Michel Regnaud de Saint-Jean d'Angély

homme politique français

Michel Regnaud de Saint-Jean d'Angély, né à Saint-Fargeau le et mort à Paris le , est un homme politique, avocat et journaliste, député aux États généraux, conseiller et ministre d'État sous l'Empire, comte d'Empire, membre de l'Académie française.

Sa famille maternelle possédait des biens à Saint-Jean-d'Angély. Il est le père du maréchal Auguste Regnaud de Saint-Jean d'Angély.

Biographie modifier

Famille et formation modifier

Michel Regnaud de Saint-Jean d'Angély est né le à Saint-Fargeau. Il est baptisé sous le nom de Michel Louis Étienne Regnaud[1]. Il est le fils de Claude Étienne Regnaud, avocat, baille de Saint-Fargeau, et de Marie Allenet, sa femme. Il a pour parrain Michel-Étienne Le Peletier de Saint-Fargeau et pour marraine son épouse, Suzanne-Louise Le Peletier de Beaupré.

Il profite un temps de l'enseignement délivré par le précepteur des enfants de ses parrain et marraine. Le futur député et ministre de Napoléon quitte encore enfant son Orléanais natal, et s'en va vivre en Saintonge avec ses parents, à Saint-Jean-d'Angély une ville dont sa mère est originaire et où sa famille jouit d'une certaine influence. En 1771, il est envoyé à Paris et intègre le collège du Plessis-Sorbonne avec Louis-Michel Le Peletier de Saint-Fargeau. Il est obligé d'arrêter ses études et de s'engager comme lieutenant de la prévôté de la marine à Rochefort, car son père, devenu aveugle, ne peut plus assurer la vie de la famille.

Voulant devenir avocat, Regnaud se rend périodiquement à Paris, et il parvient finalement à passer ses examens à Poitiers. En 1784, il est reçu conseiller-avocat du roi en la sénéchaussée de Saintonge. Il ouvre un cabinet d'avocat à Rochefort et se pose aussitôt en défenseur des faibles et des opprimés : le succès est immédiat.

Le décès de son père le rappelle à Saint-Jean-d'Angély. Là, il participe à la rédaction des cahiers de doléances du tiers état de la province de Saintonge, qui l'élit aux États généraux de 1789.

Sous la Révolution modifier

Député du tiers état pour Saint-Jean-d'Angély, il ajoute Saint-Jean d'Angély à son nom pour se démarquer de plusieurs homonymes, dont un procureur au parlement de Paris, et il siège dans le groupe des « conciliateurs » qui s'efforcent d'accorder les idées nouvelles avec celles de la monarchie. Il crée le Journal de Versailles dont il est le principal rédacteur en 1789 puis, en 1791, il collabore à divers journaux dont le Journal de Paris où il se lie d'amitié avec André Chénier, et l'Ami des patriotes, journal subventionné par la liste civile.

Admirateur de Necker, ami de sa fille Madame de Staël, il appartient à la mouvance libérale de 1789. Se démarquant des orléanistes regroupés autour de Madame de Genlis, il rejoint le parti Feuillant. C'est lui qui, en 1791, sur la proposition du marquis de Villette, fait voter le transfert en grande pompe des restes de Voltaire au Panthéon, événement qui donne lieu à un fastueux cérémonial. Il se fait remarquer dans les clubs, aux jacobins puis aux Feuillants avec Lameth, Desmeuniers et quelques autres. À la fin de la Constituante, il reprend son métier d'avocat et devient avec son ami Malouet, un des agents secrets de la cour, en concertation avec les derniers ministres de Louis XVI, Montmorin, Valdec de Lessart et autres dispensateurs des fonds de la liste civile.

 
Portrait de Marie-Louise-Augustine Chénié, mère de son fils Auguste

Après la journée du 10 août 1792, son nom est compris dans une liste de proscritption et il doit se cacher. En , il reparaît et rejoint le groupe de royalistes décidés — comme le poète André Chénier avec lequel il se lie — à peser sur la décision de certains conventionnels dans le procès du roi. Enrôlé sous un nom d'emprunt dans l'armée du Nord, il est reconnu et arrêté mais réussit à s'enfuir. En , alors que la situation politique se durcit, que la loi des suspects est votée, il se cache sous une fausse identité (« Des Richards »), rue du Bac, où des amis viennent le ravitailler. Il manque plusieurs fois de se faire arrêter mais parvient de justesse à passer le cap de thermidor. Il trouve un asile chez les parents d'une jeune actrice, Marie-Louise-Augustine Chénié, dont il a un fils, Auguste Regnaud de Saint-Jean d'Angély, futur maréchal de France. La mère meurt en couches et Regnaud recueille l'enfant qu'il reconnaît et élève.

Il épouse peu après, en , Laure Guesnon de Bonneuil, immortalisée par le pinceau de François Gérard et connue par son salon politique, artistique et littéraire de 1796 à 1817. Sa mère, Madame de Bonneuil, très belle femme, modèle de Roslin et de Vigée-Lebrun, une des « berceuses » du banquier Nicolas Beaujon, avait été l'égérie du poète André Chénier. Arrêtée pour activisme royaliste sous la Terreur, elle venait de réchapper à la guillotine contrairement à sa sœur et son beau-frère d'Eprémesnil. Ruinée à sa sortie de prison, elle s'improvise agent de liaison et de renseignement pour le compte de Cazalès, agent du comte de Provence en Espagne et en Angleterre, puis de Talleyrand, qui sont ses amis. Madame de Bonneuil procure à son gendre Regnaud des ouvertures dans les milieux de la haute émigration royaliste.

Sous le Directoire modifier

Nommé administrateur des hôpitaux de l'armée d'Italie, il y fait la connaissance de Bonaparte et lie son destin au futur empereur. En Italie, il est le corédacteur avec Napoléon Bonaparte du journal la France vue de l'armée d'Italie.

Regnaud suit Bonaparte en Italie en 1796 puis en Égypte, restant à Malte du au comme commissaire du gouvernement français[2]. Devenu conseiller d'État, section de l'intérieur, après le 18 brumaire dont il contribue au succès, il a un rôle d'éminence grise ou de conseiller occulte : Napoléon avait reconnu ses qualités de juriste, sa culture politique et historique et sa facilité à rédiger des discours.

Sous le Consulat et l'Empire modifier

Il s'occupe durant toute la période napoléonienne des relations du gouvernement avec le Sénat conservateur, se charge des affaires privées de la famille impériale : il est un des artisans du divorce avec Joséphine. À l'origine de nombreuses lois concoctées au Conseil d'État et qui sont entrées en vigueur par la suite, il participe activement à la préparation des codes napoléoniens.

Il est chargé de justifier auprès du Sénat conservateur les levées de conscrits de 1806 à 1813. En échange de ses services, Napoléon le fait comte de l'Empire par lettres patentes du et assure sa fortune. Entré à l'Académie française au fauteuil 8 en 1803, le comte Regnaud en est exclu en 1816.

Ayant accepté un portefeuille de ministre pendant les Cent-Jours, il est proscrit au retour des Bourbon et, frappé d'exil, il vit un an aux États-Unis. Gracié par l'ordonnance générale de 1819, il meurt la nuit même de son retour à Paris.

De 1810 à 1815, Regnaud est le président de la commission de la vente de la Description de l'Égypte.

Il est inhumé au cimetière du Père-Lachaise (11e division)[3].

Titre modifier

Distinctions modifier

  Empire français
  Royaume de Wurtemberg
  Empire d'Autriche
  Empire russe

Armoiries modifier

Figure Blasonnement
Armes du comte Regnaud et de l'Empire

D'azur chargé en abîme d'un coq d'argent ayant la patte droite posée sur un 4 de sable, surmonté en chef d'une étoile d'argent ; bordure componée d'or et de sable de seize pièces[4],[6] ; au canton des Comtes Ministres brochant[7],[8],[9].

  • Livrées : fond bleu, galons : orangé, bleu de ciel & blanc[4].

Notes et références modifier

  1. Contrairement à ce que certains historiographes peuvent laisser croire, Michel Regnaud et sa famille écrivent leur nom « Regnaud » et non pas « Regnault », comme l'indiquent clairement des dizaines d'actes notariés passés par l'intéressé et sa femme pendant leur vie.
  2. Alain Blondy, Malte 7000 ans d'histoire, Bouchène, 2011, p.123
  3. François Marie Marchant de Beaumont, Manuel et itinéraire du curieux dans le cimetière du Père la Chaise, Paris, Emler frères, (lire en ligne), p. 106
  4. a b et c « BB/29/974 page 5 », Titre de comte accordé à Michel, Louis, Etienne Regnaud de Saint-Jean d'Angely (Bayonne, ), sur chan.archivesnationales.culture.gouv.fr, Centre historique des Archives nationales (France) (consulté le )
  5. P.D., « Regnaud de Saint-Jean d'Angély (Michel-Louis-Étienne) », dans A. Lievyns, Jean Maurice Verdot, Pierre Bégat, Fastes de la Légion d'honneur, biographie de tous les décorés accompagnée de l'histoire législative et réglementaire de l'ordre, vol. I, [détail de l’édition] (BNF 37273876), p. 417
  6. Jean-Baptiste Rietstap, Armorial général, t. 1 et 2, Gouda, G.B. van Goor zonen, 1884-1887
  7. Alcide Georgel, Armorial de l'Empire français : L'Institut, L'Université, Les Écoles publiques, (lire en ligne)
  8. Nicolas Roret, Nouveau manuel complet du blason ou code héraldique, archéologique et historique : avec un armorial de l'Empire, une généalogie de la dynastie impériale des Bonaparte jusqu'à nos jours, etc..., Encyclopédie Roret, , 340 p. (lire en ligne)
  9. « Almanach impérial », reliure aux armes de Regnaud de Saint-Jean d'Angély, président du corps législatif, sur www.photo.rmn.fr, (consulté le )

Sources modifier

  • Olivier Blanc, L’Éminence grise de Napoléon, Regnaud de Saint-Jean d'Angély, Paris, Pygmalion, 2003 (bibliographie, annexes, généalogie, index, cahier de 8 pages d'illustration), 331 p., (ISBN 978-2-85704-782-7) ;
  • Olivier Blanc, Madame de Bonneuil, femme galante et agent secret (1748-1829), Paris, Robert Laffont, 1987, 285 p., (ISBN 978-2-22104-595-4) ;
  • Laure Junot d'Abrantès, Histoire des salons de Paris : tableaux et portraits du grand monde sous Louis XVI, le Directoire, le Consulat et l’Empire, la Restauration et le règne de Louis-Philippe Ier, t. 5, Salon de madame Regnault de Saint-Jean-d’Angély, Paris, Ladvocat, 1837-1838. 6 vol. sur Gallica, p. 355 et suiv.
  • Jules Michelet, Révolution française ;
  • « Michel Regnaud de Saint-Jean d'Angély », dans Adolphe Robert et Gaston Cougny, Dictionnaire des parlementaires français, Edgar Bourloton, 1889-1891 [détail de l’édition]
  • Jean Verzat, Le Comte Regnaud de Saint-Jean-d’Angély (1760-1819), Saint-Jean-d'Angély, J.-M. Bordessoules, 2000, 47 p., (ISBN 978-2-91347-124-5).

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