Alain de Benoist

écrivain et philosophe français
Alain de Benoist
Alain de Benoist en 2012.
Biographie
Naissance
Nom de naissance
Alain Marie de BenoistVoir et modifier les données sur Wikidata
Pseudonymes
Fabrice Laroche, Martial Laurent, Cédric de Gentissard, Tanguy Gallien, Frédéric Laurent, Robert de Herte, David Barney, Pierre Dolabella, Maxime Meyer, Jean-Pierre Dujardin, Frédéric Toulouze, Jean-Louis Cartry, Pierre Jacob, Julien Valserre, Pierre Carlet, Jean-Pierre Hébert, Maiastra, Gilles Foumier, Mortimer Davidson, Fabrice Valclérieux, Éric Saint-Léger, Éric Lecendreux, Éric DumesnilVoir et modifier les données sur Wikidata
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Œuvres principales
Vu de droite (d)Voir et modifier les données sur Wikidata

Alain de Benoist, né le à Saint-Symphorien (Touraine), est un journaliste, philosophe et essayiste français.

Principal représentant de la mouvance intellectuelle dite de la « Nouvelle Droite » depuis la fin des années 1960, il est classé à l'extrême droite ou comme proche de celle-ci par la plupart des observateurs[1].

Biographie modifier

Origines et formation modifier

Fils d'Alain de Benoist (1902-1971), inspecteur général des ventes, et de Germaine Langouët (1908-1981), Alain Marie de Benoist[2] naît à Saint-Symphorien, en Indre-et-Loire, une commune aujourd'hui rattachée à Tours. Sa grand-mère paternelle, Yvonne de Benoist, née Druet (1881-1965), fut la secrétaire de Gustave Le Bon.

Après des études secondaires effectuées à Paris, aux lycées Montaigne et Louis-le-Grand, il étudie le droit constitutionnel à la faculté de droit de Paris, puis la philosophie, la sociologie et l'histoire des religions[réf. nécessaire] à la Sorbonne.

Carrière modifier

Ayant rejeté le christianisme de son éducation, il serait devenu, à l'âge de dix-sept ans, journaliste politique en rédigeant sous le pseudonyme de « Cédric de Gentissard » quelques articles pour le mensuel d'Henry Coston, Lectures françaises, en 1960[3].

En 1961, il fait la connaissance d'Amaury de Chaunac-Lanzac, futur François d'Orcival. Il rédige avec lui le journal clandestin de l'OAS Métro, France Information[4].

Il adhère à la Fédération des étudiants nationalistes (FEN) et, en 1962, il prend en charge le secrétariat des Cahiers universitaires, revue de la FEN, et entre en contact avec Dominique Venner et le groupe fondateur d’Europe-Action[5], dont il ne tarde pas à devenir l'un des principaux collaborateurs. Il participe en 1966 au Mouvement nationaliste du progrès[6].

Il écrit aussi un temps dans Défense de l'Occident[7].

Dans ses premiers livres, Salan devant l'opinion, Le Courage est leur patrie, Vérité pour l'Afrique du Sud[8], publiés respectivement en 1963 et 1965, le deuxième en collaboration avec François d'Orcival et le dernier avec Gilles Fournier, il prend la défense de l'Algérie française et de l'Organisation armée secrète ainsi que du régime d'apartheid en Afrique du Sud, avant de se tourner vers la philosophie politique (à travers la lecture de Louis Rougier, qui influencera sa critique du christianisme), laquelle lui fait découvrir un univers conceptuel dont « les militants nationalistes ne soupçonnaient pas l'existence, et dont ils n'auraient vraisemblablement pas aperçu les possibles exploitations idéologiques », selon Pierre-André Taguieff[9].

Parmi les fondateurs, en 1968, du Groupement de recherche et d'études pour la civilisation européenne (GRECE), principal mouvement du courant que de Benoist appelle « Nouvelle Droite »[10], il signe la même année pour la première fois sous son nom dans la revue Nouvelle École, pour un article titré « Le LSD et les altérations du stock héréditaire »[11]. En , il dépose les statuts du GRECE avec Jacques Bruyas et Jean-Pierre Daugreilh[12].

En 1973, il reçoit la visite de trois membres du Cercle Pareto, Yvan Blot, Jean-Yves Le Gallou et Bernard Mazin, qui l'invitent à s'engager dans l'action politique ; il refuse alors définitivement, se montrant même « très hostile » à cette orientation[13]. Pourtant, bien que le projet n'aboutisse pas, il acceptera en 1979 de figurer sur la liste du Parti des forces nouvelles, Eurodroite, à l'occasion des élections européennes[14].

Il collabore aussi à Éléments (dont il est éditorialiste depuis 1973), à Krisis (revue qu'il fonde en 1988), ainsi qu'au Figaro magazine, qu'il doit quitter au début des années 1980. Il appartient au comité scientifique de la revue Neue Anthropologie, éditée par une "Société pour l'anthropologie biologique, l'eugénisme et la science du comportement"[15]. En 1976, il participe au lancement des éditions Copernic[16].

Son livre Vu de droite obtient en le prix de l'essai de l'Académie française, avec une dotation de 10 000 francs[17]. La même année, il aurait rédigé (avec Bruno Tellenne ou Pierre Vial[18]) l'ouvrage L'avenir n'est écrit nulle part, signé par Michel Poniatowski[19].

Il travaille à Spectacle du Monde de 1970 à 1982. Il y collabore de nouveau épisodiquement entre le milieu des années 2000 et la fin du mensuel en 2014. Alain de Benoist s'est aussi fait connaître en participant à l'émission Panorama sur France Culture de 1980 à 1992.

Selon Stéphane François, à partir des années 1980, Alain de Benoist ne « participe plus » au GRECE, « tout en restant une figure importante de la mouvance »[20]. Ce que le même Stéphane François dément en 2020, reconnaissant que « cela est évidemment faux, puisqu’il dirige toujours Nouvelle École »[21].

En 1986, le « chef de file » de la Nouvelle Droite publie Europe, Tiers monde, même combat — dont le bandeau donne à lire : « Décoloniser jusqu'au bout ! » —, ouvrage qui prône le soutien aux luttes pour l'autonomie des peuples du Tiers monde et l'alliance avec celui-ci[22] contre l'impérialisme. Une vision déjà en germe dans les écrits antérieurs de l'auteur[23] et qui restera la sienne. Pour Christian Savés (haut fonctionnaire), Alain de Benoist a en effet conduit une « remarquable entreprise de démystification » de l'« idéologie ethnocidaire de l'Occident »[24].[pas clair]

Il a par ailleurs été fortement influencé par les penseurs liés à la révolution conservatrice allemande comme Ernst Jünger et Armin Mohler[25].

En 2003, un volume de mélanges en son honneur, le Liber amicorum Alain de Benoist, est publié sous la direction de Michel Marmin[26]. Un second tome paraît sous la férule de Thibault Isabel en 2014. Selon François-Emmanuël Boucher, « l'ethos » s'y « substitue au logos »[26]. De son côté, Stéphane François note la forte présence d'universitaires parmi les auteurs, estimant que le dédicataire cherche par là à acquérir « une forme de légitimité intellectuelle »[27].

Il anime à partir de 2014 l'émission Les Idées à l'endroit sur la web-télé TV Libertés, un site de « réinformation » à la ligne identitaire[28]. Il intervient régulièrement dans les pages de la revue conservatrice allemande Junge Freiheit[29].

Ancien directeur de collection aux éditions Copernic (« Factuelles »[30], « Théoriques », « Maîtres à penser » et « L'Or du Rhin », 1977-1981) et Pardès (« Révolution conservatrice »[31], 1989-1993), il dirige « Les Grands Classiques de l'homme de droite »[32] aux éditions du Labyrinthe (depuis 1982), et les « Classiques de la pensée politique » aux éditions L'Âge d'Homme (depuis 2003).

Bibliothèque modifier

Sa bibliothèque, qui contient de 150 000[33] à 200 000 ouvrages[34], est considérée comme la plus grande bibliothèque privée de France[35]. Elle est « dispersée dans deux maisons », l'une en Normandie et l'autre près de Versailles[36].

Vie privée modifier

Néopaïen[37], il a épousé Doris Christians en 1971[38]. Ils ont deux enfants[38].

Il est membre de Mensa France, une société à QI élevé[39], et de la Société des amis de Bayreuth (de)[40].

Idées, engagements et positions modifier

Engagements modifier

Alain de Benoist ne cache pas avoir été dans sa jeunesse militant d'extrême droite, mais il se défend[41] depuis longtemps de tout penchant pour le racisme[42] et pour le totalitarisme, malgré les accusations[43],[44] dont il est régulièrement l'objet. Il fustige du même coup la « suspicion » qu'entraîne selon lui le règne de la « pensée unique », expression dont la Nouvelle Droite revendique la paternité[45].

À partir de 1975[46], il a été membre de la Ligue nordique, fondée par Roger Pearson[47].

Il n'a pour autant jamais refusé de dialoguer avec la droite radicale, avec laquelle il a toujours entretenu des relations épisodiques[48] : lui a ainsi été reproché d'avoir été publié en Allemagne par Grabert-Verlag, une maison d'édition soupçonnée de néonazisme[49].

Olivier Schmitt, professeur de science politique, estime qu'Alain de Benoist est « le père intellectuel de la “Nouvelle Droite”, ce mouvement d'extrême droite qui tenta de se doter d'un corpus intellectuel cohérent pour servir de base idéologique à une progressive prise de pouvoir »[50].

À l'occasion des élections européennes de 1984, il déclare son souhait de voter en faveur de la liste communiste[51]. À la fin des années 1980, il prend position en faveur des Verts et soutient leur candidat Antoine Waechter[1].

En 1999, il signe pour s'opposer à la guerre en Serbie la pétition « Les Européens veulent la paix »[52], initiée par le collectif Non à la guerre[53]. La même année, à l'occasion du décès de Sigrid Hunke, militante pro-islam qui avait été nazie proche de Himmler, et dont lui-même fut l'ami[54], il lui rend hommage dans un article intitulé « Sigrid Hunke : Elle avait retrouvé la vraie religion de l’Europe »[55].

En octobre 2013, il participe à une conférence du National Policy Institute (en), think tank suprémaciste blanc américain[1].

Il est proche de Gabriel Matzneff, à propos de qui il affirma : « Qu’un écrivain déclare, comme la chose la plus naturelle du monde, qu’il préfère le commerce charnel des très jeunes personnes aux turpitudes classiques de ses contemporains, et il n’en faut pas plus — en pleine société permissive — pour le faire passer pour le Diable dans le Landerneau parisien »[56]. Ce dernier lui rendit hommage dans Yogourt et Yoga. Il se rapproche de Guy Hocquenghem, également pour l'abolition de la majorité sexuelle, qui brosse un portrait de lui dans Libération, « La Nouvelle droite, contre, tout contre », créant des remous dans une partie de la rédaction du quotidien[57].

Selon le site Buzzfeed, il apporte son suffrage à Jean-Luc Mélenchon au premier tour de l'élection présidentielle française de 2017[58], en raison de son virage « populiste » lors de la campagne présidentielle. Il change d'avis lorsque ce dernier se détourne de sa stratégie politique.

En , il signe une pétition en soutien à des militants de Génération identitaire poursuivis en justice[59].

Orientation politique modifier

Dans son ouvrage de synthèse sur l'évolution des différents courants de l'extrême droite en France depuis 1945, le politologue Jean-Paul Gautier cite de très nombreuses fois Alain de Benoist pour son rôle historique au sein de diverses organisations de la mouvance d'extrême droite, ainsi que pour son rôle idéologique de théoricien de la mouvance, rôle notable et toujours d'actualité en 2009[60].

Selon Camille Bordenet et Ariane Chemin du journal Le Monde, Alain de Benoist est respectivement « proche de l'extrême droite » ou « intellectuel d’extrême droite »[61],[62]. Libération et L'Opinion le classent à l'extrême droite[63],[64]. Dans un article sur Martin Heidegger en , François Rastier, directeur de recherche au CNRS, estime qu'Heidegger connait un regain d'intérêt dans « toute l'extrême droite internationale », et il cite notamment Alain de Benoist[65].

D'après Guillaume Gendron, auteur à Libération, Alain de Benoist est une « figure identitaire française », et « le théoricien de la Nouvelle Droite », « mouvance charnière entre droite et extrême droite »[66].

Pour Roger Griffin, qui rappelle qu'Alain de Benoist s'est opposé aux considérations antimusulmanes et anti-immigration du Front national[67], la question même de son rattachement à l'extrême droite ne va pas de soi[68]. Selon le politologue Stéphane François, Alain de Benoist n'a pas joué le rôle de matrice pour le FN, il « n'a rien à voir avec le FN », et si Alain de Benoist « ne cache pas son intérêt pour Marine Le Pen », il « conteste le jacobinisme et l’islamophobie du Front national »[20]. Il critique également « un mépris total des idées » au sein du parti et dit n'avoir jamais voté pour le FN[1].

Cependant, Renaud Dély affirme que, dans un éditorial publié en 2012 sous le pseudonyme Robert de Herte dans la revue Éléments, Alain de Benoist a pris la défense des « nouveaux réactionnaires » louant leur propension à « mettre en cause avec plus ou moins d’audace, les grandes idoles de notre temps : la croyance au "progrès", l’idéologie du "genre", l’antiracisme de convenance, l’impératif de métissage, la culture de masse ou bien encore l’art contemporain ». Et Alain de Benoist fustige « les défenseurs du monothéisme du marché, les nouveaux curés des droits de l’homme qui dispensent leurs sermons moralisateurs, se veulent défenseurs du Bien […] et remplissent ainsi leur rôle de chiens de garde du système en place ». Répondant à Michel Onfray, qui estime qu'Alain de Benoist a évolué, Renaud Dely conclut : « Alain de Benoist a évolué : il n’a sans doute jamais été aussi proche du discours du Front national »[69].

Marianne rapporte qu'en 1979, Guy Hocquenghem, « essayiste de gauche », publie dans Libération avec l'accord de Serge July, une enquête sur l'école de pensée « nouvelle droite » d'Alain de Benoist, qu'il rencontre pour l'occasion. Pour Guy Hocquenghem, Alain de Benoist est à « des années-lumière » du portrait de l’horrible néo-nazi qu’en faisait alors le reste de la presse, et il soutient qu'il ne faut pas traiter cette école de pensée avec mépris ou la réduire à « un travestissement de la vieille droite fascisante ». L'enquête est jugée complaisante par une partie de la rédaction de Libération, et certains journalistes démissionnent. Selon Marianne, plus tard, Krisis, la revue d’Alain de Benoist tentera de « sortir la droite » du « ghetto intellectuel » dans lequel elle était proscrite, en accueillant des intellectuels venus d'horizons bien plus variés (Jean-François Kahn, Jacques Julliard, Régis Debray, Jean Baudrillard, Jean-Luc Mélenchon…) « pour marquer sa rupture avec les milieux d’extrême droite dont Alain de Benoist est effectivement issu et qu’il continuera d’inspirer longtemps »[70].

Renaud Dély considère de Benoist comme une « figure issue de l’extrême droite », qui, « pour éviter de se retrouver confiné à l’extrême droite de l’échiquier intellectuel », « s’est ingénié à nouer des liens avec des penseurs de l’autre bord »[69]. Pour le politologue Jean-Paul Gautier, la création de la revue Krisis par Alain de Benoist s'accompagne d'une vaste ambition, celle d'attirer à lui des collaborateurs de gauche, afin de créer un front commun dans la critique du « système », de faire converger les adversaires de la « pensée unique »[60]. Le politologue Stéphane François estime qu'à un moment donné, Alain de Benoist s'est détourné des thèmes fondateurs de la Nouvelle Droite[20].

En 2015, Le Point, qui qualifie Alain de Benoist d'« intellectuel étiqueté (très) à droite », rapporte que ce dernier a déclaré : « Je me sens plus à gauche que Manuel Valls ! »[71]. Commentant ce propos d'Alain de Benoist, le politologue Stéphane François déclare : « Pourquoi pas, mais l’on n’oubliera pas que tout un pan de la droite radicale est anticapitaliste, dans la lignée de la révolution conservatrice allemande des années 20 et du national-bolchévisme »[20]. Le sociologue Razmig Keucheyan considère son anticapitalisme comme marqué à droite, et différant de l'anticapitalisme de gauche en ce qu'il ne défend pas les travailleurs exploités par le système capitaliste mais s'oppose à « l'« illimitation » de l’accumulation du capital », qui pour Alain de Benoist « met tout en équivalence, et détruit la singularité des cultures et des modes de vie ». Ainsi, Keucheyan estime que « c'est son ethno-différentialisme qui conduit A. de Benoist à l’anticapitalisme »[1].

Idéologie modifier

S'efforçant d'adopter un point de vue, il croise plusieurs références dans ses écrits et convie ainsi à leur appui aussi bien Karl Marx[72] que Martin Heidegger[73], Gustave Le Bon ou Friedrich Nietzsche. Son œuvre touche des thèmes divers tels que le paganisme[74], l'immigration[75], races, racismes et identités[76], l'antiaméricanisme[77], la construction européenne[78], l'écologie[79], la lutte contre le néolibéralisme[80], la philosophie politique, l'histoireetc.

Selon l'historien américain Todd Shepard, dans les années 1960 1970, après la défaite française en Algérie, Alain de Benoist fait partie des théoriciens qui parlent d'une « invasion » de la France par les hommes arabes, inversant les idées sur la colonisation de l'Algérie par la France, mettant en avant une colonisation à l'envers, une victimisation des Français par les hommes arabes, ce qui a pour conséquence d'occulter la victimisation des colonisés algériens et d'effacer l'histoire[81],[82]. Selon Nicolas Lebourg, Alain de Benoist condamne la « violence » de Guillaume Faye, animateur du « courant ethniciste de la Nouvelle Droite » et « apôtre de la guerre raciale et de la reconquête de l’Europe contre les Arabo-musulmans »[83]. Guillaume Faye quitte le GRECE à la suite de désaccords avec Alain de Benoist[84].

Renaud Dély dans L'Obs estime que la réputation d'Alain de Benoist tient à sa participation à la fondation du GRECE en 1968, et que cet organisme est un « véritable laboratoire de refondation idéologique de l’extrême droite », une « école de pensée » dans laquelle on trouve notamment une quête identitaire et un racialisme établissant une hiérarchie des cultures et des peuples. Cette idéologie a permis par exemple de justifier l'existence de l'apartheid en Afrique du Sud dont Benoist fait l'apologie sous le pseudonyme de Fabrice Laroche en 1965, dans Vérité pour l’Afrique du Sud[85]. Le politologue Jean-Paul Gautier affirme que « le nationalisme d'Alain de Benoist est […] fondamentalement raciste et européen »[60].

Selon Pierre-André Taguieff, Alain de Benoist est le principal rédacteur du fascicule doctrinal Qu'est-ce que le nationalisme ? (15 pages), dans lequel le nationalisme est présenté « comme une « conception du monde » fondée sur « les données naturelles de la vie » », desquelles découleraient des inégalités raciales, ainsi que des différences de cultures et de systèmes de valeur. Pierre-André Taguieff cite un extrait de ce fascicule : « L'étude objective de l'Histoire montre que seule la race européenne (race blanche, caucasoïde) a continué à progresser depuis son apparition sur la voie montante de l'évolution du vivant, au contraire de races stagnantes dans leur développement, donc en régression virtuelle. […] La race européenne n'a pas de supériorité absolue. Elle est seulement la plus apte à progresser dans le sens de l'évolution… Les facteurs raciaux étant statistiquement héréditaires, chaque race possède sa psychologie propre. Toute psychologie est génératrice de valeurs ». Selon Pierre-André Taguieff, cette conception racialiste de la nation rend le nationalisme compatible avec la référence aux « Indo-Européens », ce qui justifie l'unification européenne, formée de peuples de la même origine[86].

En 1982, dans son ouvrage Pour un « gramscisme de droite », Alain de Benoist, influencé par le théoricien marxiste Antonio Gramsci, argue de l'importance de l'hégémonie culturelle dans le combat politique que mène la Nouvelle Droite, à des fins de « reconquête intellectuelle ». Pour Benoist, l'extrême droite étant en position de faiblesse dans l'arène idéologique, elle doit se battre en cherchant « à introduire patiemment ses catégories de pensée dans la culture dominante » et agir sur le domaine métapolitique. La même année, dans un texte qu'il fait paraître dans sa revue Éléments, il déclare sa préférence pour l'Union soviétique face aux États-Unis, estimant que le régime soviétique serait moins « cosmopolite ». Cependant, dans Europe, Tiers-monde, même combat, il estime l'Europe dans une situation analogue à celle du Tiers-monde, prise en étau entre les États-Unis et l'URSS. Selon lui, les pays européens et du Tiers-monde partagent ainsi des intérêts communs et devraient s'allier. Au moment de la chute du mur de Berlin, il se rapproche des milieux ultranationalistes russes, notamment des nationaux-bolchéviques Alexandre Douguine et Édouard Limonov[1].

D'après Stéphane François, la Nouvelle Droite est le courant qui a le plus théorisé l'idéologie identitaire, qu'il analyse comme étant le « rejet de l'Autre », c'est-à-dire défendre que les « bienfaits des Etats-providence européens » profitent « aux seuls Européens au sens ethnique du terme », mais aussi « défendre la civilisation européenne du métissage ethnique et culturel ». Plusieurs « cadres importants de ce courant de l’extrême droite sont devenus dans les années 1990 des pionniers de l’« identitarisme » », et Alain de Benoist en fait partie « dans une certaine mesure », car s'il « refuse le racisme », il « défend dans le même mouvement la défense des identités »[84]. En , Stéphane François estime que la Nouvelle Droite et Alain de Benoist n'ont pas changé : il note qu’il « n’a jamais arrêté d’écrire ou de donner des entretiens à la presse d’extrême droite, notamment celle qui se proclame identitaire, y compris après sa supposée rupture avec celle-ci »[87].

Le sociologue Sylvain Crépon présente Alain de Benoist comme étant le fondateur du GRECE, et affirme que cet organisme, dans un premier temps, a pour objectif de « rasseoir dans les consciences la supériorité de la race blanche », mais y échoue. Le « groupe d’Alain de Benoist » va alors changer d'orientation et défendre le droit à la différence culturelle, ce qui lui permet de se présenter comme étant le « parti de la diversité et de la tolérance contre celui de l’uniformité impériale et de la déculturation des peuples ». Alain de Benoist critique l'universalisme des droits de l’homme qu'il définit comme un « ethnocentrisme », car ne respectant pas l'importance des « identités collectives héritées ». L'idée d'aider les pays du sud en voie de développement a pour objectif que les pays du nord comme du sud puissent sauvegarder leurs spécificités culturelles en évitant le mélange des populations et trouver par ailleurs un développement économique conforme à ces spécificités. Alain de Benoist désigne le libéralisme économique comme étant son « ennemi principal ». Selon lui, le modèle unique de développement économique, en faisant de la « valeur marchande l’instance souveraine de toute vie commune », est une menace pour l'identité culturelle des peuples. Il estime que les « pulsions individualistes et économicistes » conduisent à une « concurrence généralisée » et à la désagrégation du lien social[88].

Selon Renaud Dély, Alain de Benoist développe aussi des critiques de la société de consommation et des conséquences de la mondialisation qui le rapproche de l'extrême gauche. Par ailleurs, d'après Alain de Benoist, le clivage politique n'est plus désormais entre la droite et la gauche, mais entre le peuple et des « élites mondialisées qui n’ont jamais digéré la souveraineté populaire et ont fait allégeance à la mondialisation économique ». Alain de Benoist prophétise que le capitalisme est dans un processus d'autodestruction qui conduira à une troisième guerre mondiale, qui ne sera pas une « guerre de civilisation entre l’Islam et l’Occident » mais « entre l’Est et l’Ouest »[69].

Selon Olivier Schmitt, professeur de science politique, « l'analyse de l'empire américanosioniste comme instrument de l'extension d'un capitalisme transnational et cosmopolite destructeur des peuples et des ethnies se diffuse à l'extrême droite et dans une partie de la droite classique à partir des années 1970 grâce aux travaux d'Alain de Benoist »[50].

Pour la politologue Ariane Chebel d'Appollonia, il est incontestable que le GRECE, dont Alain de Benoist est l'un des fondateurs, a contribué à la diffusion du néo-fascisme en France, et ceci malgré les déclarations d'Alain de Benoist, qui affirme que les travaux théoriques de la Nouvelle droite avaient pour objectif de proposer une « alternative cohérente à l'intention d'une famille d'esprit qui n'a que trop souvent été séduite par les sirènes de l’extrémisme, de l’activisme, de l'ordre moral, du christianisme et du racisme »[89]. Proche de cette analyse, Philippe Corcuff, tout en reconnaissant à Alain de Benoist une « curiosité intellectuelle rare » et le fait de posséder « une large culture philosophique et en sciences humaines », le range parmi ces intellectuels qui participent de ce qu'il nomme « la grande confusion », c'est-à-dire la perméabilité des camps politiques traditionnels aux idées que Corcuff associe avec l'extrême-droite[90].

Publications modifier

Alain de Benoist est l'auteur de plus d'une centaine d'ouvrages et de milliers d'articles et d'entretiens[91].

Pseudonymes modifier

Outre son pseudonyme principal de « Cédric de Gentissard »[39], il en a utilisé plusieurs autres, notamment ceux de « Fabrice Laroche »[39] (inspiré du nom de Pierre Drieu la Rochelle[92], et qu'il employait au début de sa carrière de journaliste), « Robert de Herte »[39] (sous lequel il rédige les éditoriaux d’Éléments[93]) et « David Barney », mais aussi « Fabrice Valclérieux »[94],[95],[96], « Éric Saint-Léger », « Éric Lecendreux »[40], « Martial Laurent », « Tanguy Gallien », « Frédéric Laurent », « Pierre Dolabella », « Maxime Meyer », « Jean-Pierre Dujardin », « Frédéric Toulouze », « Jean-Louis Cartry », « Julien Valserre », « Pierre Jacob » ou « Pierre Carlet »[11]. Il a probablement aussi utilisé les noms « Éric Dumesnil »[40] et « Gilles Foumier »[39].

Dans la Bibliographie qu’il a publiée en 2009, Alain de Benoist donne la quasi-totalité de ses pseudonymes (une quinzaine), mais en omet : Bastien O’Danieli, une anagramme, « et surtout Mortimer G. Davidson, utilisé en Allemagne pour publier une encyclopédie sur l’art nazi, Kunst in Deutschland, parue en 4 volumes entre 1988 et 1995 chez l’éditeur néo-nazi Grabert, qui était aussi dans les années 1980 et 1990 son éditeur et traducteur attitré en Allemagne[21] »[97].

Il a également participé (avec entre autres Yves Christen) à l'ouvrage Race et Intelligence, signé « Jean-Pierre Hébert »[98] (1977)[99]. Il a par ailleurs été membre du collectif « Maiastra », qui a fait paraître l'ouvrage-manifeste Renaissance de l'Occident ? (1979), dans lequel sa contribution est néanmoins signée de son nom[100]. Anne-Marie Duranton-Crabol estime en 1988 que « ce jeu de masques », qui « apparaît aussi puéril que vain », « s'apparente à la pratique du “dit sans le dire”, très fréquente chez Alain de Benoist »[101].

Ouvrages modifier

Notes et références modifier

  1. a b c d e et f Razmig Keucheyan, Alain de Benoist, du néofascisme à l'extrême droite “respectable”, Paris, La Découverte, , 160 p. (ISBN 9782707193988, lire en ligne), p. 128-143
  2. Christophe Bourseiller, L'Extrémisme. Enquête sur une grande peur contemporaine, CNRS éditions, 2012, p. 156.
  3. Frédéric Charpier, Génération Occident, Seuil 2005 : A. de Benoist aurait eu quinze ans et demi lorsque Coston lui a proposé en 1959 de rédiger des notices pour le numéro spécial de Lectures françaises (626 pages), Partis, Journaux et Hommes politiques d'hier et d'aujourd'hui (décembre 1960) selon cet auteur. Un « Cédric de Gentissard » signe en effet certaines notices, telle celle consacrée à l'histoire de l'Action française, p. 27-36.
  4. Philippe Lamy (sous la dir. de Claude Dargent), Le Club de l'horloge (1974-2002) : évolution et mutation d'un laboratoire idéologique (thèse de doctorat en sociologie), Paris, université Paris-VIII, , 701 p. (SUDOC 197696295, lire en ligne), p. 86, n. 1.
  5. Nicolas Lebourg, « La diffusion des péjorations communautaires après 1945, Abstract », Revue d'éthique et de théologie morale, no 267,‎ , p. 35–58 (ISSN 1266-0078, DOI 10.3917/retm.267.0035, lire en ligne, consulté le )
  6. « Mouvement nationaliste du progrès. France », sur data.bnf.fr (consulté le ).
  7. Duranton-Crabol 2009.
  8. Dans cette brochure parue aux éditions Saint-Just, Gilles Fournier et Fabrice Laroche écrivent : « À l'heure de la décolonisation et de la négrification internationale, elle [l'Afrique du Sud] maintient avec succès un gouvernement blanc, fier de son œuvre et résolu à la poursuivre » (p. 8) et « nous sommes attachés à la nation blanche sud-africaine parce qu'elle est, en tant qu'État, le dernier fortin de l'Occident dont nous sommes issus » (p. 19).
  9. Sur la Nouvelle Droite. Jalons d'une analyse critique, Paris, Éditions Descartes et Cie, 1994, p. 136.
  10. « Mon désir est en quelque sorte de créer une nouvelle droite » dans l'émission Radioscopie de Jacques Chancel, le 28 novembre 1977, sur France Inter (« Radioscopie de Jacques Chancel du 28 novembre 1977 », sur ina.fr).
  11. a et b Lamy 2016, p. 91.
  12. Jean-Yves Camus et René Monzat, Les Droites nationales et radicales en France : répertoire critique, Lyon, Presses universitaires de Lyon, , 526 p. (ISBN 2-7297-0416-7), p. 267.
  13. Lamy 2016, p. 264-265.
  14. Duranton-Crabol 1988, p. 124.
  15. Duranton-Crabol 1988, p. 152.
  16. Duranton-Crabol 1988, p. 188.
  17. Voir sur lemonde.fr.
  18. Lamy 2016, p. 571.
  19. Sylvain Laurens, « Le Club de l'horloge et la haute administration : promouvoir l'hostilité à l'immigration dans l’entre-soi mondain », Agone no 54, 2014, p. 90 (lire en ligne).
  20. a b c et d « Polémique Valls-Onfray : "Les néodroitiers ont contribué à structurer le FN, sans en devenir la matrice" », Libération.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  21. a et b Alain de Benoist, une obsession identitaire très médiatique.
  22. Un des éléments sous-tendant cette recherche d'alliance est l'opposition radicale à l'Occident (conçu à la fois comme bloc et comme concept), dangereux tant pour l'Europe que pour le Tiers monde d'après Alain de Benoist, qui le désigne comme ennemi principal : « Ce qui menace aujourd’hui le plus l’Europe, ce n’est ni l’islam, ni l’islamisme ni le “choc des civilisations”. C’est l’Occident lui-même, dont l’être se réduit de plus en plus à la logique de la marchandise et à la réification des rapports sociaux. J’ai plusieurs fois employé l’expression de “Forme-Capital”, qui avait été lancée par Gérard Granel. Cette expression va très au-delà du capitalisme au sens étroit du terme. Elle définit le capital en tant que déstructuration généralisée de l’imaginaire symbolique, en tant qu’avènement d’un idéal de l’illimité (ce que Heidegger appelait le Gestell) dont la mise en œuvre entraîne de telles modifications anthropologiques qu’elle peut aboutir à l’effacement de l’humain comme tel. Je ne vois pas aujourd’hui d’ennemi plus puissant. C’est donc pour moi l’ennemi principal. » Cet entretien publié sur internet(2005).
  23. En 1974, Alain de Benoist écrivait : « À supposer que l'Europe veuille voir se briser la bipolarité née de Yalta qui l'empêche de trouver son unité, ce n'est pas vers les deux superpuissances qu'elle devra se tourner dans les années qui viennent mais bien vers la nation arabe et le peuple chinois, seules forces montantes susceptibles de restituer au jeu mondial des influences sa nécessaire pluralité », « Contre tous les racismes », Éléments, no 8-9, novembre 1974.
  24. Christian Savés, Sépulture de la démocratie : Thanatos et Politique, L'Harmattan, 2008, p. 73.
  25. (en) Tamir Bar-On, Where Have All the Fascists Gone?, Ashgate Publishing, Ltd., 2007, p. 29-30.
  26. a et b Boucher 2007.
  27. « Entretien avec Stéphane François », CQFD, no 124,‎ , p. 12-13 (lire en ligne).
  28. TV Libertés, la webtélé des ultra-réacs qui se rêve en "Fox News à la française", Marianne, 29 avril 2016.
  29. Rachel Knaebel, « Allemagne : comment la droite mène la bataille des idées », Le Monde diplomatique,‎ (lire en ligne, consulté le )
  30. (SUDOC 013377795).
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  37. André de Halleux (en), « Démètre Théraios (éd.), Quelle religion pour l'Europe ? Un débat sur l'identité religieuse des peuples européens. 1990 », Revue théologique de Louvain, vol. 2, no 23,‎ , p. 255 (lire en ligne).
  38. a et b « Alain de Benoist », sur whoswho.fr, .
  39. a b c d et e Pierre-André Taguieff, L’héritage nazi : Des Nouvelles Droites européennes à la littérature niant le génocide (lire en ligne).
  40. a b et c Duranton-Crabol 1988, p. 61.
  41. À plusieurs reprises, Alain de Benoist a expliqué en quoi il différait de la droite et de l'extrême droite et divergeait par rapport à elles. Citons, à titre d'exemples, l'entretien paru en 2005 dans le numéro 118 d’Éléments, ainsi que l'émission Regarde les hommes changer du , au cours de laquelle Frédéric Taddeï parle avec Benoist de son parcours.
  42. « La Nef n°284 Septembre 2016 », sur La Nef
  43. Interrogé par la revue américaine Telos sur les raisons de sa « démonisation », Alain de Benoist a, en préalable à l'explication de ce qu'il estime en être les raisons profondes, évoqué ce passé (traduction de l'anglais) : « Il serait facile de répondre que, voilà trente ans, je me suis, étant étudiant, engagé dans des organisations de droite radicale. Cela dans le contexte très spécial de la guerre d'Algérie, en un temps où la politisation de l'université était particulièrement intense. Quand j'ai lancé Nouvelle École, une partie de mes collaborateurs partageaient de semblables antécédents politiques. Ce fut le début d'une "longue marche", une évolution intellectuelle qui s'est étalée sur plus d'un quart de siècle. Malheureusement, un passé d'extrême droite rend un homme à tout jamais suspect, au contraire d'un passé d'extrême gauche, la plupart du temps facilement oublié et “pardonné” !… » (Interview with Telos, winter 1993/spring 1994).
  44. Si d'aucuns, tel le romancier Didier Daeninckx, ont dénoncé en Alain de Benoist un « nazi masqué ». Jacques Julliard, commentant en termes élogieux une préface d'Alain de Benoist, s'est ému qu'on ait fait de ce dernier « le réprouvé de nos lettres » (sur LCI, le 12 juillet 2007). Pour Anne-Marie Duranton-Crabol, Alain de Benoist est « à la fois le maître à penser de la Nouvelle Droite et un philosophe auquel son non-conformisme vaut des marques de reconnaissance dans des sphères très éloignées de l'extrême droite » ; Duranton Crabol 2009 . De fait, ce dernier est, davantage qu'en France, cité en Italie, où il entretient un dialogue cordial avec des intellectuels d'extrême gauche : d'après le sociologue italien Carlo Gambescia, dans un entretien accordé à Éléments (no 127, hiver 2008) : « Quant à l'influence d'Alain de Benoist en Italie, je la mettrais au même rang que celle qu'a eue voilà plus d'un siècle un autre grand penseur politique français, Georges Sorel : […]. De même que Sorel influença, fût-ce de manière critique, Antonio Gramsci […], de même peut-on retrouver — en ligne directe ou indirecte, c'est encore difficile à dire —, des traits de la pensée d'Alain de Benoist chez des penseurs de gauche comme Pietro Barcellona, Costanzo Preve ou Danilo Zolo ». Sur les rapports intellectuels entre Benoist et Preve, on se reportera aux conversations publiées dans Éléments (no 115 et 116) : partie 1 ; partie 2.
  45. En septembre 1993, dans un éditorial d’Éléments titré « Maccarthysme : le retour », « Robert de Herte » (Alain de Benoist) écrivait :

    « Sait-on qu'il y a maintenant des “samizdats” qui fleurissent à Paris, sur le modèle de ceux qui circulaient clandestinement en Russie à l'époque soviétique ? C'est un signe des temps. À l'Est, on peut aujourd'hui tout dire. À l'Ouest, et singulièrement en France, la machine à ostraciser étend son emprise par cercles concentriques. Les grands journaux n'en forment déjà plus qu'un, les chaînes de télévision n'en font plus qu'une, les principaux partis politiques ont tous le même programme. Partout se met en place le système de la pensée unique… »

    Cinq ans plus tard, il revenait, dans un nouvel éditorial, sur la signification et les manifestations de cette « pensée unique » : « Une société de clones », Éléments, no 88, 3 avril 1997.

  46. Marie-José Chombart de Lauwe (préf. Madeleine Rebérioux, postface Yves Jouffa), Vigilance : vieilles traditions extrémistes et droites nouvelles, Paris, Études et documentation internationales/Ligue des droits de l'homme, (ISBN 2-85139-084-8), p. 100.
  47. François 2014, p. 117.
  48. Les dialogues avec ce courant donnent souvent lieu à de vives polémiques. Ainsi, Dominique Venner ayant interpellé Alain de Benoist à propos de sa lecture de l'histoire de la droite, ce dernier a répliqué par une sévère critique des droites et de l'analyse de Venner (cf. « La droite en questions », Éléments, no 119, hiver 2005-2006). De tels échanges sont aussi parfois - ainsi qu'en témoigne cet entretien avec Terre et Peuple -, l'occasion pour Alain de Benoist de réfuter les convictions de ses interlocuteurs.
  49. Pierre-André Taguieff a contesté les accusations de « nazisme déguisé » amplifiées par cette publication dans un article paru aux États-Unis (et dans son livre cité plus haut) : « […] Que le père, désormais décédé, de l'un de ses éditeurs allemands (Grabert-Verlag) ait été nazi [ne suffit pas] à établir son identité [celle de Benoist] de “nazi masqué” […] ». (Pierre-André Taguieff, (en) « Discussion or Inquisition? The case of Alain de Benoist », Telos, op. cit.). De son côté, Alain de Benoist a, dans les mêmes colonnes, répondu à ces accusations, évoquant plusieurs de leurs déclinaisons (traduction de l'anglais) : « […] Mes livres ont été traduits en six ou sept langues et par plus de quinze éditeurs étrangers (dont cinq en Allemagne). Certains se focalisent sur le seul livre qu’ils peuvent instrumentaliser (c’est-à-dire celui publié chez Grabert Verlag) et oublient les autres. Je suis un journaliste, et une partie de mon travail consiste à rencontrer, à m’associer avec plusieurs personnes. J’ai des relations et des amis de différentes convictions politiques. Les gens malhonnêtes sélectionnent les noms qu’ils peuvent utiliser, même s’ils ne sont que dix ou quinze, et ignorent les autres, même s’ils sont cent. Ils ne prêtent pas attention à ce qui est publié dans Nouvelle École, mais se concentrent sur ce que deux ou trois collaborateurs ont fait ou dit indépendamment de leur participation au journal. Il n’est pas besoin de discuter plus avant ce genre de méthodes. Ces gens ne représentent qu’eux-mêmes. Je ne sélectionne pas mes éditeurs (ils achètent les droits de mes livres et négocient directement avec mes éditeurs français). Être publié par tel éditeur n’implique pas adhésion au contenu de tout ce qu’il publie. […] » (Interview with Telos, art. cit.).
  50. a et b Olivier Schmitt, Pourquoi Poutine est notre allié ?: Anatomie d'une passion française, Hikari Editions, (ISBN 9782367740843, lire en ligne)
  51. Duranton-Crabol 1988, p. 212.
  52. « Liste des personnalités signataires de l'Appel », sur nonguerre.chez.com.
  53. Renaud Dély, « L'extrême droite ratisse large contre les frappes de l'Otan. Le «Collectif non à la guerre» a tenu une réunion proserbe hier soir », sur liberation.fr, .
  54. Stéphane François, La Nouvelle Droite et le nazisme (lire en ligne [archive])
  55. Robert de Herte (Alain de Benoist), Sigrid Hunke : elle avait retrouvé la vraie religion de l’Europe, revue Éléments pour la civilisation européenne, n° 96, novembre 1999.
  56. Pierre Verdrager, L'Enfant interdit – Comment la pédophilie est devenue scandaleuse, Paris, Armand Colin, coll. « Individu et société », 2013, 344 p. (ISBN 978-2200286439), p. 90-92.
  57. Quand Onfray remet la gauche à sa place, marianne.net, 9 mars 2015
  58. (en) Pierre Buet et J. Lester Feder, « The Man Who Gave White Nationalism A New Life », sur buzzfeed.com, « His first choice in the French election was the leftist candidate Jean-Luc Mélenchon. ».
  59. « Envahissement des locaux de SOS Méditerranée : 56 personnalités soutiennent Génération identitaire », sur francetvinfo.fr, (consulté le ).
  60. a b et c Jean-Paul Gautier, Les extrêmes droites en France: De 1945 à nos jours, Syllepse, (ISBN 9782849505700, lire en ligne)
  61. « Prof d’histoire-géo, Elizabeth croit en l’école de Marine Le Pen », sur Le Monde.fr (consulté le )
  62. « Alain de Benoist, intellectuel d’extrême droite, accueilli à bras ouverts à Sciences Po », sur Le Monde.fr (consulté le )
  63. « L'intellectuel d'extrême droite Alain de Benoist accueilli à Sciences-Po Paris sans polémique », Libération.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  64. « «Marine Le Pen n’a pas liquidé la pensée d’extrême-droite. Elle l’a rendue plus solide» », L'Opinion,‎ (lire en ligne, consulté le )
  65. « Un antisémitisme exterminateur », Libération.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  66. « La culture Alt-Right : de l’extrême droite française à «Fight Club» - Œil sur le front », L'Oeil sur le Front,‎ (lire en ligne, consulté le )
  67. (en) Roger Griffin, Matthew Feldman, Fascism: Critical Concepts in Political Science, Taylor & Francis, 2004, p. 362.
  68. Ibid., p. 166.
  69. a b et c « Michel Onfray et les "idées justes" d’Alain de Benoist », Bibliobs,‎ (lire en ligne, consulté le )
  70. « Quand Onfray remet la gauche à sa place », Marianne,‎ (lire en ligne, consulté le )
  71. Laureline Dupont, « Alain de Benoist : "Je me sens plus à gauche que Manuel Valls !" », Le Point,‎ (lire en ligne, consulté le )
  72. Alain de Benoist a manifesté un intérêt pour la pensée de Marx (tendance concrétisée en 2004, à la faveur de la réalisation pour Éléments d'un dossier sur l'auteur du Capital) dont il a reconsidéré l'actualité. « Marx, dit-il, n'a pas seulement été l'un des premiers à expliquer de façon convaincante comment le capitalisme organise l'expropriation des producteurs sur laquelle il se fonde, il a surtout été celui qui, de manière véritablement géniale, a compris que le système capitaliste est un système anthropologique — ce que j'appelle moi-même la Forme-Capital — plus encore qu'un système purement économique. » (Rébellion, no 26, septembre-octobre 2007). On lira également son éditorial ouvrant le numéro d'Éléments consacré au penseur allemand.
  73. Selon Pierre-André Taguieff (op. cit.), la découverte (aux alentours de 1979-1982), de la pensée d'Heidegger a permis à Alain de Benoist de dépasser son nietzschéisme de jeunesse et « [d'atteindre] ce qu'il est convenu d'appeler la maturité intellectuelle. » Cf. sur ce point « Heidegger, critique de Nietzsche. Volonté de puissance et métaphysique de la subjectivité ».
  74. La publication en 1981 de Comment peut-on être païen ? a fait d'Alain de Benoist l'un des rares auteurs à proposer une interprétation philosophique du paganisme antique. Il s'agit dans sa perspective d'y avoir recours et non d'y faire retour : le paganisme d'Alain de Benoist ne consiste pas en une croyance dans la réalité des panthéons européens, mais en la recherche d'une vue-du-monde (Weltanschauung) proprement païenne. S'agissant de ce qui, selon le penseur, fait la singularité païenne, se reporter à « La religion de l'Europe », texte paru, un an avant son livre sur le sujet, dans la revue Éléments.
  75. Alain de Benoist voit dans l'immigration la conséquence d'une marchandisation/réification de l'humanité contraignant des peuples à s'arracher de leur terre pour fuir la misère, mais aussi l'instrumentalisation xénophobe dont le phénomène fait l'objet. La réponse qu'il fit à une question d'un journaliste de Junge Freiheit (parue dans l'édition du de cet hebdomadaire, l'intégralité de l'entrevue étant reprise dans C'est-à-dire, Les Amis d'Alain de Benoist, 2006) constitue un résumé de sa position :

    « […] Les partis politiques spécialisés dans la dénonciation anti-immigrés ne sont rien d'autre que des partis démagogiques petits-bourgeois, qui essaient de capitaliser sur les peurs et les misères du monde actuel en pratiquant la politique du bouc émissaire. L'expérience historique nous a montré vers quoi conduisent de pareils joueurs de flûte ! Il faut ici distinguer l'immigration et les immigrés. L'immigration est un phénomène négatif, puisqu'elle est elle-même le fruit de la misère et de la nécessité, et les sérieux problèmes qu'elle pose sont bien connus. Il est donc nécessaire de chercher, sinon à la supprimer, du moins à lui enlever le caractère trop rapide et trop massif qui la caractérise actuellement. Il est bien évident qu'on ne résoudra pas les problèmes du Tiers-monde en conviant ses populations à venir en masse s'installer dans les pays occidentaux ! En même temps, il faut avoir une vue plus globale des problèmes. Croire que c'est l'immigration qui porte principalement atteinte à l'identité collective des pays d'accueil est une erreur. Ce qui porte atteinte aux identités collectives, c'est d'abord la forme d'existence qui prévaut aujourd'hui dans les pays occidentaux et qui menace de s'étendre progressivement au monde entier. Ce n'est pas la faute des immigrés si les Européens ne sont plus capables de donner au monde l'exemple d'un mode de vie qui leur soit propre ! L'immigration, de ce point de vue, est une conséquence avant d'être une cause : elle constitue un problème parce que, face à des immigrés qui ont souvent su conserver leurs traditions, les Occidentaux ont déjà choisi de renoncer aux leurs. L'américanisation du monde, l'homogénéité des modes de production et de consommation, le règne de la marchandise, l'extension du marché planétaire, l'érosion systématique des cultures sous l'effet de la mondialisation entament l'identité des peuples beaucoup plus encore que l'immigration. […] »

    Sur la question, cf. également « L'immigration autrement ».

  76. Cf. « Contre tous les racismes », art. cit., et, plus représentatif de son approche actuelle, « Qu'est-ce que l'identité ? »
  77. L'antiaméricanisme est, pour Pierre-André Taguieff (op. cit.), la « passion négative » d'Alain de Benoist, qui, par sa radicalité (cf. notamment Orientations pour des années décisives, Labyrinthe, 1982), lui a fait perdre, au tournant des années 1980, toute « respectabilité » dans les milieux de droite conservateurs, anticommunistes et libéraux (ainsi son exclusion de la presse Bourgine), sans pour autant lui attirer les bonnes grâces de la gauche : « Qu'Alain de Benoist ait payé un tel prix pour le maintien de ses positions sur les États-Unis et le communisme [entre lesquels il refusait de choisir] est un indicateur de ce que, pour cet intellectuel atypique, les “idées” comptent. Étrangement, ce théoricien de la “stratégie culturelle” s'est, au moins sur ce point, montré bien peu, ou fort mauvais, stratège. Comme si la logique de l'idée avait chassé les considérations d'opportunité, comme si l'idéologique avait fait oublier le pragmatique. » Pour nuancer cet « anti-américanisme », cf. « L'Amérique qu'on aime », Éléments, no 116, printemps 2005.
  78. L'itinéraire d'Alain de Benoist est marqué par un très fort attachement à l'Europe, tant comme civilisation historique que comme construction politique. L'Europe est en quelque sorte le « combat » de sa vie : « L'attachement passionné à l'Europe, confie-t-il, est certainement un des ressorts les plus puissants qu'il y ait chez moi. Je me définis comme un Européen : comme un homme qui, partout en Europe, se sent chez lui. Peut-être même pourrait-on dire que la volonté de voir l'Europe se réapproprier ce qui la fonde en propre, de la voir reconquérir sa liberté et proposer au monde un modèle, à la fois “impérial” et organique, d'existence commune, constitue le point le plus fixe de mon évolution personnelle. » (« Vers de nouvelles convergences », entretien avec A. de Benoist, Éléments, no 56, décembre 1985-février 1986, p. 16, cité dans P.-A. Taguieff, op. cit., p. 265). Pour de récentes réflexions sur l'évolution européenne (sur laquelle il porte un regard très critique), on se reportera au dossier du no 127 d'Éléments (hiver 2008) : « Alain de Benoist : On peut encore sauver l'Europe ! ».
  79. S'intéressant à la question écologique dans ses implications philosophiques (cf. par exemple « La nature et sa “valeur intrinsèque” »), Alain de Benoist s'est, depuis la parution du no 119 d'Éléments (hiver 2006), affirmé comme un des penseurs de la décroissance, — y consacrant notamment un ouvrage en 2007 —, ce qui a suscité une polémique parmi les partisans de celle-ci. Pour une analyse critique des théories d’Alain de Benoist, cf. Jean-Louis Prat, « La décroissance est-elle réactionnaire ? », Revue du Mauss permanente, 10 avril 2008.
  80. À travers plusieurs analyses et articles, Alain de Benoist a entrepris de saper l'édifice théorique du néolibéralisme (cf. par exemple « Contre Hayek »). Il va même jusqu'à voir dans les traductions actuelles du capitalisme libéral une réalisation des intentions totalitaires plus achevée encore que celles du communisme soviétique et du national-socialisme : lire à ce sujet « À propos du totalitarisme » (2004).
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  83. Nicolas Lebourg, « «Le nouvel antisémitisme en France»: qui est vraiment dans le «déni de la réalité»? », sur Slate.fr, (consulté le )
  84. a et b Stéphane François, « Raus ! L’idéologie identitaire face aux « migrants musulmans » », Sciences Po - L'Enjeu mondial, (consulté le )
  85. Razmig Keucheyan, « Alain de Benoist, du néofascisme à l’extrême droite « respectable ». Enquête sur une success story intellectuelle », Revue du Crieur, vol. 6, no 1,‎ , p. 128 (ISSN 2428-4068 et 2649-7565, DOI 10.3917/crieu.006.0128, lire en ligne, consulté le )
  86. Pierre-André Taguieff, « Origines et métamorphoses de la nouvelle droite », Vingtième Siècle. Revue d'histoire, vol. 40, no 1,‎ , p. 3–22 (DOI 10.3406/xxs.1993.3005, lire en ligne, consulté le )
  87. Stéphane François, « Alain de Benoist, une obsession identitaire très médiatique », sur inrer.org,
  88. Sylvain Crépon, « Anti-utilitarisme et déterminisme identitaire - Le cas de l'extrême droite contemporaine », Revue du MAUSS,‎ (lire en ligne)
  89. Ariane Chebel d'Appollonia, L'extrême-droite en France: De Maurras à Le Pen, Editions Complexe, (ISBN 9782870277645, lire en ligne)
  90. Philippe Corcuff, La grande confusion. Comment l'extrême-droite gagne la bataille des idées, éditions Textuel, coll. « Petite Encyclopédie critique », 2021, p. 149 et suiv.
  91. Simon Blin, « Alain de Benoist, faiseur de droites », liberation.fr, 28 novembre 2019 (consulté le ).
  92. François 2014, p. 134.
  93. À partir du no 157 d’Éléments, paru en octobre 2015, Alain de Benoist cesse de signer son éditorial avec le nom de plume « Robert de Herte ».
  94. Emmanuel Ratier (préf. Henry Coston), Encyclopédie des pseudonymes, t. I, Paris, Faits et Documents, (ISBN 2-909-76910-0), p. 247.
  95. Böhm 2007, p. 136.
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  97. Stéphane François (préf. Laurent Olivier), Au-delà des vents du Nord : l'extrême droite française, le pôle Nord et les Indo-Européens, Lyon, Presses universitaires de Lyon, (ISBN 978-2-7297-0874-0), p. 81-82.
  98. Lamy 2016, p. 162.
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  101. Duranton-Crabol 1988, p. 63.

Annexes modifier

Bibliographie modifier

Article connexe modifier

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