François Thierry (policier)

commissaire de police
François Thierry
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Distinction

François Thierry est un policier français, commissaire, ancien patron de l'Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants (OCRTIS).

Carrière modifier

Sorti de l’École nationale supérieure de la Police en 1994, il commence sa carrière à Nantes avant d'être affecté à Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe, pour lutter contre le trafic de stupéfiants, et en particulier les navires transportant de la cocaïne en provenance d'Amérique du Sud.

En 2001, il est nommé à la tête des unités opérationnelles de l’OCRTIS.

En 2006, le policier prend la direction du Service interministériel d'assistance technique (Siat), l'unité ultraconfidentielle qui, entre autres, chapeaute tous les agents infiltrés[1].

En 2009, il recrute comme informateur le baron de la drogue Sofiane Hambli qui vient d'être arrêté en Espagne[2].

François Thierry devient en 2010 le patron de l'OCRTIS, l'Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants [3].

En , François Thierry sollicite le juge d’instruction lyonnais, Bertrand Grain, pour mettre en place une mesure d’infiltration des trafiquants présumés. D'après ce magistrat, « il était convenu que les convois de stups s'inscrivant dans ce cadre ne devaient concerner "que" quelques centaines de kilos de cannabis ». L’opération s’appuie principalement sur Sofiane Hambli[4].

En octobre 2015, la révélation de l'affaire d'"importation surveillée" de tonnes de cannabis a mis en évidence les rivalités entre les policiers et les douaniers engagés dans la lutte antidrogue qui se traduit par une compétition d'ambition des chefs et une guerre des indics[5].

En mars 2016, François Thierry est muté à la sous-direction anti-terroriste (SDAT)[6].

En janvier 2020, l' OCRTIS est remplacée par l'office anti-stupéfiants (OFAST).

Pratiques policières et douanières controversées modifier

Pratiques de François Thierry révélées par la DNRED modifier

La Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED) met en cause François Thierry, soupçonné d’avoir récupéré des valises de drogue à l'aéroport de Roissy hors procédure. Une bande audio réalisée le , versée à la justice et authentifiée par un huissier illustre ses méthodes. Une douanière affirme s'être retrouvée face à François Thierry le 6 février 2010, et il aurait été là « toutes les semaines » selon une autre douanière en poste à Roissy[7]

Enquête de l'OCRTIS sur les pratiques de douaniers de la DNRED à l'aéroport de Roissy modifier

En novembre 2011, l'OCRTIS, dirigé par le commissaire François Thierry, se voit confier une enquête préliminaire sur les pratiques de douaniers à l'aéroport de Roissy suite à un courrier anonyme[7]. A l'issue de cette enquête en janvier 2012, plusieurs agents de la DNRED sont mis en examen, soupçonnés d'avoir détourné de la drogue afin de rémunérer des indics[7]. Et en juin 2012, sept douaniers de l'aéroport de Roissy, sont mis en garde à vue pour vol et corruption[8].

Ces douaniers, expérimentés, tous très bien notés par leur hiérarchie ont rédigé de faux P-V en prétendant que les fouilles auraient été réalisées en présence des passagers. Cette combine leur permettait de subtiliser de l'argent[9]. Ainsi, l'un des douaniers aurait investi les fonds dans des plantations en Afrique, un autre dans un hôtel de passe en Thaïlande, 8 millions d'euros auraient été découverts sur des comptes en Andorre ou à Hong-Kong. 3 épouses de douaniers ont elles aussi été accusées de recel [9].

Pour se défendre, ces douaniers auraient déclaré que cette pratique était généralisée au sein de l'aéroport depuis les années 1980 [9].

Saisie à Roissy par les policiers de l'OCRTIS de cocaïne en provenance de Caracas modifier

En 2013, le commissaire Thierry est à l’origine de la saisie à Roissy d’1,3 tonne de cocaïne en provenance de Caracas, à la satisfaction du ministre de l'Intérieur Manuel Valls[10]. Mais selon le quotidien Libération, l’affaire aurait été montée grâce à l’intervention de Sofiane Hambli, qui aurait récupéré plusieurs centaines de kilos de cocaïne en marge de l’opération contre une rémunération de 45 000 euros[11].

Enquête de la DNRED visant le principale indicateur de l'OCRTIS modifier

En mars 2015, la DNRED (Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières) mène une enquête baptisée "Monster River" visant le principale indicateur de l'OCRTIS qui va durer 6 mois [12]. Cette enquête les conduit à saisir sept tonnes de cannabis dans des camionnettes stationnées boulevard Exelmans le et a révélé qu'un des plus gros trafiquants français, Sofiane Hambli est devenu le principal indicateur du commissaire François Thierry qui l'avait inscrit au Bureau central des sources sous le numéro 15740174 [13],[14].

Cette saisie met fin aux opérations de François Thierry de "livraisons surveillées" en révélant que des tonnes de cannabis avait été importées dans le cadre d'une opération policière baptisée «Myrmidons» qui consiste à laisser passer de la drogue sans la saisir afin d'identifier les réseaux de revente et d'ouvrir des enquêtes judiciaires sur les lieux de destination [15]

Quand éclate l’affaire, selon le décompte de l’OCRTIS, Sofiane Hambli a permis la saisie de plus de « 60 tonnes de cannabis, l’identification de plusieurs dizaines de malfaiteurs chevronnés, l’élucidation d’une douzaine de règlements de comptes et plus d’une centaine d’interpellations » [16].

Révélations de l'"infiltré" Hubert Avoine au service de l'OCRTIS modifier

Hubert Avoine est né à Cherbourg d'un père syndicaliste et d'une mère douanière. En 2008, il est enregistré au bureau central des sources du ministère de l’intérieur de l'OCRTIS[17]. Il fut approché par les services de police français parce qu'il travaillait dans des restaurants et des boîtes de nuit à Marbella où il fréquentait des anciens de la French Connection, des nouveaux caïds du shit, des indics, des financiers douteux[18]. L'OCRTIS finit par mettre fin à leur collaboration à la demande de François Thierry.

Au printemps 2017, cet ancien "infiltré" publie avec le journaliste Emmanuel Fansten le livre L’Infiltré dans lequel il déclare avoir été le témoin de méthodes troubles de la lutte anti-drogue : proximité entre voyous et policiers, disparition de marchandises ou de billets, importations de stupéfiants sous escorte policière[14]. Il accuse François Thierry de lui avoir demandé de garder, entre mars et avril 2012, 19 tonnes de cannabis dans une villa à Estepona, au sud de Marbella, sur la costa del Sol. Et il déclare avoir vu pendant 20 jours, cinq policiers français décharger des ballots de cannabis en provenance du Maroc via des bateaux pneumatiques. La drogue serait remontée vers la France par go fast pour le compte de Sofiane Hambli, dont une partie des voitures aurait été interceptée par la douane [19],[20].

Suites Judiciaires modifier

Enquête de l'Inspection générale de la police nationale modifier

En , François Thierry est placé en garde à vue par l'Inspection générale de la police nationale[21]. En signe de protestation contre sa mise en examen, 70 policiers de l'OCRTIS déposent leurs armes[22],[23]. En octobre 2017, la procureure générale de Paris lui retire son habilitation d'officier de police judiciaire[24]. Il est accusé par l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) d'avoir organisé un « système d'importation de cannabis en France » en s'appuyant sur ses indics. Le 1er mars 2017, il est mis en garde à vue dans les locaux de l'IGPN[21],[25].

Le commissaire François Thierry est convoqué à un conseil de discipline le 16 décembre 2021, et reçoit un blâme en février 2022 ce qui revient à être « quasiment blanchi par sa hiérarchie policière »[26].

Instruction judiciaire à Lyon et à Bordeaux modifier

François Thierry est l'objet d'une double instruction judiciaire à Lyon et à Bordeaux. Il est mis en examen pour « faux et complicité de faux en écriture publique par dépositaire de l'autorité publique » et « complicité de trafic de stupéfiants » et « participation à une association de malfaiteurs »[27],[26]. À la suite de l'instruction judiciaire menée à Lyon sur une fausse garde à vue, le parquet requiert, en juillet 2022, le renvoi de François Thierry devant les assises pour « faux en écriture publique » et « destruction de preuve »[28],[29],[30].

Le 12 décembre 2023, le parquet de Bordeaux requiert un non-lieu à l'égard François Thierry et précise qu'aucun élément ne met en évidence un enrichissement personnel du commissaire [16].

Condamnation pour procédure abusive contre un journaliste modifier

François Thierry poursuit en justice pour diffamation Emmanuel Fansten mais il est condamné en 2022 pour procédure abusive[31].

Livre et Film inspirés par les affaires de trafic de drogue surveillé modifier

Thierry de Peretti s'inspire de l'affaire de l'"importation surveillée" de tonnes de canabis et de l'ouvrage L’Infiltré publié par Hubert Avoine avec le journaliste Emmanuel Fansten pour tourner en 2021 le film Enquête sur un scandale d’État[32],[33].

Notes et références modifier

  1. « Scandale des stups : 5 choses à savoir sur François Thierry », sur nouvelobs.com, (consulté le )
  2. « Drogue: l'ex-chef des "stups" impliqué dans un vaste trafic? », Le Républicain Lorrain, (consulté le )
  3. « François Thierry : tuyaux, «tontons» et tonnes de shit », sur Libération.fr, (consulté le )
  4. Emmanuel Fansten, « Comment les stups ont enfumé la justice », Libération, (consulté le ).
  5. Éric Pelletier, « Lutte antidrogue : l'importateur de cannabis attaque les douanes », sur LeParisien.fr, (consulté le )
  6. « Office anti-drogue : le patron muté sous la pression judiciaire ? », Le Point, (consulté le )
  7. a b et c Emmanuel Fansten, « Stups : les étranges bagages du commissaire », Libération, (consulté le ).
  8. « Sept douaniers de Roissy en garde à vue pour vol et corruption », sur francetvinfo.fr avec AFP, (consulté le ).
  9. a b et c AFP, « Douaniers "ripoux" de Roissy : jusqu'où l'affaire remontera-t-elle ?=Le Point », .
  10. « Drogue: 1,3 tonne de cocaïne saisie dans un avion d'Air France », La Croix avec AFP, (consulté le ).
  11. Emmanuel Fansten, « Une prise record applaudie par Valls », Libération, (consulté le ).
  12. « La guerre des polices torpille la lutte antidrogue », Le journal du dimanche,
  13. « Sophiane Hambli et François Thierry : les deux hommes clés du plan Myrmidon pour gagner la guerre des stups », atlantico,
  14. a et b Vincent Monnier, « Hubert Avoine : la dernière mission inachevée de "L'infiltré" », sur nouvelobs.com, (consulté le )
  15. Emmanuel Fansten, « Les méthodes de l’ex-patron des Stups éclaboussent la justice », sur liberation.fr,
  16. a et b Simon Piel, « Le parquet de Bordeaux requiert un non-lieu pour l’ancien chef de la lutte antistupéfiants », sur LeMonde.fr,
  17. Vincent Monnier, « Hubert Avoine : la dernière mission inachevée de "L'infiltré" », Le Nouvel Obs, .
  18. Vincent Monnier, « Disparition Stups : Hubert Avoine s'est exfiltré », Libération.fr, .
  19. Emmanuel Fansten, «En tout, 19 tonnes de cannabis ont transité par la villa au cours de ce seul séjour», Libération, (consulté le ).
  20. « L'ancien patron des stups soupçonné d'être au cœur d'un trafic de drogue », sur francetvinfo.fr, (consulté le ).
  21. a et b « L'ex-patron de la lutte antidrogue placé en garde à vue à l'IGPN », sur L'Express, .
  22. Richard Schittly, « L’ex-patron des « stups » mis en examen pour trafic de drogue », sur LeMonde.fr, (consulté le )
  23. Jean-Michel Décugis, « Les policiers des stups déposent leurs armes », LeParisien.fr, (consulté le )
  24. Jean-Michel Décugis, « L'ex-patron des « Stups » François Thierry sanctionné », sur Ouest-France.fr, (consulté le )
  25. Emmanuel Fansten et Willy Le Devin, « L’ex-patron des Stups cuisiné par les bœuf-carottes », Libération.fr, (consulté le ).
  26. a et b Emmanuel Leclère, « L'ancien patron des stups quasiment blanchi par sa hiérarchie policière », sur FranceInter.fr, (consulté le ).
  27. « Stups: François Thierry mis en examen pour «participation à une association de malfaiteurs» », sur Libération.fr (consulté le )
  28. « Fausse garde à vue : le parquet requiert le renvoi de l'ex-chef de l'office anti-stups devant les assises », sur LeFigaro.fr avec AFP, (consulté le )
  29. Richard Schittly, « A Lyon, le parquet requiert le renvoi aux assises du commissaire François Thierry », sur LeMonde.fr, (consulté le )
  30. Richard Schittly, « Pourquoi le commissaire Thierry, ex-patron des « stups », est renvoyé seul aux assises pour une fausse garde à vue », sur LeMonde.fr, (consulté le )
  31. « L’ex-patron des «stups» François Thierry condamné pour procédure abusive contre un journaliste de «Libé» », sur Libération.fr avec AFP, (consulté le )
  32. « « Enquête sur un scandale d’Etat » : un thriller paranoïaque sur fond de trafic de drogue », sur LeMonde.fr, (consulté le )
  33. Didier Péron, « «Enquête sur un scandale d’Etat», le festival de came », sur Libération (consulté le )

Voir aussi modifier

Articles connexes modifier

Émissions de radio modifier