Efficacité énergétique et impact climatique des voitures électriques

L'efficacité énergétique des voitures électriques est le rapport entre le déplacement effectué par une voiture électrique et l'énergie dépensée pour le réaliser. Cette efficacité énergétique de transport se mesure généralement par l'énergie consommée, exprimée en kilowatt-heure pour 100 kilomètres parcourus, c'est-à-dire en kWh/100 km. Ce rendement énergétique est difficile à établir, car il dépend de nombreuses hypothèses relatives au chauffage, à la climatisation, à la récupération de l'énergie du freinage et à la masse du véhicule.

Les discussions actuelles semblent porter davantage sur les émissions de CO2 que sur la consommation énergétique. Aux hypothèses évoquées s'ajoutent alors celles liées aux stations de recharge et à la production d'électricité, donc au mix électrique du pays considéré et à son contenu moyen en CO2. En raison de la multiplicité des situations, le consensus n'est pas complet en 2020, même si pour la majorité des études, l'avantage va au véhicule électrique. Il ressort des données disponibles que, dans le cas des voitures thermiques, les rejets de CO2 sont approximativement une fonction linéaire de la consommation. Dans le cas des voitures électriques, les émissions de CO2 baisseront à l'avenir plus que proportionnellement en fonction de la consommation, car l'électricité est supposée être progressivement plus décarbonée.

Rendement modifier

 
Flux d'énergie dans les voitures électriques en ville et sur autoroute (récupération en vert)[Note 1],[1].

D'après le département de l'Énergie des États-Unis, les véhicules électriques présentent un rendement supérieur à 77 %, en particulier grâce à la récupération en ville (le gain est beaucoup plus important dans une agglomération avec un trafic erratique et avec une conduite souple que sur une autoroute fluide). Le freinage régénératif permet d'augmenter de 17 points le rendement du véhicule électrique[1]. La Fédération européenne pour le transport et l'environnement, qui regroupe des associations écologistes, annonce un rendement de 73 % à partir de l'électricité, pour les véhicules électriques[2].

Le chauffage, pratiquement « gratuit » dans le cas des véhicules thermiques, mais qui doit être assuré par les batteries dans le cas des véhicules électriques, n'est toutefois pas pris en compte dans ces études. Selon l'automobile-club allemand, la distance que peuvent parcourir les voitures électriques en hiver est réduite de 10 à 30 %[3]. Des innovations pourraient permettre de réduire le coût du chauffage[4]. La climatisation, quant à elle, concerne les deux types de motorisation, électrique et thermique.

Induction modifier

Le rendement de la seule induction serait de 87 %[5].

Hydrogène modifier

Énergie grise modifier

L'énergie grise associée à la fabrication d'un véhicule électrique est probablement plus élevée que celle associée à la fabrication d'un véhicule thermique, car la fabrication des batteries nécessite beaucoup d'énergie.

Impact climatique modifier

En Allemagne, selon, l'ADAC — qui s'appuie sur une étude du Joanneum Research (en) —, les voitures électriques présenteraient un bilan en matière de CO2 à peine meilleur que celui des voitures thermiques. Ce bilan deviendrait meilleur avec le développement des énergies renouvelables[6],[7]. Toutefois selon l'agence fédérale allemande de l'environnement (en), les chiffres de l'ADAC sont faux, car ils sous-estiment la part des énergies renouvelables[8].

Un paramètre important reste l'énergie dépensée pendant la phase d'utilisation des véhicules. Ainsi, un véhicule léger, de petite taille et qui roule lentement s'avère dans tous les cas favorable. Pour les systèmes de transport qui utilisent un taux élevé d'énergie renouvelable, l'énergie grise, dépensée lors de la fabrication, peut constituer proportionnellement un facteur élevé[7].

Le document du Joanneum Research permet de dresser le tableau des émissions de CO2 et de consommation d'énergie primaire cumulée, avec les abréviations anglaises BEV (Battery electric vehicle) et ICE (Internal combustion engine).

Gaz à effet de serre (en g CO2 éq./km) et
énergie primaire cumulée (en kWh/100 km)[7]
- Gaz à effet de serre
(en g CO2 éq./km)
Énergie primaire cumulée
(en kWh/100 km)
ICE petrol E10 (2019) 225 à 235 90 à 100
ICE petrol E10 (2030) 195 à 205 82 à 92
ICE petrol E10 (2050) 160 à 170 69 à 79
ICE diesel B7 (2019) 180 à 190 69 à 79
ICE diesel B7 (2030) 160 à 170 64 à 74
ICE diesel B7 (2050) 130 à 140 54 à 64
BEV EU28 (2019) 140 à 150 75 à 85
BEV EU28 (2030) 91 à 100 60 à 70
BEV EU28 (2050) 49 à 59 44 à 54

Il ressort de ce tableau que dans le cas des voitures thermiques, le CO2 est une fonction plus ou moins linéaire de la consommation. Dans le cas des voitures électriques, le même CO2 baisse plus que proportionnellement en fonction de la consommation, car l'électricité est supposée être plus décarbonée en 2050 qu’actuellement.

Pour comparaison, le cas extrême d'une voiture électrique minimale est un vélomobile à assistance électrique. Il s'agit d'un tricycle procurant une assise semi-couchée confortable, entièrement entouré d'un carénage aérodynamique. Sa consommation est de 0,7 kWh/100 km pour des vitesses réglementaires de l'ordre de 50 km/h[Note 2] (en utilisant le moteur seul, sans les pédales). Pour ce type de véhicule très léger (une trentaine de kilogrammes), la masse de l'ensemble mobile est dominée par celle du conducteur, l'énergie dépensée sert donc principalement à mouvoir celui-ci, plutôt que la masse du véhicule lui-même comme c'est le cas habituellement.

L'essor des véhicules électriques répond avant tout aux enjeux climatiques, l'amélioration des rendements étant secondaire. C'est en particulier l'argument développé par les écomodernistes, qui tiennent pour possible un découplage absolu. Ainsi, l'objectif est atteint même en présence de rendements faibles, si la source d'énergie primaire est peu ou pas carbonée (nucléaire, hydraulique, solaire, éolien...)[9],[10],[11]. Des rendements élevés permettent certes d'économiser les ressources. Mais substituer d'autres énergies au pétrole dans les transports permettrait de préserver ce dernier pour d'autres usages. De plus, la notion de rendement serait moins pertinente quand elle concerne des sources renouvelables ou très abondantes[12].

Par ailleurs, le temps que le parc automobile soit renouvelé, le mix électrique sera en partie décarboné[13],[14].

Ressources fossiles et électricité modifier

 
Grosso modo, le rendement du moteur thermique est de l'ordre d'un tiers[15]. Le rendement d'une centrale électrique utilisant des combustibles fossiles s'établit également autour d'un tiers (le coefficient d'énergie primaire vaut approximativement 3)[15],[13]. L'idée consiste alors, au travers de la cogénération, à récupérer la chaleur générée lors de la production d'électricité[16], qui serait sinon dissipée en pure perte dans le moteur thermique[Note 3].

Même à partir de ressources fossiles, le gain de la chaîne électrique peut devenir ultérieurement très important en matière de rendement, et même plus favorable en matière de gaz à effet de serre que l'utilisation directe de carburant dans un véhicule thermique[16], grâce à la cogénération, ou au gaz, moins carboné, dans les centrales à cycle combiné.

Toutefois, selon un rapport du Centre commun de recherche de l'Union européenne paru en 2020, les émissions de gaz à effet de serre associées aux véhicules électriques sont inférieures à celles d'un véhicule diesel équivalent, sauf lorsque l'électricité est produite à base de charbon[17].

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. Pour une énergie fournie de 100, l'énergie « utile » (pertes aérodynamiques, pertes de roulement et pertes de freinage) est estimée à 66 en conduite urbaine et 74 en conduite sur autoroute. Avec récupération (freinage régénératif), l'énergie à fournir n'est plus que de 100-27 = 73 en ville et 100-7 = 93 sur autoroute.
  2. Soit une puissance de 350 W, voir Consommation des véhicules électriques.
  3. Cette chaleur est surtout utile en hiver dans les pays froids. De façon similaire, les voitures thermiques peuvent utiliser la chaleur du véhicule en hiver.

Références modifier

  1. a et b (en) « Where the Energy Goes: Electric Cars », sur fueleconomy.gov (consulté le ).
    Les rendements comparés au premier paragraphe ne prennent pas en compte les pertes dues à la production d'électricité et de carburant.
  2. (en) Eoin Bannon, « E-fuels too inefficient and expensive for cars and trucks, but may be part of aviation's climate solution – study » [« Les e-carburants sont trop inefficaces et trop chers pour les voitures et les camions, mais pourraient faire partie de la solution climatique pour l'aviation - étude »], sur Fédération européenne pour le transport et l'environnement, .
  3. (de) « Pro & Contra: Fakten zur Elektromobilität » [« Pour et contre : les faits concernant l'électromobilité »], sur ADAC, .
  4. (en) « Efficient heating for electric cars », sur Phys.org, .
  5. « Une start-up israélienne veut « électrifier » les routes pour recharger des véhicules », sur connaissancedesenergies.org, .
  6. (de) « Elektroautos brauchen die Energiewende: Die Klimabilanz » [« Les voitures électriques ont besoin de la transition énergétique: le bilan climatique »], sur ADAC, .
  7. a b et c (de) Joanneum Research (en), Geschätzte Treibhausgasemissionen und Primärenergieverbrauch in der Lebenszyklusanalyse von Pkw-basierten Verkehrssystemen [« Estimation des émissions de gaz à effet de serre et de la consommation d'énergie primaire dans l'analyse du cycle de vie des systèmes de transport reposant sur les voitures particulières »], ADAC, , 171 p. (lire en ligne [PDF])
  8. « "Dépassé par la [transition énergétique]": ADAC développe un nouveau bilan CO2 pour les voitures électriques », sur elettrico.fr, .
  9. Fondation pour la nature et l'homme, European Climate Foundation, Carbone 4, Quelle contribution du véhicule électrique à la transition écologique en France ? : Enjeux environnementaux et perspectives d’intégration des écosystèmes Mobilité et Energie, , 112 p. (lire en ligne [PDF]).
  10. La France amorce le virage vers le VE, Carbone 4, , 20 p. (lire en ligne [PDF]).
  11. (en) Dr. Maarten Messagie, Life Cycle Analysis of the Climate Impact of Electric Vehicles, 14 p. (lire en ligne [PDF]).
  12. (en) Bernard L. Cohen, « Breeder reactors: A renewable energy source » [« Surgénérateurs: une énergie renouvelable »], American Journal of Physics, vol. 1, no 51,‎ , p. 1 (lire en ligne [PDF]).
  13. a et b Cédric Ringenbach, « Faut-il électrifier la mobilité ? », Centrale Énergies — Flash, no 55,‎ (lire en ligne [PDF], consulté le ) :

    « À première vue, les émissions sont du même ordre de grandeur ; le moteur à explosion a un plus mauvais rendement que celui de la centrale thermique, mais le transport de l’électricité coûte également de l’énergie ; admettons que cela s’équilibre. »

  14. (en) « Renewable electricity is a must to decarbonise land freight transport » [« L'électricité renouvelable est indispensable pour décarboniser le transport terrestre de marchandises »], sur Fédération européenne pour le transport et l'environnement, .
  15. a et b « Voiture électrique », Électricité et hydrogène, sur connaissancedesenergies.org citant :
    « Les véhicules essence et Diesel », sur IFP Énergies nouvelles (consulté le ).
  16. a et b (en) Florian Kobloch et al., « Net emission reductions from electric cars and heat pumps in 59 world regions over time » [« Réductions nettes des émissions des voitures électriques et des pompes à chaleur dans 59 régions du monde en fonction du temps »], Nature,‎ (lire en ligne).
  17. (en) Matteo Prussi, Marta Yugo, Luis De Prada, Monica Padella et Robert Edwards, « JEC Well-To-Wheels report v5 », (ISBN 978-92-76-20109-0, DOI 10.2760/100379), p. 88.

Voir aussi modifier

Articles connexes modifier

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