Guillaume II (roi de Sicile)

roi de Sicile au XIIe siècle
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Guillaume II de Sicile
Illustration.
Le Christ couronnant Guillaume II.
Mosaïque de la cathédrale de Monreale.
Titre
Roi de Sicile

(23 ans, 6 mois et 11 jours)
Prédécesseur Guillaume Ier de Sicile
Successeur Tancrède
Biographie
Dynastie Hauteville
Date de naissance
Lieu de naissance Palerme (Sicile)
Date de décès (à 35 ans)
Lieu de décès Palerme (Sicile)
Père Guillaume Ier de Sicile
Mère Marguerite de Navarre
Conjoint Jeanne d'Angleterre
Enfants Bohémond de Sicile

Guillaume II (roi de Sicile)
Rois de Sicile

Guillaume II de Sicile (Palerme, – Palerme, ), aussi nommé Guillaume le Bon, est le fils de Guillaume le Mauvais, de la dynastie des Hauteville, et de Marguerite de Navarre. Roi de Sicile de 1166 à 1189, Guillaume II est surnommé « le Bon » en raison de sa politique de clémence et de justice envers les communes et les barons de Sicile, en opposition avec le règne de son père.

BiographieModifier

Enfance et régenceModifier

Guillaume a seulement douze ans lorsqu'il succède à son père Guillaume le Mauvais à la tête du royaume de Sicile[1]. Il est couronné le puis placé sous la régence de sa mère Marguerite de Navarre[1]. Le cousin de Marguerite, le jeune comte Étienne du Perche, est nommé chancelier du royaume puis archevêque de Palerme en 1167[1]. Un autre français, Pierre de Blois, devient le précepteur de Guillaume. Étienne du Perche s'attire cependant la haine de la noblesse locale, et est contraint de quitter la Sicile en 1168[1]. Gautier Ophamil, devenu archevêque de Palerme en 1169[1], et Matthieu d'Ajello, vice-chancelier, prennent alors les rênes du gouvernement. En 1171, le jeune Guillaume commence à dix-huit ans son règne personnel[2],[3].

Règne personnelModifier

 
Guillaume II offrant la cathédrale de Monreale à la Vierge Marie. Mosaïque de la cathédrale de Monreale.

Guillaume poursuit la politique étrangère de son père. Il entretient de bons rapports avec le pape Alexandre III et l'empereur byzantin Manuel Comnène. En 1172, l'empereur propose sa fille Marie en mariage puis revient sur sa décision. C'est un camouflet pour Guillaume, qui se déclare alors contre Byzance. Champion de la papauté, Guillaume soutient le pape Alexandre III contre Frédéric Barberousse. L'empereur germanique tente pas moins de cinq expéditions militaires en Italie, sans succès. Il est finalement battu par la Ligue lombarde à Legnano en 1176[2].

Aidé par un brillant amiral, Margaritus de Brindisi, Guillaume tente de continuer la politique expansionniste de son père, et surtout celle de son grand-père Roger II de Sicile. En 1174, sa flotte conduite par l'amiral Gauthier de Moac attaque l’Égypte pour venir en aide au roi Amaury Ier de Jérusalem mais échoue dans sa tentative de prendre Alexandrie.

En 1177, Guillaume épouse la princesse Jeanne d'Angleterre, fille du roi Henri II d'Angleterre, alors âgée de onze ans. En 1180, il signe une trêve de dix ans avec le califat almohade[1]. Après la mort du pape Alexandre III en 1181, Guillaume prépare une alliance avec Frédéric Barberousse contre l'Empire byzantin. En 1184, il donne sa tante Constance de Hauteville en mariage au fils aîné de Barberousse, le futur Henri VI. Cette union donnera ensuite à la dynastie souabe des prétentions au trône de Sicile[2],[4].

Campagne contre l'Empire byzantinModifier

En 1185, Guillaume lance une grande campagne contre l’Empire byzantin, alors dirigé par l'empereur Andronic Ier Comnène. Il met sur pied une flotte de 300 vaisseaux, tandis qu’une armée de 80 000 hommes dont 5 000 cavaliers et un corps d’archers doivent attaquer l’empire par voie de terre[5].

Partie de Messine le , la flotte prend Durazzo le , avant de se lancer à l’attaque de Corfou, Céphalonie, Zante, le Péloponnèse et la mer Égée. Pendant ce temps, l’armée de terre fonce sur la Macédoine et met le siège devant Thessalonique le  ; le 15 août, la flotte complète le blocus[6] ; le , les assaillants s'emparent de la ville et se livrent au pillage[7],[8].

À partir de Thessalonique, l’armée normande se divise en deux corps, le premier marchant vers Serrès, pendant que le second, suivant la côte, se dirige vers Constantinople où l’annonce de son arrivée crée une peur panique[9]. Les Byzantins se révoltent contre Andronic et proclament Isaac II Ange empereur. Celui-ci se hâte d’envoyer à la rencontre de l’armée normande le talentueux général Alexis Branas, déjà auréolé de plusieurs campagnes victorieuses en Hongrie et en Bithynie. Celui-ci force les troupes normandes, fatiguées et encombrées de butin, à reculer jusqu’à Mosynopolis, à l’est du Nestos. Il se dirige alors vers le Strymon où, devant Dimitritsa, il inflige une sévère défaite aux Normands le [10].

L'armée normande est contrainte de retourner à Thessalonique afin de s’embarquer sur les bateaux qui se trouvent encore dans le port[11],[12]. Guillaume abandonne Thessalonique et signe en 1189 un traité de paix avec l'empereur Isaac II Ange. Les Normands évacuent également Durazzo et Corfou. Seules les iles de Céphalonie et de Zanthe resteront en leur possession.

Le souverain normand participe également à la préparation de la troisième croisade, incitant les croisés à passer par son territoire. En 1188, la flotte normande de l'amiral Margaritus de Brindisi empêche Saladin de s'emparer de la ville de Tripoli[13].

 
Palerme pleurant la mort de Guillaume II.

Guillaume II meurt le à trente-cinq ans, sans enfant légitime[1]. Son cousin Tancrède de Lecce, soutenu par la noblesse contre les prétentions de sa tante la princesse Constance et de son époux Henri VI, lui succède à la tête du royaume.

HéritageModifier

 
La cathédrale de Monreale, où se trouve le tombeau de Guillaume II.

Les chroniqueurs mettent en avant la remarquable beauté physique de Guillaume, qui se révèle en particulier le jour du sacre[1]. Les autres vertus attribuées par les chroniqueurs au souverain sont la clémence, la libéralité, la bienveillance, la piété et la miséricorde[1]. Selon Ferdinand Chalandon, Guillaume avait une personnalité peu affirmée, et il est difficile de trouver la trace son influence personnelle dans la politique générale du royaume[14]. « Vivant le plus souvent retiré au fond de ses palais, entouré de ses femmes et de ses esclaves, Guillaume II vécut en souverain oriental plus occupé de ses plaisirs que de l’État[15]. » Il ajoute que les « fortes qualités de la race » que l'on trouvait encore en Roger II et Guillaume Ier ont disparu totalement chez Guillaume[15].

Dans la Divine Comédie, Dante fait mention du roi Guillaume le Bon, un « souverain estimé et aimé de ses sujets », le plaçant au Paradis (XX, 61-65), parmi les princes pieux, justes et sages, aux côtés de David, Trajan, et Constantin.

Le roi Guillaume le Bon est commanditaire de plusieurs édifices. Il fait achever notamment en 1170, le palais de la Zisa commencé par son père en 1164, et y entame quelques modifications jusqu'en 1184. Il est le commanditaire de la construction à partir de 1174 de la cathédrale de Monreale, du monastère et du palais voisins[1]. Vers 1180, il fait édifier la Cuba à Palerme. Le voyageur arabe Ibn Djubayr déclare son admiration pour le roi de Sicile en ces termes:

« Le roi de la Sicile est admirable en ceci qu'il a une conduite parfaite ; il emploie des musulmans comme fonctionnaires et utilise des officiers castrats et tous, ou presque, gardent leur foi secrète et restent attachés à la loi musulmane. Le roi a pleine confiance dans les musulmans et se repose sur eux pour ses affaires et ses travaux les plus importants. […] Il ressemble aux souverains musulmans : comme eux il plonge dans les délices du pouvoir, établit ses lois, règle ses modalités, répartit les dignités parmi ses hommes, exagère la pompe royale et l'étalage de son apparat. […] Un autre fait admirable qu'on rapporte à propos de sa personne, c'est qu'il lit et écrit l'arabe. »

— Ibn Djubayr, Relation de voyages, « La Sicile et le retour », p. 385-386, Voyageurs arabes, 1184[16], Gallimard, 1995.

Notes et référencesModifier

  1. a b c d e f g h i et j (it) Francesco Panarelli, « GUGLIELMO II d'Altavilla, re di Sicilia », Dizionario Biografico degli Italiani, volume 60, 2003. [lire en ligne]
  2. a b et c (en) « William II », Encyclopaedia Britannica, Fifteenth Edition, 2010.
  3. Mondes normands, « La régence de la reine Marguerite ». [lire en ligne].
  4. Mondes normands, « Guillaume II, la politique étrangère ». [lire en ligne].
  5. Aubé 1983, p. 260.
  6. Norwich 1995, p. 146-147.
  7. Aubé 1983, p. 262.
  8. Norwich 1995, p. 149.
  9. Norwich 1995, p. 151.
  10. Norwich 1995, p. 154.
  11. Aubé 1983, p. 263.
  12. Norwich 1995, p. 155.
  13. (en) « William II », Encyclopaedia Britannica, Eleventh Edition, 1911.
  14. Chalandon 1907, p. 417.
  15. a et b Chalandon 1907, p. 418.
  16. La Sicile du roi Guillaume II sur le site de la Bnf.

Voir aussiModifier

BibliographieModifier

  • Pierre Aubé, Les empires normands d'Orient, Paris, Tallandier, .
  • Ferdinand Chalandon, Histoire de la domination normande en Italie et en Sicile, Paris, Picard, .
  • (en) John Julius Norwich, Byzantium: The Decline and Fall, Londres, Viking, .

Articles connexesModifier

Liens externesModifier