Empire latin de Constantinople

ancien État

L'empire latin de Constantinople ou empire latin d'Orient est un État fondé en sur le territoire de l'Empire byzantin à la suite de la quatrième croisade et la chute de Constantinople aux mains des croisés latins. Opposé à l'empire de Nicée et à l'empire de Trébizonde, l'empire latin de Constantinople se maintient jusqu'à la reconquête de la ville par l'empereur Michel Paléologue, restaurateur de l'Empire byzantin, en 1261.

Empire latin de Constantinople
(la) Imperium Romaniæ

1204–1261

Drapeau Blason
Informations générales
Statut

État latin d'Orient

Monarchie absolue
Monarchie féodale
Capitale Constantinople
Langue(s) Ancien français, grec
Religion Catholicisme Romain
Christianisme orthodoxe
Histoire et événements
1204 Quatrième croisade et création
Conquête de Constantinople par les troupes nicéennes

Entités précédentes :

Entités suivantes :

Détournement de la croisade

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En 1198, le pape Innocent III appelle à la croisade. Les croisés concluent un traité avec les Vénitiens, prévoyant le transport et le ravitaillement de l'armée contre 85 000 marcs d’argent et la moitié du butin.

Au , l'expédition ne compte que le tiers des participants prévus et verse seulement 50 000 marcs aux Vénitiens. Un moratoire est accordé à condition que les croisés aident Venise à reprendre le port dalmate de Zara au roi de Hongrie. La prise de cette ville chrétienne () suscite des protestations dans l’armée. Le pape excommunie Vénitiens et croisés, mais lève aussitôt la peine pour ces derniers. Pendant l’hivernage, le jeune prince byzantin Alexis Ange arrive à Zara et demande aux croisés de rétablir sur le trône impérial son père Isaac II, renversé par Alexis III Ange en 1195. En échange de cette aide, il promet des versements élevés, la contribution des Byzantins à la croisade et l’union des Églises. Malgré l’opposition d’une partie de l’armée et du légat pontifical, l'assemblée des croisés se rallie aux propositions du prétendant.

Le , la croisade met le siège devant Constantinople. Le , un premier assaut de la capitale provoque la fuite d’Alexis III. Rétabli, Isaac II doit associer son fils Alexis au pouvoir. Incapables de tenir les promesses faites aux croisés de plus en plus impatients, et tandis que la population grecque leur est de plus en plus hostile, ils sont renversés par une émeute populaire qui, en janvier 1204, porte au pouvoir Alexis V Doukas, hostile aux Latins.

En , un traité conclu entre le doge de Venise Enrico Dandolo et les croisés, le Partitio terrarum imperii Romaniae, décide par avance le partage de l’Empire byzantin. Constantinople est prise et livrée au pillage les et . La population grecque est massacrée, les églises et les monastères profanés. La ville, pillée et en partie brûlée, est désertée par sa population qui la délaisse jusqu’en 1261. Le pape Innocent III accepte d’abord le fait accompli, justifié par les promesses d’union des Églises et l’aide de l’empire latin à Jérusalem, avant de parler de détournement de la croisade et d'en accuser les Vénitiens.

L'empire latin de Constantinople

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Balkans et Proche-Orient après 1204 : empire latin de Constantinople et vassaux en mauve, avec ses vassaux, et sultanat de Roum.

Le choix du nouvel empereur est confié à une commission de douze membres, six Vénitiens et six Francs. Deux chefs francs convoitent le titre impérial : Boniface de Montferrat et Baudouin IX de Flandre. Sur les six hommes d'Église choisis pour représenter les Francs, un seul est partisan de Boniface de Montferrat, tandis que la plupart des barons soutiennent la candidature de Baudouin de Flandre.

Préféré à Boniface de Montferrat, Baudouin de Flandre est élu empereur sous le nom de Baudouin Ier le par les douze électeurs[1].

Si l'empire latin de Constantinople est souvent considéré comme la continuation de l'Empire byzantin, les historiens modernes mettent aujourd'hui l'accent sur le fait que ces deux entités sont totalement différentes : en effet, si Baudouin conserve un gouvernement impérial ainsi qu'un cérémonial directement inspiré de Byzance, il met en place un État féodal en Orient, rompant ainsi avec les traditions grecques.

Morcellement de l'Empire byzantin

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La partitio reprend les termes du traité de 1202 sur le partage pour moitié entre les croisés et les Vénitiens des conquêtes effectuées. Les croisés doivent concéder à Venise « un quart et demi » des terres byzantines, les trois cinquièmes de la ville, le patriarcat et de nouveaux privilèges commerciaux, les ports de Coron et Modon, la Crète, l'île de Négrepont, entre autres, permettant à Venise de se constituer un empire commercial destiné à assurer ses intérêts commerciaux.

L’empire latin de Constantinople obtient le quart des terres et s'étend à Constantinople, la Thrace et le nord-ouest de l’Asie mineure ; les Vénitiens reçoivent les territoires qui s'étendent au sud d'Andrinople, jusqu'à la mer de Marmara. D'autres États "latins" sont constitués :

Au sein de chaque État vassal de l'empire, les terres sont partagées entre les seigneurs ayant participé à la croisade, conformément aux usages féodaux.

Certains hauts barons n'obtiennent cependant que des fiefs situés en Asie, que Baudouin leur cède sur sa part, constituées de territoires alors à conquérir : Henri de Flandre obtient ainsi le « royaume d'Andremite », Pierre de Bracheux le « royaume de Konya », Louis de Blois se voit attribuer le « duché de Nicée » tandis que Rénier de Trit reçoit le « duché de Philippopoli ».

Règne de Baudouin de Flandre

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Sous l'influence de Baudouin et des Francs, la civilisation latine est introduite dans tous les territoires formant l'empire latin de Constantinople, par l'application des coutumes féodales et des cours d'Occident.

L'histoire de l'empire latin de Constantinople est rythmée par des expéditions, des sièges et des actions de défense des places fortes en pays insoumis : devant combattre sur tous les fronts, les Francs doivent en outre faire face à l'hostilité des Grecs. Ainsi en , à la mort d'Hugues de Saint-Pol, les Grecs de sa seigneurie de Didymotique s'allient à Kaloyan, roi des Bulgares. S'ensuit une sanglante défaite, le à Andrinople, au cours de laquelle Baudouin de Flandre disparaît, sans que son corps soit retrouvé[2].

Quelques semaines plus tard, le doge vénitien Enrico Dandolo meurt à Constantinople, laissant les Vénitiens sans directives quant au choix d'un nouvel empereur. C'est finalement Henri de Hainaut, le frère de Baudouin, qui devient empereur.

Règne d'Henri de Flandre

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De 1206 à 1216, l'empire latin de Constantinople s'affermit sous le gouvernement d'Henri : il conquiert l'Épire et la Macédoine mais échoue également devant les Bulgares, à Andrinople.

Kalojan organise en 1205-1206 le siège puis le massacre de Philippopoli, au cours duquel l'archevêque est massacré, les notables écorchés vifs ou décapités, la ville rasée et réduite en cendres ; il s'empare ensuite d'Arcadiopolis, puis de Visoï, où il massacre toute la population.

Les exactions des Bulgares entraînent en Europe un ralliement aux Latins. Henri de Flandre peut conquérir Le Dimot et, le , il est couronné empereur à Constantinople. Il repart ensuite en expédition contre les Bulgares.

Au , les Bulgares assiègent Andrinople : également harcelé par les Grecs en Asie, Henri de Flandre parvient tout de même à libérer la ville. Le , Kalojan meurt devant Andrinople, probablement assassiné par l'un de ses hommes.

En , Henri conclut une trêve avec les Bulgares et marie une de ses filles à Slav, un prince bulgare neveu de Kalojan. Il met à profit ces temps de paix pour se concilier ses anciens ennemis, tâchant de s'allier les Grecs, qu'il rappelle à Constantinople et admet à sa cour.

Il parvient également à intéresser l'Occident à l'empire latin de Constantinople.

De 1209 à 1212, il mène la guerre contre les barons de Salonique : ceux-ci, au décès de Boniface de Montferrat, avaient refusé de lui prêter hommage et avaient proclamé pour suzerain Guillaume de Montferrat ; le , le royaume de Salonique est déclaré partie intégrante de l'empire latin de Constantinople.

Il mène également la guerre contre les Grecs de Nicée et d'Épire et les Serbes.

Les Courtenay

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En 1216, à la mort sans postérité d'Henri de Flandre, une délégation de barons offre le trône à Pierre II de Courtenay, comte de Tonnerre, d'Auxerre et de Namur et époux de Yolande de Flandre, sœur de Baudouin et de Henri. Couronné à Rome le , il jure de maintenir les privilèges des Vénitiens. Il tombe cependant dans une embuscade tendue par des Grecs dans les montagnes d'Albanie et n'atteindra jamais Constantinople : il meurt en prison au cours de l'-1219.

Sa veuve, Yolande de Courtenay, donne naissance à Baudouin II de Courtenay, né en 1217 à Constantinople dans la chambre des porphyrogénètes. L'empire latin de Constantinople est alors confié à Conon de Béthune, qui meurt le  ; il est remplacé par un gouvernement collégial composé de Geoffroy de Merry, Narjot de Toucy et Théodore Branas.

En 1220, Robert de Courtenay, fils de Yolande et de Pierre de Courtenay, est couronné empereur. Son règne est marqué par le renforcement des relations avec les Grecs de Nicée mais, en 1224, la victoire (en) de Jean III Doukas Vatatzès sur les frères Lascaris renforce la menace que les Grecs font peser sur l'empire latin de Constantinople, privé de ses territoires d'Asie et mal gouverné. Au cours de l', les barons déposent Robert de Courtenay, qui meurt en Morée en .

Baudouin II de Courtenay, alors âgé de 10 ans, est proclamé empereur. En 1229, la couronne est également proposée à Jean de Brienne, ancien roi de Jérusalem. Il devient co-empereur associé à Baudouin II. Réduit à la seule ville de Constantinople, l'empire latin de Constantinople est au bord de la faillite.

La fin de l'empire latin de Constantinople

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L'empire latin de Constantinople en 1230.

Chassés de Constantinople, les Grecs ont constitué trois États indépendants les uns des autres, soustraits à l'empire latin de Constantinople et tenus par des dynastes grecs : l'empire de Nicée, le despotat d'Épire et l'empire de Trébizonde.

Alexis III est emprisonné par son gendre Théodore Ier Lascaris, qui se fait reconnaître empereur à Nicée. Il échoue dans ses efforts militaires et diplomatiques pour reprendre Constantinople, mais maintient vivante dans sa capitale la tradition impériale byzantine.

En 1235, Jean III Doukas Vatatzès, empereur de Nicée, allié aux Bulgares d'Ivan Assen II, assiège sans succès Constantinople, défendue par Jean de Brienne avec l’appui d’une escadre vénitienne.

En dépit de cet échec, il parvient à reconquérir la Thrace et la Macédoine.

Un second siège de Constantinople échoue partiellement en 1260, après la victoire de Michel Paléologue sur Guillaume de Villehardouin à la bataille de Pélagonia, au cours de l'automne 1259.

Le , le général Alexis Strategopoulos entre par surprise dans Constantinople : ayant fui le palais des Blachernes pour se réfugier au palais de Boucoléon, l'empereur latin Baudouin II de Courtenay se retire à Thèbes puis dans les Pouilles, avant de parvenir en France en 1262.

Notes et références

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  1. Longnon 1949, p. 50.
  2. Selon une légende, Baudouin est fait prisonnier et amené dans la capitale bulgare Véliko Tarnovo. Il y sera enfermé durant quelques années dans une tour isolée, qui porte encore aujourd'hui le nom de « Tour de Baudouin ». Baudouin se serait ensuite évadé avec l'aide d'une noble bulgare, amoureuse de lui.

Voir aussi

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Bibliographie

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Articles connexes

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Liens externes

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