Loi du 24 avril 1833 concernant le régime législatif des colonies

texte législatif de la Monarchie de Juillet
Loi du
concernant le régime législatif des colonies
Autre(s) nom(s) Charte des colonies
Constitution coloniale[1]

Présentation
Titre loi concernant le régime législatif des colonies
Pays Drapeau du Royaume de France Royaume de France
Territoire d'application Martinique
Guadeloupe (y compris Saint-Barthélemy et la partie française de Saint-Martin)
La Réunion
Guyane (notamment l'Île de Cayenne)
Saint-Pierre-et-Miquelon
Établissements français au Sénégal (notamment les îles de Saint-Louis et de Gorée)
Établissements français dans l'Inde (notamment Pondichéry, Chandernagor, Mahé, Yanaon et Karikal)
Sainte-Marie de Madagascar (auj. Nosy Boraha)
Algérie française (y compris les Territoires du Sud)
Langue(s) officielle(s) français
Type loi
Branche droit colonial (régime législatif et administration territoriale)
Adoption et entrée en vigueur
Régime monarchie de Juillet
Législature IIe
Gouvernement Soult (I)
Adoption [2]
Sanction [3]
Promulgation [3]
Publication [3]

Lire en ligne

Texte promulgué[4]

La loi du concernant le régime législatif des colonies est une loi française adoptée sous la monarchie de Juillet. Promulguée par Louis-Philippe le , elle fixe le régime législatif des colonies françaises.

À la suite de Jean-Élie Gautier[5], elle a été surnommée la Charte des colonies.

Contexte modifier

Avec le traité de Paris du , la France recouvre « les colonies, pêcheries, comptoirs et établissements de tout genre [qu'elle] possédait, au , dans les mers et sur les continents de l'Amérique, de l'Afrique et de l'Asie, à l'exception toutefois des îles de Tabago (auj. Tobago) et de Sainte-Lucie, et de l'Île de France (auj. l'île Maurice) et de ses dépendances, notamment Rodrigue et les Séchelles (auj. Rodrigues et les Seychelles), [ainsi que] de la partie de Saint-Domingue ».

La Charte octoyée par Louis XVIII le les place sous le régime de la spécialité législative en disposant, dans son article 73, que « les colonies seront régies par des lois et des règlements particuliers ». Comme cet article ne définit pas les domaines respectifs des lois et des règlements, en l'absence de lois, toutes matières peuvent être réglées par voie d'ordonnances royales. En fait, le régime des ordonnances s'institue.

Après les Trois Glorieuses et l'abdication de Charles X, la Charte révisée du maintient le régime de spécialité législative. « Les colonies, dispose son article 64, seront régies par des lois particulières ». Aucune mention n'est plus faite des règlements. Cela ne signifie pas que les ordonnances sont exclues mais que la Charte exige que le Parlement intervienne pour définir le régime législatif des colonies. C'est à cet effet que la loi du est prise.

Élaboration modifier

Un projet de loi est préparé par le ministre de la Marine et des Colonies, Henri de Rigny.

Le , il est déposé à la Chambre des pairs[2]. Il est examiné en commission. Le , Jean-Élie Gautier en présente le rapport[2] qui conclut à l'adoption du projet, sous réserve de quelques amendements. Il est discuté les et [2] puis adopté le à la majorité de 118 voix contre 5[2].

Le , le projet amendé est porté à la Chambre des députés[2]. Il est examiné en commission. Le , Charles Dupin en présente le rapport[2] qui conclut à son adoption sans amendement. Il est discuté les et [2] puis est adopté le à la majorité de 216 voix contre 26[2],[6].

Le , le roi, Louis-Philippe, sanctionne et promulgue la loi[3].

Contenu modifier

La loi distingue deux catégories de colonies qu'elle soumet à des régimes législatifs distincts : la Martinique, la Guadeloupe, Bourbon (auj. La Réunion) et la Guyane, d'une part, et les autres colonies, qualifiées d'« établissements », d'autre part.

Les colonies du premier groupe sont dotées d'institutions plus complètes et d'assemblées représentatives ayant une compétence de réglementation. Dans chacune d'elles est institué un conseil colonial élu au suffrage censitaire. Les questions qui la concernent sont réglées, en principe, par des décisions de ce conseil, appelées « décrets coloniaux » et soumises à la sanction du roi. Ce régime d'autonomie est limité de plusieurs façons. Certaines matières importantes sont réservées au Parlement. D'autres questions sont mises dans la compétence du roi qui ne peut les régler qu'après consultation des conseils coloniaux ou de leurs délégués.

En ce qui concerne les autres colonies, où nul conseil représentatif n'est établi, toutes les questions peuvent être réglées par voie d'ordonnances. L'article 25 de la loi dispose à leur égard que « les établissements français dans les Indes orientale continueront d'être régis par ordonnances du roi ».

Territoire d'application modifier

La loi du s'est appliquée aux colonies et établissement suivants dont la France avait repris possession :

Application à l'Algérie française modifier

L'expression « établissements français en Afrique » ne s'appliquait, à l'origine, qu'aux comptoirs du Sénégal. Mais il fut admis que l'annexion de l'Algérie au territoire français, réalisée par l'ordonnance du [12], fit entrer l'Algérie française aux nombres des « établissements » visés par la loi du . Son article 25 forma ainsi la base légale du régime des ordonnances qui s'institua en Algérie française à cette époque. Ce régime fut d'ailleurs confirmé par l'ordonnance du elle-même qui disposait, en son article 4, que « jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné, les possessions françaises dans le nord de l'Afrique seront régies par nos ordonnances ». Il fut ensuite confirmé par l'ordonnance du [13] qui visait, dans son article 1er les « ordonnances royales destinées à régir l'Algérie ».

Le régime des décrets s'est maintenu sous la IIIe République, la jurisprudence admettant que l'article 25 de la loi de 1833 n'était incompatible avec aucune des constitutions intervenues ultérieurement et qu'il avait, en conséquence, subsisté[14],[15].

En effet, la Constitution du 4 novembre 1848, en disposant en son article 109 que « le territoire de l'Algérie et des colonies est déclaré territoire français, et sera régi par des lois particulières jusqu'à ce qu'une loi spéciale les place sous le régime de la présente Constitution », entend soumettre l'Algérie française à l'identité législative. Mais la lois spéciale prévue n'est pas faite. En fait, c'est le chef de l'État qui statue, le plus souvent, par décret.

Après le coup d'État du 2 décembre 1851, la Constitution du 14 janvier 1852 confère au Sénat le soin de régler la constitution de l'Algérie et des colonies. « Le Sénat, dispose son article 27, règle par un sénatus-consulte la constitution des colonies et de l'Algérie ». En vertu de cet article, le Sénat fixe, par le sénatus-consulte du 3 mai 1854, le régime législatif des colonies. Mais il ne fixe pas celui de l'Algérie française. Il se borne à régler deux questions particulières, mais importantes, celle de la propriété foncière par le sénatus-consulte du et celles de l'état des personnes et de la naturalisation par le sénatus-consulte du 14 juillet 1865.

En définitive, le régime des décrets n'a été abrogé que sous la IVe République par la loi du portant statut organique de l'Algérie[16].

Notes et références modifier

  1. Larcher 2015, p. 144.
  2. a b c d e f g h et i Duvergier 1842, p. 74, col. 1, n. 2.
  3. a b c et d Duvergier 1842, p. 74, col. 1.
  4. L. 1833.
  5. Duvergier 1842.
  6. Ulysse Tencé, Annuaire historique universel pour 1833, Paris, Thoisnier-Desplaces, , p. 134-136 (lire en ligne, consulté le 10 octobre 2015)
  7. Jean-Louis Guébourg, Petites îles et archipels de l'océan Indien, Paris, Karthala, coll. « Hommes et société », 2e éd. revue et augmentée (1re éd. ), 526-[16], 24 × 16 cm (ISBN 2-84586-823-5, OCLC 470725186, BNF 40949117, présentation en ligne), p. 75, n. 75 (lire en ligne, consulté le 11 octobre 2015)
  8. p. 390 (lire en ligne, consulté le 11 octobre 2015)
  9. p. 451(lire en ligne, consulté le 11 octobre 2015)
  10. Raymond Decary, « Les débuts de la colonisation agricole à l'île Sainte-Marie de Madagascar », Revue de botanique appliquée et d'agriculture coloniale, vol. 17e année, nos 192-193,‎ , p. 610-618 (DOI 10.3406/jatba.1937.5775, www.persee.fr/doc/jatba_0370-3681_1937_num_17_192_5775, consulté le )
  11. Ministère de la Marine et des Colonies. Direction des colonies, Précis sur les établissements français formés à Madagascar, Paris, Imprimerie royale, , p. 7 (lire en ligne, consulté le 11 octobre 2015)
  12. Ordonnance du 22 juillet 1834 relative au commandement et à la haute administration des possessions françaises dans le nord de l'Afrique, Bulletin des lois du royaume de France, IXe série, t. 9, 2e partie, Paris, Imprimerie royale, bulletin no 324, texte no 5450, p. 121-122
  13. Ordonnance du 15 avril 1845 portant réorganisation de l'administration générale et des provinces en Algérie
  14. Chambre criminelle de la Cour de cassation – arrêt du 28 août 1902, Kentouli Smaïl ben Omar, dans Bulletin des arrêts de la Cour de cassation rendus en matière criminelle, t. 107, Paris, Imprimerie nationale, no 8, arrêt no 302, p. 537-538 (lire en ligne, consulté le 10 octobre 2015)
  15. Conseil d'État – arrêt du 6 août 1928, Sieurs Dazinière et autres (no 92.628, 92.677 et 92.680 ; Roussel, rapporteur ; Latournerie, commissaire du gouvernement ; Lemanissier et Morillot, avocats) dans Recueil des arrêts du Conseil d'État, Paris, Delhomme, , p. 1065-1066 (lire en ligne, consulté le 10 octobre 2015)
  16. Loi no 47-1853 du 20 septembre 1947 portant statut organique de l'Algérie, Journal officiel de la République française, , p. 9470-9474 (fac-similé, consulté le 10 octobre 2015)

Voir aussi modifier

Texte officiel modifier

Bibliographie modifier

  : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

Articles connexes modifier

Lien externe modifier