Eugène Druet

photographe français (1867–1916)
Eugène Druet
Description de cette image, également commentée ci-après
Nom de naissance Alphonse Eugène Druet
Naissance
Paris (10e arrondissement)
Décès (à 48 ans)
Paris (16e arrondissement)
Nationalité France France
Profession

Eugène Druet né le à Paris et mort dans la même ville le est un photographe et galeriste français.

Biographie modifier

 
Catalogue des dessins originaux d'André Rouveyre, exposition à la galerie E. Druet, 1907.

Alphonse Eugène Druet est né au 206, rue du Faubourg-Saint-Martin à Paris. Ses parents, Eugène Alphonse Druet et Alphonine Augustine Herbinière, étaient alors fruitiers[2].

Il a, dans un premier temps, été tenancier du Yacht Club français, un petit café familial qu'il rachète en 1893, au 3, place de l'Alma (avenue du Président-Wilson de nos jours)[3]. Auguste Rodin, dont l'atelier du Dépôt des marbres au 182, rue de l'Université était non loin du Yacht Club français[4], fréquentait régulièrement le café d'Eugène Druet, et lui fit découvrir la photographie d'art.

Après leur rencontre en 1896[5], Druet réalise de nombreux clichés des sculptures de Rodin et lui fait bientôt office de photographe officiel. Selon Hélène Pinet[6], la raison pour laquelle Rodin choisit Druet comme photographe reste obscure, mais pourrait tout simplement être expliquée par le fait que le sculpteur ait été impressionné par les photos amateurs que Druet lui aurait présentées. Ils travaillent ainsi jusqu'en 1900, date à laquelle ils s'éloignent peu à peu, notamment parce que Druet n'était presque pas rémunéré pour ce travail volontaire auprès de Rodin. 1900 est aussi la date de la grande rétrospective que Rodin organise au pavillon de l'Alma, en marge de l'Exposition universelle[7] : Druet s'était chargé de pratiquement de toute l'organisation, et avait par la même occasion eu un pan de mur consacré à 71 de ses photographies[5],[8].

Sur les conseils de Rodin, Druet abandonne son café pour ouvrir une galerie d'art en 1903, au 114, rue du Faubourg-Saint-Honoré, qu'il transfère au 20, rue Royale en 1908[9]. Cette galerie parisienne devient assez connue. Dans L'Autobiographie d'Alice B. Toklas de Gertrude Stein, la galerie est évoquée au chapitre 3 : « à l'autre bout de Paris, rue du Faubourg-Saint-Honoré, était installé l'ancien restaurateur et photographe Druet. »[10]. Il compte parmi ses riches clients le fameux collectionneur moscovite Ivan Morozov[11].

Il pratique la photographie d'art et réalise tout particulièrement des clichés de tableaux. Il vend alors dans sa galerie les tableaux, ainsi que les clichés qu'il en réalise[12]. Cette idée de vendre les reproductions des tableaux qu'il expose lui permettra de réaliser des bénéfices supplémentaires[5]. Guillaume Apollinaire écrit des photos de la galerie Druet qu'elles « reproduisent de façon tout à fait satisfaisante des tableaux célèbres de Léonard de Vinci à Maurice Denis en passant par Titien, Ingres, Toulouse-Lautrec et Cézanne »[13].

Il accède à une reconnaissance dans le milieu de l'art. Par exemple, le , il assiste à la grande vente aux enchères des œuvres de la collection La peau de l'ours, dans les salles 7 et 8 de l'hôtel Drouot, où il tient le rôle d'expert avec Josse et Gaston Bernheim-Jeune[14].

Sa galerie exposa près de 1 300 artistes entre 1903 et 1938[15], comme Georges Manzana-Pissarro, Charles Camoin, Henri Manguin[16], Théo van Rysselberghe[17], Odilon Redon[18], Albert Marquet[19], Léon Lehmann, Maurice Denis, Jacqueline Marval, Paul Cézanne[20], Fernand Labat ou Jules Cavaillès[21].

Il meurt d'une congestion cérébrale à Paris en 1916. Après sa mort, sa femme reprend la galerie jusqu'en 1938, date de sa fermeture[5]. Par la suite, l'ensemble de ses archives (soit 30 000 plaques) sont rachetées par François Antoine Vizzavona, lui-même photographe d'art et éditeur[5].

Son œuvre modifier

 
Apollon Sauroctone, reproduit dans le magazine Touche à tout, cliché selon procédé Druet.

Eugène Druet a utilisé les plaques autochromes Lumière pour réaliser nombre de ses clichés. Il utilise les formats 9 × 12 cm en grande majorité, mais aussi 13 × 18 cm et 18 × 24 cm[5]. Ses photographies sont un témoignage précieux, puisqu'il réalise de nombreux clichés en couleurs d'œuvres d'art ou d'artistes. Son talent donnera même son nom à un procédé photographique (le procédé Druet)[22].

Au début, sa production comprend essentiellement des photographies d'œuvres d'Auguste Rodin réalisées de son vivant. Le critique Claude Anet dira de ses tirages qu'ils « reproduisent non seulement toutes les délicatesses du modelé, la beauté des plans et des lignes, mais encore […] le pouvoir d´évocation des œuvres elles-mêmes[5] ».

Par la suite, il réalise une série de photographies des tableaux de Vincent van Gogh à l'époque où ses œuvres commençaient à gagner en notoriété (L'Arlésienne, Jardin à Auvers, Portrait du docteur Gachet). Cette série contribua à l'époque à diffuser l'œuvre de van Gogh[5].

Sa série de photographies du danseur Vaslav Nijinski ont été réalisées le dans le jardin du peintre Jacques-Émile Blanche[23].

Dans un numéro du Bulletin de la SFP de 1908, son œuvre est ainsi commentée : « À l'encontre d'un très grand nombre de photographes, se contentant d'à peu près sans se soucier de l'exactitude des valeurs, M. Druet s'est toujours préoccupé d'orthochromatisme, parvenant ainsi à une fidélité de rendu indispensable en matière de reproduction d'œuvre d'art[24] ».

Une grande partie de ses clichés est conservée à la médiathèque de l'architecture et du patrimoine au fort de Saint-Cyr, sous le nom de Fonds Druet-Vizzavona. Ce fonds, comportant environ 150 000 plaques photographiques, est composé de la collection d'Eugène Druet (environ 30 000 plaques) et de celle de la famille Vizzanova, qui furent réunies en 1939[5].

Expositions modifier

  • 1900, Paris, pavillon de l'Alma, avec les œuvres d'Auguste Rodin, un pan de mur ayant été réservé aux clichés de Druet[25].
  • Du 16 janvier 1994 au 6 mars 1994, Licht und Schatten. Rodin-Photographien von Eugène Druet, exposition au musée Georg Kolbe, Berlin.
  • Du 14 novembre 2007 au 2 mars 2008, Rodin sous l'œil des photographes, exposition au musée Rodin, Paris.

Expositions à la galerie Druet modifier

 
Invitation à l'exposition des dessins originaux d'André Rouveyre, à la galerie E. Druet, 1907.

Notes et références modifier

  1. « Portrait d’Eugène Druet » notice sur musee-mauricedenis.fr.
  2. Archives en ligne de la ville de Paris, Actes de Naissance, 1860-1870.
  3. Serge Gérard, Rodin, l´homme d´airain, Éditions Cheminements, 2004.
  4. Chronologie de la vie de Rodin sur www.musee-rodin.fr.
  5. a b c d e f g h et i « Revue Les Nouvelles de l´INHA, n°17 », sur ihna.fr, (consulté le )
  6. « Revue Les Nouvelles de l´INHA, n°17 », sur ihna.fr, Conservatrice chargée des collections de photographies du Musée Rodin, (consulté le ).
  7. L´exposition Rodin au pavillon de l´Alma (1900), sur www.histoire-image.org.
  8. Courte présentation d´Eugène Druet sur le site du Met, www.metmuseum.org.
  9. Courte biographie d´Eugène Druet sur un site consacré à la commune Sainte-Marguerite-de-Carrouges.
  10. Gertrude Stein, 'L'Autobiographie d'Alice B. Toklas, chapitre 3, p. 36, Édition L'Imaginaire, Gallimard, 2006.
  11. (en) La peinture française au musée Pouchkine, no 174.
  12. Courte biographie d´Eugène Druet sur www.autochromes.culture.fr.
  13. Chroniques d'art du 10 janvier 1911.
  14. a et b « Article : Quand on vendait la Peau de l´ours », sur www.centaures.com (consulté le ).
  15. Pierre Sanchez, Les expositions de la galerie Eugène Druet : répertoire des artistes exposants et liste de leurs œuvres, 1903-1938, préface de Dominique Vieville, Éditions L'Échelle de Jacob, 2009.
  16. [PDF] Catalogue de l´exposition Henri Manguin à la galerie Fleury, du 15 septembre au 15 novembre 2010.
  17. a b c d et e « Chronologie des expositions de Théo van Rysselberghe », sur www.artnet.de (consulté le )
  18. a et b Liste des expositions d´Odilon Redon sur la base de données Joconde.
  19. Le tableau Vue du Pont-Neuf (petit bras) porte sur le haut du châssis une étiquette d´origine « GALERIE DRUET 114 faub. St-Honoré, PARIS ; no 36 32 ; Marquet Rue de Paris neige. »
  20. Article sur Cézanne sur www.artsetsocietes.org : E. Druet prêta le tableau La vieille femme au chapelet pour l´exposition de l´Armory Show à New-York en 1913.
  21. Diana Wiegersma, Jules Cavaillès, Jules Cavaillès Research Center, mai 2007.
  22. le procédé Druet évoqué sur le site de Réunion des Musées nationaux.
  23. Description de la série de photos de Nijinski sur www.christies.com.
  24. Bulletin de la SFP, 1908.
  25. Article Rodin en images sur www.rfi.fr.
  26. Bruno Belleil, « Albert Clouard… », Ar Men, n°31, 1990, p. 74.
  27. Notice bibliographique enregistrée sur la base de données de la BnF.
  28. Liste des expositions de Berthe Morisot.
  29. Liste des expositions des œuvres de Jacqueline Marval.
  30. Le Figaro, 4 juillet 1921, p. 2 — sur Retronews.
  31. « Pierre Bonnard » sur larousse.fr.
  32. Chronologie des expositions de Jean Helleu sur www.artnet.de. Consulté le 11/01/2011.

Bibliographie modifier

  • Hélène Pinet, Les photographes de Rodin : Jacques-Ernest Bulloz, Eugène Druet, Stephen Haweis et Henry Coles, Jean-François Limet, Eduard Steichen, Paris, Musée Rodin, 1986, (ISBN 978-2-901428-11-4).
  • Rodin et la photographie, [catalogue d'exposition][source insuffisante].
  • Guide des collections du musée Rodin, Paris, Musée Rodin, 2008.
  • Pierre Sanchez, Les expositions de la galerie Eugène Druet. Répertoire des artistes exposants et liste de leurs œuvres, 1903-1938, préface de Dominique Vieville, Éditions L'Échelle de Jacob, 2009.

Liens externes modifier