Fatima al-Fihriya

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Fatima al-Fihriya
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Statue de Fatima Fihria au Jordan museum d'Amman.

فاطمة الفهرية

Nom de naissance Fatima bint Mohamed ibn Abd-Allah
Alias
Al-Fihri(ya) (« la Fihride »)
Al-Qurayshi(ya) (« la Quoreïchite »)
Naissance v. 800
Kairouan (Ifriqiya)
Décès v. 880
Fès (Maroc)
Pays de résidence Sultanat Idrisside
Activité principale
Mécène
Distinctions
Prix Fatima al-Fihiriya
Ascendants
Mohamed ibn Abd-Allah al-Fihri al-Qurayshi (père)
Famille
Maryam bint Mohamed al-Fihriya al-Qurayshiya (sœur)

Compléments

Personnalité tunisienne, probablement fictive, prétendue fondatrice de la mosquée-université Al Quaraouiyine de Fès.

Fatima al-Fihriya[n 1], surnommé Omm-al-bannine (« mère des deux fils ») ou Omm-al-Cassim (« mère de Cassim »), est née vers 800 à Kairouan en Ifriqiya et morte en 880 à Fès, elle aurait fondé l'université Al Quaraouiyine à Fès, au Maroc, qui est considérée comme la plus ancienne université du monde encore en activité.

Biographie traditionnelle modifier

Les nibas al-Fihriya et al-Qurayshiya indiquent que la famille de Fatima est issue du clan des Fihrides de la tribu de Coreïch. Ce faisant, Fatima est du même clan qu'Oqba Ibn Nafi al-Fihri, général ayant participé à la conquête musulmane du Maghreb (647-709), et de la même tribu que Mahomet, fondateur de l'islam[CTB 1].

Fatima naît vers 800 à Kairouan, dans l'émirat d'Ifriqiya, à l'époque de la dynastie des Aghlabides. Son père, Mohamed ibn Abd-Allah al-Fihri al-Qurayshi, est un riche négociant Kairouanais, et elle a une sœur, Maryam. Vers 825, sa famille migre à Fès pour des raisons financières, puis elle se marie et a deux garçons. Fatima hérite d'une fortune immense aux décès de son père et de son mari. En 859, les deux sœurs, très éduquées et pieuses, reçoivent l'autorisation de construire des mosquées : Maryam celle des Andalous (Andalousiyine) et Fatima celle des Kairouanais (Karaouiyine). Fatima supervise la construction de la Karaouiyine et meurt vers 880 à Fès[1],[2].

Historicité modifier

L'existence de Fatima al-Fihriya est remise en question de nos jours, en raison d'un manque de sources à son sujet, et que les sources rapportant son histoire sont peu fiables.

Arguments contre modifier

L'historien Ibn Abi Zar (mort en 1326) est le premier à les mentionner cinq siècles après les faits supposés[CTB 1]. Cependant, l'auteur du Rawd al-Qirtas est vu par la recherche contemporaine comme peu fiable, commettant plusieurs anachronismes et embellissant le passé[CTB 2], aussi Chafik T. Benchekroun considère que la fondation des plus importantes mosquées de Fès par deux sœurs est trop beau, et Ibn Abi Zar se serait basé sur une riche et pieuse veuve Émigrante, appelée Fatima al-Fihriya, qui aurait eut une proximité avec Mahomet et été grande prêcheuse de l’islam[CTB 1].

Outre le manque de sérieux d'Ibn Abi Zar, Benchekroun pointe plusieurs autres détails qui jouent en faveur d'une supercherie[CTB 3] :

  • son konya est Omm-al-Cassim quand Mahomet portait celui d'Abou-al-Cassim ;
  • Fatima porte le nom du fondateur de Kairouan (Oqba al-Fihri) ;
  • son prénom et filiation ressemblent à celle de Fatima Zahra, fille de Mahomet [Mohamed], fils d'Abd-Allah ;
  • que la méticuleuse description de la mosquée lors de sa fondation contient plusieurs erreurs chronologiques ;
  • les plus anciens érudits marocains généreux en détails de l'histoire de Fès n'en parlent pas.

En sus, lors de rénovations dans les années 1950, au-dessus du mihrab original de la Karaouiyine, l’archéologue Henri Terrasse découvre un chevron de bois, avec une inscription coufique proclamant la fondation du lieu en 877 par Daoud, fils de l’émir du Maroc Idris II et gouverneur de Fès[CTB 4],[3].

Arguments pour modifier

Pour une partie de la recherche, Fatima al-Fihriya est un personnage historique. Mohammed Mezzine, citant Abdelhadi Tazi, affirme que l’absence de la mention de Fatima al-Fihriya sur le chevron en bois s’explique car on n’évoquait pas les personnes ayant financé la mosquée, mais le prince, l’émir[4].

Postérité modifier

Fatima al-Fihriya est considérée avec sa sœur Maryam comme de saintes femmes pour avoir construit deux grandes mosquées. On ajoute à la sainteté de Fatima son jeûne durant toute la durée de la construction de la Karaouiyine[5].

Un prix Fatima al-Fihiriya a été créé en 2017 à l'université de Kairouan. Il récompense les initiatives pour l'accès des femmes à la formation et aux responsabilités professionnelles[6],[7].

Un programme universitaire et une bourse ont été mis en place en l'honneur d'al-Fihri « Erasmus Mundus Fatima al-Fihri » destinée aux étudiants universitaires d'Europe et d'Afrique du Nord[8],[9].

Au moment de l'élection controversée de Sadia Saifuddin, en 2014, première étudiante musulmane nommée comme déléguée des étudiants de l'université de Berkeley[10],[11], l'imam et militant associatif Omar Mahassin rappelait que de nombreuses femmes avait joué un rôle dans la transmission des textes saints et de la doctrine musulmane dans les premiers temps de l'islam et a cité son nom parmi d'autres érudites telles que Nafisa al sayyiida, Chahda al-Abari, Fatima bint Hussein et Oum Adardaa[12].

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. Son nom complet est Fatima bint Mohamed ibn Abd-Allah al-Fihri al-Qurashi (en arabe : فاطمة بنت محمد بن عبد اللهالفِهْرية القُرَشية?).

Références modifier

Étude de Chafik T. Benchekroun modifier

  1. a b et c Benchekroun, p. 184.
  2. Benchekroun, p. 171-173.
  3. Benchekroun, p. 184-185.
  4. Benchekroun, p. 186.

Autres sources modifier

  1. (en) Dictionary of African Biography, vol. VI, Oxford, Oxford University Press, , « Fatima al-Fihri », p. 357-359.
  2. (en) Encyclopaedia of Islam : Second Edition, vol. IV, Leyde, E. J. Brill, , « al-Ḳarawiyyīn », p. 632-635.
  3. Figures historiques: Fatima El Fihriya [Production de télévision], Layla Triqui (réalisatrice), dans Des Histoires et des Hommes sur 2m.ma (, 50 minutes) Consulté le . La scène se produit à 19:00-19:30. “[C. T. Benchekroun :] En évoquant la gravure sur bois, dissimulée dans le frontispice du « mihrab » idrisside que mit à jour dans les années 50 le grand historien français Henri Terrasse, nous nous retrouvons, de ce fait, devant une autre version sur l'édification d'Al Quaraouiyine, où l'histoire de Fatima Al Fihriya nous paraît ainsi sans fondement.”
  4. Figures historiques: Fatima El Fihriya [Production de télévision], Layla Triqui (réalisatrice), dans Des Histoires et des Hommes sur 2m.ma (, 50 minutes) Consulté le . La scène se produit à 22:38-23:30. “[Mohamed Mezzine :] Le professeur Abdelhadi Tazi, dans sa thèse doctorale « Mosquée Al Quaraouiyine » en trois volumes, […] a déduit qu'il n'y avait pas d'amalgame ni de confusion d'aucune sorte, car Fatima Al Fihriya avait effectivement financé la construction de la mosquée. Et comme il était de coutume, chaque édifice portait le nom de l'émir de l'époque.”
  5. Ruggero Vimercati Sanseverino, Fès et sainteté, de la fondation à l’avènement du Protectorat (808-1912) : Hagiographie, tradition spirituelle et héritage prophétique dans la ville de Mawlāy Idrīs, Centre Jacques-Berque, , 695 p. (ISBN 9791092046168), p. 144.
  6. Al Idrissi, « Euro-Méditerranée: Remise du Prix « Fatima Fihiriya » à l’Université de Kairouan au mois d’avril prochain », sur Euro-Méditerranée, (consulté le )
  7. « Fatima Al-Fihiriya, Fondatrice de la première université du monde », Femmes ici et ailleurs,‎ (lire en ligne)
  8. (en) « European Union - Erasmus Mundus Action 2: Fatima Al Fihri », sur European Funding Guide (consulté le ).
  9. Collectif Georgette Sand, Ni vues ni connues. Panthéon, Histoire, mémoire : où sont les femmes?, Paris, Hugo doc, , 253 p. (ISBN 9782755635393), p. 159
  10. Havre De Savoir, « La nomination d’une musulmane à l’Université de Californie fait polémique - Havre De Savoir », (consulté le )
  11. le figaro, « La nomination d’une musulmane à l’Université de Californie fait polémique », sur Le Figaro Etudiant (consulté le )
  12. Omar Mahassine, « Ces femmes érudites qui ont marqué l'islam de leur empreinte », sur Les cahiers de l'Islam (consulté le )

Bibliographie modifier

  • Chafik T. Benchekroun, « Les Idrissides : L'histoire contre son histoire », Al-Masaq, vol. 23, no 3,‎ , p. 171-188 (lire en ligne).

Liens internes modifier

Liens externes modifier