Livre des cavernes
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Le livre des cavernes, tel que représenté dans la tombe de Ramsès VI, KV9 (chambre E, mur de droite).

Pays Égypte antique
Genre littérature funéraire
Version originale
Langue Égyptien ancien
Lieu de parution Égypte
Version française
Traducteur Alexandre Piankoff
Date de parution Nouvel Empire à la dynastie lagide

Le livre des cavernes ou livre des Quererts est un important texte funéraire de l'Égypte antique, il date du Nouvel Empire[1], vers 1200 avant notre ère.

Il est aussi appelé « Sortilège des douze grottes » (également l'« errance de l'âme » ; arabe : تعويذة الكهوف الاثني عشر, romanisé : Taewidhat al-Kuhuf al-Iathnay Eashar).

La plus ancienne copie connue se trouve sur un papyrus trouvé dans KV35 la tombe d'Amenhotep II, et une autre copie a été inscrite dans l'Osireion d'Abydos sous Mérenptah. Bien que le texte apparaisse également dans certaines copies du Livre des Morts, où il est classé comme le sort 168, l'égyptologue Alexandre Piankoff l'a traité comme une composition distincte[2].

Comme pour les autres textes funéraires, il est attesté dans les tombes des rois pour accompagner le défunt. Il décrit le voyage du dieu soleil à travers les six cavernes des enfers. En particulier, il traite les relations entre le dieu soleil et les habitants des enfers : les récompenses données aux justes et les punitions des ennemis de l'ordre du monde, ceux qui ont échoué lors de leur jugement dans l'Au-delà.

Le livre des cavernes est l'une des sources d'information sur le concept d'enfer des anciens Égyptiens[3].

Contenu modifier

Comme ses prédécesseurs, Le livre des cavernes décrit le voyage du dieu soleil , de l'horizon occidental à l'horizon oriental, à travers le monde souterrain, les créatures divines qu'il rencontre et ses interactions avec elles. Les points importants de son voyage sont :

  • la caverne des décédés « justes », désormais créatures divines (1er et 2e tableaux) ;
  • la caverne des deux corps divins d'Osiris et du dieu soleil (3e tableau) ;
  • la sortie du monde souterrain dans le soleil levant (tableau final).

Durant ce voyage, le dieu soleil traverse aussi les cavernes de l'Enfer, dans lequel les ennemies de l'ordre du monde (ennemies de Rê et d'Osiris) sont détruits.

Le livre des cavernes donne aussi quelques indications sur la structure topographique imaginaire de l'Au-delà[n 1].

Contenu de chaque caverne modifier

  • Cavernes 1 à 7 : triades de divinités debout, une femme entre deux hommes
  • Cavernes (numéros impair) 1, 3, 5, 7 : momies
  • Cavernes (numéros pairs) 2, 4, 6 : êtres vivants animés
  • Caverne 8 : Celle qui protège les âmes, celle qui juge, distinguant le vrai du faux.
  • Caverne 9 : Celle aux formes mystérieuses, qui coupe l'air [vital].
  • Caverne 10 : la Clameuse dont les mystères sont sacrés.
  • Caverne 11 : Celle qui couvre le Fatigué, qui dissimule ce qui est caché.
  • Caverne 12 : Celle qui unit les dieux et embrasse [leurs] manifestations.

Structure modifier

Le livre des cavernes n'est pas le nom que lui donnaient les anciens Égyptiens. Il ne divise pas la nuit en heures comme le font d'autres textes funéraires[4]. En fait, le livre contient sept tableaux comprenant environ 80 scènes différentes. Ces sept tableaux sont répartis en deux groupes de trois tableaux plus un tableau final[5].

 
Schéma du livre des cavernes

Le livre des cavernes est plus littéraire que les autres livres funéraires du Nouvel Empire, comme le Livre de l'Amdouat ou le Livre des Portes. Il comporte moins de dessins que les autres livres et beaucoup plus de textes[6].

Historique modifier

Le livre des cavernes a son origine au XIIIe siècle avant notre ère, pendant la période ramesside[7].

La plus ancienne représentation du livre se trouve dans l'Osiréion à Abydos[1]. Elle est découverte par les archéologues William Matthew Flinders Petrie et Margaret Alice Murray qui fouillent le site de 1902 à 1903. Cette version presque complète est endommagée sur son registre supérieur. Elle est visible dans l'entrée, sur le mur gauche, face au livre des Portes[3].

Ramsès IV est le premier à utiliser Le livre des cavernes dans sa tombe KV2, dans la vallée des Rois.

La première (et dernière) version complète utilisée dans la vallée des Rois se trouve dans KV9, tombe de Ramsès VI. Comme dans l'Osiréion, elle est face au livre des Portes dans l'entrée de la tombe. Les passages du livre sont écrits sur tous les murs du tombeau le couvrant entièrement[3],[8].

En 2013, treize textes du Livre des cavernes sont répertoriées[9] :

Site Localisation Texte Époque
Osiréion dans le temple d'Osiris à Abydos Corridor Complet Fin du XIIIe siècle
KV2, tombe de Ramsès IV [1] 3e couloir, annexe 1er et 2e tableaux Milieu du XIIe siècle
KV9, tombe de Ramsès VI [2] Partie supérieure de la tombe Presque complet Milieu du XIIe siècle
KV1, tombe de Ramsès VII [3] 1er couloir 1er tableau Deuxième partie du XIIe siècle
KV6, tombe de Ramsès IX [4] 1er et 2e couloir, chambre du sarcophage 1er au 5e tableaux Fin du XIIe siècle
Papyrus funéraire de la reine Nedjemet [5] British Museum et Musée du Louvre 1er, 2e, 4e, et 7e tableaux Milieu du XIe siècle
Le phylactère du scribe Boutehamon[10] Musée égyptologique de Turin Une scène Milieu du XIe siècle
Cartonnage de momie Musée du Louvre Une scène Probablement Ier millénaire avant notre ère
TT34, tombe de Montouemhat, « maire de Thèbes » Désormais largement détruit, mais probablement complet Deuxième partie du VIIe siècle
TT33, tombe de Padiamenopé, « prophète et chef des prêtres-lecteurs » Chambres et corridors XVIIXIX Complet Deuxième partie du VIIe siècle
Blocs de l'Île de Roda 1er et 2e tableaux Probablement Ier millénaire avant notre ère
Sarcophage du général Padi-Iset [6] Couvercle Une scène IVe siècle
Sarcophage de Tjihorpto Surface extérieure; couvercle 1er, 2e, 5e, et 6e tableaux IVe siècle

Traduction modifier

La première traduction d'extraits du Livre des cavernes est celle Ippolito Rosellini en 1836, dans la tombe de Ramsès VI. Ultérieurement, Jean-François Champollion fait lui aussi quelques traductions du livre de cette tombe[8].

Néanmoins, les savants ne s'intéressent plus au livre avant le siècle suivant quand une deuxième version du livre, complète, est découverte dans l'Osiréion. En 1933, Henri Frankfort, avec l'aide de Adriaan de Buck, publie la première traduction complète du livre basé sur le texte de l'Osiréion[3].

Entre 1942 et 1945, Alexandre Piankoff publie une traduction française. En 1972, une version allemande est publiée par Erik Hornung[11].

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. La théologie du Livre des cavernes et sa topographie imaginaire font l'objet de recherches par Daniel Werning Topoi. - Représentation schématique du monde de l'Au-dela dans l'Égypte ancienne, Berlin.

Références modifier

  1. a et b Hornung (1999), p. 83.
  2. Hornung, p. 54–55.
  3. a b c et d Ellison, The Book of Caverns
  4. Hornung (1999), p. 84.
  5. Werning (2011), vol. I, p. 5-8.
  6. Taylor Ray Ellison, The Book of Gates
  7. Werning (2011), vol. I, ch. V, p. 262.
  8. a et b Werning (2011), vol. I, p. 29.
  9. Werning (2011), vol. I, ch. II.
  10. Demichelis (2000), BIFAO 100, p. 267-273.
  11. Hornung (2005)

Bibliographie modifier

Traductions modifier

  • trad. d'Alexandre Piankoff
    • Alexandre Piankoff, « Le livre des Quererts [1] », Bulletin de l’Institut français d’archéologie orientale, no 41,‎ , p. 1-11 (lire en ligne)
    • Alexandre Piankoff, « Le livre des Quererts [2] », Bulletin de l’Institut français d’archéologie orientale, no 42,‎ , p. 1-62 (lire en ligne)
    • Alexandre Piankoff, « Le livre des Quererts [3] », Bulletin de l’Institut français d’archéologie orientale, no 43,‎ , p. 1-50 (lire en ligne)
    • Alexandre Piankoff, « Le livre des Quererts [fin] », Bulletin de l’Institut français d’archéologie orientale, no 45,‎ , p. 1-42 (lire en ligne)
  • trad. de Claude Carrier : Grands livres funéraires de l'Égypte pharaonique, Cybèle, 2009, 550 p.
  • trad. de Daniel Werning : (de) Daniel A. Werning, Das Höhlenbuch : Textkritische Edition und Textgrammatik, II : Textkritische Edition und Übersetzung, vol. 2, Wiesbaden, Harrassowitz Verlag, coll. « Göttinger Orientforschungen 48 », , 345 p. (ISBN 978-3-447-06635-8)

Études modifier

  • (de) Daniel A. Werning, Das Höhlenbuch im Grab des Petamenophis (TT33) : Szenen, Texte, Wandtafeln, Berlin, Edition Topoi, coll. « Berlin Studies of the Ancient World 66 », , 286 p. (ISBN 978-3-9820670-0-1, DOI 10.17171/3-66)
  • (de) Daniel A. Werning, Das Höhlenbuch : Textkritische Edition und Textgrammatik, I : Überlieferungsgeschichte und Textgrammatik, II : Textkritische Edition und Übersetzung, Wiesbaden, Harrassowitz Verlag, coll. « Göttinger Orientforschungen 48 », , 345 p. (ISBN 978-3-447-06635-8)
  • Colleen Manassa, The Late Egyptian Underworld: Sarcophagi and Related Texts from the Nectanebid Period, t. I : Sacophagi and Texts, Wiesbaden, Harrassowitz, 2008.

Voir aussi modifier

Articles connexes modifier

Liens externes modifier

Sources modifier

  Ouvrages utilisés pour la rédaction de l'article
  • Sara Demichelis, « Le phylactère du scribe Boutehamon », Bulletin de l’Institut français d’archéologie orientale, no 100,‎ , p. 267-273 (lire en ligne)
  •   (de) Daniel Werning, Das Höhlenbuch Textkritische Edition und Textgrammatik Teil I : Überlieferungsgeschichte und Textgrammatik Teil II : Textkritische Edition und Übersetzung, Wiesbaden, Göttinger Orientforschungen 48, , 345 p. (ISBN 978-3-447-06635-8)