Gap direct et gap indirect

En physique des semi-conducteurs, on appelle gap la largeur de la bande interdite, laquelle est l'intervalle d'énergies situé entre l'état de plus basse énergie de la bande de conduction et l'état de plus haute énergie de la bande de valence. On parle de gap direct lorsque ces deux extremums correspondent au même quasi-moment[a], et de gap indirect lorsque la différence entre les vecteurs d'onde de ces deux extremums est non nulle. Les matériaux à gap direct et ceux à gap indirect se comportent très différemment du point de vue optoélectronique car les porteurs de charge des matériaux à gap direct peuvent passer d'une bande à l'autre en échangeant simplement un photon, dont la quantité de mouvement est négligeable à ces niveaux d'énergie, tandis que les porteurs des matériaux à gap indirect doivent interagir à la fois avec un photon et avec un phonon afin de modifier leur vecteur d'onde, ce qui rend la transition bien moins probable. Un certain nombre de semi-conducteurs III-V sont à gap direct, comme l'arséniure de gallium GaAs et l'arséniure d'indium InAs, tandis que d'autres sont à gap indirect, comme l'antimoniure d'aluminium AlSb ; le silicium et le germanium sont également des semi-conducteurs à gap indirect.

Application en optoélectronique modifier

 
Structure de bandes de matériaux semi-conducteurs calculés par la méthode de l'approximation de la liaison forte (en).

Les interactions entre électrons, trous, photons et phonons se font toujours à quasi-moment constant afin de conserver le vecteur d'onde total. La quantité de mouvement d'un photon d'énergie correspondant à la bande interdite d'un semiconducteur est négligeable par rapport à celle des porteurs et des phonons, de sorte que l'échange d'un photon avec un porteur modifie le niveau d'énergie de ce porteur mais ne modifie quasiment pas son vecteur d'onde. C'est la raison pour laquelle les matériaux semiconducteurs à gap direct sont privilégiés pour réaliser des diodes électroluminescentes et des diodes laser : la recombinaison radiative des électrons et des trous peut se faire à travers la bande interdite par simple émission de photons sans nécessiter d'interaction supplémentaire avec des phonons du réseau cristallin, qui rendraient la transition bien moins probable ; la recombinaison radiative des porteurs est bien plus lente dans les matériaux semiconducteurs à gap indirect.

L'absorption de photons par des semi-conducteurs est le processus réciproque de la recombinaison radiative. Des photons pourvus d'une énergie proche de celle de la bande interdite pénètrent plus profondément dans un semi-conducteur à gap indirect que dans un semi-conducteur à gap direct car leur absorption dans les premiers requiert l'intervention concomitante d'un phonon pourvu de la quantité de mouvement adéquate pour permettre la transition d'un électron de la bande de valence vers la bande de conduction avec un photon de cette énergie. Ceci a son importance pour la conception des cellules photovoltaïques, souvent réalisées en silicium pour des raisons de coût, et dont l'épaisseur est nécessairement d'au moins plusieurs centaines de micromètres afin d'absorber l'essentiel du rayonnement incident, notamment dans l'infrarouge. Les cellules photovoltaïques à couches minces, en revanche, sont réalisées avec des semi-conducteurs à gap direct tels que le tellurure de cadmium CdTe[1],[2], le CIGS[3],[4] CuInxGa1-xSe2 et le CZTS[5],[6] Cu2ZnSnS4, qui permettent de concevoir des composants avec des couches actives de moins d'un micromètre d'épaisseur.

Notes et références modifier

  1. Le quasi-moment   est associé par la relation   au vecteur d'onde   des électrons dans la première zone de Brillouin du cristal, où   est la constante de Planck réduite.
  1. (en) Iris Visoly-Fisher, Sidney R. Cohen et David Cahen, « Electronically active layers and interfaces in polycrystalline devices: Cross-section mapping of CdS/CdTe solar cells », Applied Physics Letters, vol. 83, no 24,‎ , article no 4924 (DOI 10.1063/1.1632532, Bibcode 2003ApPhL..83.4924V, lire en ligne)
  2. (en) Xuanzhi Wu, « High-efficiency polycrystalline CdTe thin-film solar cells », Solar Energy, vol. 77, no 6,‎ , p. 803-814 (DOI 10.1016/j.solener.2004.06.006, Bibcode 2004SoEn...77..803W, lire en ligne)
  3. (en) M. Kaelin, D. Rudmann et A. N. Tiwari1, « Low cost processing of CIGS thin film solar cells », Solar Energy, vol. 77, no 6,‎ , p. 749-756 (DOI 10.1016/j.solener.2004.08.015, Bibcode 2004SoEn...77..749K, lire en ligne)
  4. (en) Y. Hagiwara, T. Nakada et A. Kunioka, « Improved Jsc in CIGS thin film solar cells using a transparent conducting ZnO:B window layer », Solar Energy Materials and Solar Cells, vol. 67, nos 1-4,‎ , p. 267-271 (DOI 10.1016/S0927-0248(00)00291-9, lire en ligne)
  5. (en) Hironori Katagiri, Kotoe Saitoh, Tsukasa Washio, Hiroyuki Shinohara, Tomomi Kurumadani et Shinsuke Miyajima, « Development of thin film solar cell based on Cu2ZnSnS4 thin films », Solar Energy Materials and Solar Cells, vol. 65, nos 1-4,‎ , p. 141-148 (DOI 10.1016/S0927-0248(00)00088-X, lire en ligne)
  6. (en) Hironori Katagiri, Kazuo Jimbo, Win Shwe Maw, Koichiro Oishi, Makoto Yamazaki, Hideaki Araki et Akiko Takeuchi, « Development of CZTS-based thin film solar cells », Thin Solid Films, vol. 517, no 7,‎ , p. 2455-2460 (DOI 10.1016/j.tsf.2008.11.002, Bibcode 2009TSF...517.2455K, lire en ligne)