Godefroid Kurth

historien et philologue belge
Godefroid Kurth
Biographie
Naissance
Décès
Sépulture
Pseudonyme
Victor ChrétienVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Formation
Activités
Professeur d'université, philosophe, historien, enseignant du secondaireVoir et modifier les données sur Wikidata
Conjoint
Eva Lavaux (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
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Rue Godefroid Kurth à Arlon.
Chapelle funéraire de Godefroid Kurth au cimetière de Frassem.

Godefroid Kurth né à Arlon (province de Luxembourg) le et mort à Asse (province de Brabant) le , est un historien belge.

Biographie modifier

Origines et formation modifier

Godefroid Kurth naît en 1847 à Arlon[1]. Son père, Jean-Guillaume-Joseph, était un ancien militaire originaire de Cologne (Rhénanie) devenu commissaire de police à Arlon, chef-lieu de la province belge de Luxembourg, et mort en 1850. Sa mère, née Jeanne Erpelding, était arlonaise et parlait le dialecte de la région : l'Areler qui était également la langue maternelle de Godefroid Kurth.

Par sa bisaïeule maternelle, Godefroid Kurth était également apparenté à l'historien belge Jean-Pierre Waltzing[2].

Ce n'est qu'à l'âge de huit ans, à l'école primaire, qu'il commença à apprendre le français. Doué, il entra à l'Athénée royal d'Arlon (école secondaire) à onze ans et y fit un parcours aussi classique que brillant[réf. nécessaire]. À la fin de ses études secondaires, il rafla trois premiers prix au Concours général organisé entre les athénées du royaume de Belgique (composition française, histoire et latin), et, au vu des points obtenus, il se classait comme le meilleur élève des athénées de toute la Belgique. En 1865, l'École normale de Liège accueillit cet élève. Après y avoir terminé ses études en 1869, il fut chargé du cours d’Histoire à l’athénée royal de Liège[1]. Godefroid Kurth était également passionné par la poésie durant sa jeunesse. Sous le pseudonyme de Victor Chrétien[3], il publia des poèmes catholiques quelque peu marqués par le romantisme.

Carrière d'historien modifier

 
Buste de Godefroid Kurth à Arlon.

En 1873, après sa thèse sur Caton l'Ancien et une autre sur la politique des ducs de Bourgogne, il fut nommé professeur d'histoire médiévale à l'Université de Liège et Docteur spécial en sciences historiques. Il introduisit à l'Université de Liège des innovations inspirées de la pratique historique allemande, notamment pour les cours d'histoire qu'il trouvait alors trop théoriques. Ses nouvelles méthodes marquèrent une révolution dans le milieu universitaire belge. Fervent catholique, ses opinions lui valurent parfois des difficultés dans le milieu universitaire. Toutefois, son livre Les Origines de la civilisation moderne (1886) lui apporta la célébrité en son temps. En enseignant l'Histoire des Francs de Grégoire de Tours aux étudiants, il devint en effet le spécialiste des Mérovingiens[1]. Cet ouvrage, sa biographie de Clovis et ses études sur l'histoire de la Ville de Liège lui ont valu de passer à la postérité. Il a également été le premier en Belgique à s'être consacré aux œuvres de Dante Alighieri. Ces travaux ont marqué le début d'une tradition d'études dantesques à l'Université de Liège. Kurth accéda à l'éméritat en 1906. Le journaliste Fernand Neuray lui a consacré une biographie[4].

L'année où Kurth accéda à l'éméritat coïncide avec l'année durant laquelle il est devenu le directeur de l'Institut historique belge de Rome. Cette nouvelle nomination lui a donné l'occasion de vivre une partie de l'année auprès du Vatican durant les dernières années de sa vie. Malgré ses nombreux voyages, il était un grand nostalgique de sa province natale qu'il assimilait souvent dans ses écrits à une sorte de refuge, ainsi qu'on peut le constater dans sa correspondance privée et professionnelle. Cette nostalgie marquante conduira Godefroid Kurth et sa femme Eva Lavaux, unis depuis 1874, à faire bâtir une maison dans le village de Frassem.

Godefroid Kurth était un homme de foi convaincu. Défenseur du catholicisme, il était persuadé que l'absence de l'Eglise provoquait un effondrement social. Ses diverses interventions lui valurent d'être un homme de confiance du cardinal Mercier avec qui il tissa de solides liens d'amitié. En plus d'être catholique, Kurth était un ultramontain déterminé. Il prônait la primauté des pouvoirs du pape sur le pouvoir politique.

Germanophile jusqu'en 1914, du fait de ses origines paternelles, il fut très actif dans diverses associations visant à défendre l'usage de la langue allemande en Belgique. L'ultimatum allemand à la Belgique fut cependant un véritable choc pour lui. Godefroid Kurth fut révulsé par les conséquences de l'invasion allemande et des combats en Belgique avec leur cortège d'atrocités infligées à la population civile. Il enquêta, et le résultat de ses investigations parut après sa mort sous le titre « Le Guet-Apens prussien en Belgique »[5] (Paris-Bruxelles 1919). Inachevée de par le décès de son auteur, cette recension des faits s'appuyait sur des témoignages, notamment sur les massacres d'Aarschot. Le cardinal Mercier écrira, dans la préface, que Godefroid Kurth, dont les origines familiales étaient en partie allemandes, fut « accablé par l'invasion, son iniquité, ses atrocités, ses perfidies »[6].

Décès modifier

Godefroid Kurth est mort à Asse le des suites d'une pneumonie. À sa demande, il a été enterré dans le cimetière de Frassem cinq années après son décès.

Œuvre modifier

Godefroid Kurth a laissé une œuvre écrite considérable : 504 titres[7], dont plusieurs livres et de très nombreux articles de revues[1].

Ouvrages modifier

  • Caton l'ancien, étude biographique, Bruges, Daveluy, (lire en ligne).
  • Sitting Bull, Bruxelles, Revue générale, 1878-1879.
  • Analectes pour servir à l’histoire d’Arlon, Arlon, Institut archéologique du Luxembourg, 1880.
  • Les origines de la ville de Liège, Liège, L. Grandmont-Danders, 1883.
  • Les Origines de la civilisation moderne, Louvain, Ch. Peeters, (lire en ligne).
  • La lèpre en Occident avant les Croisades, Paris, Alphonse Picard, (lire en ligne)
  • Histoire poétique des Mérovingiens, Bruxelles, Société belge de librairie, (lire en ligne)
  • La Frontière linguistique en Belgique et dans le nord de la France, Bruxelles, Société belge de librairie,
  • Das deutsche Belgien und der Deutsche Verein, Arlon et Aubel, Willems, , 50 p.
  • Clovis, le fondateur, Paris, Éditions Tallandier, (réimpr. 2000), 629 p. (ISBN 2-235-02266-9)
  • Qu’est-ce que le moyen âge ? (Discours prononcé à Fribourg au Congrès international des catholiques le 19 août 1897), (lire en ligne)
  • L'Église aux tournants de l'histoire, Bruxelles, Société belge de librairie,
  • Saint Boniface, Paris, Lecoffre, coll. « Les Saints », , 159 p. (lire en ligne)
  • Notger de Liége et la civilisation au Xe siècle, Paris, Bruxelles, Liège, A. Picard, O. Schepens, L. Demarteau, , 2 tomes (lire en ligne)
  • La Cité de Liège au Moyen-Âge, Bruxelles, Liège, Dewit, Cormaux et Demarteau, , LXXI-322, VII-345, VII-417
    • La Cité de Liège au Moyen-Âge, t. I, Liège, Dewit, Cormaux et Demarteau, , LXXI-322 p. (lire en ligne)
    • La Cité de Liège au Moyen-Âge, t. II, Liège, Dewit, Cormaux et Demarteau, , VII-345 p. (lire en ligne)
    • La Cité de Liège au Moyen-Âge, t. III, Liège, Dewit, Cormaux et Demarteau, , VII-417 p. (lire en ligne)
  • Etude critique sur Jean d'Outremeuse, Bruxelles, Palais des Académies, coll. « Mémoires - Académie royale de Belgique, Classe des Lettres et des Sciences Morales et Politiques » (no VII), , 105 p., in-8° (ISSN 0378-7893, lire en ligne)
  • Histoire des croix miraculeuses d’Assche, Assche, Imprimerie Frans Van Achter, 1912.
  • Mizraim, souvenirs d'Égypte, Albert Dewit, (lire en ligne)
  • La Nationalité belge, Namur, Picard-Balon, , 231 p. (lire en ligne)
  • Études franques, Paris, Bruxelles, Honoré Champion, Albert Dewitte, , 2 tomes (lire en ligne)
  • Le Guet-apens prussien en Belgique, Paris, H. Champion, 1919.
  • La chronique de Jean de Hocsem, Bruxelles, Kiessling, , 445 p. (lire en ligne)

Articles modifier

  • « Notice sur un manuscrit d'Hariger et d'Anselme, conservé à l'abbaye d'Averbode », Bulletin de la Commission Royale d'Histoire, Commission Royale d'Histoire, 4e série, vol. II,‎ , p. 377-394 (lire en ligne)
  • « Saint Grégoire de Tours et les études classiques au VIe siècle », Revue des questions historiques, vol. XXIV,‎ , p. 586-593 (ISSN 2017-7275, lire en ligne, consulté le )
  • « La Loi de Beaumont en Belgique », Mémoires couronnés et autres mémoires, vol. XXXI,‎ , p. 769-790 (lire en ligne, consulté le )
  • « Majerou », Annales de l’Institut archéologique d’Arlon, t. 17, 1885, p. 265-295.
  • « Une nouvelle histoire des papes », Revue des Questions historiques, t. 12, 1887, p. 197-203.
  • « Une biographie de l'évêque Notger au XIIe siècle », Bulletin de la Commission royale d'Histoire,‎ (lire en ligne, consulté le )
  • « Les Nationalités en Auvergne au VIe siècle », Bulletins de l'Académie Royale des Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts de Belgique, vol. 4,‎ , p. 224-242 (lire en ligne, consulté le )
  • « Les Ducs et les comtes d'Auvergne au VIe siècle », Revue d'Auvergne,‎ (ISSN 0035-1008)
  • « Les origines de la Commune de Liége », Bulletin de l'institut archéologique liégeois, t. XXXV,‎ , p. 229-324 (lire en ligne, consulté le )
  • « Ce que demandent les Allemands », Le Vingtième Siècle,‎
  • « Recherche sur l'origine des paroisses de Liège », Bulletin de la Société d'art et d'histoire du diocèse de Liège, vol. 16,‎ , p. 234 (lire en ligne, consulté le )

Poèmes modifier

  • « Paul et Virginie », Bulletin de l’Académie royale de Belgique, 1863, n° 9 et 10, 2e série, t. XVI, p. 278-280.
  • « Attitudes d’arbres. Esquisses d’après nature », Revue trimestrielle, 2e série, t. IV, 1864, p. 5-31.
  • « Poésies », dans, Revue trimestrielle, 2e série, t. XVII, 1868, p. 282-289.
  • « La poésie flamande. Julius Vuylsteke », dans, Revue de Belgique, 2e année, t. IV, 1870, p. 5-18.
  • « Roma. Poésies catholiques » (sous le pseudonyme de Victor Chrétien), Paris-Bruxelles, Victor Palmé – G. Lebrocquy, 1877.
  • « Pie IX » (sous le pseudonyme de Victor Chrétien), dans, Revue générale, t. XXVII, 1878, p. 372-377.
  • « La jeunesse d’un poète » (sous le pseudonyme de Victor Chrétien), Revue générale, t. XXIX, 1879, p. 711-719 ; 866-878 ; t. XXX, pp. 51-65.

Postérité modifier

A Arlon, sa ville natale, l’ancienne rue de Mersch, où la famille Kurth habita à la suite du décès prématuré de son père, porte actuellement le nom de Godefroid Kurth. Un buste a par ailleurs été dressé dans le parc du Musée archéologique d'Arlon à l’occasion du centenaire de cet historien accompli.

Une rue porte également son nom dans la ville d’Asse, où il est décédé.

Un auditorium (amphithéâtre) de l’Université de Liège porte son nom. Il y a également un « Quai Godefroid Kurth » le long de la Meuse à Liège.

Exposition modifier

Du au , le Musée Gaspar d'Arlon lui a consacré une exposition[8], documentée grâce aux fonds Kurth de l'Institut archéologique du Luxembourg[9] et des Archives du monde catholique (ARCA - Louvain-la-Neuve).

Notes et références modifier

  1. a b c et d Godefroid Kurth, Clovis, le fondateur, Paris, Éditions Tallandier, (réimpr. 2000), 629 p. (ISBN 2-235-02266-9), « Préface », p. VII-XI
  2. David Colling, « Kurth/Waltzing : perceptions luxembourgeoises et catholiques du milieu académique », Archives générales du Royaume et Archives de l'état dans les provinces ; Studia, vol. 163,‎ , p. 49-59 (ISBN 978-94-9298-292-6)
  3. Son pseudonyme est précisé dans l'aperçu des publications de ses poèmes.
  4. Fernand Neuray, Godefroid Kurth. Un demi-siècle de vie Belge, Bruxelles, Librairie Nationale d'Art et d'Histoire, 1931.
  5. Ce titre s'explique, car, selon Kurth, le génie intellectuel allemand a été influencé négativement par l'esprit belliqueux prussien.
  6. John Horn et Alan Kramer (trad. de l'anglais), 1914, les Atrocités allemandes, Paris, Tallandier, , 640 p. (ISBN 2-84734-235-4), p. 396
  7. Karl Hanquet, Bibliographie des travaux de M. Godefroid Kurth (1863-1908), Paris, H. Champion, 1908.
  8. David Colling, « Exposition "Kurth" au Musée Gaspar du 24/06/2016 au 05/03/2017 », Bulletin trimestriel de l'Institut Archéologique du Luxembourg, vol. 92, nos 3-4,‎ , p. 166-190 (ISSN 0776-1244)
  9. David Colling et Jean Kélecom, « Le Fonds Godefroid Kurth de l'Institut Archéologique du Luxembourg, conservé au Musée Gaspar », Bulletin trimestriel de l'Institut Archéologique du Luxembourg, vol. 92, nos 3-4,‎ , p. 129-149 (ISSN 0776-1244)

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

Dictionnaire modifier

  • Thierry Denoël (dir.), Le nouveau dictionnaire des Belges, Bruxelles, , p. 35.
  • Paul Delforge, Cent Wallons du Siècle, Charleroi, Institut Jules Destrée, .
  • Paul Gérin, Nouvelle Biographie nationale, vol. 8, Bruxelles, Académie royale de Belgique, , p. 212-219.

Monographie modifier

  • Alfred Cauchie, Godefroid Kurth (1847-1916) : Le patriote, le chrétien, l'historien, Bruxelles, La lecture au foyer, , 142 p. (lire en ligne)
  • Fernand Neuray, Godefroid Kurth. Un demi-siècle de vie Belge, Bruxelles, Librairie Nationale d’Art et d’Histoire, .
  • Jean-Marie Triffaux, Combats pour la langue dans le Pays d'Arlon aux XIXe et XXe siècles : Une minorité oubliée?, Arlon, La Vie arlonaise - Institut archéologique du Luxembourg, , 478 p.
  • Karl Hanquet, Bibliographie des Travaux de M. Godefroid Kurth : (1863-1908), Paris, H. Champion, .

Article modifier

  • Georges Goyau, « Un historien belge - M. Godefroid Kurth », Revue des deux Mondes, Paris, 5e série, no 37,‎ , p. 367-395 (lire sur Wikisource, lire en ligne)
  • Henri Pirenne, « Notice sur Godefroid Kurth », dans Annuaire de Belgique, Bruxelles, Académie royale de Belgique, , p. 192-261.
  • Vincent Genin, « Du côté de chez…Godefroid Kurth. Réflexions personnelles », dans Bulletin : l’Institut archéologique du Luxembourg, vol. 3-4, t. 92, Arlon, . À paraître prochainement.

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