Johannes Mentelin

imprimeur-libraire actif à Strasbourg entre 1458 et 1478 ; associé de Heinrich Eggestein
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Johannes Mentelin
Buste non-réaliste de Mentelin (rue de l'Outre à Strasbourg)
Biographie
Naissance
Décès
Nationalité
Strasbourgeois (1447-1478)
Activité
Période d'activité
Conjoint
Madeleine
Elisabeth von Matzenheim
Parentèle
Adolf Rusch (gendre)
Martin Schott (gendre)Voir et modifier les données sur Wikidata
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Johannes Mentelin (parfois orthographié Hans, Hein ou Johann et Mentlin ou Mentelein ; en français : Jean Mentel ou Mentels ; en latin : Iohannes Mentelius), né en à Sélestat en Alsace, alors dans le Saint-Empire romain germanique, et mort le à Strasbourg, est un imprimeur-typographe allemand du XVe siècle.

Il est connu pour avoir imprimé en la première Bible en allemand qui fait suite à la version latine réalisée par Johannes Gutenberg à Mayence en . Mettant en application l’invention de ce dernier, Mentelin est le premier à imprimer des livres en Alsace.

Biographie modifier

 
Buste de Johannes Mentelin (Bibliothèque humaniste de Sélestat)

Johannes Mentelin est né vers au sein d’une famille patricienne de Sélestat, alors ville d’Empire : il est le fils de Nicolaus et d’Elisabeth Mentelin. Après avoir appris le latin et l’enluminure probablement à l’école paroissiale de sa ville natale[1], il s’installe vers à Strasbourg où son travail d’enlumineur de manuscrits est remarqué par le prince-évêque Robert de Pfalz-Simmern qui le prend alors à son service comme notaire et enlumineur de l’évêché. Il fait la connaissance d’Heinrich Eggestein, official et garde des sceaux épiscopaux, devant lequel il a dû passer un examen pour accéder aux fonctions notariales[2]. Il acquiert le droit de bourgeoisie pour devenir citoyen de la ville de Strasbourg le [3] puis s’inscrit à la corporation de l’Échasse, à savoir celle des peintres[note 1].

Mentelin s’intéresse à l’imprimerie à caractères métalliques mobiles, tout comme Eggestein, et conclut avec ce dernier un accord secret sur leurs ambitions. Tout en poursuivant son activité de notaire[4], il ouvre un atelier d’imprimerie à Strasbourg vers [note 2], dans lequel Eggestein a probablement exercé comme prote avant d'en devenir associé puis de partir pour fonder sa propre officine[5]. En , un premier ouvrage sort des presses de Mentelin : il s’agit du premier volume d’une Bible en latin de quarante-neuf lignes qui paraît à peine cinq ans après celle imprimée par Gutenberg ; le second volume est publié en [6]. Cette réalisation constitue le tout premier livre imprimé en Alsace.

En , l’imprimeur strasbourgeois édite la première Bible en langue allemande qui, durant de nombreuses années, est reprise comme modèle par d’autres imprimeurs : la Bible de Mentelin sera, jusqu’à la parution de la Bible de Luther, réimprimée treize fois dans le sud de l’aire germanique. Le , l’empereur Frédéric III décerne à l’imprimeur des lettres de noblesse l’autorisant à porter comme armoiries celles de Sélestat, sa ville natale : d’argent au lion couronné de gueules[3].

La première épouse de Johannes Mentelin, prénommée Madeleine et probablement décédée dès , a donné naissance à deux filles qui ont toutes les deux épousé des imprimeurs : Salome devient la femme d’Adolf Rusch vers  ; la seconde fille, dont le prénom est inconnu, se marie avec Martin Schott[3]. Les deux gendres ont sans doute fait leur apprentissage dans l’atelier de Mentelin[7]. Ce dernier épouse en secondes noces Elisabeth von Matzenheim qui lui apporte une dot conséquente, à savoir des biens fonciers, des meubles et une vaisselle en argent. Lorsque celle-ci décède en , Mentelin perd cet apport revenant à sa belle-mère Anne von Matzenheim[8]. Johannes Mentelin décède le  : il est inhumé le lendemain dans la cathédrale de Strasbourg[3].

Œuvre modifier

Au cours de sa carrière, Mentelin a imprimé quarante-cinq éditions selon le Gesamtkatalog der Wiegendrucke[9] : il s’agit principalement d’ouvrages théologiques ou consacrés à la littérature et à l’histoire

Vers , il édite un Ars moriendi, puis la Summa secunda secundae partis de Thomas d’Aquin vers . Il publie La Cité de Dieu de saint Augustin cinq ans plus tard, puis en , Fortalitum fidei d’Alfonso de Espina (es) ainsi que les Comœdia de Térence.

En , Mentelin imprime plusieurs œuvres, notamment le Speculum quadruple de Vincent de Beauvais, les Etymologiae d’Isidore de Séville et le Summa de casibus conscientiæ d’Astesanus de Ast (en). En , le Speculum morale sort de ses presses puis paraissent l’année suivante le Parzival de Wolfram von Eschenbach et le Titurel également attribué à ce dernier, ainsi qu’un almanach pour l’année .

Hommages modifier

L’historien et poète Jacques Wimpheling rend hommage à Mentelin dans son œuvre Epitome rerum germanicarum en 1505.

Un buste apparaît sur la façade de l’immeuble situé au n°5 de la rue de l’Outre à Strasbourg[10], et un autre se situe au sein de la Bibliothèque humaniste de Sélestat. Une rue et un pont portent le nom de Mentelin dans le quartier strasbourgeois de Koenigshoffen, ainsi qu’un collège à Sélestat.

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. Le siège de cette corporation était situé au n°15 de la rue du Dôme, dans la maison dite « À l’Échasse » (en allemand : Zu der Steltzen) où se trouvaient des artistes, des orfèvres, des peintres, des sculpteurs, des peintres verriers, des graveurs, des imprimeurs, et d’autres artisans.
  2. Mentelin s’est d’abord établi dans la maison « Au Saint-Esprit » située dans la ruelle du Saint-Esprit (n°7 de l’actuel quai Saint-Thomas) et a installé son atelier dans la maison « À l’Épine » (Domus zue dem Dorne, située au n°9 de l’actuelle rue de l’Épine) qu’il a acheté après avec la demeure voisine, dite « Au Paon » (Zum Pfawen, située au n°7 de la rue de l’Épine).

Références modifier

  1. Ritter 1955, p. 19
  2. Ritter 1955, p. 21
  3. a b c et d Meyer 1995, p. 2599
  4. Ritter 1955, p. 22
  5. Ritter 1955, p. 39
  6. Karagiannis-Mazeaud 2017, p. 35
  7. Ritter 1955, p. 69
  8. Ritter 1955, p. 20
  9. Karagiannis-Mazeaud 2017, p. 38
  10. « 5 rue de l'Outre (Strasbourg) », sur www.archi-wiki.org (consulté le 22 juin 2020)

Annexes modifier

Bibliographie modifier

  • (de) Ernst Voulliéme, Die deutschen Drucker des fünfzehnten Jahrhunderts. Berlin : Verlag der Reichdruckerei, 1922, XVI-176 p. ;
  • (de) Karl Schorbach, Der Straßburger Frühdrucker Johann Mentelin (1458-1478): Studien zu seinem Leben und Werke, Mayence, Verlag der Gutenberg-Gesellschaft, 1932, 25 p. ;
  • (de) Ferdinand Geldner, Die deutschen Inkunabeldrucker: Ein Handbuch der deutschen Buchdrucker des XV. Jahrhunderts nach Druckorten : Teil 1. Das deutsche Sprachgebiet. Stuttgart : Hiersemann, 1968, 310 p. (ISBN 3-7772-6825-9) ;
  • (de) Hartmut Harthausen, « Johannes Mentelin », in Severin Corsten, Lexikon des gesamten Buchwesens (LGB) : Band 5, 2ème nouvelle édition entièrement revue et augmentée, Stuttgart : Hiersemann, 1989, p. 145 (ISBN 978-3-7772-8527-6) ;
  • (de) Peter Amelung, « Mentelin, Johannes », sur www.deutsche-biographie.de (consulté le 1er septembre 2020) ;
  • Alexandre Dorlan, Quelques mots sur l'origine de l'imprimerie, ou, Résumé des opinions qui en attribuent l'invention à Jean Mentel, natif de Schlestadt. Sélestat : Impr. de F. Helbig, 1840, 38 p.  ;
  • « Mentel ou Mentelin, Jean », in Édouard Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace : depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, tome 2, K-Z. Rixheim : Impr. F. Sutter & Cie, 1909, p. 270-271 (lire en ligne) ;
  • Auguste Bernard, De l'origine et des débuts de l'imprimerie en Europe, partie 2. Paris : Imprimerie impériale, 1853 (lire en ligne) ;
  • « Prétentions en faveur de Jean Mentelin », in Edmond Werdet, Histoire du livre en France depuis les temps les plus reculés jusqu'en 1789, tome V. Paris : E. Dentu, 1864, p. 29-46 (lire en ligne) ;
  • François Ritter, Histoire de l'imprimerie alsacienne aux XVe et XVIe siècles, Paris : F.-X. Le Roux, 1955, XVI-631 p. ;
  • Jean-Luc Kahn, « Mise au point sur un incunable strasbourgeois célèbre : Le Fortalitium Fidei d’Alphonse De Spina imprimé par Mentelin en 1470 », in Annuaire de la Société des amis du Vieux Strasbourg, 1982 (ISSN 0986-2684), p. 23-28 (lire en ligne) ;
  • Maurice Moszberger, Strasbourg et banlieue (communauté urbaine). Strasbourg : Éd. de la Nuée Bleue, 1986 (21e édition), 264 p. (ISBN 2-7165-0095-9) ;
  • Hubert Meyer, « Mentelin Johannes », in Jean-Pierre Kintz, Nouveau dictionnaire de biographie alsacienne, vol. 26, Mar à Mie. Strasbourg, Fédération des sociétés d'histoire et d'archéologie d'Alsace, 1995, p. 2599 (ISBN 2-85759-025-3) ;
  • Michelle Meyer, Les premiers temps de l'imprimerie : Jean Mentelin, Primo typographiae Inventori. Strasbourg : Éditions Prospective 21, 2001 (réédition), 115 p. (ISBN 2-905871-25-3) ;
  • Guy Bechtel, « Mentelin, Johann », in Pascal Fouché, Daniel Péchoin et Philippe Schuwer (dir.), Dictionnaire encyclopédique du livre. Tome 2, E-M. [Paris] : Éditions du Cercle de la Librairie, 2005, p. 930 (ISBN 2-7654-0910-2) ;
  • Édith Karagiannis-Mazeaud, Strasbourg, ville de l'imprimerie : l'édition princeps aux XVe et XVIe siècles (textes et images) : tradition et innovations. Turnhout : Brepols, 2017, 220 p. (ISBN 978-2-503-57047-1) ;
  • Georges Bischoff, Le siècle de Gutenberg : Strasbourg et la révolution du livre. [Strasbourg] : La Nuée Bleue, 2018, p. 91 (ISBN 978-2-7165-0853-7).

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