Jean-Marc Théolleyre

journaliste français
Jean-Marc Théolleyre
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Noisy-le-GrandVoir et modifier les données sur Wikidata
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Jean-Marc Théolleyre, né le à Lyon et mort le à Noisy-le-Grand[1], est un journaliste français. Il fut un chroniqueur judiciaire renommé dans la seconde moitié du XXe siècle, pour le quotidien parisien Le Monde où il fit presque toute sa carrière.

Carrière modifier

Lycéen à Lyon, il devient résistant durant la Seconde Guerre mondiale, en 1943 à Toulouse, où il sert de « courrier » pour un réseau, à 17 ans. Arrêté par la Gestapo, il est torturé et en conserve des traces à ses phalanges par la suite. Il est déporté à Buchenwald durant près de deux ans. Il est libéré en 1945 et entre au Monde comme reporter, la même année, en octobre, à 21 ans, avec l'appui d'un autre ancien résistant, rencontré à Buchenwald, Rémy Roure[2],[3],[4],[5].

Il est d'abord chargé des faits divers puis il est courriériste littéraire, publie des portraits d'écrivains, et devient chroniqueur judiciaire à partir de la fin des années 1940[6],[7]. Il suit certains des grands procès de l'après-guerre comme ceux de Vichystes et de collaborateurs, celui d'Oradour-sur-Glane (1953), ceux des Allemands Carl Oberg et Helmut Knochen (1954). Mais aussi celui d'Amélie Rabilloud (1952), de Marie Besnard, de Gaston Dominici, de Jacques Fesch ou encore la mystérieuse Affaire Pronnier dans le Pas-de-Calais en 1951.

Désireux d'être mieux payé du fait de ses charges de famille alors que le directeur du Monde, Hubert Beuve-Méry, est connu pour offrir des salaires faibles[8], il quitte ce quotidien, rejoint brièvement d' à Le Figaro littéraire, où il est grand reporter puis devient grand reporter et chroniqueur judiciaire à Paris-Journal[9].

En 1959, après avoir reçu le prix Albert-Londres, il revient au Monde, comme grand reporter et chroniqueur judiciaire. Il couvre notamment les procès liés à la guerre d'Algérie comme celui du réseau Jeanson, du général Salan, de la Semaine des barricades, de l'attentat du Petit-Clamart. Il couvre aussi le procès d'Adolf Eichmann à Jérusalem en 1961[10],[11]. De 1970 à 1975, il est envoyé permanent pour la région Rhône-Alpes, puis reprend ses fonctions de critique littéraire et grand reporter chargé de la chronique judiciaire. En 1987, il couvre pour Le Monde son dernier procès, celui de Klaus Barbie à Lyon. De 1987 à 1989, à la fin de sa carrière, il dirige le service des « informations générales » du quotidien[12]. Il part en retraite en 1989[13].

Il a longtemps présidé l'association de la presse judiciaire et participé aux instances de la société des rédacteurs du Monde[14].

Ce catholique s'est opposé à la peine de mort depuis les années 1950[15]. Il publie à ce sujet en 1977 un pamphlet, Tout condamné à mort aura la tête tranchée.

Il réfléchit sur son métier de chroniqueur judiciaire dans Les médias et la justice (1996) notant que le chroniqueur judiciaire est « un personnage particulier » dans les relations passionnelles qu’entretiennent les médias et la justice : « Pour être sinon en voie de disparition, du moins dépouillé de sa noblesse historique dans l’évolution de la presse française, il n’en reste pas moins l’interlocuteur privilégié aussi bien des magistrats que des avocats ». Il souligne aussi qu'il a fait partie d'une « nouvelle génération de chroniqueurs judiciaires », issue des « années noires de l’Occupation », qui s’est faite plus critique à l’égard de l’institution judiciaire : « Comment tout ce rituel est conduit, comment fonctionne en sa phase ultime et publique la machine pénale, comment se sont établies des habitudes plus mauvaises que bonnes, voilà ce dont se souciaient soudain nos nouveaux journalistes ». Il s’agissait pour eux de veiller à l’équité du procès et au respect du droit des accusés[16]. Il a pu bénéficier d'une page voire de deux pages dans Le Monde pour ses comptes-rendus de certains procès.

Distinctions modifier

Condamnation judiciaire pour diffamation modifier

Jean-Marc Théolleyre fut condamné en 1983 par la Cour d'appel de Paris pour diffamation, ayant suggéré, dans son ouvrage publié l'année précédente, Les néo-nazis (éd. Messidor/Temps actuels, éditeur lié au Parti communiste français[23]) que « Jean-Marie Le Pen professait des opinions néo-nazies ». L'arrêt de la Cour retient notamment que « il n'a pas fait preuve de la prudence, de la réserve et de l'objectivité qui s'imposaient en procédant par amalgame ou insinuations » (Cour d'Appel de Paris , ).

Publications modifier

  • Le procès des fuites, Paris, Calmann-Lévy, 1956 (Lire le début en ligne)
  • Ces procès qui ébranlèrent la France, 1966, Paris, Le Cercle du nouveau livre d'histoire (Lire le début en ligne) (comptes-rendus d’audience de procès liés au processus de décolonisation)
  • Tout condamné à mort aura la tête tranchée, Paris, Tema-éditions, 1977
  • Les néo-nazis, Paris, Messidor/Temps actuels, 1982 (Lire le début en ligne)
  • Procès d'après-guerre : Je suis partout, René Hardy, Oradour-sur-Glane, Oberg et Knochen, Paris, La Découverte/Le Monde, 1985 (dossier présenté et établi par Jean-Marc Théolleyre)
  • L'accusée: 45 ans de justice en France, 1945-1990, Grasset, 1991 (Lire le début en ligne)
  • Les médias et la justice (avec l'avocat Henri Leclerc), Paris, Éd. CFPJ, 1996 (Lire en ligne le début)

Notes et références modifier

  1. Relevé des fichiers de l'Insee
  2. Jean-Paul Jean, « Jean-Marc Théolleyre, l'observateur engagé (1945-1965) », dans Histoire de la justice, 2010/1, n° 20 (L'auteur cite notamment l'article nécrologique de Laurent Greilsamer.)
  3. Laurent Greilsamer, « Jean-Marc Théolleyre », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  4. Ariane Chemin, « Le jour où… Beuve-Méry recruta ses premiers compagnons », Le Monde, 22 juillet 2014 : « Certains disent qu’il lui manquait « un bout d’index », d’autres « des ongles ». Les phalanges de ses doigts semblaient en tout cas « raccourcies ». Même parmi les plus jeunes ou les derniers arrivés, rares sont ceux qui se souviennent précisément des mains de Jean-Marc Théolleyre. « J’observais à la dérobée, fasciné, ces doigts raides comme des spatules qui écrasaient le Bic, raconte Pierre Georges, une des « plumes » du quotidien et son premier fan. Jamais pourtant je n’aurais osé l’interroger là-dessus. D’ailleurs, il n’aurait pas répondu. » Les mains de « Théo », un non-dit enfoui dans la mémoire du Monde ; le stigmate d’un journal qui a voulu, comme la France, tirer un trait sur cinq années de guerre ».
  5. « Le prix Albert-Londres est décerné à Jean-Marc Théolleyre », Le Monde,‎ (lire en ligne).  : « Jean-Marc Théolleyre n'ai (sic) pas un inconnu pour les lecteurs du Monde. C'est dans notre journal qu'il débuta, en octobre 1945. Il avait alors vingt et un ans, et déjà avait montré des qualités de courage peu communes. Membre d'un réseau de résistance, torturé par la Gestapo - il porte encore aux doigts la marque des sévices qu'il avait héroïquement subis - il refusa de parler et fut déporté à Buchenwald. C'est là une période de sa vie que, dans sa modestie, il n'évoque jamais, niais (sic) que nous tenons - même s'il devait amicalement nous le reprocher - à rappeler ».
  6. « Le prix Albert-Londres est décerné à Jean-Marc Théolleyre », Le Monde,‎ (lire en ligne). : « Il fut chargé plusieurs années, au Monde, des faits divers (...). Mais bientôt lui fut confiée la rubrique judiciaire, et il suivit pour notre journal les grands procès. Nos lecteurs n'ont pas oublié la qualité de ses comptes rendus d'audience qui révélaient son sens de la précision et de l'objectivité, mais aussi ses qualités de cœur. Sa sensibilité s'exprimait également dans ces courts billets que nous avons baptisés " Au Jour le Jour " et, s'intéressant aux mouvements littéraires, il avait publié de nombreuses silhouettes de jeunes romanciers ».
  7. Combat, 9 décembre 1948
  8. Jacques Julliard, Jean-Noël Jeanneney, « Le Monde » de Beuve-Méry, ou le métier d'Alceste, Seuil, coll. « Essais », 1979
  9. « Le prix Albert-Londres est décerné à Jean-Marc Théolleyre », Le Monde,‎ (lire en ligne).  : « Il quitta notre journal en avril 1957. Il est aujourd'hui chroniqueur judiciaire de Paris-Journal, où il fait également de grands reportages ».
  10. « Il y a 50 ans, le procès du criminel nazi Adolf Eichmann », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  11. Annette Wieviorka, Sylvie Lindeperg (dir.), Le moment Eichmann, Albin Michel, 2016
  12. Pierre Georges, « Théo le juste », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  13. « Les adieux de Jean-Marc Théolleyre », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  14. Bertrand Poirot-Delpech, « Son article fera foi », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  15. Brunon Frappat, « Jean-Marc Théolleyre incarnait une haute idée du journalisme », La Croix, 18 juin 2001
  16. Thomas Ferenczi, Le journalisme, PUF, 2007
  17. « La Médaille de la Résistance est conférée à de nombreuses personnalités », Le Monde,‎ (lire en ligne).  : « Nous sommes particulièrement heureux de relever parmi les nouveaux titulaires de la médaille de la Résistance le nom de notre collaborateur et ami Jean-Marc Théolleyre. Nous avons eu déjà l'occasion de signaler les services dans la Résistance de Jean-Marc Théolleyre qui fut déporté à Buchenwald après avoir subi de graves sévices corporels ».
  18. Journal officiel, 23 décembre 1948
  19. L'Aube, 24 décembre 1948
  20. « Le prix Albert-Londres est décerné à Jean-Marc Théolleyre », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  21. Combat, 15 mai 1959
  22. a et b « Les prix de la Fondation Mumm pour la presse écrite Jean-Marc Théolleyre et Plantu parmi les cinq lauréats », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  23. Annie Kriegel, Israël est-il coupable ?, Paris, Robert Laffont, 1982, p. 23

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • Jean-Paul Jean, « Jean-Marc Théolleyre, l'observateur engagé (1945-1965) », dans Histoire de la justice, 2010/1, n° 20 (Lire en ligne)
Une erreur : Il n'a pas reçu le prix Albert-Londres en 1972 mais en 1959.

Liens externes modifier