Origine des roumanophones

analyse

L’origine des roumanophones et même leur définition actuelle sont sujets, dans les sciences historiques, humaines et linguistiques, à des controverses découlant de deux problématiques :

  • la politique depuis le XIXe siècle, qui oriente et instrumentalise les recherches en fonction des enjeux liés à l’émergence de l’État roumain et aux oppositions suscitées par cette émergence dans les empires voisins, notamment habsbourgeois et russe, produisant des théories contradictoires et une profusion de sources biaisées ;
  • la méthodologie historique, qui, si on s’en tient exclusivement aux sources écrites (rares et sujettes à interprétations entre le IVe siècle et le XIIIe siècle), produit l’« illusion documentaire » d’une « disparition durant mille ans » des locuteurs des langues romanes orientales suivie d’une « mystérieuse et miraculeuse réapparition »[1].

Le résultat de ces controverses est qu’à quelques exceptions près[2], la plupart des ouvrages historiques actuels pour le grand public omettent de mentionner l’existence de ce groupe linguistique entre la fin de l’Empire romain et l’émergence de la Roumanie moderne ; les plus sérieux mentionnent parfois l’existence des principautés médiévales de Moldavie et Valachie. Toutefois, l’existence, la structure et le lexique de la langue roumaine ainsi que la répartition géographique des romanophones en Europe du Sud-Est, rendent absurde la réfutation du lien linguistique de ces locuteurs avec les populations romanisées par l’Empire romain dans la péninsule des Balkans et le bassin du bas-Danube[3] : c’est pour cela que les controverses portent moins sur leur existence, que sur l’étendue des territoires où leur évolution s’est déroulée[4]. Faisant fi du nomadisme pastoral qui, de l’avis général des historiens, des ethnologues et des linguistes, fut jusqu’à la fin du Moyen Âge une occupation essentielle des romanophones orientaux[5], ces controverses opposent des aires d’évolution tantôt très étendues allant de la Moravie à l’Ukraine et à la Grèce[6], tantôt très restreintes, localisées par exemple uniquement dans l’actuel județ de Teleorman en Valachie centrale[7].

Définition d’un roumanophone modifier

 
Les langues paléo-balkaniques.
 
En bleu, la Dacie trajane et la Mésie, en rose les régions des « Daces libres ».
 
La ligne Jireček.
 
Dans l'imaginaire des Roumains, les ressemblances entre Daces antiques et ancêtres du XIXe siècle nourrissent la certitude d'une « continuité autochtone ».
 
Un cocher valaque dessiné par Dieudonné Lancelot au milieu du XIXe siècle (la légende de l'image le désigne comme « paysan mâle »).
 
L'évolution des langues romanes orientales parmi les autres langues d'Europe du Sud-Est, avec les trois phases de la formation, de la cohabitation et de la séparation.
 
Paysanne valaque dessinée par Dieudonné Lancelot au milieu du XIXe siècle
 
Selon les études linguistiques sur l'origine du roumain et de l'albanais, la romanisation des Daces et des Thraces s'est faite à cheval sur le bas-Danube, et celle des Illyriens en Dalmatie, en deux processus séparés qui ont donné au IVe siècle d'un côté les Dalmates (zone rose) et de l'autre les Proto-Roumains qui, au IXe siècle se sont séparés en Aroumains (petite zone violette) et en Dacoroumains (grande zone violette), tandis que les Daces non-romanisés (Carpes : zones bleues) migrèrent vers la péninsule des Balkans lors des invasions des Goths, des Huns et des Gépides, devenant les ancêtres des Albanais (zone orange), ce qui expliquerait le lexique commun au roumain et à l'albanais.
 
Vatra străromână (l'aire d'origine du proto-roumain) d'après Mircea Cociu : Spațiul etnic românesc, ed. Militară, Bucarest 1993, (ISBN 973-32-0367-X), se référant aux études de Jireček, Petrović, Popp, Pușcariu et Rosetti.
 
Illustrant la version le plus extrême des thèses migrationnistes nord-sud, cette carte yougoslave n'admet comme unique foyer des langues romanes orientales (en vert) que le Sud de la Transylvanie, en dépit de la toponymie et des chroniques.
 
Les roumanophones (« îlots valaques ») en Europe en 850, d'après Anne Le Fur : cette carte fait la synthèse des positions scientifiques actuelles.
 
La dispersion linguistique des Valaques dans les Balkans et les Carpates.
 
Les chemins traditionnels de transhumance des Valaques.
 
L'aire de répartition des roumanophones au nord du Danube avant le XIIIe siècle.
 
Le roumain comme langue officielle en 2011, seul ou avec d'autres langues.

Selon le Droit du sol, un Roumain est un citoyen de la Roumanie, roumanophone ou non. Un roumanophone est un locuteur du roumain, citoyen de la Roumanie ou non. C’est l’ensemble « roumanophone » (terme forgé par les ethnologues et les linguistes) qui fait l’objet de cet article.

Développement de la conscience de former un même peuple modifier

Avant de devenir explicite, la conscience de former un même peuple parmi les roumanophones était implicite et liée à leur langue commune et à la legea strămoșească (λеџѣ стръмошѩскѣ, « droit ancestral », en latin jus valachicum ou « droit valaque ») qui fixait les droits, devoirs, privilèges et spécificités juridiques des communautés valaques initialement pastorales de l’Europe centrale et orientale médiévale, dirigées par des joupans et des boyards. Aux XIe et XIIe siècles, on trouve dans le bassin du bas-Danube et dans les Balkans ce que les sources byzantines appellent en grec des ϐλαχίες : valachies, communautés populaires romanophones de l'Europe du Sud-Est gouvernées par la noblesse roumaine, entre lesquelles s'intercalent les sklavinies des Slaves méridionaux[8]. Dans ces régions, le terme « valaque » désignait initialement les communautés romanophones appelées « valachies »[9], mais depuis l’installation parmi elles de « sklavinies » slaves à partir du VIe siècle, qui a abouti à la slavisation linguistique d’une partie de ces communautés pastorales, le terme « valaque » a fini par désigner indistinctement tout berger orthodoxe au XVIIIe siècle, qu’il soit romanophone (cas majoritaire en Hongrie orientale et en Transylvanie) ou slavophone (cas majoritaire dans les Balkans)[10],[11],[12],[13].

Pour autant, ce terme de « valaque » n’était qu’un exonyme (nom donné par les non-roumanophones) ; l'endonyme « Roumain » (par lequel les roumanophones se désignaient eux-mêmes) est explicitement attesté au XVIe siècle, alors que des humanistes italiens rendent compte de leurs voyages en Transylvanie, Valachie et Moldavie. Ainsi, Tranquillo Andronico écrit en 1534 que les Roumains (Valachi) « s’appellent eux-mêmes Romains »[14]. En 1532 Francesco della Valle accompagnant le gouverneur Aloisio Gritti à travers la Transylvanie, Valachie et Moldavie note que les « Roumains » ont préservé leur nom de « Romains » et qu'« ils s’appellent eux-mêmes Roumains dans leur langue ». Il cite même une phrase en roumain : « Sti rominest ? » (« sais-tu roumain ? », en roumain : știi românește ?)[15], Ferrante Capeci écrit vers 1575 que les habitants de ces provinces s’appellent eux-mêmes Roumains (Romanesci)[16], tandis que Pierre Lescalopier remarque en 1574 que « Tout ce pays la Wallachie et Moldavie et la plupart de la Transilvanie a esté peuplée des colonies romaines du temps de Trajan l’empereur… Ceux du pays se disent vrais successeurs des Romains et nomment leur parler romanechte, c’est-à-dire romain… »[17]

D’autres témoignages sur le nom que les roumanophones se donnaient eux-mêmes, viennent des intellectuels ayant connu de très près ou vécu parmi eux. Ainsi le Saxon transylvain Johann Lebel note en 1542 que les Roumains se désignent eux-mêmes sous le nom de Romuini[18], alors que le chroniqueur polonais Stanisław Orzechowski (Orichovius) observe en 1554 qu’« en leur langue les Roumains s’appellent Romin, selon les Romains et Valaques en polonais, d’après les Italiens»[19], le Dalmate Antonio Veranzio (ou Anton Verancić) remarque vers 1570 que « les gens vivant en Transylvanie, Moldavie et Valachie se nomment eux-mêmes Romains »[20] et le hongrois transylvain Martin Szent-Ivany cite en 1699 les expressions roumaines Sie noi sentem Rumeni (« nous aussi, nous sommes roumains », en roumain : Și noi suntem români) et Noi sentem di sange Rumena (« nous sommes de sang roumain », en roumain : Noi suntem de sânge român)[21].

Les documents historiques présentent deux graphies du mot « roumain » : « român » et « rumân ». Durant plusieurs siècles, les deux formes coexistent et sont employées d’une manière interchangeable, parfois dans le même document[22].

Au Moyen Âge, qui pour les roumanophones est un âge pastoral, la dénomination ethnolinguistique rumân/român signifiait aussi « roturier ». En effet, l’aristocratie des pays à majorité roumanophone (joupans, cnèzes, boyards, voïvodes, hospodars et autres comtes, ducs et princes) était soit d’origine étrangère, soit de culture étrangère (slavonne au début, magyare ou hellénique ensuite, française au siècle des Lumières). En Transylvanie, la quasi-totalité de la noblesse roumaine est devenue hongroise au fil des siècles, et ceux qui s’y sont refusés ont du passer en Moldavie et Valachie, où la noblesse s’est en partie hellénisée, notamment à l’époque phanariote. Lorsque l’institution du servage connaît une extension significative, pendant les XVIIe et XVIIIe siècles, la forme rumân finit par identifier le sens de « serf », tandis que la forme român garda son sens ethnolinguistique[23]. Après l’abolition du servage par le Prince Constantin Mavrocordato en 1746, le mot rumân, restant sans objet socio-économique disparaît graduellement alors que la forme român, românesc s’établit définitivement[24].

Le nom de la Valachie est en roumain Țara Românească (anciennement aussi Ца́ра Рȣмѫнѣ́скъ en cyrillique roumain, translittéré Țara Rumânească), signifiant pays roumain. Le plus ancien document connu en roumain attestant la dénomination « Pays roumain » est une lettre, — la Lettre de Neacșu — écrite en 1521 au maire de Brașov pour le mettre en garde contre les mouvements des Ottomans au sud du Danube. Dans ce texte roumain, la principauté nommée par les étrangers « Valachie » est appelée « Pays roumain » (Ца́ра Ромѫнѣ́скъ en cyrillique roumain, translittéré Țara Românească).

En Transylvanie, après l’échec de la jacquerie de Bobâlna en 1438 et la constitution de l’« Union des trois nations », le jus valachicum disparaît progressivement et la noblesse roumaine n’a que trois issues : s’intégrer à la noblesse hongroise en passant à la langue magyare et au catholicisme comme l’y incite l’édit de Turda du roi Louis Ier de Hongrie en 1366 (grofia), s’exiler en Moldavie ou Valachie (descălecarea), ou perdre tous leurs droits et tomber en servitude (iobăgia)[25]. Ce phénomène va accélérer une prise de conscience explicite de former un même groupe relié par la langue, même si dans l’Empire des Habsbourg, les « statuts des Valaques » (latin : statuta Valachorum) promulgués en 1630, concernaient tous les régiments de garde-frontières, les pandoures et les fermiers orthodoxes des « Confins militaires » qu’ils fussent roumanophones ou non[26], ainsi que des communautés pastorales, initialement orthodoxes et de langues roumaine et ruthène, vivant dans les Carpates et finalement passées au catholicisme et, le plus souvent, aux langues polonaise, tchèque ou ukrainienne (comme les Gorales, les Moravalaques et les Houtsoules)[27],[28].

L’Empire des Habsbourg absorbe la Transylvanie en 1699. Dans ce pays, au XVIIe siècle, lors de la mise en place des « Confins militaires » habsbourgeois, seul le comté de Fogaras et quelques joupanats comme Almaj, Amlaș, Gurghiu, Lăpuș, Năsăud, Zărnești ou les pays des Motses et d’Oaș étaient encore régis par le jus valachicum, mais à ce moment la conscience commune s’était déjà constituée et c’est pourquoi les Valaques transylvains réclament en 1784 son rétablissement sous une forme actualisée, et se révoltent. Cette révolte échoue et les dernières traces de jus valachicum disparaissent, mais sont relayées par les statuts des Valaques de la Transylvanie militaire, qui disparaissent à leur tour en 1867 en même temps que la Grande-Principauté transylvaine[29], alors totalement intégrée au royaume de Hongrie. La conscience commune des roumanophones commence alors à intégrer alors de revendications sociales voire territoriales sur le « territoire ethnolinguistique roumain ». Parmi les premières références explicites à un « territoire ethnolinguistique roumain » comprenant la Valachie, la Moldavie et la Transylvanie on trouve l’ouvrage « De la nation des Moldaves » du chroniqueur Miron Costin au XVIIe siècle[30].

Au XVIIIe siècle, le prince érudit Dimitrie Cantemir désigne d’une manière systématique les trois principautés habitées par les roumanophones (La Moldavie, La Transylvanie et la Valachie) sous le nom de « Pays roumain » (Țara Românească)[31]. Le nom « Roumanie » (România) dans son acception moderne apparaît pour la première fois dans un ouvrage datant de 1816 publié à Leipzig, de l’érudit grec Dimitrios Daniel Philippidès[32]. Il semble que le nom était déjà entré dans le langage courant au début du XIXe, puisque sur la pierre tombale de Gheorghe Lazăr à Avrig en 1823 on peut lire « De même que Jésus a ressuscité Lazare, toi, tu as réveillé la Roumanie »[33]. En français, le journal Mercure de France de emploie pour la première fois l’expression « Valachie ou pays roumain » lorsqu’il présente le texte de la Constitution octroyée par le prince Constantin Mavrocordato en 1746. Mais ce sont Émile Ollivier, Edgar Quinet et Élisée Reclus qui imposeront définitivement en français courant, le nom de « Roumains » pour les roumanophones, à la place de « Valaques », de « Moldaves » et de leurs variantes (Moldovanes, Moldovans, Moldo-valaques, Wallachiens, Vélaces, Volokhs, Vlaques, Koutsovlaques, Zinzares...), dans un contexte où la France soutenait la constitution d’un « État tampon » et « tête-de-pont » francophile entre l’Autriche-Hongrie, la Russie et l’Empire ottoman. Après la généralisation de « Roumains » à l’international, l’exonyme « Valaques » (devenu parfois péjoratif, notamment en hongrois et dans les langues slaves du sud) a servi à désigner plus spécifiquement les romanophones vivant en Serbie, Bulgarie, Albanie, Macédoine et Grèce, et notamment les Aroumains.

Construction de la Roumanie et début des controverses modifier

Bien qu’elle soit combattue par les empires austro-hongrois et russe, la conscience de former un même groupe s’est progressivement développée au long du XIXe siècle chez l’ensemble des roumanophones, sous l’influence des instituteurs, des enseignants et des prêtres, qui formèrent l'École transylvaine et qui, au début du XXe siècle promurent l’existence d’un État roumain unitaire. Une fois celui-ci réalisé, cette conscience fut contestée et considérée comme une expression de l’« impérialisme roumain » par les Soviétiques, et à leur suite par les autorités post-soviétiques, qui ont imposé le terme « Moldaves » pour les Roumains de l’ex-URSS et pour leur langue.

Les controverses sont apparues à partir du moment où l’Empire des Habsbourg justifia l’annexion des provinces roumaines d’Olténie et de Bucovine en invoquant le statut de terra nullius pour ces « provinces danubiennes » peuplées de chrétiens non-catholiques (dits « schismatiques ») tributaires de l’Empire ottoman musulman[34]. Les auteurs roumanophones réfutèrent ce statut de terra nullius en invoquant l’histoire romaine et médiévale. Aux XVIIIe et XIXe siècles la renaissance culturelle roumaine finit par se cristalliser dans l’aspiration de vivre ensemble au sein d’un même État, la Roumanie, à former à partir des principautés de Moldavie et de Valachie (unies en 1859) mais aussi à partir des provinces à majorité roumanophone des Empires voisins : Dobrogée turque, Bessarabie russe, Transylvanie et Bucovine austro-hongroises. Les historiens de ces empires ont contesté les arguments des historiens roumains, usant abondamment de la méthode hypercritique et de l’axiome « absence de preuves vaut preuve d’absence » pour produire un grand nombre d’ouvrages et de cartes où la présence des Thraco-Romains, des protoroumains et autres locuteurs des langues romanes orientales entre 275 et 1275 est niée ou omise, de même que l’existence du XIVe siècle au XIXe siècle des principautés roumaines (figurées comme provinces turques sur leurs cartes). La controverse s’est poursuivie après que la Roumanie a obtenu satisfaction en 1918 à l’issue de la Première Guerre mondiale (qu’elle fit aux côtés de l’Entente franco-britannique), car les États issus de la désagrégation de l’Autriche-Hongrie (Hongrie) ou de la Russie (URSS) ont contesté les gains de la Roumanie et revendiqué les territoires dont elle s’était agrandie.

L’URSS à son tour a eu gain de cause en 1940 (ainsi que la Hongrie, mais celle-ci seulement pour une partie de ses revendications, et seulement pour quatre ans), ce qui n’a fait qu’alimenter les controverses jusqu’à nos jours, d’autant que si les États modernes n’ont plus de revendications territoriales, il n’en est pas de même de l’ensemble des opinions.

Controverse sur la définition modifier

La définition même d’un roumanophone est sujette à deux controverses, l’une linguistique, l’autre politique :

  • linguistiquement, si l’on considère que les quatre langages est-latins sont quatre langues à part entière (position de G. Giuglea, Alexandru Graur, Florin Constantiniu, Ion Coteanu, Neagu Djuvara...) un « roumanophone » est seulement un locuteur de la langue daco-roumaine, et cela en exclut les Aroumains, les Istro-Roumains et les Mégléniotes ; en revanche, si l’on considère qu’il s’agit de quatre dialectes d’une même langue (position de la plupart des historiens et linguistes roumains) cela les inclut ;
  • politiquement, l’émergence de la République de Moldavie lors de la division de l’URSS n’a pas abouti, comme dans les pays baltes, à une sortie de la sphère d’influence de la Russie ni à une intégration dans l’Union européenne : les russophones y sont toujours très influents, et leur partis[35] ont promulgué une constitution qui, par son article 13, rejette officiellement l’appartenance des latinophones de Moldavie à l’ensemble roumanophone, bien que l’Académie des sciences moldave admette que « le moldave et le roumain sont analogues »[36] et que la Cour constitutionnelle ait jugé en 2013 que la dénomination de « roumain », figurant dans la déclaration d'indépendance du pays, prime sur celle de « moldave »[37]. Dans ce pays, si un citoyen autochtone s'identifie comme « roumain », il s’exclut de la communauté nationale et est considéré comme issu d’une minorité ethnique. Cela a pour effet de diviser les Moldaves en deux groupes : ceux de Roumanie, qui peuvent s’identifier à la fois comme « Moldaves » et « Roumains », et ceux de l’ex-URSS, qui doivent choisir de s’identifier soit comme « Moldaves », soit « Roumains » (mais dans le second cas, les autorités les considèrent comme une minorité dans leur propre pays).

Controverses sur la zone géographique d’origine des roumanophones modifier

L’endroit où l’ethnogenèse des roumanophones eut lieu (vatra străromână) est lui-même sujet à controverses, dues au fait qu’entre la romanisation des Thraces/Daces et la première mention par le chroniqueur byzantin Georges Cédrène, au XIe siècle, du terme « Valaque », les sources écrites n’apportent pas d’information explicite sur ce sujet. En fait, on ne les appelait tout simplement pas encore « Valaques », car, pour les auteurs byzantins, ils étaient, comme les hellénophones, et les albanophones, inclus dans le terme générique de Ῥωμαίοι (« Romains ») donné à tous les habitants aborigènes de l’ancienne Ῥωμανία (l’Empire)[38]. Ce contexte a favorisé l’émergence d’hypothèses fantaisistes et non-documentées pouvant être groupées en deux catégories :

  • la première catégorie, initiée par Eduard Robert Rössler[39] développant les théories de Franz Josef Sulzer, Josef Karl Eder et Johann Christian von Engel, délégitime les revendications des roumanophones d’Autriche-Hongrie et a été largement adoptée par l’historiographie des empires et des pays voisins de la Roumanie ayant des contentieux territoriaux avec elle, mais aussi par de nombreuses sources germanophones et anglophones[40] ;
  • la seconde catégorie, en réaction à la première et initiée par Bogdan Petriceicu Hasdeu dans son livre Etymologicum magnum Romaniae, mais popularisée par l’historien Nicolae Densușianu (ro) dans sa Dacie préhistorique, relève d’une approche protochroniste et décrit sans la moindre preuve une « civilisation préhistorique pélasgique » allant de l’Atlantique à l’Oural, dont l’actuelle Roumanie aurait été le centre, qui serait à l’origine du latin (compté comme un dialecte dace), et dont le roumain serait la langue la mieux conservée jusqu’à nos jours sur une continuité de cinq millénaires.

Dans la réalité démontrable, si les « Valaques » ne descendent pas plus des « Pélasges » (mot grec ancien très polysémique) que des Centaures, ils n’ont pas pour autant pu apparaître par « génération spontanée » au XIIIe siècle, et aucune donnée scientifique ne corrobore l’hypothèse d’une « miraculeuse réapparition après mille ans d’absence ». Par conséquent, quelles que soient les controverses, le fait que les langues romanes orientales existent aujourd’hui implique que les formes anciennes de ces langues ont existé dans la région avant l’arrivée des Avars, des Slaves, des Bulgares et des Magyars, même si l’archéologie ou la toponymie sont discutées, et même s’il n’y a que très peu de mentions écrites (passages de Théophylacte Simocatta et de Théophane le Confesseur)[41].

Autochtonisme plurigénétique modifier

La plupart des historiens situent le foyer proto-roumain (roum. vatra străromână) au nord de la ligne Jireček, c’est-à-dire en Dacie (soit les régions antiques de Dacie aurélienne et trajane, de Mésie et de Scythie mineure, ou les régions actuelles du Banat, d'Olténie, de Transylvanie, de Bulgarie danubienne et de Dobroudja. C’est le cas de Theodor Capidan, A.D. Xenopol et Nicolae Iorga, qui ont pensé que la différenciation linguistique ultérieure en quatre dialectes ou langues :

Cette thèse plurigénétique de la continuité daco-romano-roumaine[43] est contestée en Roumanie même, où elle n’est diffusée ni dans les ouvrages scolaires ni dans ceux de vulgarisation, où domine la thèse monogénétique d’une ethnogenèse en Roumanie seulement et de migrations ultérieures et tardives à partir de cet unique foyer. Les historiens qui défendent la thèse plurigénétique, tels Florin Constantiniu, soulignent que les seules migrations de romanophones historiquement attestées, sont celles liées aux suites de la longue et sanglante guerre opposant l’empereur byzantin Basile II à la Bulgarie entre 975 et 1018. Il s’agit :

  • d’une part, d’un échange de populations qui, selon le chroniqueur byzantin Jean Skylitzès, aurait eu lieu entre l’Empire byzantin et le royaume slave de Grande-Moravie en 976 : une partie des Serbes de la Serbie blanche, dont les descendants actuels sont les Sorabes de l’Allemagne orientale, seraient alors venus s’installer dans le bassin d’un affluent du Danube, le Margos, qu’ils nommèrent Morava, tandis que les Valaques de cette région, ayant résisté à l’empereur Basile II qui avait confisqué leurs terres, seraient partis s’installer en Moravie septentrionale, où ils auraient formé la « Valachie morave »[44]. Mais sur place, en Moravie, il n’y a ni mention écrite, ni preuve archéologique d’une telle immigration, et surtout, sur le plan linguistique, le dialecte aujourd’hui slave des Valaques de Moravie, mélange des langues slovaque et tchèque, comprend un lexique latin plus récent, d’origine daco-roumaine lié au pastoralisme[45]. C’est pourquoi les spécialistes tchèques[46] pensent que les Valaques chassés de la vallée de la Margos comme le rapporte Skylitzès, ont plus probablement rejoint leurs congénères du Banat, de la Crișana et de Transylvanie comme le rapportent les chroniques du moine russe Nestor[47], et que c’est bien plus tard, du XVe siècle au XVIIe siècle, que des groupes de bergers roumains se sont installés en Moravie orientale ;
  • et d’autre part, de la fuite des Valaques de Bulgarie occidentale vers la Grèce, plus précisément vers la Thessalie alors appelée, pour un temps, « Grande Valachie » (Μεγάλη Βλαχία), l'Acarnanie appelée « Petite Valachie » (Μικρή Βλαχία)[48] et l'éparchie de Gortyne au centre du Péloponnèse[49].

Migrationnismes monogénétiques modifier

Une activité essentielle des Valaques durant la plus grande partie de leur histoire a été le pastoralisme transhumant nomade, traversant sans encombre les Carpates, le Grand Balkan, le Pinde, le Danube et tous ses affluents, tout comme l'ont fait également les peuples guerriers slaves, avars, bulgares ou magyars[50],[51],[52], mais ces migrations ont favorisé non seulement leur dispersion historique de part et d'autre de ces éléments géographiques, mais aussi, depuis le XIXe siècle, d'âpres controverses nationalistes entre les partisans de la théorie « A » (comme Awarenwüste ou « Désert des Avars ») selon laquelle jusqu'au XIIIe siècle, durant l'Antiquité tardive et le Haut Moyen Âge, les Valaques n'auraient vécu qu'au sud du Danube[53], et ceux de la théorie « B » (comme « Balkans ») selon laquelle les Valaques n'auraient vécu qu'au nord du Danube[54] ; dans les deux théories, le grand fleuve et les Carpates auraient été des frontières perméables pour les Slaves, les Bulgares et les Magyars, mais d'infranchissables obstacles pour les Valaques et pour eux seuls, l'absence de preuve indiscutable de leur présence valant preuve d'absence[55]. Le biais ainsi créé dans les sources secondaires, est que les Valaques auraient « disparu pendant mille ans » pour réapparaître « miraculeusement » XIIIe siècle[56].

Les deux théories migrationnistes monogénétiques « A » et « B » s’affrontent encore au XXIe siècle, biaisant les débats scientifiques :

  • La théorie « A » dite du « désert des Avars » provient de l'idée que ce peuple des steppes arrivé au VIe siècle aurait vidé de tout habitant sédentaire le territoire de la future Hongrie jusqu'à l'arrivée des Magyars au Xe siècle, de sorte que ceux-ci en auraient été les premiers occupants[57]. Elle domine l’historiographie hongroise et germanique qui conteste l’ancienneté des Roumains en Transylvanie, et l’historiographie soviétique et russe qui conteste l’ancienneté des roumanophones en Bessarabie (aujourd’hui République de Moldavie), affirmant que le proto-roumain n’était parlé initialement qu’au Sud du Danube, d’où les ancêtres des Roumains auraient immigré tardivement en Transylvanie et en Moldavie. Au XXe siècle, l’académie hongroise soutient toujours officiellement cette thèse[58]. Les arguments du migrationnisme « du Sud vers le Nord » (théorie « A » dite aussi « de Rössler ») sont :
    • la courte période d’occupation romaine de la Dacie (165 ans) ;
    • l’étendue limitée de la Dacie trajane qui n’inclut que la moitié de la Dacie (actuelles Transylvanie, Olténie, Banat, l’ouest de la Munténie et la Moldavie du Sud) ;
    • les récits des historiens Eutrope (livre IX, 15), Flavius Vopiscus et Sextus Rufus, relatant que l’empereur Aurélien a retiré de Dacie non seulement les garnisons et l’administration, mais aussi la population romaine ;
    • la conquête par la tribu dace des Carpes, venant de Moldavie, des zones abandonnées par les Romains ;
    • l’absence de documents écrits confirmant que des populations latinophones vivaient en Dacie durant la période intermédiaire entre le retrait romain et le Xe siècle ;
    • l’absence de traces incontestables d’influence germanique dans la langue roumaine, alors que, aux ve et VIe siècles, la Dacie est habitée par des tribus d'origine germanique.
  • La théorie « B » domine l'historiographie roumaine, serbe, macédonienne et bulgare qui n’admett pas que des populations romanes aient pu vivre dans les Balkans avant l’arrivée des Slaves, malgré quatre à six siècles de présence romaine, affirmant que ce sont les Valaques des Balkans qui sont issus d'ancêtres tardivement venus, de la Roumanie actuelle, au Sud du Danube, le Proto-roumain n’ayant pu être parlé qu’au Nord du Danube. Cette thèse quasi-officielle en Roumanie affirme que la conquête romaine de la Dacie en 106 a inauguré un processus de romanisation rapide et intense, les Daces adoptant le latin vulgaire des colons romains, vecteur de promotion sociale dans l’Empire, de la même façon que les Gaulois romanisés sont devenus gallo-romains pour les mêmes raisons. Cela permet aux historiens roumains d’affirmer que la Transylvanie a été habitée de façon continue par les ancêtres des Roumains actuels, et qu’il y ont fait preuve d’un tel dynamisme démographique, que leurs descendants sont descendus jusqu’en Grèce. Dans cette optique, les Valaques sud-danubiens descendent tous de bergers roumains venus des Carpates, mais cela heurte les thèses autochtonistes grecques selon lesquelles les Aroumains seraient en fait des Grecs latinisés. Les arguments du migrationnisme « du Nord vers le Sud » (théorie balkanique « B » dite « de l’origine dace ») sont :
    • l’importante colonisation romaine en Dacie, due à l’attrait des gisements d’or ;
    • le mélange de colons romains provenant des différentes parties de l’Empire, le latin vulgaire seul pouvant leur servir de langue véhiculaire, de la même façon que l’anglais s’est imposé aux États-Unis ;
    • les toponymes daces ont conservé, par exemple le nom de plusieurs rivières (Danube: Danubius/Dunăre ; Alutus-Olt; Samus-Someș, Maris-Mureș, Auraneus-Arieș, Porata/Pyretos-Prut), et le nom de certaines cités (Petrodava-Piatra Neamț, Abruttum-Abrud, Dava-Deva) ;
    • la ressemblance entre les vêtements daces et les habits traditionnels roumains, comme le montre la Colonne Trajane ;
    • comme Trajan en 106, Constantin Ier a porté le titre de Dacicus Maximus en 336, longtemps après le retrait d’Aurélien en 270-275 ;
    • la population romaine de Dacie, si même elle s’est partiellement retirée, n’est pas allée bien loin, mais sur l’autre rive du Danube, en Dacie ripense, d’où elle a continué à commercer avec la rive nord (où l’exploitation des salines et des orpaillages) comme en témoignent de nombreuses monnaies ;
    • les objets archéologiques au nord du Danube témoignant de l’usage du latin après le retrait impérial de 271 : des inscriptions (par exemple l’ex-voto de Biertan) montrent que le latin vulgaire a pu servir de lingua franca aux commerçants, aux orpailleurs, aux sauniers, et entre les populations sédentaires (Daces romanisés ou non) et de passage (Gépides, Goths, Avars, Slaves, etc.) : en effet, le roumain présente des caractères linguistiques propres aux langues « pidgin », qu’il partage avec les autres langues balkaniques, aussi bien slaves qu’albanaise et grecque moderne.

« Millénaire d’absence » apparente et conclusion de Lucien Musset modifier

En raison de ces controverses et incertitudes, les ouvrages historiques actuels tendent à occulter l’existence des langues romanes orientales entre la fin de l’Empire romain et l’émergence des principautés médiévales de Moldavie et Valachie (soit pendant plus d’un millénaire)[59], ce qui est considéré comme absurde par la plupart des historiens roumains : dans une interview de 2008, l’historien Neagu Djuvara disait avec humour : « Les arguments des thèses antagonistes peuvent tous être contestés, mais ils ont le mérite d’exister, tandis qu’aucun fait archéologique et aucune source écrite n’étayent l’hypothèse d’une disparition pure et simple des roumanophones pendant mille ans, qu’ils se soient envolés avec les hirondelles pour migrer en Afrique, ou qu’ils soient allés hiberner avec les ours dans les grottes des Carpates ou des Balkans… »[60].

Lucien Musset écrit que la frontière de l’Empire romain, de la mer du Nord à la mer Noire en passant par la Souabe et la Transylvanie, doit être considérée comme un tout. Selon lui, les parties plus occidentales furent germanisées, celles du centre effacées par les invasions successives hunnique, avare puis magyare, et celles de l’Est et du Sud transformées en îlots romanophones en Transylvanie et dans les Balkans. Parmi ces îlots, les premiers se sont mieux maintenus que les seconds à partir du XIe siècle grâce à la stabilisation du royaume de Hongrie au nord du Danube, tandis qu’au Sud l’insécurité des affrontements entre Bulgares et Byzantins puis entre états chrétiens et Ottomans, jointe à la présence massive des Slaves méridionaux, fit dépérir lentement ces îlots romanophones dont les Aroumains sont les derniers témoins[61].

Références modifier

  1. Gheorghe Brătianu, (ro) O enigmă și un miracol istoric: poporul român, ed. Fundația Academia Civică, Bucarest 2019, (ISBN 9786068924069)
  2. Jean Sellier et André Sellier, Atlas des peuples d'Europe centrale, Paris, La Découverte, , 199 p. (ISBN 978-2-7071-5284-8), p. 12.
  3. Si les langues romanes orientales ne proviennent pas de la romanisation des langues paléo-balkaniques par l’Empire romain comme l’affirment unanimement les linguistes, alors seule l’hypothèse de Vladimir Jirinovski (qui n’est ni linguiste, ni historien) peut constituer une alternative : selon lui, les roumanophones proviendraient d’un « mélange de colons italiens venus sur les nefs génoises et de Tziganes danubiens, mélange qui a envahi des terres appartenant légitimement à la Bulgarie, à la Hongrie et à la Russie » (déclaration de Sofia en 1994 [1])
  4. Kristian Sandfeld, Linguistique balkanique : problèmes et résultats, É. Champion, .
  5. E. Petrović, cité par D. Macrea dans Probleme de lingvistică romînă, Bucarest 1961, p. 58-59.
  6. Carte de l'Europe du Sud-Est en 1020, in : Alexandre Xenopol : Une énigme historique: les Roumains au Moyen Âge, E. Leroux, Paris 1883 et Histoire des Roumains de la Dacie Trajane, E. Leroux, Paris 1896, d'après Ferdinand Lot : La Fin du monde antique et le début du Moyen Âge, La Renaissance du Livre, Paris, 1927 sur [2]
  7. Carte d'Euratlas.net sur [3]
  8. Il ne faut pas confondre les ϐλαχίες - valachies avec les ϐαλαχάδες - valachades, beaucoup plus tardives, qui sont des communautés hellénophones musulmanes dont l'étymologie remonte au nom Allah et qu'évoque F. W. Hasluck dans son ouvrage Christianity and Islam under the Sultans, Oxford 1929.
  9. Alexandru Avram, Mircea Babeş, Lucian Badea, Mircea Petrescu-Dîmboviţa et Alexandru Vulpe (dir.), Istoria românilor : moştenirea timpurilor îndepărtate (« Histoire des Roumains : l'héritage des temps anciens ») vol.1, éd. Enciclopedică, Bucarest 2001, (ISBN 973-45-0382-0).
  10. (en) Vatro Murvar, The Balkan Vlachs : a typological study, University of Wisconsin--Madison, (lire en ligne), p. 20.
  11. (en) Alain Du Nay, André Du Nay et Árpád Kosztin, Transylvania and the Rumanians, Matthias Corvinus Publishing, , 337 p. (ISBN 978-1-882785-09-4, lire en ligne), p. 15.
  12. (en) Gordana Filipović, Kosovo--past and present, Review of International Affairs, (lire en ligne), p. 25.
  13. (hr) Andrej Cebotarev, « Review of Stećaks (Standing Tombstones) and Migrations of the Vlasi (Autochthonous Population) in Dalmatia and Southwestern Bosnia in the 14th and 15th Centuries », Croatian Institute of History, Zagreb, vol. 14, no 14,‎ , p. 323 (lire en ligne).
  14. « nunc se Romanos vocant » A. Verress, Acta et Epistolae, I, p. 243.
  15. « ...si dimandano in lingua loro Romei...se alcuno dimanda se sano parlare in la lingua valacca, dicono a questo in questo modo: Sti Rominest ? Che vol dire: Sai tu Romano... » Cl. Isopescu, « Notizie intorno ai romeni nella letteratura geografica italiana del Cinquecento », in Bulletin de la Section Historique n° 16, 1929, p. 1- 90
  16. « Anzi essi si chiamano romanesci, e vogliono molti che erano mandati quì quei che erano dannati a cavar metalli... » in Maria Holban, Călători străini despre Țările Române, vol. II, p. 158-161.
  17. « Voyage fait par moy, Pierre Lescalopier l’an 1574 de Venise a Constantinople », fol. 48 in Paul Cernovodeanu, Studii și materiale de istorie medievală, IV, 1960, p. 444.
  18. Ex Vlachi Valachi, Romanenses Italiani, /Quorum reliquae Romanensi lingua utuntur…/Solo Romanos nomine, sine re, repraesentantes./Ideirco vulgariter Romuini sunt appelanti, Ioannes Lebelius, De opido Thalmus, Carmen Istoricum, Cibinii, 1779, p. 11-12.
  19. « qui eorum lingua Romini ab Romanis, nostra Walachi, ab Italis appellantur » St. Orichovius, Annales polonici ab excessu Sigismundi, in I. Dlugosz (Dlugossus), Historiae polonicae libri XII, col. 1555
  20. …Valacchi, qui se Romanos nominant… et Gens quae ear terras Transsylvaniam, Moldaviam et Transalpinam nostra aetate incolit, Valacchi sunt, eaque a Romania ducit originem, tametsi nomine longe alieno… in « De situ Transsylvaniae, Moldaviae et Transalpinae », in Monumenta Hungariae Historica, Scriptores, II, Budapest 1857, p. 120.
  21. Valachos… dicunt enim communi modo loquendi : Sie noi sentem Rumeni : etiam nos sumus Romani. Item : Noi sentem di sange Rumena : Nos sumus de sanguine Romano in Martin Szent-Ivany, Dissertatio Paralimpomenica rerum memorabilium Hungariae, Tyrnaviae 1699, p. 39.
  22. Am scris aceste sfente cǎrți de învățături, sǎ fie popilor rumânesti… sǎ înțeleagǎ toți oamenii cine-s rumânii creștini in : Întrebare creștineascǎ, 1559, Bibliografia româneascǎ veche, IV, 1944, p. 6, et …că văzum cum toate limbile au și înfluresc întru cuvintele slǎvite a lui Dumnezeu numai noi românii pre limbă nu avem. Pentru aceia cu mare muncǎ scoasem de limba jidǎveascǎ si greceascǎ si sârbeascǎ pre limba româneascǎ cinci cărți ale lui Moisi prorocul și patru cărți și le dăruim voo fraților rumâni și le-au scris în cheltuială multǎ… și le-au dăruit voo fraților români… și le-au scris voo fraților români in Palia de la Orǎștie (1581–1582), Bucarest, 1968, et aussi : În Țara Ardealului nu lăcuiesc numai unguri, ce și sași peste seamă de mulți și români peste tot locul… soit « En Transylvanie n'habitent pas seulement des Hongrois mais aussi d'innombrables Saxons et partout des Roumains », Grigore Ureche, Letopisețul Țării Moldovei, p. 133-134.
  23. Stelian Brezeanu, Romanitatea Orientalǎ în Evul Mediu, Editura All Educational, București, 1999, p. 229-246.
  24. Dans son testament littéraire Ienăchiță Văcărescu écrit : Urmașilor mei Văcărești!/Las vouă moștenire:/Creșterea limbei românești/Ș-a patriei cinstire soit « A mes descendants Vacaresques/je laisse en héritage/la croissance de la langue roumanesque/et la patrie en hommage »
  25. Alexandru Filipașcu de l’université de Cluj : L’Ancienneté des Roumains de Marmatie (en français), éd. du Centre d’études et de recherches transylvaines de l'université Ferdinand-Ier de Sibiu, Bibliotheca rerum Transsilvaniae, 1945, p. 8 à 33)
  26. (en) John R. Lampe et Marvin R. Jackson, Balkan economic history, 1550-1950 : from imperial borderlands to developing nations, Bloomington, Indiana University Press, , 728 p. (ISBN 0-253-30368-0, lire en ligne), p. 62.
  27. (en) Karoly Kocsis et Eszter Kocsisne Hodosi, Ethnic Geography of the Hungarian Minorities in the Carpathian Basin, Simon Publications LLC, , 45–46 p. (ISBN 978-1-931313-75-9, lire en ligne).
  28. (en) Ethnographia, vol. 105, A Társaság, (lire en ligne), chap. 1, p. 33.
  29. Historia urbana, Academia Română, éd. de l'Académie roumaine, 1993.
  30. Așa și neamul acésta, de carele scriem, al țărâlor acestora, numele vechiŭ și mai direptŭ ieste rumân, adecă râmlean, de la Roma. Acest nume de la discălicatul lor de Traian, și cât au trăit (…) tot acest nume au ținut și țin pănă astăzi și încă mai bine munténii decât moldovénii, că ei și acum zic și scriu țara sa rumânească, ca și românii cei din Ardeal (…) și așa ieste acestor țări și țărâi noastre, Moldovei și Țărâi Muntenești numele cel direptŭ de moșie, ieste rumân, cum să răspundŭ și acum toți acéia din Țările Ungurești lăcuitori și munténii țara lor și scriu și răspundŭ cu graiul Țara Românească, soit « Il en est ainsi de ce peuple aussi, que je décris, de ces pays, : son nom ancien et juste est rumân, c'est-à-dire râmlean, de Rome. Ce nom, depuis leur arrivée avec Trajan, et tant qu'ils vécurent (…) ils le gardèrent jusqu'à aujourd'hui et les gens de Valachie encore mieux que ceux de Moldavie, car les premiers disent et écrivent țara sa rumânească comme ceux de Transylvanie (…) et c'est ainsi que de nos pays, de Moldavie et de Munténie, le nom juste de la terre ancestrale est rumân, comme se répondent jusqu'à nos jours les habitants des pays hongrois montagnanrds par le mot Țara Românească », Dans De neamul moldovenilor.
  31. Hronicon a toată Țara Românească (care apoi s-u împărțit în Moldova, Munteniască și Ardealul)…, in D. Cantemir, Hronicul vechimei româno-moldo-vlahilor, in Operele Principelui Dimitrie Cantemir, Academia Română, Bucarest 1901, p. 180.
  32. Dimitrios Daniel Philippidès : Histoire de Roumanie, suivi d’une Géographie de Roumanie.
  33. « Precum Hristos pe Lazăr din morți a înviat/Așa tu România din somn ai deșteptat ».
  34. Ce statut de terra nullius a été invoqué par l'Empire des Habsbourg en 1718 pour le Banat, l'Olténie valaque et la Serbie au traité de Passarowitz, en 1775 pour la Bucovine moldave, et en 1908 pour la Bosnie-Herzégovine nominalement ottomane, mais administrée par l’Autriche-Hongrie depuis 1878
    (en) Tomasz Kamusella, « Central Europe in the Distorting Mirror of Maps, Languages and Ideas », The Polish Review, University of Illinois Press, vol. 57, no 1,‎ , p. 33-94 (lire en ligne)
    Gregor von Rezzori, Maghrebinische Geschichte in : Lacques Lajarrige, Gregor von Rezzori, études réunies, Centre d'Études et de Recherches Autrichiennes de l'Université de Rouen, Mont-Saint-Aignan 2003.
  35. Actuellement (2015, et depuis 2001) le Parti des communistes de la république de Moldavie est le plus fortement représenté au parlement de Chișinău, avec près de la moitié des sièges.
  36. [4]
  37. Arrêt no 36 de la Cour constitutionnelle du 5 décembre 2013 sur [5] et sur [6] (Chisinau Recognizes Romanian As Official Language, Radio Free Europe, 5 décembre 2013).
  38. Cornelia Bodea, Ștefan Pascu, Liviu Constantinescu : România : Atlas Istorico-geografic, Académie roumaine 1996, (ISBN 973-27-0500-0), chap. II, "Repères".
  39. Eduard Robert Rössler, 2.3.1836 à Olmütz/Olomouc – † 19.8.1874 à Graz : Romänische Studien : untersuchungen zur älteren Geschichte Rumäniens, Leipzig, 1871
  40. Jusqu'au dictionnaire historique français de Michel Mourre (dir.) qui, dans son article sur les origines des Roumains, qualifie les thèses roumaines de « nationalistes et infondées » : ce choix relève de la méthode hypercritique concernant les arguments des historiens roumains, et de l’interprétation littérale de la pénurie de sources anciennes, selon l’axiome « absence de preuve égale preuve d’absence », pour conclure que les roumanophones ne sont pas apparus avant le XIIIe siècle au plus tôt : comme une telle apparition semble inexplicable, des spéculations comme l’immigration tardive à partir de l’Italie, via la thalassocratie génoise, ont été avancées par Vladimir Jirinovski déjà cité [7].
  41. Stelian Brezeanu, (en) Palaiovlachoi - Stari Vlah - A medieval Balkan history and toponymy, Istituto Romeno’s Publications
  42. Kristian Sandfeld-Jensen, Linguistique balkanique, Klincksieck, Paris 1930, [8].
  43. Formule de Marcel Renard, Compte rendu de (de) « Zu den Schicksalen Siebenbürgens im Altertum » par M. Alföldi, dans la Revue belge de philologie et d'histoire, tome 25, fasc. 3-4, 1946, p. 1017.
  44. T.J. Winnifruth : Badlands-Borderland, 2003, page 44, Romanized Illyrians & Thracians, ancestors of the modern Vlachs, (ISBN 0-7156-3201-9).
  45. Le dialecte aujourd'hui slave des Valaques de Moravie comprend des mots roumains comme bača (roum. baci « berger »), brynza (roum. brânză « fromage affiné », mot passé aussi en slovaque et en tchèque), cap (roum. țap « bouc »), domikát (roum. dumicat « produit laitier »), galeta/geleta (roum. găleată « baratte »), pirt’a (roum. pârtie « chemin de transhumance »), kurnota (roum. cornută « cornue ») ou murgaňa/murgaša (roum. murgașă « brebis noire »).
  46. Jan Pavelka, Jiří Trezner (dir.), Příroda Valašska, Vsetín 2001, (ISBN 80-238-7892-1).
  47. Jean-Pierre Arrignon, Chronique de Nestor, Naissance des mondes russes, ed. Anacharsis, 2008 (ISBN 2-914777-19-1) :

    « Depuis longtemps, les Slaves s’étaient installés sur les rives du Danube où vivent aujourd’hui les Bulgares et les Hongrois. […] Venant de l’Est, ils [les Magyars] traversèrent difficilement les grandes montagnes et commencèrent à affronter les Valaques voisins et les Slaves, car les Slaves s’y étaient installés les premiers mais les Valaques s’étaient emparés du territoire des Slaves »

     ; voir aussi Alexandru Madgearu dans The Romanians in the Anonymous Gesta Hungarorum: truth and fiction, Romanian Cultural Institute, Center for Transylvanian Studies, 2005b (ISBN 973-7784-01-4), Victor Spinei dans The Great Migrations in the East and South East of Europe from the Ninth to the Thirteenth Century, 2003 (ISBN 973-85894-5-2) p. 52 et The Romanians and the Turkic Nomads North of the Danube Delta from the Tenth to the Mid-Thirteenth century, Koninklijke Brill NV, 2009 (ISBN 978-90-04-17536-5) p. 73.
  48. Théophane le Confesseur, Cédrène et Alexis Apokaukos, cités par Stelian Brezeanu, Nicolae Iorga, Teodor Capidan et Constantin Giurescu.
  49. Voir Vlacho-Raphti et Vlacho-Kerasia sur la carte linguistique [9].
  50. Alexandru Avram, Mircea Babeş, Lucian Badea, Mircea Petrescu-Dîmboviţa et Alexandru Vulpe (dir.), (ro) Istoria românilor : moştenirea timpurilor îndepărtate (« Histoire des Roumains : l'héritage des temps anciens ») vol. 1, éd. Enciclopedică, Bucarest 2001, (ISBN 973-45-0382-0).
  51. Ilie Gherghel, (ro) Câteva considerațiuni la cuprinsul noțiunii cuvântului "Vlah" (« Quelques considérations sur le contenu du mot "Valaque" »), ed. Convorbiri Literare, Bucarest 1920.
  52. Tom Winnifruth : Romanized Illyrians & Thracians, ancestors of the modern Vlachs, Badlands-Borderland, 2006, (ISBN 0-7156-3201-9).
  53. Franz-Josef Sulzer, Josef-Karl Eder, Johann-Christian von Engel cités par Eduard-Robert Rössler dans (de) Romänische Studien: untersuchungen zur älteren Geschichte Rumäniens, Leipzig, 1871 et par Béla Köpeczi, (hu) Erdély rövid története, Akadémiai Kiadó, (ISBN 963 05 5901 3)
  54. Roumen Daskalov et Aleksander Vezenkov, (en) Entangled Histories of the Balkans - Shared Pasts, Disputed Legacies, tome 3, Balkan Studies Library, Brill (Leyden, 2015), (ISBN 9004290362)
  55. Neagu Djuvara, Comment le peuple roumain est-il apparu ?, Humanitas, Bucarest 2001.
  56. Gheorghe I. Brătianu, Les Roumains, une énigme et un miracle historique, éd. Academia Civică, Bucarest 2019, (ISBN 9786068924069).
  57. Édouard Sayous, Histoire générale des Hongrois, Budapest & Paris, 1900, p. 20-25.
  58. Béla Köpeczi (dir.), Histoire de la Transylvanie, Akadémiai Kiado, Budapest, 1992, (ISBN 963-05-5901-3).
  59. Gheorghe I. Brătianu, Op. cit., 2019.
  60. Neagu Djuvara sur [10]
  61. Lucien Musset, Les invasions. Le second assaut contre l'Europe chrétienne (VIIe et XIe siècles, Presses universitaires de France, , p.195.

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • Bianca Botea, « Des usages de l’autochtonie en Roumanie : la Transylvanie », dans Nommer et classer dans les Balkans, sous la direction de Gilles de Rapper et Pierre Sintès, Athènes – Paris, École française d'Athènes – Boccard, 2008.
  • Demetrie Cantemir, Chronique de l'ancienneté des Romano-Moldo-Valaques, Berlin, 1708 (rééd. Bucarest, 1901).
  • Georges Castellan, Histoire du peuple roumain, Crozon, Armeline, 2002.
  • Georges Castellan, « Quelques problèmes d'histoire entre Hongrois et Roumains », dans Melikov zbornik : Slovenci v zgodovini in njihovi srednjeevropski sosedje, sous la dir. de Vincenc Rajšp et al., Ljubljana, Založba ZRC, 2001, p. 153–162.
  • Georges Castellan, Histoire des Balkans, Paris, Fayard, 1991.
  • Georges Castellan, Histoire de la Roumanie, Paris, PUF, 1984 (rééd. 2015).
  • Neagu Djuvara, Le Pays roumain entre Orient et Occident, Paris, POF, 1989.
  • Catherine Durandin, Histoire des Roumains, Paris, Fayard, 1995 (ISBN 2-213-59425-2).
  • Olivier Gillet, « L'histoire de la Transylvanie : le différend historiographique hungaro-roumain », Revue belge de philologie et d'histoire, 1997, tome 75, fasc. 2, p. 457–485.
  • Jean-François Gossiaux, « Valaques et/ou Aroumains en Bulgarie », dans Nommer et classer dans les Balkans, sous la dir. de Gilles de Rapper et Pierre Sintès, Athènes – Paris, École française d'Athènes – Boccard, 2008.
  • Nicolas Trifon (dir.), Les Aroumains, un peuple qui s'en va, Acratie, La Bussière, 2005 (ISBN 2-909899-26-8).
  • Nicolae Iorga, Histoire des Roumains et de la romanité orientale, 10 vol., Bucarest, Imprimerie de l'État, 1945.
  • Nicolae Iorga, Histoire des Roumains de la Peninsule des Balcans (Albanie, Macédoine, Épire, Thessalie, etc.), Bucarest, Impr. Cultura neamului romănesc, 1919.
  • Claude Karnoouh, L'Invention du peuple, chroniques de la Roumanie. Arcantère, Paris, 1990 ; 2e éd. revue, corrigée et augmentée d'une longue postface traitant des années 1989-2007, Paris – Montréal, L'Harmattan, 2008.
  • Jules Michelet, Légendes démocratiques du Nord, Paris, PUF, 1968.
  • Kristian Sandfeld, Linguistique balkanique, Paris, E. Champion, 1930.
  • (de) Karl Strobel, « Die Frage der rumänischen Ethnogenese : Kontinuität – Diskontinuität im unteren Donauraum in Antike und Frühmittelalter », Balkan-Archiv, 2005–2007, nos  30–32, p. 59–166.
  • Gilles Veinstein et Mihnea Berindei, L'Empire ottoman et les pays roumains, 1544–1545 : étude et documents, Paris, EHESS, 1987.
  • (en) T. J. Winnifrith, Badlands-Borderland : A History of Southern Albania / Northern Epirus, Londres, Gerald Duckworth & Co., 2002 (ISBN 0-7156-3201-9)
  • Alexandre Xenopol, Histoire des Roumains de la Dacie Trajane, Paris, E. Leroux, 1896 ; version abrégée de Istoria Romînilor din Dacia Traiana.

Articles connexes modifier