Messe en si mineur

œuvre de Jean-Sébastien Bach
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La Messe en si mineur (en allemand h-Moll-Messe) est une œuvre musicale composée par Johann Sebastian Bach (BWV 232), pour deux sopranos, un contralto, un ténor, une basse, un chœur et un orchestre.

Manuscrit de la première page du Credo
Johann Sebastian Bach (16851750)

La Messe en si mineur est essentiellement composée d'un assemblage de diverses pages puisées dans différents ouvrages antérieurs du compositeur et réécrites par lui selon le procédé dit de la parodie (au sens ancien du terme : « texte composé pour être chanté sur une musique connue »[1] à l'avance) : par exemple la cantate BWV 12 a fourni la matière du Crucifixus, l’Hosanna est repris de la cantate BWV 215, l’Agnus Dei provenant quant à lui de l’Oratorio de l'Ascension (BWV 11). Seul un tiers de l'œuvre environ consiste en compositions « originales ». La parodie est un processus relativement courant chez Bach, comme d'ailleurs chez maints compositeurs de l'époque, car c'était souvent la seule manière de donner à entendre de nouveau des pièces que leurs auteurs estimaient particulièrement réussies.

La tonalité de si mineur, comme le veut l'usage, vient de la première pièce (Kyrie eleison), les autres numéros étant, à l'exception du n° 26 (Agnus Dei en sol mineur), dans les tons voisins, particulièrement dans la gamme relative, c'est-à-dire ré majeur (13 sur les 27 numéros).

Histoire modifier

Bach a travaillé sur cette œuvre à plusieurs périodes étalées sur plus de vingt ans[2],[3] :

La première version pouvait être utilisée aussi bien dans le rituel catholique que luthérien. Bach a dédié les 21 parties de cette version en juillet à la cour catholique de Dresde, exprimant le souhait de se voir attribuer le titre de Compositeur de la cour. Ce n'est qu'en , qu'il deviendra compositeur de la cour du prince électeur de Saxe et de la cour royale de Pologne[6].

  • En 1747–1749, Bach s'est décidé à élargir la Messe en si mineur[5],[2] au Credo, au Sanctus et à l’Agnus Dei, soit avec de nouvelles compositions soit en utilisant des parties de cantates antérieures.

Depuis 2015, le manuscrit de Bach de la partition est inscrit au registre international « Mémoire du monde » de l'Unesco[7].

Signification liturgique modifier

Certains musicologues (en particulier Gilles Cantagrel et Philippe Charru[8]) ont noté le côté œcuménique de l'ouvrage, catholique par sa forme et luthérienne dans son esprit. Le dédicataire initial (le prince électeur de Dresde, qui était catholique) peut en être une explication partielle, la cité abritant les deux confessions.

La Messe en si mineur était considérée comme une œuvre catholique par la famille Bach[9],[10], bien que le texte s'éloigne de la liturgie catholique en deux points :

  • Dans le Gloria après Domine, fili unigenite, Jesu Christe, le mot altissime fait référence à la liturgie de Martin Luther.
  • Dans le Sanctus on trouve gloria eius au lieu de gloria tua.

La partition n'a été publiée qu'en 1833 (Kyrie et Gloria) chez Nägeli à Zurich, alors qu'il avait acquis la partition en 1806[11]. L'intégralité n'est parue qu'en 1845, en association avec un autre éditeur, N. Simrock de Bonn[11].

Bach n'a jamais entendu la messe dans son intégralité[5],[12]. La création ne semble avoir eu lieu qu'en 1859[12] en Allemagne.

Structure et correspondances modifier

BWV BC   Indications de mouvement[Information douteuse]  Tonalité Mesure Parodie Commentaires
I   Missa brevis : Kyrie, Gloria (1733)          
1 1 Kyrie eleison (chœur) Adagio/Largo si mineur 4/4    
2 2 Christe eleison (duo pour soprano & alto) Larghetto ré majeur 4/4    
3 3 Kyrie eleison (chœur) Moderato fa# mineur 4/2    
4 4 Gloria in excelsis (chœur) Vivace ré majeur 3/8   → BWV 191/1
5 5 Et in terra pax (chœur) Tranquillo ré majeur 4/4    
6 6 Laudamus te (aria pour alto solo) Andante maestoso la majeur 4/4    
7 7 Gratias agimus tibi (chœur) Pietoso ré majeur 4/2 BWV 29/2 (EA3 1731) BWV 29/2 (EA 1731)
8 8 Domine Deus (duo pour soprano & ténor) Andante animato sol majeur 4/4 peut-être BWV 193a/5 (musique disparue) → BWV 191/2
9 9 Qui tollis peccata mundi (chœur) Lento si mineur 3/4 BWV 46/1 (EA 1723)  
10 10 Qui sedes ad dextram Patris (alto solo) Allegro grandioso si mineur 6/8    
11 11 Quoniam tu solus sanctus (basse solo) Andante pomposo ré majeur 3/4    
12 12 Cum Sancto Spiritu (chœur) Vivace ré majeur 3/4   → BWV 191/3
II   Symbolum Nicenum : Credo (1748/49)          
1 13 Credo in unum Deum (chœur) Grave mode de sol sur la
ré majeur
4/2    
2 14 Patrem omnipotentem (chœur) Allegro ré majeur 2/2 voir BWV 171/1 (EA 1729 ou 1737)  
3 15 Et in unum Dominum (duo pour soprano & alto) Andante sol majeur 4/4 duo disparu, qui date de 1733 pour BWV 213/11 2 variantes
4 16 Et incarnatus est (chœur) Largo si mineur 3/4    
5 17 Crucifixus (chœur) Poco adagio mi mineur 3/2 BWV 12/2 (EA 1714)  
6 18 Et resurrexit (chœur) Allegro un poco maestoso ré majeur 3/4 supposé BWV Anh. 9/1  
7 19 Et in Spiritum Sanctum (basse solo) Allegretto grazioso la majeur 6/8    
8 20 Confiteor (chœur) Allegro molto moderato e solenne fa# mineur 2/2    
9 21 Et expecto (chœur) Vivace ed allegro ré majeur 2/2 BWV 120/2 (EA 1729)  
III   Sanctus (1725)          
  22 Sanctus (chœur) Poco sostenuto
Allegro maestoso
ré majeur 4/4
3/8
   
IV   Osanna et Benedictus, Agnus Dei et Dona nobis pacem (1748/49)          
1 23 Osanna in excelsis (chœur) Poco vivace ré majeur 4/4
3/8
supposé BWV Anh. 11/1 (EA 1732)  → BWV 215/1
2 24 Benedictus (ténor solo) Larghetto si mineur 3/4    
3 25 Osanna repetatur (« On répète Osanna » : chœur) Poco vivace ré majeur 3/8   Répétition du n° 23
4 26 Agnus Dei (alto solo) Largo sol mineur 4/4 supposé BWV Anh. 196/3 (EA 1725), BWV 11  
5 27 Dona nobis pacem (chœur) Moderato, pietoso ré majeur 4/2 BWV 232I//7  


Quelques versions de référence modifier

Bibliographie modifier

Références modifier

  1. Définition de « parodie » sur le site du CNRTL
  2. a b et c Lemaître 1992, p. 126
  3. Cantagrel 1998, p. 564
  4. Cantagrel 1998, p. 565
  5. a b et c Basso 1985, p. 559
  6. « Bach : Messe en si mineur BWV 232 », sur France Musique (consulté le )
  7. « Manuscrit de la h-Moll-Messe (Messe en si mineur) de Jean-Sébastien Bach | Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture », sur www.unesco.org (consulté le )
  8. Philippe Charru et Christoph Theobald, L'Esprit créateur dans la pensée musicale de Jean-Sébastien Bach, éd. Mardaga, 2002 (ISBN 978-2-87009-801-1)
  9. Registre de succession de Carl Philipp Emanuel Bach, 1790
  10. Cantagrel 1998, p. 563
  11. a et b Basso 1985, p. 557–558.
  12. a et b Lemaître 1992, p. 127
  13. Déclarée « version de référence » par la Tribune des critiques de disques de F. Hudry, le 01/02/2009.

Articles connexes modifier

Liens externes modifier