Dictionnaires statistiques, topographiques, historiques et politiques

Le mot statistique - au singulier - conservait au début du XIXe siècle le sens que lui avait donné l'Allemand Archenwell qui avait créé ce néologisme au milieu du XVIIIe siècle, celui de « science de l'État ».

Au moment où, vers 1810, a commencé le mouvement des Dictionnaires statistiques départementaux, cette notion est très différente de celle de statistiques - au pluriel - que l'on utilise actuellement au sens que lui a donné Condorcet: une représentation du monde par des tableaux de chiffres, et la mise en évidence de variations et de changements qui indiquent les mouvements de l'histoire. À cette époque, qui suit les bouleversements de la Révolution, c'était au contraire la stabilité du monde que l'on s'efforçait de retrouver, c'était l'idée d'état, ou d'État, de ce qui se tient, de ce qui est établi, et de ce qui est stable, par delà les transformations et les révolutions, qui est exprimée par la vogue du mot statistique, un peu comme la notion de sociologie "statique" qu'Auguste Comte oppose à la sociologie "dynamique".

De là cette entreprise pour établir des Dictionnaires statistiques, portant le plus souvent comme sous-titre : Topographiques, historiques, archéologique, politiques : elle satisfaisait aussi bien la visée des administrateurs jacobins qui ne savaient plus sur quoi fonder une politique, que le mouvement réactionnaire des notables qui aspirent à un retour à une tranquillité politique et sociale qu'on ne savait plus sur quoi tabler.

C'est un ancien sous-préfet de Normandie, N ?, membre de l'Académie celtique, qu'on voit pour la première fois former le projet d'établir pour chaque département, sous le nom de Dictionnaire statistique, une monographie qui ferait sa description sous tous ses aspects : historique, topographique, archéologique, linguistique, historique, politique, monumental, etc. L'idée n'était pas nouvelle, elle reprenait sous cette nouvelle appellation de statistique, le projet des Mémoires des intendants (1696-1701) qu'avait compilé en forme de dictionnaire Jean-Aimar Piganiol de La Force (1673-1753). Le Dictionnaire des Gaules et de la France, de l'abbé Expilly, procédait du même esprit. Cependant, avec cette nouvelle étape, elle se systématise dans un programme d'enquête qualitative plus exhaustif et plus scientifique qui est très semblable à celui proposé par Joseph-Marie de Gérando.

Postérité modifier

Au point de vue des données numériques, le Ministre de l'Intérieur publie en 1852 une Statistique générale de la France 1834-1852, et prend le Décret du qui crée dans chaque chef-lieu de canton une commission de statistique dont les données seront centralisées au Ministère de l'Intérieur.

Au point de vue des données qualitatives, un certain nombre de ces ouvrages a vu le jour après un travail approfondi de recherche documentaire et archéologique de tout ce qui est immuable en matière de coutumes, d'institutions, d'administration, de topographie, de langues, de monuments, d'hagiographie, de mythes et de folklore. Les dénombrements y sont peu nombreux, essentiellement démographiques, géographiques, administratifs, mais très peu économiques.

Dictionnaires statistiques nationaux modifier

  • Statistique générale et particulière de la France et de ses colonies avec une nouvelle description topographique, physique, agricole, politique, industrielle et commerciale de cet État (…) Où l’on trouve aussi un très grand nombre de tableaux représentant sous un seul coup d’œil, toutes les anciennes divisions géographiques, militaires, ecclésiastiques, etc., le commerce intérieur et extérieur, les localités, le nombre et le produit des mines, forges, fonderies, usines, salines, les force de terre et de mer, etc, avec un Grand Atlas contenant 19 tableaux et 9 grandes cartes enluminées, tant de la France et de sa navigation intérieure, que des colonies et établissements Français dans les quatre parties du Monde, dressées par Jean-Baptiste Poirson et gravées en taille douce par Tardieu l’aîné, par une société de gens de lettres et de savans et publié par P. E. Herbin de Halle, Paris, édition F. Buisson, An XII (1803-1804), 7 volumes in-8° + 1 volume grand in-4° d'atlas[1].

Dictionnaires statistiques départementaux modifier

Inventaires topographiques modifier

Un inventaire topographique proprement dit (Dictionnaire topographique) s'est efforcé de recenser et localiser tous les noms de lieux de la France, anciens et modernes, par département ; il est toujours en cours d'achèvement. Dans le même temps, les Répertoires archéologiques ont entrepris de signaler les principaux monuments de chaque département. De nos jours, il s'agit d'une collection de monographies archéologiques, historiques et culturelles portant sur un territoire, en général un canton ou une ville, établies dans le cadre de l'Inventaire général du patrimoine et des richesses artistiques de la France et édités par l'Imprimerie nationale.

Notes et références modifier

  1. Contient 52 pages consacrées à l’inventaire des mines de France et : 1°. - Tableau général des naissances, mariages et décès qui ont eu lieu en France pendant l’an IX. 2°. - Tableau du commerce d’importation et d’exportation de la France à l’époque de l’année 1787. 3°. - Tableau général des exportations en 1787, des marchandises originaires de la France et de leur produit. 4°. - Tableau de la navigation générale de la France, à l’époque de l’année 1787. 5°. - Tableau estimatif du commerce maritime et de terre entre la France et les différentes contrées de l’Europe en 1792. 6°. - Résultats généraux du commerce et de la navigation de la France avec les Européens, les Levantins, les Barbaresques et les États-Unis d’Amérique en 1792.~7° Tableau du commerce extérieur et de la navigation de la République Française pendant l’an VIII, et prises maritimes. 8°. - Tableau des importations et exportations des substances minérales en 1787. 9°. - Denrées coloniales portées en France en 1788 par 686 navires, jaugeant 219,122 tonneaux – Ports de France qui ont reçu les denrées des colonies. 10°. - Commerce des colonies en général. 11°. - Carte physique de la navigation intérieure de la France, indiquant les bassins des cinq grands fleuves, le cours des rivières navigables, flottables et autres, et les canaux exécutés et projetées. 12°. - Carte des Iles Antilles. 13°. - Carte de Saint-Domingue, divisée par Départemens. 14°. - Carte de la Guiane Française et Hollandaise. 15°. - Carte de l’Afrique. 16°. - Carte de la côte Occidentale de l’Afrique, depuis le Cap Blanc, jusqu’à la grande rivière de Serra Leone, comprenant le cours des rivières du Sénégal et de la Gambie. 17°. - Carte de l’Inde. 18°. - Cours du Mississippi, contenant la Louisiane, les deux Florides, une partie des États-Unis et pays adjacens. 19°. - Carte de la République Française après la Paix d’Amiens, divisée en 108 départemens, pour servir d’intelligence à la Statistique Générale de la France.

Bibliographie modifier

  • (de) Introduction à la science de la description des États, 1748, par Achenwall;
  • (de) Idéal d'une statistique générale du monde, 173, par Gatterer;
  • (en) Arithmétique politique, 1774 et 1779, par Arthur Young, Londres, 2 volumes;

Articles connexes modifier