Jean-Conrad Wieland

militaire suisse et officier de l'armée républicaine pendant la guerre de Vendée

Jean-Conrad Wieland
Naissance
Bâle
Décès / (à 39 ans)
Noirmoutier-en-l'Île
Origine Suisse
Allégeance Drapeau du royaume de France Royaume de France (1771-1784 et 1789-1791)
Drapeau du Royaume de France Royaume de France (1791-1792)
Drapeau de la France République française (1792-1794)
Grade Lieutenant-colonel
Conflits Guerre de Vendée
Faits d'armes 1re Bataille de Machecoul
1re Bataille de Noirmoutier
2e Bataille de Noirmoutier
3e Bataille de Noirmoutier

Jean-Conrad Wieland, né le à Bâle et mort entre le et le à Noirmoutier-en-l'Île, est un militaire suisse et un officier de l'armée républicaine pendant la guerre de Vendée.

Biographie modifier

Jean-Conrad Wieland naît à Bâle, le [1],[2]. Il est le fils de Jean-Henri Wieland et de Dorothée Buxtorf[2]. Comme plusieurs membres de sa famille, il rejoint l'armée française et s'engage en 1771 dans le régiment de Boccard[2]. En 1782, il est élevé au grade de lieutenant et il se marie la même année à Calais avec Marie-Claudine Tucker[2]. Le couple a trois filles : Adeline-Sophie-Dorothée, née le  ; Marie-Marguerite, née le , mais qui décède au bout de quelques semaines ; et Anne-Louise, née le [2].

Wieland démissionne de l'armée en 1784[2]. Il s'installe ensuite à Paris, puis à Nantes[2]. Dans cette ville, il devient négociant et s'associe avec un nommé Daniel Schinz, de Zurich, dans le commerce de sucre, de café et de coton avec plusieurs ports d'Europe[2].

En 1789, dès le début de la Révolution française, Wieland rejoint la garde nationale de Nantes[2],[3]. En , il est nommé chef du bataillon de la Bourse[2].

Lorsque la guerre de Vendée débute en , Wieland participe aux opérations contre les paysans insurgés contre la levée en masse. En mars, il est à Ancenis[2], qui est attaquée sans succès par des insurgés. Il sert ensuite sous les ordres du général Beysser et participe à la reprise de Machecoul le [3]. Beysser reprend ensuite le contrôle de l'île de Noirmoutier le [4] et place Wieland à la tête de la garnison chargée d'occuper l'île[5]. Le , il est élevé au grade de lieutenant-colonel[2].

Après quelques mois de calme, Wieland doit cependant faire face aux troupes de Charette qui tentent de reprendre Noirmoutier avec la complicité de certains habitants de l'île[5]. Il repousse une première attaque le [6] et établit une commission militaire pour rechercher et juger les conjurés[7]. Cependant Charette lance une nouvelle attaque le [5]. Cette fois, les défenses républicaines sont enfoncées et les Vendéens se rendent maîtres de l'île[5]. Wieland gagne le port de la Chaise, où il organise l'embarquement et l'évacuation vers Nantes de sa femme et de ses enfants[8],[9]. Cependant, les républicains pensent qu'il tente de s'enfuir, ce qui provoque un mouvement de panique[8]. Wieland regagne alors la ville et s'enferme à l'intérieur du château avec ses troupes[5],[8]. Peu après, il capitule et remet son sabre à Charette, qui le lui rend[5].

La garnison de Noirmoutier est conduite à Bouin, où elle est en partie massacrée par François Pajot[10], mais Wieland demeure à Noirmoutier où il entretient de bons rapports avec l'état-major royaliste[11],[12],[13]. Le , les républicains débarquent sur l'île et obtiennent la capitulation de la garnison vendéenne[14]. Malgré les promesses du général Haxo, tous les défenseurs sont fusillés sur ordre des représentants en mission Prieur de la Marne, Turreau et Bourbotte[15].

Wieland est découvert et est aussitôt accusé de trahison par les représentants en mission, qui décident de le faire exécuter sans jugement[11],[12],[13],[A 1].

 
La mort du général d'Elbée, huile sur toile de Julien Le Blant, 1878. musée du Château, Noirmoutier-en-l'Île.

Wieland est fusillé entre le 6 et le , sur la place d'Armes, à Noirmoutier-en-l'Île[17],[1],[18],[19],[20]. Il est exécuté en même temps que Maurice d'Elbée, Pierre Duhoux d'Hauterive et de Pierre Prosper Gouffier de Boisy, qui tentent en vain de l'innocenter[19],[21].

À Nantes, le Comité révolutionnaire de Nantes fait mettre aux arrêts la femme de Wieland, ainsi que ses enfants et son associé, Schinz[2]. Le , Marie-Claudine Tucker est incarcérée à la prison Le bon Pasteur, tandis que Schinz est enfermé à la prison des Saintes-Claires[2]. L'ambassadeur François Barthélemy obtient leur libération en [2]. Marie-Claudine Tucker se rend alors à Bâle, dans la famille de son mari, où elle donne naissance à un fils, qui reçoit le prénom de son père, Jean-Conrad[2]. Le 24 brumaire de l'an V, François Louis Phelippes-Tronjolly fait une pétition signée par plusieurs administrateurs de la commune et du canton de Nantes pour obtenir la réhabilitation de Wieland[1]. En 1795, Legrand, avoué de Paris, adresse un mémoire[A 2] au ministère de la guerre pour obtenir une pension pour la veuve et les enfants de Wieland[3],[1]. Marie-Claudine Tucker reçoit une pension alimentaire de 200 francs en pluviôse de l'an IX et meurt à Versailles le [1].

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. « La veille [de l'exécution de d'Elbée], dans un souper où je me trouvais, [les représentants] s'entretenaient de l'appareil militaire qu'ils voulaient qu'on donnât à cette exécution, lorsqu'un d'eux prétendit qu'il était fâcheux que la partie ne fût pas carrée. « Eh ! sac... d... ! reprend aussitôt Bourbotte, n'avons-nous pas ce traître de Wieland? » C'en fut assez, cet avis passa sans contradiction. On conçoit que, pour livrer à la mort les prisonniers, ils se soient prévalus des horribles décrets de la Convention et du prétendu droit de représailles. Mais Wieland n'était pas un prisonnier, c'était un officier de la République, trahi par le sort des combats. Parce que Charette avait fait périr les débris de sa garnison et avait ménagé ses jours, était-ce là une preuve d'intelligence avec lui ? Fallait-il donc qu'il fût massacré, pour rester innocent à leurs yeux? Rien ne pouvait les autoriser à le faire passer par les armes, sans un jugement préalable d'une commission militaire. En agir autrement, c'était outrager la civilisation à la manière des cannibales. Tel fut cependant le tribunal, telles furent les formes qu'il observa. Ainsi fut prononcé l'arrêt de mort de l'infortuné commandant.

    Dès le lendemain, au moment de l'exécution, le hussard Félix se rendit chez lui et lui dit de le suivre. […] Un homme à cheval désigne, à haute voix, le nom des victimes et les crimes qu'on leur impute ; mais lorsqu'il dit : « Voici Wieland, ce traître qui a vendu et livré l'île de Noirmoutier aux rebelles », d'Elbée, rassemblant tout ce que sa situation et ses blessures lui laissaient de force, s'écrie : « Non ! M.Wieland n'est pas un traître ; jamais il n'a servi notre parti, et vous faites périr un innocent. » Il dit en vain, le plomb siffle, et tous quatre ont cessé d'exister[16]. »

    — Mémoires de François Piet.

  2. « Le 4 janvier 1794, les armées républicaines reprirent Noirmoutier. Wieland s'empressa d'en instruire sa femme ; il lui fit parvenir dans son cachot un billet écrit de sa main, par lequel il lui annonça qu'il touchait au moment fortuné où il lui serait permis d'embrasser ses enfants. Il lui disait : Je sais qu'on m'accuse, mais je n'aurai pas de peine à me justifier, pourvu qu'on m'écoute !

    Le malheureux, pour repousser l'odieux reproche de trahison, s'occupait de la rédaction d'un mémoire justificatif ; il ne savait pas que ce travail était peine perdue et que ses ennemis, en l'immolant sans vouloir l'entendre, ne lui laisseraient pas même en mourant la consolation de publier son innocence !

    En effet, au moment où il y pensait le moins, on vint le chercher pour le conduire au supplice. En vain il réclama le droit sacré de toutes les nations, le droit d'être entendu avant d'être jugé; on ne daigna pas l'écouter ; on lui lut une espèce d'écrit qu'on appelait sentence, qui portait qu'il serait fusillé comme traitre à la patrie !

    À ce mot de traitre, il s'écria d'une voix ferme : Non, je ne l'ai pas été ! Deux généraux de l'armée ennemie, attachés au même poteau que lui, élevant aussi leurs voix, dirent : Nous attestons qu'il n'a jamais été des nôtres !

    Mais cet hommage rendu à l'innocence de l'infortuné Wieland, dans un moment où les paroles des mourants sont pour ainsi dire des actes, ne purent l'arracher des mains de ses bourreaux. Ainsi fut assassiné, au nom de la patrie, un homme qui n'avait cessé de prodiguer son sang pour elle.

    La malheureuse veuve et ses enfants, compris dans la même proscription, n'échappèrent que par miracle aux noyades et aux soupapes du temps d'alors ; ils ne furent redevables de leur salut qu'à l'intervention de l'État de Bâle et au citoyen Barthélemy, ambassadeur de la République française en Suisse[1]. »

    — « Mémoire pour la veuve et les enfants de Wieland », adressé par Legrand, avoué de Paris, au ministre de la guerre, en l'an VI .

Références modifier

  1. a b c d e et f Chassin, t. III, 1894, p. 491-492.
  2. a b c d e f g h i j k l m n o et p La Revue du Bas-Poitou et des Provinces de l'Ouest, Volumes 59 à 60, 1946, p. 122
  3. a b et c Chassin, t. III, 1892, p. 352.
  4. Dumarcet 1998, p. 210-212.
  5. a b c d e et f Dumarcet 1998, p. 278-279.
  6. Dumarcet 1998, p. 276.
  7. Chassin, t. III, 1894, p. 151-152.
  8. a b et c Chassin, t. III, 1894, p. 177-179.
  9. Gabory 2009, p. 326-327
  10. Dumarcet 1998, p. 283-284.
  11. a et b Dumarcet 1998, p. 279.
  12. a et b Chassin, t. III, 1894, p. 178-179.
  13. a et b Baguenier Desormeaux, 1893, p. 19-20.
  14. Dumarcet 1998, p. 307-309.
  15. Gérard 2013, p. 109.
  16. Gérard 2013, p. 114-115.
  17. Chassin, t. III, 1894, p. 486.
  18. Chassin, t. III, 1892, p. 605.
  19. a et b Dumarcet 1998, p. 311.
  20. Gérard 2013, p. 296.
  21. Gérard 2013, p. 110.

Bibliographie modifier