Jean-Pierre Aumont

acteur français, XXe siècle
Jean-Pierre Aumont
Description de cette image, également commentée ci-après
Jean-Pierre Aumont en 1959.
Nom de naissance Jean-Pierre Philippe Salomons
Surnom Jean-Pierre Aumont
Naissance
9e arrondissement de Paris (France)
Nationalité Drapeau de la France Française
Décès (à 90 ans)
Gassin (Var, France)
Profession Acteur
Films notables Lac aux dames
Hôtel du Nord
La Nuit américaine

Jean-Pierre Salomons, dit Jean-Pierre Aumont, est un acteur français, né le dans le 9e arrondissement de Paris et mort le à Gassin (Var).

Jeune premier vedette du cinéma français dans l'entre-deux-guerres, il participe également, durant sa longue carrière, à divers films américains.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, il a combattu dans les Forces françaises libres.

Il est le père de l’actrice franco-américaine Tina Aumont.

Biographie Modifier

Origines familiales Modifier

Jean-Pierre Philippe Salomons est le fils d'Alexandre Abraham Salomons (Amsterdam, 1881 - New York, 1964) — un Juif hollandais administrateur d'une société (La Maison du Blanc) et proche collaborateur de Raphaël-Edouard Worms[1] —, et d'une actrice française Suzanne Cahen (Paris, 1885 - Paris, 1940)[2],[3],[4]. Il est « d'ascendance ashkénaze et séfarade »[3]. La famille Salomons habite à Paris où Jean-Pierre naît.

Un de ses oncles est le philosophe Henri Berr, un autre est l'homme de lettres chevalier de la Légion d'honneur Émile Berr[5], un autre encore est le comédien Georges Berr, sociétaire de la Comédie-Française[6], et son frère fit une carrière de cinéaste sous le nom de François Villiers[7].

Débuts en France Modifier

Jean-Pierre Aumont est un jeune garçon qui a une « déplorable tendance de vouloir, à tout prix, s'amuser en tous lieux »[8]. À neuf ans, ses parents l'envoient en pension à Ville-d'Avray où son professeur fouette les élèves tous les matins[9]. Après des années scolaires tumultueuses[10], il s'oriente à 16 ans vers le théâtre, en cela influencé par le prestige de son grand-oncle Georges Berr[8] ou impressionné à 10 ans, lors d'une représentation d'Andromaque à la Comédie-Française[10],[9], et prend des leçons de diction chez Eugène Larcher et des cours d'art dramatique chez Renée Du Minil, rue Bénouville[10]. Il s'inscrit au Conservatoire de Paris comme figurant et y obtient un premier accessit[11] mais s'en fait exclure pour n'avoir pu réfréner un fou-rire lors d'une scène d'Œdipe-Roi[10].

 
Jean-Pierre Aumont dans Lac aux dames (1934).

Fréquentant les coulisses du Théâtre-Français, il est repéré par Louis Jouvet qui le fait débuter dans sa troupe dans la comédie intitulée Le Prof' d'anglais ou Le système Puck de Régis Gignoux, en 1931[8]. La même année, il apparaît en silhouette au cinéma dans Jean de la Lune[3] puis obtient un premier rôle comme jeune ouvrier sombrant dans la délinquance dans Dans les rues de 1933. Il joue encore en 1933 dans des mélodrames de boulevards comme Le Voleur de Maurice Tourneur.

Doté d'une beauté physique particulièrement avantageuse, grand garçon blond aux yeux bleus, à la fois sportif et romantique, frais et optimiste, tantôt rieur « au sourire franc », tantôt rêveur, il n'a aucun mal à accéder à des rôles de jeune premier au cinéma qui lui ouvre grand ses portes[10],[12]. Jean Cocteau lui confie en 1934 celui d'Œdipe dans sa Machine infernale, à la Comédie des Champs-Élysées, qui remporte un certain succès[3]. Cette même année, il figure un soupirant sacrifié dans le film Maria Chapdelaine de Julien Duvivier.

 
Publicité où figure Aumont, vers 1930.

Il triomphe en 1934 en tant que maître-nageur séduisant dans Lac aux dames de Marc Allégret avec Simone Simon et Michel Simon, puis obtient un rôle de laitier poétique en 1937 dans Drôle de drame de Marcel Carné avec Françoise Rosay et Michel Simon et celui d'un amant désespéré dans Hôtel du Nord 1938 du même Carné avec Annabella, Louis Jouvet et Arletty, films de belle notoriété[3].

En 1936, il est dans Tarass Boulba le fils de Tarass Boulba interprété par Harry Baur, et réalisé par Alexis Granowsky aux côtés de Danielle Darrieux. Il tourne pour Robert Siodmak Le Chemin de Rio en 1937 avec Jules Berry et Suzy Prim. Il joue également dans des feuilletons d'aventures tels que Chéri-Bibi, en 1938, de Léon Mathot.

Il joue au théâtre Le Cœur de Henry Bernstein avec Claude Dauphin au théâtre du Gymnase, en 1936, et Sérénade à trois avec Blanche Montel, de Noël Coward[10].

Il écrit également pour le théâtre, d'abord en 1937 L'Empereur de Chine puis L'Ile heureuse, en 1950[13].

À la suite de l'invasion allemande, Aumont sert dans la 3e division blindée française entre 1939 et 1940[3].

Seconde Guerre mondiale Modifier

 
Jean-Pierre Aumont et Susan Peters dans Assignment in Brittany (1943).

Du fait de ses origines juives, il obtient un visa de complaisance du consul du Honduras, (de) Mauricio Rosal, qui lui permet, transitant par le Portugal et le Honduras, de s'exiler aux États-Unis en 1940, où il va rapidement devenir la « coqueluche française d'Hollywood »[14],[10],[9].

Dès son arrivée à New York, Antoine de Saint-Exupéry lui prête son duplex dominant l'île de Manhattan[15]. Ne parlant pas encore l'anglais, il apprend phonétiquement ses répliques[3] et part en tournée avec Katharine Cornell pour jouer un petit rôle dans Rose Burke, une pièce de Henri Bernstein, qui récolte de mauvaises critiques mais sa prestation est remarquée[15],[16]. La doublure de Jean-Pierre Aumont est alors un débutant du nom de Gregory Peck[10].

En 1943, il est la vedette de deux films de guerre ayant pour cadre le conflit en France : Un commando en Bretagne (Assignment in Brittany) de Jack Conway, avec Susan Peters, et La Croix de Lorraine (The Cross of Lorraine) de Tay Garnett avec Gene Kelly[3].

Abandonnant son confort californien, il s'engage dans les Forces françaises libres en et sert le cinéma de propagande[13],[3]. Il fait partie des troupes qui libèrent la France, notamment en tant que lieutenant, aide de camp du général Diego Brosset, commandant la 1re division française libre. Il survit à la chute de la Jeep qui provoque la mort du général Brosset le au pont du Rahin, à Champagney en Haute-Saône. Il avait précédemment participé aux campagnes d'Afrique du Nord dont la Tunisie avec l'opération Torch, d'Italie et au débarquement de Provence[14],[3].

Blessé deux fois au cours de ces années, il reçoit la croix de guerre 1939-1945 et la Légion d'honneur[3].

Carrière internationale Modifier

 
Jean-Pierre Aumont dans le film Lili (1953).

Après la guerre, Jean-Pierre Aumont se partage entre l'Europe et les États-Unis[13].

En mai 1946, il interprète avec Michèle Morgan une adaptation pour la radio de Shadow of a doubt (L'ombre d'un doute) diffusée sur la Chaîne Parisienne[17]. La même année, il joue avec Ginger Rogers dans la comédie Un coeur à prendre de Sam Wood[3].

Son charme et son élégance lui ayant ouvert les portes d'Hollywood, Jean-Pierre Aumont capture « l'admiration du public américain avec son charisme » et devient le nouveau French lover du cinéma outre-Atlantique[3].

En 1947, il interprète le compositeur russe Nicolaï Rimski-Korsakov dans une fantaisie hollywoodienne intitulée Schéhérazade (Song of Scheherazade) aux côtés d'Yvonne De Carlo[3]. Ses deux derniers films ayant été accueillis tièdement, Aumont décide de revenir en France avec sa femme dont la carrière décline, et sa fille Marie-Christine, née en 1946[3]. De temps à autre, il retourne sur le sol américain et apparaît à Broadway, notamment en 1949 avec son œuvre Figure of a Girl rebaptisée My Name Is Aquilon, une pièce où il joue avec Lili Palmer mais qui ne remporte pas un grand succès[3].

Il partage l'affiche avec María Montez, en 1949, dans le rôle du beau Hans le marin[3]. Il tourne dans de nouvelles versions de L'Atlandide avec encore María Montez en 1948, et de Koenigsmark en 1953. Il travaille deux fois en 1951 pour Gilles Grangier mais l'impact de ses prestations reste limité[3]. Cette même année, son épouse meurt tragiquement[3].

Dans les années 1950, Aumont semble mieux s'en sortir dans ses apparitions télévisées dans des œuvres classiques, notamment Les armes et l'homme et Crime et châtiment[3].

 
Jean-Pierre Aumont au festival de Cannes 1993.

On le retrouve en 1953 dans Moineaux de Paris de Maurice Cloche aux côtés des Petits chanteurs à la croix de bois et dans Lili de Charles Walters avec Leslie Caron et Mel Ferrer, pour la MGM. Il joue dans Si Versailles m'était conté de Sacha Guitry, en 1954, et dans La Charge des lanciers, la même année, avec Paulette Goddard[3].

Dès 1957, il écrit ses mémoires intitulées Souvenirs provisoires. Par la suite, il écrira également des pièces de théâtre et des recueils de nouvelles[10].

Il joue à nouveau sur scène, pendant deux ans à Broadway, au début des années 1960 dans Le général ennemi, Le diable à 4 heures ou Le Couteau dans la plaie[3]. On le retrouve également dans The Heavenly Twins et A Second String, tenant le rôle-titre dans The Affairs of Anatol, Murderous Angels[3]. Il effectue des apparitions dans des comédies musicales comme Tovarich aux côtés de Vivien Leigh[13],[11], Jacques Brel Is Alive and Well and Living in Paris, Pacifique Sud ou Gigi avec sa nouvelle épouse Marisa Pavan. Le couple forme également un numéro de cabaret chaleureusement accueilli à New York[3] ; ils partent alors ensemble en tournée aux États-Unis[10].

Jean-Pierre Aumont apparaît encore dans diverses productions théâtrales, cinématographiques ou télévisées françaises et étrangères, au milieu desquelles se détachent en 1973 un film remportant un grand succès, La Nuit américaine de François Truffaut, et encore Le chat et la souris de Claude Lelouch en 1975[3]. Son activité cinématographique se ralentit dans les années qui suivent puis il tient des rôles de premier plan dans les remakes de Nana en 1982 et de Senso en 1993[3].

Il est membre du jury de Miss Univers en 1973 à Athènes en Grèce.

Dans les années 1990, il tient des petits rôles au cinéma ; notamment, James Ivory l'emploie dans Jefferson à Paris, en 1995. L'année précédente, en 1994, il joue aux côtés de Mylène Farmer dans le film Giorgino, premier long-métrage de Laurent Boutonnat[10].

Durant sa carrière, il tourne en tout dans une cinquantaine de films, de Paris à Rome, de Londres à Hollywood.

Décorations Modifier

Outre ses distinctions de croix de Guerre puis une Légion d'honneur, il est fait commandeur dans l'ordre des Arts et des Lettres en 1991 et reçoit un César d'honneur en 1992[3].

 
Plaque apposée sur l'immeuble du 4 allée des Brouillards (Paris).

Vie privée Modifier

Jean-Pierre Aumont est le compagnon de l'actrice française Blanche Montel (de 1934 jusqu'à son départ pour les États-Unis en 1940). Blanche Montel avait été l'épouse du cinéaste Henri Decoin de 1927 à 1934[3].

Aux États-Unis, il se marie après trois mois de fréquentation avec l'actrice dominicaine María Montez, avec laquelle il a ensuite une fille, Tina Aumont (1946-2006)[3]. Sont notamment présents à la noce ses amis Charles Boyer en tant que témoin et Ronald Reagan[3]. Son épouse María Montez est retrouvée morte noyée dans sa baignoire en 1951, dans leur pavillon situé rue des Raguidelles à Suresnes, où le couple vivait alors[18],[19].

Dans les années 1950, il a une liaison avec l'actrice Grace Kelly, future princesse de Monaco[3].

En 1956, il épouse en troisièmes noces à Santa-Barbara l'actrice italienne Marisa Pavan, sœur jumelle de Pier Angeli, avec qui il a deux fils, Jean-Claude Aumont (né en 1957) qui deviendra caméraman et Patrick Aumont (né en 1959)[3]. Le couple divorce en 1963 et se marie à nouveau à San Clemente en Californie en 1969[20].

On lui connaît également des liaisons avec les actrices américaines Joan Crawford, Hedy Lamarr, Vivien Leigh et Barbara Stanwyck[21],[22],[12].

Il n'a pas de lien de parenté avec l'acteur Michel Aumont.

Mort et hommages Modifier

Il meurt à 90 ans d'une crise cardiaque à Gassin, dans les environs de Saint-Tropez[14]. Ses obsèques ont lieu au crématorium du cimetière du Père-Lachaise et ses cendres sont remises à la famille[23].

Une plaque en hommage à Jean-Pierre Aumont est dévoilée le au 4, allée des Brouillards, dans le 18e arrondissement de Paris, où il a longtemps habité.

Le , la Cinémathèque française célèbre son centenaire.

Il existe un Fonds Jean-Pierre Aumont qui couvre les années 1947 à 1984[13].

Filmographie Modifier

Cinéma Modifier

 
Jean-Pierre Aumont en 1946 (photo studio Harcourt).

Télévision Modifier

Cinéastes ayant tourné avec Jean-Pierre Aumont Modifier

Théâtre Modifier

Adaptation Modifier

Auteur Modifier

Comédien Modifier

Distinctions Modifier

Décorations Modifier

Récompense Modifier

Box-office France Modifier

Publications Modifier

Notes et références Modifier

  1. « ÉDOUARD-RAPHAËL WORMS », sur entreprises-coloniales.fr,
  2. Who's Who in France, dictionnaire biographique, 1992-1993. Éditions Jacques Lafitte, 1992
  3. a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t u v w x y z aa ab ac ad ae et af (en) Gary Brumburgh, « Jean-Pierre Aumont », sur IMDb (consulté le )
  4. Archives départementales AD 75 numérisées- Paris 10, M 14/04/1908, 10M306, page 2, acte n°540 ; AD 75- Paris 17, D 13/05/1940, 17D263, page 2, acte n°705
  5. « Ministère de la culture - Base Léonore », sur www2.culture.gouv.fr (consulté le )
  6. Olivier Barrot et Raymond Chirat, Noir et Blanc, 250 acteurs du cinéma français (1930-1960), Flammarion, 2000
  7. « Jean-Pierre Aumont », sur Vodkaster (consulté le )
  8. a b et c Raymond Chirat, « JEAN-PIERRE AUMONT », sur Encyclopædia Universalis (consulté le )
  9. a b et c Jean-Pierre Aumont, Le soleil et les ombres, (Robert Laffont) réédition numérique FeniXX, (ISBN 978-2-221-22848-7, lire en ligne), section 1
  10. a b c d e f g h i j et k Yvan Foucart, « JEAN-PIERRE AUMONT : Dictionnaire des Comédiens Français disparus », sur www.lesgensducinema.com (consulté le )
  11. a et b Annie Coppermann, « Un comédien élégant et discret : Jean-Pierre Aumont est mort », sur Les Echos, (consulté le )
  12. a et b Pierrick Geais, « Avant Rainier, l’autre grand amour de Grace Kelly », sur Vanity Fair, (consulté le )
  13. a b c d et e Cinétheque Francaise-BiFi- Bibliotheque du film, « BiFi - Fonds Jean-Pierre Aumont », sur www.cineressources.net (consulté le )
  14. a b et c « Jean-Pierre Aumont : mort d'un séducteur », sur leparisien.fr, (consulté le )
  15. a et b Jean-Pierre Aumont, Le soleil et les ombres, (Robert Laffont) réédition numérique FeniXX, (ISBN 978-2-221-22848-7, lire en ligne)
  16. (en-US) Special to THE NEW YORK TIMES SAN FRANCISCO LAWRENCE DAVIES, « REGARDING 'ROSE BURKE'; Katharine Cornell Launches the Latest Bernstein Play in San Francisco », The New York Times,‎ (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consulté le )
  17. « "L'ombre d'un doute" avec Michèle Morgan et Jean-Pierre Aumont », sur France Culture (consulté le )
  18. Francis Prévost, Histoires de Suresnes, Suresnes Information, 1989, p. 232-233.
  19. Altitude 85 : Le domaine des Hocquettes à Suresnes, 1995, p. 16.
  20. Paris-Presse, L'intransigeant, 8 mai 1969, p.19 : "13 ans après, J.-P. Aumont a réépousé sa femme Marisa Pavan"
  21. « JEAN-PIERRE AUMONT », sur www.cinememorial.com (consulté le )
  22. « Chronologie: Jean-Pierre Aumont Biographie », sur www.kronobase.org (consulté le )
  23. CineMemorial.com

Voir aussi Modifier

Bibliographie Modifier

Liens externes Modifier

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