des écoles théologiques ( celles d'Antioche ou d'Alexandrie)[2].
On range fréquemment avec les Pères de l'Église certains auteurs importants comme Origène dont l'étude est indispensable aux spécialistes. Ce sens large de l'expression, qui définit un domaine d'étude, peut être dit scientifique ou universitaire ; il a présidé à l'établissement de la liste ci-dessous.
On peut classer les Pères de l'Église selon leur époque (apostoliques), la nature de leurs écrits (apologistes), le style de leur pensée (orientaux ou occidentaux, de l'école d'Alexandrie ou de celle d'Antioche), leur langue (latine, grecque ou syriaque), leur milieu de vie (l'empire chrétien)...
Position des Églises sur les PèresModifier
Contrairement à la liste des Docteurs de l'Église, celle des Pères de l'Église n'est pas « officiellement » établie par les Églises.
L'Église catholique a tendance à assigner un terme à une « période patristique » et à considérer Jean Damascène et Isidore de Séville comme les derniers Pères.
L'Église orthodoxe ne voit pas les choses de la même façon et estime que la paternité ne suppose pas obligatoirement l'antiquité. Elle estime de plus qu'un Père n'est pas forcément un écrivain. Elle a tendance à considérer comme Pères de l'Église les Pères du désert et les grands instituteurs de la vie monastique car leur travail d'ascèse de direction spirituelle est éminemment doctrinal.
Les Pères anténicéens (jusqu'en 325)Modifier
Les Pères apostoliquesModifier
- l'auteur de la Didachè - (Ier siècle)
- saint Clément de Rome - (? - 101)
- saint Ignace d'Antioche - (? - entre 105 et 135)
- l'auteur de la Lettre de Barnabé - (vers 130/132)
- Hermas, auteur du Pasteur - (entre 130 et 140)
- Papias de Hiérapolis - (? - v. 140)
- saint Polycarpe de Smyrne - (? - entre 155 et 167)
Les Pères du IIe siècleModifier
Les apologètes
- Aristide d'Athènes - (v. 130/140 - ?)
- saint Justin Martyr - (? - 165)
- Athénagore d'Athènes - (v. 180 - ?)
- Tatien le Syrien - Disciple de Justin - (av. 155 - ap. 172)
- Méliton de Sardes - (v. 160/170 - ?)
- Théophile d'Antioche - (v. 180 - ?)
- l'auteur de l'Épître à Diognète - (entre 140 et 200)
La littérature anti-hérétique
- saint Irénée de Lyon - évêque de Lyon - (v. 140 - 208)
- saint Hippolyte de Rome - (v. 170 - v. 235)
Les Pères du IIIe siècleModifier
Pères grecs
- Origène (°185 - +254) (n'a pas fait l'objet du consensus ecclésiastique)
- Clément d'Alexandrie (° vers 150 - + vers 220)
- Denys d'Alexandrie (°? - +264/265)
- Pierre d'Alexandrie (°? - +311)
- Méthode d'Olympe
Pères latins
- Tertullien (° vers 155 - + après 220) (n'a pas fait l'objet du consensus ecclésiastique)
- Minucius Félix (° vers 200 - + ?)
- Cyprien de Carthage (° vers 200 - +258) ; saint fêté le 16 septembre
- Lactance (°vers 260 – + vers 325), appelé aussi le Cicéron chrétien.
L'âge patristique (325-451)Modifier
Pères opposés à l'arianismeModifier
- Eustathe d'Antioche - (230 - 327 ou 330)
- saint Cyrille de Jérusalem - Docteur de l'Église (? - 387)
- Alexandre d'Alexandrie - (? - 328)
- saint Athanase d'Alexandrie - Docteur de l'Église (v. 296 - 373)
- saint Didyme l'Aveugle - (313 - 398)
- saint Hilaire de Poitiers - (315 - 367)
- Marius Victorinus - (? - ap. 362)
- saint Ambroise de Milan - Docteur de l'Église (339 - 394)
Pères cappadociens et Jean ChrysostomeModifier
- saint Basile de Césarée ou Basile le Grand - Docteur de l'Église (330 - 379)
- saint Grégoire de Nazianze le Théologien - Docteur de l'Église (329 - 390)
- saint Grégoire de Nysse le Mystique - (335 - 394)
- saint Jean Chrysostome - Docteur de l'Église, patriarche de Constantinople (345 - 407)
Autres Pères de l'époque des 2e, 3e et 4e conciles (Ve siècle)Modifier
Pères grecs
- saint Cyrille d'Alexandrie - Docteur de l'Église, le « sceau des Pères » - (v. 380 - 444)
- saint Épiphane de Salamine (+ 403), répertoire des hérésies.
Pères latins
- Rufin d'Aquilée - (? - 410)
- saint Jérôme - Docteur de l'Église (v. 347 - 420)
- saint Paulin de Nole, évêque (v.353-431)
- saint Ambroise de Milan, évêque (v.340 - 397)
- saint Augustin - Docteur de l'Église, évêque d'Hippone - (354 - 430)
- saint Jean Cassien - (v. 360 - v. 435)
- saint Vincent de Lérins, (Ve siècle).
- saint Sulpice-Sévère - (vers 400)
- saint Léon le Grand - Pape, Docteur de l'Église - (406 - 461)
Pères syriens
- saint Éphrem le Syrien (+ 379),
- Diodore de Tarse - (? - av. 394)
- Théodoret de Cyr - (? - v. 466)
Les Pères de tradition chalcédonienne (après 451)Modifier
Pères grecs antérieurs à la crise iconoclaste
- le Pseudo-Denys l'Aréopagite (fin Ve siècle).
- saint Sophrone de Jérusalem (+ 644), patriarche.
- saint Maxime le Confesseur - moine byzantin, théologien mystique - (v. 580 - 662).
Pères grecs défenseurs des saintes images
- saint Germain de Constantinople (+ 740).
- saint Jean Damascène (v. 675 - 749), Docteur de l'Église.
- saint Théodore Studite (+ 826).
Pères latins
- saint Eucher de Lyon (?- 449/455?)
- Boèce - le Philosophe - (480 - 524)
- saint Grégoire le Grand - Pape, Docteur de l'Église (540 - 604)
- saint Isidore de Séville - Docteur de l'Église (v. 560 - 636)
Les Pères propres à une seule confession chrétienneModifier
Les Pères propres à l'Église orthodoxe
- saint Photius de Constantinople (+ 891).
- saint Théophylacte d'Ochrid (XIIe siècle)
- saint Grégoire Palamas (XIVe siècle).
- saint Marc d'Éphèse (XVe siècle).
Les théologiens du Moyen Âge propres à l'Église catholique
- Jean Scot Erigène - théologien et philosophe latin d'origine irlandaise - (v. 810 - v. 870), selon certains, le dernier des Pères de l'Église [réf. nécessaire]
- saint Bernard de Clairvaux - Docteur de l'Église ; selon certains, le dernier des Pères de l'Église (1090 - 1153)
Les Pères propres à l'Église non-chalcédonienne
- Sévère d'Antioche (456 - 538)
- Jacques de Saroug (vers 450 - vers 521)
- Jacques d'Édesse (vers 633 - 708)
Les Pères propres à l'Église de l'Orient
- Théodore de Mopsueste - (? - 428)
- Narsaï - (av. 437 - 503)
IconographieModifier
L'iconographie occidentale représente ensemble quatre Pères de l'Église latine :
NoteModifier
- Charles Kannengiesser, « La Bible dans l’Eglise ancienne. Nature et présupposés de l’exégèse patristique », Concilium, no 233, , p. 52.
- Une distinction trop stricte est faite dans l'herméneutique patristique entre l'école alexandrine, axée sur l'allégorie, et celle d'Antioche, dénonçant une allégorie excessive et privilégiant davantage le sens historique et la typologie. Cf. (en) Tad W. Guzie, « Patristic Hermeneutics and the meaning of Tradition », Theological Studies, vol. 32, no 2, , p. 647.
Voir aussiModifier
Articles connexesModifier
- Patristique
- Docteur de l'Église
- Sources chrétiennes
- Liste de théologiens chrétiens (pour les époques ultérieures)
- Clavis Patrum Græcorum, Patrologia Graeca, Chronicon Paschale
BibliographieModifier
- Berthold Altaner, Précis de Patrologie, Salvator, Toulouse, 1961.
- Johannes Quasten, Initiation aux Pères de l'Église, 3 vol., Éditions du Cerf, Paris, 1957 à 1962.
- Hans von Campenhausen (en), Les Pères grecs et Les Pères latins, éditions de l'Orante, coll. « Livre de vie », Paris, 1963.
- Jean-Marie Auwers, La lettre et l'esprit. Les Pères de l'Église, lecteurs de la Bible, coll. Connaître la Bible, no 28, Bruxelles, Lumen Vitae, 2002, 80 p. (ISBN 2-87324-185-3).
- Jean Laporte, Les Pères de l'Église - I - Les Pères latins, II - Les Pères grecs, Paris, Éditions du Cerf, .
- Michel Fédou, Les Pères de l'Église et la Théologie chrétienne, Édition facultés jésuites de Paris, 352 p.
- Michel Fédou, La Voie du Christ II ; Développement de la christologie dans le contexte de l'Orient ancien ; d'Eusèbe de Césarée à Jean Damascène (IVe – VIIIe siècle) ; Éditions du Cerf , 670 pages.