Gloire (cuirassé)

navire de guerre

La Gloire
illustration de Gloire (cuirassé)
Modèle réduit de la Gloire, au Musée de la Marine

Type Frégate cuirassée
Classe Gloire
Histoire
A servi dans  Marine nationale
Chantier naval Toulon, Drapeau de la France France
Quille posée
Lancement
Armé Août 1860
Statut Radiée en 1879, détruite en 1883
Équipage
Équipage 570 hommes
Caractéristiques techniques
Longueur 77,8 mètres
Maître-bau 17 m
Tirant d'eau 8,4 m
Déplacement 5 630 tonnes
Propulsion 1 100 m² de voilure
1 machine à vapeur horizontale à deux cylindres
1 hélice à six pales, 8 chaudières ovales
Puissance 2 500 ch
Vitesse 13 nœuds
Caractéristiques militaires
Blindage 120 mm de plaques en fer forgé
Armement 36 canons chargés par la bouche de 160 mm modèle (1858/60).
Après 1866 :
8 canons à chargement par la culasse de 239 mm modèle 1864
6 canons de 193 mm de même type modèle 1866
Rayon d'action 4 000 km à 8 nœuds
Pavillon France

La Gloire est le premier bâtiment de guerre cuirassé de haute mer construit en occident. Construite sur les plans de l’ingénieur Dupuy de Lôme[1] activement soutenu par Napoléon III, elle a été lancée en 1859 pour la marine française, juste après la guerre de Crimée, où le besoin s’était fait sentir d’améliorer la protection des bâtiments. Sa taille n'en fait pas encore un cuirassé, mais, selon l’appellation du temps, une « frégate cuirassée ». Elle surprend néanmoins tous les observateurs et relance la course à l’armement naval entre la France et le Royaume-Uni, ouvrant ainsi la porte à la mise en chantier des grands cuirassés. Un modèle réduit de la Gloire a été exposé au Musée national de la Marine lors d'une exposition intitulée De la Gloire au Charles de Gaulle qui a eu lieu en 1998. Il figure parmi les collections permanentes du musée.

Un navire « dans l’air du temps » modifier

Au lendemain de la guerre de Crimée et du succès des batteries flottantes, se pose la question du renouvellement de la flotte car les canons type Paixhans ont fait preuve d'une extrême efficacité contre les bâtiments en bois à cause de leurs obus explosifs. Plusieurs vaisseaux britanniques et français ont été sévèrement endommagés au début du conflit et il devient évident qu’il faut procéder à un blindage, au moins partiel des coques. Les batteries flottantes, qui ont encaissé des dizaines de coups sans broncher pendant la bataille de Kinbourn montrent la voie, mais elles sont lourdes, peu manœuvrantes et limitées aux bombardements côtiers[2]. Le , le Conseil des travaux émet l’avis qu’en raison des progrès réalisés par l’artillerie rayée il faut « aborder résolument la question des bâtiments blindés et suspendre toutes constructions nouvelle de bâtiment de guerre dans lesquelles les murailles ne seraient pas mises à l’abri des ravages de la nouvelle artillerie »[3]. Plusieurs projets de bâtiments de haut bord, blindés, sont proposés par les ingénieurs du génie maritime tandis que Napoléon III fait procéder à des essais de blindage pour trouver un système invulnérable aux tirs des canons les plus puissants[3].

Dupuy de Lôme, directeur du Matériel depuis le , réalise la synthèse des idées « dans l’air du temps »[3]. Sur une extrapolation du Napoléon naissent les plans de la Gloire, navire susceptible de rétablir l’équilibre des forces maritimes au profit de la marine française et de mettre un terme à la suprématie de la Royal Navy. Convaincu que dans un engagement entre deux bâtiments égaux par la vitesse, la cuirasse, les qualités nautiques et le rayon d’action, le plus petit aurait l’avantage, Dupuy de Lôme veut pour la Gloire « les moindres dimensions qu’il fût possible d’adopter », à savoir une coque en bois longue de 77,89 m, large de 17 m, propulsée par une hélice mue par une machine à vapeur de 900 ch[3]. C’est, en gros, le gabarit d’une frégate de la classe Algésiras. L’innovation réside surtout dans le blindage en fer forgé de 12 cm d’épaisseur couvrant les hauts et descendant à 2 m en dessous de la ligne de flottaison. Pour compenser les 820 tonnes de la cuirasse, Dupuy de Lôme supprime une batterie et limite l’artillerie à 36 canons de 30 rayés (remaniée en 1866). Simple auxiliaire, le gréement est réduit aux dimensions de celui d’une goélette[3]. Ce gréement « trois-mâts goélette » de (1 100 m2) sera considéré comme insuffisant et remplacé par un « trois-mâts barque » (1 621 m2) puis un « trois-mâts carré » (2 508 m2)[4].

Une percée technologique modifier

Séduit, Napoléon III décide seul, sans consulter les instances de la marine, de faire construire ce bâtiment qui va révolutionner les constructions navales militaires[3]. Mise en chantier à Toulon en sur les cales de l’arsenal du Mourillon, la Gloire est armée vingt-trois mois plus tard. Aux essais, en 1860, elle donne entière satisfaction, en affichant une vitesse de 13,5 nœuds comparable à celle des paquebots[3]. Elle n’est cependant pas sans défaut, puisqu’elle embarque beaucoup d’eau par grosse mer, obligeant à fermer les sabords de son unique batterie. Il n’en reste pas moins qu’elle surclasse tous les vaisseaux existants de l’époque. Elle constitue une indéniable percée technologique et maintient la marine française en tête du progrès technique[3].

Côté britannique, on commence par juger l’initiative française coûteuse avant de prendre peur et d’opérer un retournement à 180° en faisant mettre en chantier le HMS Warrior, plus grand (de 50 m) et mieux armé[3]. Confiant dans le savoir-faire de Dupuy de Lôme, le ministre Hamelin avait ordonné dès le la construction de trois nouvelles frégates cuirassés sur les plans de la Gloire : l’Invincible à Toulon, la Normandie à Cherbourg et la Couronne à Lorient[3]. La Gloire ne sera engagée dans aucun combat naval, même pendant la guerre franco-prussienne de 1870-1871[5]. Dépassée assez rapidement par la rapidité du progrès technique et l'émergence des premiers véritables cuirassés, elle est remaniée en 1866 puis radiée du service en 1879 et mise à la casse en 1883. Son sister-ship la Couronne, qui présente l’originalité d’avoir été construite complètement en fer ne sera condamnée qu’en 1933[3].

Notes et références modifier

  1. Léon Renard (ill. Léon Morel-Fatio), L'Art naval, Paris, Librairie Hachette et Cie, (lire en ligne)
  2. Il s’agit de la Lave, de la Dévastation, de la Tonnante, de la Congrève, de la Foudroyante. Michele Battesti, Vergé-Franceschi 2002, p. 184.
  3. a b c d e f g h i j et k Michele Battesti, Vergé-Franceschi 2002, p. 673-674.
  4. Vincent Bernard, « Gloire vs Warrior : bras de fer naval dans la Manche », Guerres & Histoire, no 48,‎ , p. 80 (ISSN 2115-967X)
  5. Concernant un autre conflit, celui de la guerre civile américaine, la Gloire aurait été à proximité de Cherbourg le 19 juin 1864, lorsque la corvette unioniste USS Kearsarge coula au canon le corsaire confédéré CSS Alabama, selon Wikipedia anglophone.

Bibliographie modifier

  : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Jean Meyer et Martine Acerra, Histoire de la marine française : des origines à nos jours, Rennes, éditions Ouest-France, , 427 p. (ISBN 2-7373-1129-2)
  • Rémi Monaque, Une histoire de la marine de guerre française, Paris, éditions Perrin, , 526 p. (ISBN 978-2-262-03715-4)
  • Michel Vergé-Franceschi (dir.), Dictionnaire d'Histoire maritime, Paris, éditions Robert Laffont, coll. « Bouquins », , 1508 p. (ISBN 2-221-08751-8 et 2-221-09744-0).  
  • Alain Boulaire, La Marine française : De la Royale de Richelieu aux missions d'aujourd'hui, Quimper, éditions Palantines, , 383 p. (ISBN 978-2-35678-056-0)
  • Jacques-Olivier Boudon (dir.), La Marine sous le Premier et le Second Empire, Paris, SPM, coll. « Collection de l'Institut Napoléon », , 151 p. (ISBN 978-2-917232-75-0)
  • Jean-Michel Roche (dir.), Dictionnaire des bâtiments de la flotte de guerre française de Colbert à nos jours, t. 1, de 1671 à 1870, éditions LTP, , 530 p. (lire en ligne)
  • (en) Steam, Steel and Shellfire. The steam warship 1815-1905 Conway's History of the ship (ISBN 0-7858-1413-2)

Voir aussi modifier

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