Le Livre de Marco Polo

récit retraçant les aventures de l’explorateur marchand vénitien Marco Polo au XIIIe siècle
(Redirigé depuis Devisement du monde)

Le Livre de Marco Polo (aussi connu sous les titres Le Devisement du monde ou Le Livre des merveilles, et en italien sous celui d'Il Milione et en anglais comme The Travels of Marco Polo) décrit l'empire sino-mongol de Khubilai Khaan, pour lequel Marco Polo a été « messager » ou émissaire impérial de 1275 à 1290. Ce livre est considéré comme ayant fait faire un pas de géant à la géographie pour avoir décrit l'Asie et, en mer de Chine et océan Indien, les îles depuis le Japon jusqu'à Madagascar.

Le Livre de Marco Polo
Page d'un manuscrit racontant la bataille contre les éléphants du roi de Birmanie
Une page d'un manuscrit du Livre de Marco Polo racontant la bataille contre les éléphants du roi de Birmanie (ms. A2, BnF fr. 2810, en ligne).

Auteur Marco Polo et Rusticien de Pise
Pays Italie (écrit en ancien français)
Genre Description de l'Asie et de l'empire sino-mongol de Khubilai Khaan
Lieu de parution Gênes
Date de parution 1298
Type de média Manuscrit
Fragment d'une autre enluminure du ms. A2 : débarquement au port d'Hormos, ch. 36 (en ligne)).

Faire connaître de nombreux peuples et les particularités de diverses régions du monde est le but fixé par les premiers mots du Livre. Au long de ses itinéraires, il rapporte une multitude d'historiettes, historiques ou piquantes ou miraculeuses, et surtout raconte l'histoire des Mongols de Gengis Khan, les institutions de la Chine sous l'empereur Khubilai Khaan, avec ses fastes, ses chasses et ses fêtes dans sa ville de Pékin (Khanbalik).

Rédigé d'abord en 1298 dans un français approximatif parsemé d'italianismes, puis corrigé à partir de 1307, ce livre comporte un prologue relatant le premier voyage en Chine du père et de l'oncle de Marco Polo, puis leur second voyage avec Marco. Ce prologue est suivi de quatre itinéraires : depuis Acre vers la Chine – depuis Pékin vers le Yunnan et les États au sud de la Chine – depuis Pékin vers Hangzhou et le port de Quanzhou – enfin l'espace entre le Japon et Madagascar en passant par Sumatra, Sri Lanka et l'Inde.

À partir d'une vingtaine de principaux manuscrits anciens qui ont été conservés, ce livre est fréquemment édité, sous divers titres, traduit dans beaucoup de langues, et donne lieu à d'innombrables études qui confirment la véracité de la plupart des nombreux faits consignés.

L'Œuvre

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Extension de l'empire mongol hors Sibérie[n 1].
 
Première impression à Venise : Delle meravigliose cose del mondo, 1496 (en ligne)
 
Page de couverture de l'édition italienne de Ramusio, imprimée en 1559 (en ligne).

Le livre qui a rendu Marco Polo mondialement célèbre est la première description européenne de l'ensemble de l'Orient : Perse, Asie centrale, Extrême-Orient, Inde et océan Indien. Antérieurement, Jean de Plan Carpin (1182-1252) et Guillaume de Rubrouck avaient raconté leur voyage au pays des Mongols, mais en latin, et ils n'avaient pas pénétré aussi loin en Extrême-Asie[2]. Le Livre de Marco Polo est aussi le plus ancien des livres en langue européenne moderne, non en latin, qui soit resté populaire[n 2].

Ce livre décrit les immenses possessions de l'empire sino-mongol qui fut le plus vaste empire de l'histoire du monde[1]. Il décrit aussi le Grand Khan et empereur de Chine Khubilai, qui fut l'un des hommes les plus puissants de l'Histoire – sinon le plus puissant de tous – avec son organisation militaire, son mode de gouvernement, son papier-monnaie obligatoire, ses chasses extraordinaires et ses fêtes fastueuses :

« L'homme le plus puissant en gens, en terres et en trésors, qui fut jamais au monde ni qui soit maintenant, depuis Adam notre premier père jusqu'à ce jour[3] ... Si que je vous dis bien en vérité que jamais ne fut ni ne sera, je crois, homme qui puisse avoir si grande réjouissance et agrément en ce monde comme celui-ci a ; ni qui mieux eut le pouvoir de le faire[4] ».

Le livre n'est pas un récit de voyage, car l'itinéraire est reconstruit et il n'évoque que de façon discrète l'expérience vécue par son auteur[5] – sauf peut-être quand il s'agit du charme des courtisanes de Hangzhou[6].

À la fois récit de belles histoires comportant parfois des éléments légendaires présentés comme tels, description de villes et d'institutions de pays lointains, relation de mœurs étranges, parfois cocasses ou piquantes[7] , ce livre fut aussi un guide utile pour les marchands en route vers l'Asie, quoique son auteur n'ait pas été lui-même en Chine un commerçant[8],[9],[10], mais un officiel employé par le palais impérial[11].

Cette œuvre a aussi beaucoup contribué aux progrès de la géographie :

« Et si dans la longue série des siècles on cherche quels sont les trois hommes qui ont le plus contribué aux progrès de la connaissance du globe, le modeste nom du voyageur vénitien vient se placer sur la même ligne que ceux d’Alexandre-le-Grand et de Christophe Colomb. »

— Walckenaer, Histoire générale des voyages[12].

Contenu du Livre

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Un avant-propos, un prologue et quatre parties

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Marco Polo révèle le pétrole, le charbon et l'amiante.

Pétrole (‘huile’)[13] :
« Et en cette fin vers Géorgie, sachez qu'il y a une source qui sourde huile en moult grande quantité ; si que bien 100 navires y pourraient bien charger à la fois. Mais elle n'est pas bonne à manger, mais elle est bonne à brûler et à enduire les chameaux contre la gale. Et y viennent gens de moult loin pour cette huile. Car en toute la contrée ou environ ne brûlent autre huile. »

Charbon (‘les pierres pour feu’)[14] :
« Il est vrai que par toute la province du Catay a une manière de pierres noires qui s'excavent des montagnes par filons et qui brûlent comme bûche, et maintiennent mieux le feu que la bûche ne fait. Car si vous les mettez au feu la nuit vous trouverez du feu au matin, si qu'elles sont si bonnes que par toute la province ne brûlent autre chose. »

Amiante (‘salamandre’)[15] :
« Et sachez bien qu'en cette dite montagne se trouve une veine de laquelle se fait la salamandre. Car sachez de vrai que salamandre n'est pas une bête si comme on dit en nos pays mais est d'une veine de terre, et entendrez comment ... l'on fait creuser en cette montagne, et on trouve une veine (de terre) ; et se prend cette veine et s'amenuise, et l'on trouve dedans comme fils de laine, et puis on les met sécher. Et quand elle est sèche si se réduit dans de grands mortiers de fer, puis la font laver et toute la terre s'en va et demeure si comme fils qui semblent de laine ; et on les fait filer, et on en fait toiles. Et quand elles sont faites si ne sont pas bien blanches, mais ils les mettent dedans le feu. Et quand une en est retirée si est blanche comme neige, et chaque fois qu'elle devient sale on la met dedans le feu, si devient blanche. Ainsi est la vérité de la salamandre non autrement : car qui le dirait autrement ce serait bourde et fable. »
Itinéraires de Marco Polo (clic pour carte entière).
En rouge, aller (1271-1294). – En bleu, missions en Chine (1275-1290). – En vert, retour (1292-1295). – En brun, lieux cités hors itinéraire certain.
 
Perrière du type Bricole
(ch. 145, bataille de Xiangyang).
 
La caravane de Marco Polo voyageant vers les Indes (miniature d'Abraham Cresques dans l'Atlas catalan).
 
Miniature illustrant “l'arbre à vin” : « Quand ils veulent du vin, si en taillent une branche (et) est moult bon à boire » (ch. 165).
 
Papier-monnaie à pouvoir libératoire obligatoire, 1287.

Le livre comporte un avant-propos, un prologue et quatre parties, avec un nombre de chapitres variable selon les manuscrits : entre 192 et 232[n 3].

  • L’Avant-propos (à tort souvent confondu avec le Prologue, surtout dans la compilation initiale qui le numérote comme un chapitre) ne comporte que 300 mots et présente le livre, son auteur et les circonstances de sa rencontre avec son rédacteur, Rusticien de Pise (ms. F: « Rustaciaus de Pise », ms. A1: « Rusta Pisan », et non « Rustichello[n 4] »). S'y adjoint, dans les manuscrits B3, B4 et B5, un certificat d'origine de la rédaction corrigée.
  • Le Prologue raconte en dix-huit courts chapitres le premier voyage des père et oncle de Marco, Nicolo et Matteo Polo, entre 1255 et 1269, puis leur second voyage avec Marco de 1271 à 1295. Cette partie de l'œuvre est la plus personnelle. Elle valorise les parents Polo comme ambassadeurs du Grand Khan Khubilai auprès du pape[16], et plus tard Marco comme son « messager » — messager ou Envoyé (chinois : 出使, chūshĭ[17]) devant être entendu comme un emploi d'émissaire impérial, chargé de transmettre les ordres de l'Empereur et d'observer, sans s'impliquer dans leur exécution[18],[19].
  • La Deuxième partie est d'abord consacrée à Khubilai Khaan : comment il a pris, affermi et défendu son pouvoir (ch. 75 à 80) ; ses quatre femmes et ses nombreuses concubines (ch. 81) ; ses fils (ch. 82) ; ses palais (ch. 83-84) ; sa salle des banquets et sa garde prétorienne (ch. 85) ; ses fêtes et la couleur des costumes (ch. 86) ; les présents et offrandes qu'il reçoit (ch. 87) ; ses grandes chasses (ch. 88-92). Puis la ville de Pékin ou Cambaluc (ch. 94) ; le papier-monnaie rendu obligatoire et exclusif (ch. 95) ; le gouvernement (ch. 96) ; les relais de poste (ch. 97) ; les dégrèvements d'impôts en cas de calamité naturelle (ch. 98) ; le réseau de routes bordées d'arbres (ch. 99) ; le vin de riz (ch. 100) ; l'usage du charbon ; le stockage des céréales dans des silos pour réguler les prix et prévenir les disettes (ch. 102) ; les aides aux démunis (ch. 103) — modes de gouvernement souvent encore inconnus en Europe[5].
    À quoi s'ajoute dans la rédaction de Ramusio l'histoire d'un coup d'État, l'assassinat d'un important ministre dans la Cité Interdite — chapitre qui se termine par la mention sibylline : « Et dans le temps que cela se passait, messire Marco se trouvait sur les lieux[20] », laissant entendre qu'il participa à l'enquête judiciaire qui suivit[21].
    Les chapitres suivants présentent deux itinéraires en Chine, l'un vers le sud-ouest de Pékin, l'autre vers le sud-est, que Marco Polo a parcourus lors de ses missions comme « messager » de l'empereur de Chine[22].
    Le premier décrit la route de Pékin vers le Yunnan en passant par le Sichuan et l'est du Tibet, suivi d'un survol de la Birmanie, du nord de l'actuelle Thaïlande et du Vietnam (ch. 104-129).
    Le second itinéraire va de Pékin vers la Chine du Sud, l'ancien empire des Song du Sud que Khubilai Khaan absorba à partir de 1276. En longeant plus ou moins le Grand Canal, il arrive à Yangzhou où il fut l'émissaire impérial pendant trois ans (ch. 143), puis, après une excursion à Xiangyang (Saianfu), théatre d'un long siège où des armes venues de l'Ouest furent décisives (ch. 145)[23], il parvient à la grande capitale de Hangzhou, qui était la plus grande ville du monde (ch. 151) et dont il analyse les immenses recettes fiscales (ch. 152). Enfin, il atteint Quanzhou, le plus grand port du monde (ch. 156).
  • La Troisième partie, qui s'intitule le Livre d'Inde, décrit la mer de Chine et l'océan Indien : du Japon gorgé d'or aux anthropophages de Sumatra (ch. 157-165) ; puis Sri Lanka et l'Inde (ch. 166-182) ; enfin l'ouest de l'océan Indien : Socotra, Madagascar, Zanzibar avec son continent africain, et l'Éthiopie, pour revenir par Aden et Dhofar jusqu'à Ormuz (ch. 183-192).
    Le récit comporte, avec de belles histoires, beaucoup d'informations vérifiées exactes, qui témoignent d'une expérience réelle, notamment lors de l'escale de cinq mois à Sumatra en raison de la mousson d'hiver. Marco décrit les jonques chinoises, les hauts fonds du détroit de Johor, la disparition de l'étoile Polaire sous l'équateur, l'arbre à vin de Sumatra, le bois de brésil qu'il a tenté d'introduire en Europe sans succès[24], les rubis de Ceylan, les diamants de Golconde, le poivre, l'indigo, le gingembre, les cuirs du Gujarat, les moutons sans pavillon d'oreilles[25] d'Ash Shihr.
    Il s'intéresse aussi aux croyances religieuses, à l'aspect des brahmanes et à la nudité des ascètes[26], ainsi qu'aux chamans et leurs curieux protocoles médicaux.
    Dans l'ouest de l'océan Indien où il n'est pas allé, le récit rapporte des traditions orales : les deux îles « Masle et Femelle » habitées l'une par des hommes, l'autre par des femmes, qui ne se rencontrent qu'au printemps (ch. 183), l'oiseau rokh capable de soulever des éléphants au sud de Madagascar (ch. 185), ainsi que des faits historiques comme la guerre des chrétiens d'Éthiopie contre les mahométans de la Côte (ch. 187).
  • Une Quatrième partie, souvent plus ou moins omise dans des manuscrits, contient des fragments historiques au long de 34 chapitres dans la compilation initiale, 8 ch. seulement dans les mss. A1 et A2, 3 seulement dans les mss. B.
    Elle raconte la « Province d'obscurité » russe, et surtout les guerres fratricides entre Mongols qui font comprendre la cause de leur déclin. La plupart des faits rapportés sont historiques, notamment : les expéditions répétées de Qaidu contre les troupes du Grand Khan en Asie centrale et en Mongolie – les combats de la Horde d'Or contre l'ilkhanat d'Iran – le combat d'Arghoun contre son oncle Ahmad Teküder pour le pouvoir en Iran – et la bataille en 1297 d'un puissant général faiseur de rois, Nogaï, contre le khan de la Horde d’Or Toqtaï.

Chapitres saillants

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Le Livre est souvent perçu comme un recueil de « merveilles » (au sens ancien : étonnant, surprenant, voire effrayant[n 7]) avec de belles histoires. Mais sa trame est une base continue d'informations plus précises, nombreuses et exactes que la légèreté des récits et la simplicité de la langue ne laissent supposer.

  • Chapitres 97 et 99[n 5] sur les relais impériaux, leur luxe, leurs nombreux chevaux, et la rapidité de leurs courriers (lors de ses missions, M. Polo les a souvent utilisés).
  • Chapitre 145 sur la bataille de Xiangyang (Saianfu), qui révèle l'implication de Nicolo et Matteo Polo, les père et oncle de Marco, dans un transfert de technologie militaire : l'introduction de grandes perrières qui furent effectivement décisives pour la conquête par les Mongols du très riche empire des Song du Sud. L'affaire est contestée (voir ci-dessous), mais sa véracité justifierait que Khubilai ait favorisé les frères Polo et facilité la promotion de leur fils Marco[27].
  • Chapitre 151 sur Hangzhou, à l'époque la plus grande ville du monde. Décrite par M. Polo à partir d'une lettre de l'impératrice Song (dont lui seul a transmis la teneur) et de ses propres expériences, la ville est présentée comme le joyau de la dynastie Song et un apogée de la civilité humaine — un sommet du Livre aussi, surtout dans la rédaction de Ramusio qui est deux fois plus développée.
  • Chapitre 152, seul cas où M. Polo présente le résultat d'une de ses missions : l'évaluation des recettes fiscales de la province de Hangzhou. Chiffre le plus astronomique du Livre : annuellement l'équivalent d'environ 300 tonnes métriques d'argent fin[28] (mais payé en papier-monnaie), soit environ douze fois la recette ordinaire à l'époque du royaume de France[29] qui était le plus puissant d'Europe. Pour le seul impôt sur le sel dans une seule province, c'est un montant incroyable (« si desmesuré nombre de monnoie que c'est impossible chose à croire »), mais cette évaluation a été démontrée compatible avec une statistique des annales chinoises[30], prouvant que M. Polo n'affabule pas, même dans son évaluation la plus énorme.
  • Chapitres décrivant l’économie, l'activité de production et d'échange : intervention sur le marché des grains (ch. 102) et fonds sociaux (ch. 98 et 103) ; appareil de production proche de l'industrie à Hangzhou (ch. 151) ; bateaux et commerce naval (ch. 156, 157, 177) ; papier-monnaie, rendu obligatoire pour la première fois dans l'histoire et sous peine de mort (ch. 95), que M. Polo décrit comme un détournement de l'économie au profit de l'État : grâce à ce papier d'écorce « qui rien ne lui coûte … l'empereur achète tant chaque année que c'est sans fin son trésor … il a de cette façon tout le trésor de ses terres … la manière et la raison pourquoi il doit avoir et a plus de trésor que tous ceux du monde ».
  • Chapitre posthume racontant l'histoire de l’assassinat d'un puissant ministre des finances en 1282 (ch. II.8 de Ramusio)[20], prouvant que Marco Polo eut connaissance de nombreux détails tenus secrets d'un des évènements les plus graves du règne de Khubilai.
  • Tyrannie enfin : massacre de dizaines de milliers de personnes à l'enterrement de chaque Grand Khan avant Khubilai (ch. 68)[31] – répressions terribles (ch. 133 et 149) – appareil militaro-policier omniprésent dans les villes – couvre-feu permanent à Pékin (ch. 84, 85) – soldats sur chacun des innombrables ponts de Hangzhou (ch. 151) – et dans le ch. posthume, despotisme criminel d'un ministre.

Exagérations dans les récits ?

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De nombreux chercheurs ont depuis le XVIIe siècle confirmé un nombre incommensurable d'informations contenues dans le Livre de Marco Polo, mais trois chapitres cristallisent un soupçon d'exagération :

Le chapitre 143[n 5] sur Yangzhou, où il est reproché à M. Polo de prétendre y avoir été « gouverneur » alors qu'aucun document chinois ne le confirme[32].
Le chapitre 145 sur la bataille de Xiangyang (Saianfu), où il est reproché à Marco Polo de s'y être mis en scène[33].
Le chapitre 152 sur l'impôt prélevé à Hangzhou, où l'évaluation de la recette pour le sel paraît exorbitante[34].

Quant au premier : le texte ne dit pas qu'il fut ‘gouverneur’ à Yangzhou, mais qu'il y « eut seigneurie[n 8] durant trois ans par le commandement du Grand Khan[35] », ce qui est compatible avec son emploi de « messager[18] », c'est-à-dire émissaire impérial chargé de transmettre des ordres et de faire rapport sur leur mise en œuvre, sans se mêler de l'exécution laissée à l'administration locale, laquelle devait impérativement obéir aux ordres de l'Empereur transmis par ses messagers[19].

Quant au second : les meilleures rédactions (A, C et Ramusio) ont supprimé la mention “et messire Marc” ajoutée fautivement par un copiste derrière de nom de ses père et oncle. Le récit concerne le père et l'oncle lors de leur premier voyage. Dès lors le récit devient crédible puisqu'il ne dit que ceci : qu'il « proposèrent » et « firent faire » des perrières[ms 1], tandis que ces armes étaient très connues à l'arsenal de Venise dont elles étaient une spécialité. – La suppression de la mention du prénom Marco par Ramusio en 1559 est particulièrement significative, car Ramusio ne connaissait pas les textes en français.

Quant au troisième : Guillaume Pauthier[36] et Hans Ulrich Vogel[37] ont démontré que le montant énoncé par M. Polo, quoiqu'énorme, est compatible avec une statistique chinoise qui a été retrouvée. À cause du caractère mathématique de cette démonstration, Pauthier disait qu'« aucune preuve plus frappante de la véracité scrupuleuse de Marc Pol ne pouvait être fournie[38] ».

Omissions

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Du fait que le Livre ne parle pas explicitement de diverses réalités chinoises (sinogrammes, Grande Muraille, thé, pieds bandés, pêche au cormoran...), quelques commentateurs ont tenté d'en tirer argument contre les récits de Marco Polo[39], quoiqu'une absence ne saurait constituer une preuve : « l'argument ex silentio est au plan de la méthode un faux argument[40] ».

À ces critiques, M. Polo oppose ses ultimes paroles, sur son lit de mort, à ceux qui lui demandaient de rétracter ce qui dans son livre allait au-delà des faits : « Je n'ai pas écrit la moitié de ce que j'ai vu[41] ».

Voyageur explorateur ? Bon observateur

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Marco Polo est souvent représenté comme un ‘voyageur’ et un ‘explorateur’. Cependant son Livre nous le montre parcourant beaucoup de « journées » de cheval, mais à titre officiel : attaché d'ambassade à l'aller, messager de l'empereur en Chine, enfin chargé de « messagerie » à son retour[42]. Il n'était pas un ‘voyageur’ qui voyage pour son agrément ou pour ses propres recherches, mais un « messager » portant table de commandement en or[43], logé dans des relais impériaux luxueux[44].

D'autre part, le Livre décrit des lieux où M. Polo n'est pas allé. Les itinéraires sont littéraires, reconstruits, « il est même impossible de fixer exactement sa route[45] ».

« Vouloir, par habitude, faire du Devisement un récit de voyage est manifestement une erreur... (Il y a des) pays hors itinéraires et pourtant décrits, réintroduits d’une façon artificielle dans le cours du discours... Marco, dans son livre, ne suit pas son itinéraire... il s’agit d’une narration, pour faire connaitre les pays et non l'aventure personnelle d’un seul homme. »

— Jacques Heers[46]

Aux trajets effectivement parcourus se greffent des pays adjacents, qu'il ne prétend pas avoir visités, mais qui, soit appartenaient à l'empire mongol (ch. 21-28[n 5] : Bakou, Géorgie, Irak – ch. 51 : Samarcande – ch. 58-70 : Dzoungarie, Mongolie, Sibérie), soit étaient plus ou moins inféodés (ch. 120-127 : Birmanie, nord de la Thaïlande et du Vietnam), soit étaient en relations commerciales pouvant déboucher sur leur soumission (ch. 47-48 : Cachemire – ch. 158, 162, 165 : Japon, Java, Sumatra – ch. 183-190 : Ouest de l'océan Indien).
— Le sujet du Livre n'est pas le ‘voyageur’ Marco Polo, mais le plus vaste empire de l'histoire, l'empire de l'empereur sino-mongol qui réunifia la Chine : Khubilai Khaan.

Quant à ‘explorateur’, cela ne saurait être au sens du XIXe siècle. M. Polo ne découvre pas des pays inconnus, mais son Livre révèle à l'Europe des mœurs, des histoires, des pays connus des Chinois. Cependant lui-même s'avère être un chercheur et un bon observateur, ne serait-ce que pour satisfaire son maître, le Grand Khan, qui désirait connaître comment vivaient ses peuples. Le Livre le dit explicitement : Marco Polo « toujours allant et venant de çà et de là en messagerie par diverses contrées, là où le seigneur l'envoyait ... peinait moult pour savoir et pour entendre toute chose qu'il croyait plaire au Grand Kaan ... il mettait beaucoup d'attention à savoir et à espier et à s'enquérir de tout pour le raconter au grand seigneur[47] ». Il ne faisait pas qu'observer, il questionnait notamment les hauts fonctionnaires locaux et il prit vraisemblablement des informations dans des livres et documents chinois[48].

Ses qualités d'observateur ont été reconnues par son contemporain Pietro d'Abano, l'un des plus grands esprits de son temps, qui a laissé ce fort compliment : « Marc le Vénitien est de tous ceux que j'ai connus, celui qui a le plus parcouru le globe et a été l'observateur le plus attentif[49] ». Le Livre révèle particulièrement une connaissance des plantes et des animaux, que les précédents voyageurs avaient rarement mentionnés[50] ; par exemple, sa description de cinq variétés de grues (ch. 73) fait dire à Stephen Haw que « seul un excellent observateur et bon connaisseur des oiseaux peut donner une information si juste et si précise[51] ». Jacques Heers résume ainsi : « Le livre écrit par Marco Polo et Rusticello n’est pas le récit des voyages des Vénitiens. C’est un traité encyclopédique qui s’inscrit dans une très longue et vivante tradition[52] ». Tradition vénitienne particulièrement, car le Sénat de Venise formait ses ambassadeurs et autres voyageurs à décrire ce qu'ils voyaient dans les pays étrangers selon un canevas proche de celui suivi dans le Livre pour la description de chaque pays.

Titres du Livre

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Le Livre se présente sous différents titres, généralement repris des premiers mots (incipit) des manuscrits[ms 2].

  • Le Livre de Marco Polo est le titre des mss. A2, A4 et D, et celui de la traduction latine de Pipino. — Ce titre a été retenu par les deux plus grands commentateurs du livre, Guillaume Pauthier et le colonel Henry Yule.
  • Le Devisement du monde est le titre des mss. F et A1. — Ce titre a le défaut d'utiliser un mot devenu obscur (devisement[n 9]) et d'être formellement inexact, car le sujet du Livre n'est pas ‘le monde’ mais le monde du Grand Khan Khubilai, de l'actuelle Turquie jusqu'à la Corée.
  • Le Livre du Grand Khan est le titre des mss. B.
  • Le Livre des Merveilles est tiré d'un complément des incipits des mss. A2, A4 et B[ms 2]. — Ce titre a le défaut d'utiliser le mot 'merveille' qui est ambigu[n 7] et de prêter à confusion : d'une part parce que « Le livre de merveilles du monde » est l'intitulé (ajouté par un bibliothécaire au verso de sa couverture en cuir[ms 3]) du gros ms. BnF fr. 2810 qui contient d'autres œuvres en sus de la rédaction A2 du Livre de Marco Polo ; d'autre part parce que le livre de Mandeville, qui contient beaucoup de plagiat, est aussi intitulé le Livre des merveilles du monde.
  • Les Voyages de Marco Polo est le titre de l'édition de Ramusio (1559), adopté ensuite par la plupart des traductions anglaises depuis Frampton (1579)[53], ainsi que par l'édition de la Société de géographie (1824). — Ce titre a le défaut de représenter Marco Polo en ‘voyageur’, alors qu'il était un officiel en mission.
  • Il Milione est le titre courant en Italie. — Mais Milione était le surnom de l'auteur, non de son Livre[54].

Des divers titres extraits des incipits des manuscrits, à vrai dire seuls conviennent : Le Livre de Marco Polo, ou Le Livre du Grand Khaan puisque Khubilai Khaan en est le sujet central.

Langue de la rédaction

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Début du ms. F BnF fr. 1116 :
« Seingnors enperaor et rois, dux et marquois, cuens, chevalers et borgiois, et toutes gens qe volés savoir les deverses jenerasions des homes et les deversités des deverses region dou monde... »

Le Livre a été rédigé en français du XIIIe – XIVe siècle.

La première rédaction a été faite en prison à Gênes en 1298 avec l'aide de Rusticien de Pise, un écrivain Pisan écrivant en français[55].

Le choix de cette langue peut s'expliquer par le fait que le français était une langue internationale[56] propre à toucher « tous les rois de la chrétienté[n 10] », ou parce que le latin, contrôlé par l'Église, ne permettait pas la même liberté de ton[57], ou ainsi que l'explique Guglielmo Libri[58] :

« La rédaction française du Voyage de Marco Polo et les autres ouvrages composés en français par des Italiens montrent qu'à cette époque où toutes les langues néo-latines étaient encore presque confondues, où l'influence provençale venait de ranimer la poésie italienne, où plusieurs poètes italiens écrivaient en provençal, la langue italienne n'avait pas encore prévalu dans toute l'Italie. Alors, les nations n'avaient fixé ni leur langage ni leurs limites. »

Le Livre indique être écrit en français [ms 4] et précise qu'il s'agit de la langue d'oïl[ms 5]. Jean le Long le confirme en 1350 : « ce livre a été écrit en français[59] » et Jean Lebeuf le répète en 1741 : « Un nommé Marc, qui avait été envoyé en Tartarie et aux Indes, fit en français un livre des merveilles de ce pays-là[60] ».

Des preuves philologiques ont été apportées en 1827 par le comte Baldelli Boni[61]. Étudiant les plus anciens manuscrits en dialectes italiens, dont l'un est antérieur à 1310, il trouvait de nombreux gallicismes prouvant que « ce document est traduit du français (la presente opera è versione dal francese)[62] ». Son avis a été aussitôt partagé[63],[64], ce que Barthélemy Saint-Hilaire résume ainsi[65] :

« Le comte Baldelli Boni constata que son texte italien n'était qu'une traduction du texte français, encore plus ancien qu'elle. Les arguments qu'il fournissait étaient décisifs : les fautes trop visibles de la traduction italienne laissaient apercevoir la leçon originale0... Tous ceux qui, depuis Baldelli Boni, ont pris part à la discussion ont été unanimement de cet avis, qu'ils fussent eux-mêmes Français, ou Italiens ou Anglais. MM. Paulin Paris [1833, 1850] et d'Avezac [1841] sont d'accord avec MM. Hugh Murray [1844], Thomas Wright [1854] et Vicenzo Lazari [1847] ».
Nécessité de corrections

Cependant Rusticien de Pise avait donné une compilation dont le français était fautif quant à l'orthographe et à la syntaxe[66], et comportait des italianismes morphologiques et lexicaux[67],[68],[69]. M. Polo pouvait d'autant moins laisser ce caractère brouillon à son Livre, qu'il répondait à l'ultime mission que lui avait confiée son maître Khubilai : être son messager auprès de tous les rois de la chrétienté[n 10]. Des corrections s'imposaient. Elles ont été effectuées à partir de 1307, donnant naissance à la rédaction corrigée, dédiée à Charles de Valois, frère du roi de France et lui-même bientôt père d'une dynastie de rois de France[ms 6].

Pour cette rédaction corrigée, M. Polo a bénéficié du concours de Thibaut de Cepoy, qui était en Italie entre 1306 et 1308[70] — avant de partir sur des bateaux vénitiens pour tenter de reconquérir l'empire de Constantinople[n 11]. Quelques années plus tard, son fils Jean devint le premier éditeur du Livre en France[n 12].

Les deux exemples suivants montrent comment les Cepoy et leurs copistes ont corrigé et mis en français plus correct la langue approximative de la compilation initiale :

compilation initiale, ms. F : Et sachiés qu'il ot la segnorie as 1256 ans que avoit qe Crist avoit nasqu ;
rédaction corrigée, ms. A1 : Et ot la seigneurie à 1256 ans de Crist.

Ou, avec les poules noires du chapitre 154, qui se calque sur l'italien :

compilation initiale, ms. F : galine qe ne ont pennes mes ont peaus come gate et sont toute noire ;
1re traduction italienne, ms. TA1 : galline che non hanno penne, ma peli come gatte, e tutte nere ;
rédaction corrigée, ms. A1 : gelines qui n'ont nulles plumes mais ont poil et si sont toutes noires.
« Franco-italien » ? « franco-vénitien » ?

La locution « franco-italien » pour désigner le ms. F est apparue en 1886[71], et cette expression « franco-italien » est couramment employée depuis l'édition par L. F. Benedetto en 1928 de ce même manuscrit[72]. Cette formulation est excellente pour rappeler que l'œuvre est toute italienne, mais paraît mal adaptée pour désignée sa langue, car le ms. F n'est pas écrit en italien parsemé de traits français, mais au contraire en langue française d'oïl[ms 5] avec des formes, expressions, tournures et mots italiens plus ou moins francisés.

Alvise Andreose, spécialiste de la langue romane[73] capable d'analyser les expressions et graphies du manuscrit F pouvant être caractérisées comme vénitiennes ou lombardes, florentines ou pisanes, conclut que « En tout cas, ce qu'on peut dire avec certitude est que le label ‘franco-italien’ apparaît inapproprié (unfit)[74] ». Simon Gaunt en 2013 y voit aussi : « une désignation trompeuse[75] ». Quant à L. F. Benedetto, il disait du ms. F qu'il « n'est pas possible de (le) rapprocher ni confondre avec aucune des autres productions franco-italiennes de l'époque », parce qu'en dépit de ses « traces d'italianité », il démontre une connaissance considérable de la langue française[76].

Au début du XXIe siècle une école a tenté d'introduire l'idée que la compilation initiale avait été écrite, non en « franco-italien » mais « en franco-vénitien »[77]. Il est pourtant établi que le ms. F italianise son français avec nettement moins de formes vénitiennes ou d'Italie du Nord que de formes toscanes de Pise ou de Florence[78]. En outre Chiara Concina, qui dans une première étude avait proposé l'expression “franco-vénitien” pour caractériser la langue de deux folios d'un fragment dit f de la compilation initiale, a par la suite cosigné avec Alvise Andreose un article qui conclut au contraire, que ce fragment révèle « une base graphico-linguistique essentiellement toscane », sur laquelle ne se greffent que quelques éléments d'Italie du Nord[79]. Ce que confirme Ph. Ménard[80].

Les co-auteurs

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Pour produire son Livre qui compilait énormément d'informations dans une langue non italienne, M. Polo eut besoin d'un spécialiste de l'écriture sur parchemin et de Français pour parfaire la langue.

  • Rusticien de Pise, appelé Rustaciaus de Pise dans le ms. F, et Rusta Pisan dans les le mss. A1 et A2, est un écrivain célébré pour sa compilation vers 1271 des romans de la Table ronde[81]. À cause de la complexité et du grand nombre d'informations consignées dans le Livre, il lui fallut s'impliquer dans sa création au-delà de ce que doit faire un simple copiste écrivant sous une dictée en assurant le passage de l'oral à l'écrit. Classement d'un grand nombre de notes, structuration du récit, demandes d'éclaircissements de faits et de noms qui lui étaient complètement étrangers — il mérite sans doute le titre de co-auteur. Mais de lui, on sait peu de choses, sinon qu'il était prisonnier des Génois comme des milliers d'autres Pisans, et que peut-être il dirigeait le scriptorium pisan au service des Génois[82].
  • Thibaut de Cepoy et son fils Jean ont ensuite, à partir de 1307, contribué, par eux-mêmes ou par leurs copistes, à l'amélioration de la langue de la compilation initiale. Puis Jean de Cepoy a été ensuite l'éditeur du Livre en France[n 12]. L'intervention des Cepoy est à la source des rédactions qui ont donné les mss. B puis les séries A, C et D.

La genèse du Livre

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Les frères Polo avec Marco présentent à l'empereur Khubilai Khaan une fiole de l'huile du Saint-Sépulcre et une lettre du pape Grégoire X, en 1274 (miniature du ms. B2, Bodleian, Oxford).

Comment le Livre de Marco Polo a-t-il été écrit ? Deux théories sont en concurrence pour expliquer les circonstances des premières rédactions.

La première théorie a été exposée par Paulin Paris en 1850 dans un célèbre discours devant les cinq chambres réunies de l'Institut de France[83]. C'est la théorie du work in progress. Elle repose sur l'avant-propos du ms. F, et sur le certificat d'origine[ms 6] attaché aux mss. B3, B4, B5 de la rédaction corrigée. Son explication est la suivante : il y eut une compilation en français rapide faite dans la prison de Gênes en 1298, suivie à partir de 1307 de copies effectuées par des mains françaises (les copistes de Thibault et Jean de Cepoy), qui ont corrigé la langue et intégré des corrections de fond apportées par l'auteur[84].

Les différences entre les sous-classes A et B des manuscrits suggèrent qu'il y eut au moins deux sessions de corrections à partir de 1307.
En tout cas, ces corrections n'ont pas pu être effectuées loin de l'auteur, car beaucoup comportent des précisions que lui seul pouvait connaître.

La conception work in progress a été prouvée en 1865 par plusieurs notes de Guillaume Pauthier[85], qui montrent aussi que la série B n'a pas bénéficié d'autant de corrections que la série A[86],[87],[88].

La seconde théorie est due à un philologue italien[89] et date de 1928. Elle est exposée en italien dans la première partie de son édition du ms. F (p. xxxi), et en anglais par Denison Ross dans l'introduction à son édition anglaise[90]. Son explication est la suivante : il y aurait eu un manuscrit premier, dit l'original perdu, réputé complet, qui aurait contenu tous les récits, même ceux qui apparaissent tardivement[91],[ms 7]. De ce supposé original auraient découlé deux manuscrits différents, également perdus, d'où proviendraient d'une part les mss. ressemblants au ms. F, et d'autre part les mss. comportant des innovations apparentées à la rédaction de Ramusio parue deux siècles et demi plus tard, en 1559 (d'où sa super-classification en grand A et grand B qu'il ne faut pas confondre avec les sigles A, B, C et D de la classification des manuscrits en français corrigés).

Cette théorie a été acceptée par beaucoup de commentateurs depuis 1928, quoiqu'elle tire argument de sources inexistantes (!) et qu'elle relègue les manuscrits corrigés de façon cavalière[n 13],[94].

Du point de vue de cette théorie de l'original perdu, le ms. F est réputé meilleur, car “plus proche” du supposé original perdu.
Au contraire, du point de vue de la théorie work in progress, la rédaction issue de la collaboration avec Thibault de Cepoy est jugée meilleure (à l'exception des passages reconnus plus corrects dans le ms. F), car mieux écrite, intégrant des corrections d'auteur, et qu'étant dédiée à un prince de France, elle bénéficie d'une authentification formelle.

En 2019, une découverte[95] donne un nouvel essor à la conception work in progress. En établissant la proximité de M. Polo avec les dominicains de Saint-Jean-et-Saint-Paul à Venise, elle suggère qu'il a travaillé avec eux pour étoffer la traduction succincte en latin de Pipino. De là viendraient les additions trouvées dans Ramusio ; le codex Z en serait un produit[95]. Il y aurait donc eu tentative de révision en langue latine sous les auspices des dominicains, faisant pendant à la révision en langue française sous les auspices des Cepoy.

Réception du Livre au moyen-âge

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Notes manuscrites de Christophe Colomb sur sa copie en latin du Livre de Marco Polo.

Le Livre a été fréquemment traduit et recopié au XIVe siècle (Ramusio dit qu'en peu de mois toute l'Italie en fut pleine[96]) et ce succès a été durable. En 1430, un voyageur raconte que la ville de Venise en avait attaché un exemplaire avec une chaîne dans un lieu public pour que chacun puisse le lire[97].

Des commentateurs ont affirmé que M. Polo n'avait pas été cru de son vivant, mais cette supposée incrédulité de ses contemporains a été démentie par deux spécialistes, C. Dutschke et C. Gadrat, qui ont étudié la réception du Livre aux XIVe et XVe siècles. Dutschke donne de nombreuses citations positives[98] et Gadrat a cette nette conclusion : « Loin d'avoir été rejeté ou d'avoir suscité la méfiance, le récit de Marco Polo a au contraire été considéré non seulement comme fiable, mais encore comme une source remarquablement riche d'informations. Il acquiert même rapidement, aux yeux de nombreux auteurs, un statut d'autorité[99] ».

En fait, des contemporains de M. Polo louent sa véracité. Le frère Pipino, avec l'autorité de l'Église, se porte garant de la vérité du Livre dans sa préface : « que tous ceux qui le liront sachent que le susdit messire Marco, le narrateur de ces choses extraordinaires, est un homme prudent, fidèle et pieux, et que sa relation est digne de confiance. Son père, messire Nicolo, homme prudent, raconte toutes ces choses de la même manière. Son oncle messire Matteo ... à l'article de la mort confirma fermement à son confesseur que le Livre"" contient la vérité[100] ». Pipino n'aurait pas pu écrire cela sans l'accord de sa hiérarchie, et les dominicains étaient des spécialistes de l'Orient.

Pietro d'Abano, l'un des plus grands esprits de son temps, a laissé ce fort compliment : « Marc le Vénitien est de tous ceux que j'ai connus, celui qui a le plus parcouru le globe et a été l'observateur le plus attentif[101] ». Peu de temps après, le premier légat du pape envoyé à Pékin en 1343, Jean de Marignolli est catégorique en parlant de M. Polo et d'Odoric : « Ces auteurs ne mentent pas ».

Plus tard, en 1375, l'Atlas catalan inclut une carte de la Chine avec une trentaine de toponymes du Livre de Marco Polo. Et en 1450, le cartographe Fra Mauro inclut presque tous les toponymes du Livre dans sa carte du monde qui a servi de référence durant trois siècles.

Au XIVe siècle, le Livre de Marco Polo a aussi ouvert la voie aux voyages de marchands italiens. Ainsi Pegolotti dont le livre La mercatura consigne les règles du commerce en Asie, et dont le vrai titre, Libro di divisamenti di paesi, est décalqué de l'un des titres du Livre de M. Polo). Ainsi Andalò da Savignone (it) qui effectue plusieurs voyages en Asie (dont une ambassade d'un Grand Khan vers le pape en 1336, comme les frères Polo en 1266)[102]. Ainsi Galeotto Adorno[103] et Gabriele Basso[104].

Sans compter aux XVe et XVIe siècles Christophe Colomb[105] et Vasco de Gama. Encore au XIXe siècle l'on voit un lieutenant de l'armée britannique explorant l'Afghanistan et le Pamir avec un exemplaire du Livre, qui incidemment confirme qu'avant Talikhan l'on voit des aigles, comme disent les ms A, et non des « aigues », comme l'écrivait le ms F[106].

Sources du Livre de Marco Polo

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Le Livre est connu par plus d'une trentaine de manuscrits principaux parvenus jusqu'à nous, 14 en français qui est la langue originelle, plus des traductions en dialectes italiens et en latin.

Manuscrits en français

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Les manuscrits en français parvenus jusqu'à nous sont classés en trois familles principales qui témoignent d'une rédaction progressivement améliorée :

  • La première mise en français correct incluant des corrections de M. Polo, faite à partir de 1307 avec Thibaut de Cepoy[n 14] et ses copistes, est attestée par quatre manuscrits complets, formant la série B ou “FB”[ms 9] des manuscrits en français (B1, B2, B3, B4). Elle commence par « Pour savoir la pure vérité... », et elle nomme le nom du co-auteur, Rusta Pisan.
    Trois de ces manuscrits sont pourvus d'un instrument d'authentification : un certificat d'origine contenant une dédicace « pour honneur et révérence à puissant seigneur[ms 6] ».
  • Une ultime correction de la langue avec des corrections d'auteur supplémentaires est attestée par deux manuscrits principaux dit A1 et A2 et sept autres manuscrits concordants (dont 4 sont abrégés et sont classés comme série C). Cette rédaction finale commence aussi par « Pour savoir la pure vérité... » et, avec moins d'italianismes, se caractérise surtout par la suppression du très critique prénom Marco au ch. 145 sur Xiangyang (Saianfu)[ms 1].

Les mss. A, B, C et D, dont certains ont des enluminures et des cachets royaux[107], constituent la plus nombreuse collection de manuscrits concordants et « la plus belle famille de manuscrits marcopoliens que nous possédions aujourd’hui[108] ». Ils ont été édités pour la première fois en 1865 (mss. A1 et A2) [ms 10], puis en 1998-2008 (mss. B1 et B4)[ms 11],[ms 12].

Traductions en dialectes italiens et en latin

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Le Livre a rapidement été traduit en différents dialectes italiens et en latin, et toutes ces traductions sont basées sur la compilation initiale faite à Gênes en 1298 (ms. F). Toutes sont abrégées, omettent le plus souvent le nom du co-auteur Rusticien de Pise, et toutes ignorent les corrections apportées par M. Polo à partir de 1307.

  • En dialectes italiens du Nord (vénitien, émilien, lombard), on compte 6 manuscrits principaux parvenus jusqu'à nous, formant la “version vénitienne” (dite V).
  • En dialectes italiens du Centre (florentin, pisan), on compte 7 manuscrits principaux, formant la “version toscane” (dite T), dont le plus ancien remonte à 1309 au plus tard (dite TA1).
  • En latin, la traduction principale, dite P, a été faite après 1310 par le frère dominicain Francesco Pipino (it)[ms 13]. Ce texte a cessé d'être référentiel parce que très abrégé, peu fidèle[109], censuré[57], chargé de diatribes contre « l'aveuglement des païens » et de quelques erreurs manifestes[n 15]. Pourtant, étant autorisé par l'Église, le manuscrit de Pipino est celui qui a été le plus recopié et qui a donc le plus contribué à la permanence de la connaissance du Livre et de son auteur jusqu'au XVIIIe siècle. Cette traduction en latin a été, par exemple, la source de Christophe Colomb pour justifier auprès de la reine d'Espagne son projet de voyage maritime vers l'Ouest[105].
    — D'autres manuscrits en latin témoignent de l'importante diffusion du Livre au moyen-âge. Dutschke en donne la liste[110] et les classe selon le type de leur source avant traduction en latin : source traduite du français en toscan (LT) ou en vénitien ou italien du Nord (LV), ou comprenant des additions (L)[ms 7].
    — Une autre traduction en latin (dite Z), plus tardive, a acquis de la réputation à partir de 1928, due au philologue italien L. F. Benedetto. Cependant cette traduction est extraordinairement abrégée[ms 14],[ms 15].
  • En italien standard, une réécriture du Livre (dite R) a été publiée imprimée en 1559, due à Giovanni Battista Ramusio, géographe vénitien et ancien secrétaire du Conseil des Dix. Cette rédaction comporte des additions, dont deux importantes : l'histoire d'une tentative de coup d'État en avril 1282 à Pékin avec le meurtre d'un ministre favori de Khubilai (son ch. II.8), et une description plus complète de Hangzhou (son ch. II.68). Cette rédaction retranche aussi le prénom Marco au chapitre sur la bataille de Xiangyang-Saianfu (son ch. II.62).

Leur caractère abrégé

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Les manuscrits en dialectes italiens et en latin sont notoirement abrégés par rapport à la compilation initiale qui est leur source commune.

En ne retenant que les trois premières parties du Livre, puisque la quatrième comportant des fragments historiques est souvent omise, le décompte des mots des rédactions publiées par l'édition digitale de Ca' Foscari montre que, par rapport au nombre du ms. F : sa rédaction "L" en comporte environ 39 % – "P", 44 % – "Z", 53 % – "VA" et "VB", 60 % – "V", 71 % — chiffres plutôt surévalués, car ces éditions fusionnent le texte de plusieurs manuscrits (6 mss. pour "L").
Par ailleurs "TA2" de Lanza[111] en comporte 55 %, alors que le ms. TA2 a la réputation d'être le meilleur des mss. italiens du XIVe siècle.

Même la rédaction de Ramusio (dite R), en dépit de ses nombreuses additions, ne comporte pas autant de mots que le ms. F de la compilation initiale[ms 16].

Particularités

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Différences de fond entre les mss. F et A

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Les séries A, B, C et D (ou FA, FB, FC et FD[ms 9]) des manuscrits en français comportent, par rapport à la compilation initiale F des améliorations de la forme (orthographe, syntaxe, etc.) ainsi que des modifications du texte voulues par M. Polo. Elle « porte sur beaucoup de points des traces évidentes d'une révision de Marc Pol, et de modifications que lui seul pouvait opérer[112] », elle contient « un assez grand nombre de passages d'authenticité non douteuse, c'est-à-dire dont la substance ne peut avoir été fournie que par Marco Polo lui-même, qui font absolument défaut dans la première rédaction. Il y a ainsi preuve certaine qu'une révision, une au moins, fut opérée, par Marco en personne, de 1298 à 1307[113] ».

Les modifications les plus saillantes sont les premiers mots (« Pour savoir la pure vérité... ») et la suppression du prénom Marco au ch. 145 (sauf dans la série B), mais il y en a beaucoup d'autres[114].

Une partie des améliorations voulues par M. Polo ne se trouvent pas dans la série B des copies, ce qui les fait paraître plus proches de la compilation initiale ou, plutôt, suggère que la série A a bénéficié d'une révision supplémentaire par l'auteur, car elles sont en fait beaucoup plus proches de la série A que de F.

Cependant la compilation initiale, le manuscrit {{#msF|F}}, quoique seul de sa catégorie, reste une référence, car il comporte des passages ou détails qui ont été omis ensuite. Ainsi, dans les rédactions corrigées, disparaît une partie de l'histoire de Shakyamuni Bouddha racontée dans le chapitre sur Sri Lanka[115].

Enluminures

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Les manuscrits mis en français correct sont pratiquement les seuls à avoir des enluminures[116]. Elles sont parfois très belles, quoique le pinceau des enlumineurs illustrait ce qu'ils n'avaient jamais vu et qu'ils avaient peine à imaginer[117].

Manuscrits principaux (dont en ligne et éditions)

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En français[122] :
F, Paris, BnF ms. 1116 (en ligne)[ms 8].
A1 Paris, BnF ms. 5631 (en ligne)[ms 10].
A2 Paris, BnF ms. 2810, folios 1 à 96 du Livre des merveilles, l'un des plus beaux livres du moyen-âge, réalisé vers 1411 à la demande de Jean sans Peur pour son oncle le duc de Berry (en ligne)[ms 10].
A3 Paris, Arsenal ms. n° 3511[ms 19].
A4 New York, Morgan Library, Pierpont ms. M 723[ms 20].
B1 Londres, British Library ms. 19DI (en ligne)[ms 12].
B2 Oxford, Boldeian ms. 264 (en ligne).
B3 Berne, Burgerbibliothek ms. 125 ; a comme les 2 suivants un certificat d'origine[ms 6] et utilise un vocabulaire plus proche du moyen français que de l'ancien français (en ligne).
B4 Paris, BnF ms. 5649 (en ligne)[ms 11].
B5, Genève, BGE ms. 154 (“Voyages de Marc Paul, de Venise aux Indes”, XVe siècle, catalogue en ligne).
C1 Stockholm, Bibliothèque royale (Suède) ms. M304 (en ligne).
C2 Paris, BnF ms. 1880 (en ligne).
C3 Paris, BnF ms. 5219 (en ligne).
D Bruxelles, Bibliothèque royale de Belgique ms. 9309 (en ligne).

En italien :
TA1 Florence, BNCF ms. II.IV.88 (dit l'“Ottimo” ou “della Crusca”)[ms 21].
TA2 Florence, BNCF ms. II.IV.136(en ligne).
TA3 Paris, BnF ms. it .434 (en ligne).
TA5 Florence, BNCF ms. II.II.61 (Bonaguisi, 1392) (en ligne).
V1 Berlin, Staatsbibliothek ms. Ham.424(en ligne).

En latin :
Quelques-uns des manuscrits issus de la rédaction de Pipino[ms 13] :
P2 Berlin, Staatsbibliothek, lat. qu.70 (en ligne).
P10 Gand, Rijksuniversiteit ms. 13 (en ligne).
P11 Giessen (Allemagne), Universität ms. 218 (en ligne).
P34 Paris, BnF lat. 6244 A (en ligne).
P35 Paris, BnF lat. 1616 (en ligne).
P50 Wolfenbüttel, Herzog August Bibliothek ms. 40 (en ligne).
– Px Abbaye de Melk ms. 1094 (en ligne).
– Px Vatican, Bibliothèque palatine lat. 1358 (en ligne).
– Z Tolède, bibliothèque de l'archevêché, ms. Zelada 49.20, et copie à Milan, Abrosiana, ms. Y 160 sup.

Bibliographie

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Principales éditions du Livre

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Frontispice de la 1re édition imprimée (Nuremberg, 1477) : « Ceci est le célèbre chevalier Marco Polo de Venise, le plus grand des voyageurs nous décrit les grandes merveilles du monde qu'il a vues de ses yeux. Du levant au couchant, on n'entendra plus jamais rien de semblable[n 16] ».
 
Page de couverture de la 1re édition du Livre de Marco Polo imprimé en français (libraire Groulleau, 1556).
  • 2018 : J. Blanchard, M. Querueil, Th. Tanase, Marco Polo : Le Devisement du monde, Genève, Droz, (présentation en ligne)
    Édition du ms. F, la compilation initiale, avec une transcription en français moderne.
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  • 2018 : (it) (fr) Mario Eusebi et Eugenio Burgio, Marco Polo, Le Devisement dou Monde, Venise, Ca' Foscari, (lire en ligne)
    Édition du ms. F, la compilation initiale, comportant un tome 2 avec un important glossaire.
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  • 2015 : (it) Ca' Foscari, Le redazioni del Milione, édition critique digitale des universités de Venise et Bologne, Université Ca' Foscari, Venise, (lire en ligne)
    Édition du texte de Ramusio (le meilleur en italien) comparé à 7 autres rédactions[123], par Alvise Andreose, Alvaro Barbieri, Eugenio Burgo, Marina Buzzoni, Antonella Ghersetti, Giuseppe Mascherpa, Fabio Romanini et Samuela Simion.
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  • 2004 : René Kappler, Marco Polo, Le Devisement du Monde, Paris, Imprimerie nationale, 2004.
    Transcription en langue moderne du ms. F, la compilation initiale, ajoutant en italique les compléments fournis par le manuscrit Z. Édition de luxe comportant de nombreuses photographies en pleine page de Roland et Sabrina Michaud.
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  • 2001-2008 : Philippe Ménard et al., Marco Polo, Le Devisement du Monde, Genève, Droz, 6 volumes, 2001-2008 (présentation en ligne)
    Édition critique du manuscrit B1 British Lib. ms. 19 DI, l'une des rédactions corrigées, avec une étude le comparant à d'autres manuscrits et, en annexe, une liste des variantes. Avec la collaboration de t. 1 : Marie-Luce Chênerie, Michèle Guéret-Laferté ; t.2 : Jeanne-Marie Boivin, Laurence Harf-Lancner, Laurence Mathey-Maille , t. 3 : Jean-Claude Faucon, Danielle Quéruel, Monique Santucci ; t. 4 : Joël Blanchard, Michel Quereuil ; t. 5 : Jean-Claude Delclos, Claude Roussel ; t. 6 : Dominique Boutet, Thierry Delcourt, Daniel James-Raoul.
    .
  • 1998 : Pierre-Yves Badel, Marco Polo, La Description du Monde : Édition, traduction et présentation, Le livre de Poche, coll. « Lettres gothiques », 1998.
    Édition du manuscrit B4 Bnf n° 5649, l'une des rédactions corrigées de la série B (très fautive aux ch. 143 sur Yangzhou et ch. 145 sur la bataille de Xiangyang (Saianfu)[124]).
    .
  • 1980 : (it) Ramusio, Viaggi di Marco Polo, gentiluomo veneziano, édité et annoté par Marica Milanesi, Turin, Giulio Einaudi, 1980.
    Réédition des six volumes des Navigazioni e Viaggi de Ramusio avec annotations de Marica Milanesi. Le Livre de Marco Polo est en pp. 947-1070 du 3e volume.
    .
  • 1938 : (en) Arthur Christopher Moule et Paul Pelliot, Marco Polo : The Description of the world, Londres, Routledge, (lire en ligne)
    Traduction en anglais du ms. F, la compilation initiale, intégrant une multitude de variantes[125] prises dans d'autres rédactions (A1, B4, TA1, TA3, LT, VA3, P, VG3, Z, L1, V1, VB2, I, VL, S, Z et R[126]). Oublie de mentionner la suppression du prénom Marco au chapitre sur Xiangyang (Saianfu), qui est pourtant une variante importante. Utilise de façon critiquable le codex Z[127].
    .
  • 1931 : (en) Luigi Foscolo Benedetto (trad. Aldo Ricci, préface de Denison Ross), The Travels of Marco Polo, (présentation en ligne)
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  • 1928 : (it) (fr) Luigi Foscolo Benedetto, Marco Polo - Il Milione, Florence, Olschki, 1928.
    - Édition du ms. F, la compilation initiale, souvent tacitement corrigée[129].
    - Précédé d'une étude en italien sur la « tradition manuscrite » (p. I à CCXXI ; réédité en 1962) analysant et classant les principaux manuscrits disponibles en Europe.
    - Ouvrage par ailleurs à finalité nationale[n 17].
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  • 1871-1903 : (en) Henry Yule, The Book of Ser Marco Polo, Londres, John Murray, 1871, 1875, 1903, 2 volumes (lire en ligne)
    Traduction en anglais de l'édition Firmin Didot / Pauthier[n 18], aménagée avec celles de la Société de géographie et de Ramusio. Nombreuses notes savantes en fin de chapitres. La troisième édition de 1903 comporte une actualisation par Henri Cordier.
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  • 1865 : Guillaume Pauthier, Le Livre de Marco Polo, citoyen de Venise, conseiller privé et commissaire impérial de Khoubilaï-Khaân, Paris, Firmin Didot, 1865, 2 volumes (en ligne: vol. 1, vol 2).
    Édition de la rédaction corrigée, mss. A1 et A2 avec variantes du ms. B4[n 18]. Nombreuses notes savantes illustrées de citations d'auteurs orientaux. Donne en note le texte italien du ch. de Ramusio sur le coup d'État de 1282 (p. 276), et ajoute les ch. supplémentaires du ms. F (p. 740). – Réédition : Slatkine Reprints, Genève, 1978.
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  • 1827 : (it) Giovanni Battista Baldelli Boni, Il Milione di Marco Polo : Testo di lingua del secolo decimoterzo ora per la prima volta Batista Baldelli, Florence, Pagani, (lire en ligne)
    Édition historique du manuscrit TA1 (dit "Ottimo" ou "della Crusca") antérieur à 1310, qui permit d'établir que le Livre avait été écrit initialement en français. (Édition plus récente de TA1 par Ruggero M. Ruggieri, Il Milione, Florence, Olschki, 1986.)
    Le volume II réédite le texte de Ramusio : Il Milione di Messer Marco Polo Viniziano secondo la lezione Ramusiana (en ligne).
    .
  • 1824 : Roux de Rochelle et Dominique Martin Méon, Voyages de Marco Polo, t. 1 de Recueil de voyages et de mémoires, Paris, Éverat, (lire en ligne)
    Édition par la Société de géographie de Paris du ms. F BnF n° 1116, la compilation initiale. Toute première édition d'un manuscrit du Livre de Marco Polo.
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  • 1818 : (en) William Marsden, The Travels of Marco Polo The Venitian, Londres, (lire en ligne)
    Traduction en anglais du texte de Ramusio avec de nombreuses notes savantes. Première édition scientifique du Livre de Marco Polo.
    .
  • 1735 : Marc Paul, Venitien, Les voiages très-curieux & fort remarquables... ou Relation des pais orientaux, dans le second volume des Voyages faits principalement en Asie dans les XII, XIII, XIV et XVe siecles, La Haye, Jean Neaulme, (lire en ligne)
    - Repris de Van der Aa, Recueil de voyages curieux en Perse, en Tartarie et ailleurs, Leyde, 1729 (lire en ligne).
    - Attribue faussement le texte à Pierre Bergeron, comme Van der Aa[130].
    - Contient en fait la traduction (par Nicolas Salcon ?) de la préface et du texte latin d'Andreas Müller[131].
    - Peu fiable[n 15] mais fréquemment publié depuis sa réédition actualisée par Eugène Müller en 1888 (Voyage de Marco Polo, Delagrave, 1888, sur Wikisource).
    .
  • 1559 : Giovanni Battista Ramusio, De i viaggi di messer Marco Polo gentil'huomo venetiano, Venise, Second volume des Navigationi et viaggi, (lire en ligne)
    Réécriture du Livre en italien du XVIe siècle, vraisemblablement à partir d'une copie du latin de Pipino, mais complété avec d'autres sources. Abrégé par rapport au ms. F, la compilation initiale, mais comprenant de nombreuses additions (notamment : histoire de la tentative de coup d'État de 1282, chapitre sur Hangzhou deux fois plus long)[n 19]. De loin la meilleure rédaction en italien.
    .
  • 1556 : Marc Paule gentilhomme Venetien, La description géographique des provinces & villes plus fameuses de l’Inde Orientale, meurs, loix, coustumes des habitans d’icelles, mesmement de ce qui est soubz la domination du grand Cham Empereur des Tartares : Nouvellement reduict en vulgaire françois, traduit du latin par François Gruget, Paris, éd. Groulleau, Longis et Sertenas[132], (lire sur Wikisource et sur Archive)
    Première édition imprimée en français du Livre. Traduite de l'édition latine imprimée dans le Novus Orbis[133], qui fut l'édition la plus lue de la Renaissance. Très abrégé et a cessé d'être référentiel[134],[n 15].

Ouvrages

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  • Les éditions ci-dessus contiennent, dans leur commentaire, les principales informations sur Le Livre de Marco Polo, notamment les éditions de Pauthier et Yule.
  • Pierre Racine, Marco Polo et ses voyages, Perrin, (ISBN 9782262031329).
  • (en) Simon Gaunt, Marco Polo’s Le Devisement du Monde : Narrative Voice, Language and Diversity, Cambridge, Brewer, (présentation en ligne).
  • (en) Hans Ulrich Vogel, Marco Polo Was in China: New Evidence from Currencies, Salts and Revenues, Leiden; Boston, Brill, (lire en ligne).
  • (en) Consuelo Wager Dutschke, Francesco Pipino and the manuscripts of Marco Polo's “Travels”, Los Angeles, University of California, 1993, 1348 pages (lire en ligne) ; dresse une liste de tous les manuscrits (pas seulement de Pipino) et les décrits.

Articles cités

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  • Anonyme, « Marco Polo », dans Encyclopédie des gens du monde, tome XVII, Strasbourg, Treuttel et Würtz, (lire en ligne).
  • Christine Gadrat, « Le Livre de Marco Polo et les géographes de l’Europe du Nord au XVe siècle », dans Henri Bresc et Emmanuelle Tixier du Mesnil, Géographes et voyageurs au Moyen Âge, Nanterre, Presses universitaires de Paris Nanterre, (ISBN 9782840160663, lire en ligne), p. 147-162.
  • Christine Gadrat, « Le rôle de Venise dans la diffusion du livre de Marco Polo (XIVe -début XVe siècle », Médiévales, no 58,‎ (lire en ligne).
  • Jacques Heers, « De Marco Polo à Christophe Colomb : Comment lire le Devisement du monde ? », Journal of Medieval History, vol. 10, no 2,‎ (lire en ligne).
  • Julius Klaproth, « Observations ajoutées (à la première notice de Paulin Paris sur la relation originale de Marc Pol) », dans Nouveau journal asiatique: ou recueil de mémoires, d'extraits et de notices relatifs aux études orientales, Volume 12, (lire en ligne), p. 252-254.
  • Jean-François Kosta-Théfaine, « Du récit de voyage et de sa mise en image : l'exemple du manuscrit de New York (Morgan Library, M.723) du Devisement du Monde de Marco Polo », dans Jean-Loup Korzilius, Art et littérature: le voyage entre texte et image, Rodopi, (lire en ligne), p. 31-59.
  • Robert Lopez, « Nouveaux documents sur les marchands italiens en Chine à l'époque mongole », Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, vol. 121, no 2,‎ , p. 445-458
  • Philippe Ménard, « Le prétendu “remaniement” du Devisement du monde de Marco Polo attribué à Grégoire », Medioevo romanzo, no 22,‎ .
  • Philippe Ménard, « L'édition du Devisement du Monde de Marco Polo », Comptes rendus des séances de l'Académie des inscriptions et Belles-Lettres, nos 149-1,‎ , p. 407-435.
  • Philippe Ménard, « Marco Polo à la découverte de l’Extrême-Orient », Académie Stanislas, Nancy,‎ , p. 22-47 (lire en ligne [PDF]).
  • Paulin Paris, « Nouvelles recherches sur les premières rédactions du Voyage de Marco Polo », Nouvelles Annales des Voyages et des sciences géographiques, vol. 4,‎ 1850, p. 129 (lire en ligne).
  • Joseph Petit, « Un capitaine du règne de Philippe le Bel : Thibaut de Chepoy », Le Moyen Âge, Paris: Bouillon,‎ 1897, 2e série, t. 1 (lire en ligne).
  • Charles Athanase Walckenaer, « Marco Polo », dans Vies de plusieurs personnages célèbres, Laon, Melleville, Livre 4e, 2e section, (lire en ligne).
  • (en) Alvise Andreose, « Marco Polo’s Devisement dou monde and Franco-Italian tradition », Francigena, vol. 1,‎ (lire en ligne).
  • (it) Alvise Andreose, Chiara Concina, « A monte di F e f. Il Devisement dou monde e la scripta dei manoscritti francesi di origine pisano-genovese : Collana diretta da Antonio Pioletti, colloqui 14 », Medioevo Romanzo e Orientale,‎ (lire en ligne).
  • (it) Chiara Concina, « Prime indagini su un nuovo frammento franco-veneto del Milione di Marco Polo », Romania, vol. 125,‎ , p. 342-369 (lire en ligne).
  • (it) Luciano Petech, « Marco Polo e i dominatori mongoli della Cina », dans Sviluppi scientifici de L. Lanciotti, Florence, Olschki, . -->

Notes et références

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Notes sur les manuscrits

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  1. a et b ms. F : « Adonc dirent les 2 frères et leur fils messire Marc: Grand sire nous avons... Adonc messire Nicolau et son frère et son fils qui avaient en leur suite... ».
    - A et C : « Si dirent messire Nicolo Polo et messire Matteo au Grand Kaan qu'ils feraient s'il lui plaisait engins... Donc les deux frères firent préparer des madriers et firent faire... ».
    - Ramusio : « Il che venuto ad orecchie di messer Nicolò et di messer Maffio fratelli... si profersero di far fare mangani al modo di Ponente... Questa espeditione fatta cosí presta crebbe la riputatione et credito a questi duoi fratelli venetiani appresso il Gran Can et tutta la corte. ».
  2. a et b Incipit des manuscrits en français :
    F et A1 : Ci commence les rubriques de ce livre qui est appelé le devisement du monde.
    A2 : Ci commence le Livre de Marc Paule des merveilles d'Asie la grande et d'Inde la grande et mineure, et des diverses régions du monde.
    A4 : Cy commence le Livre de Marc Paule des merveilles d'Aise la grant et de Ynde la majour et mineur.
    B1, B2 : Ci commence le Livre du Grand Kaan qui parole de la grande Arménie, de Perse et des Tartars et d'Ynde et des grandes merveilles qui sont par le monde.
    B3 : Cy commence le [livre du] Grand Kaan qui devise les grandes merveilles qui sont en la terre d'Ynde.
    B4 : Cy commence le Livre du Grand Kaan de Cathay qui devise des grandes merveilles qui sont en la terre d'Inde.
    C1, C2, C3 : Pas de titre, commence par Pour savoir la pure vérité.
    D : Cy commence par table toutes les rubriques de ce livre nommé le Livre Messire Marc Pol citoyen de Venise croyant en Jesucrist auquel livre sont déclarées et contenues plusieurs grandes merveilles de aucunes parties du monde.
  3. Voir en ligne.
  4. En « françois », répété dix fois dans le ms. F : en ses ch. 23, 31, 47, 50, 64, 74, 86, 151, 152 et 200.
  5. a et b Langue d'oïl est incidemment précisé au ch. 178 du ms. F : « Comant, feist le filz au roi, donc morent tuit les homes ? Oïl voiremant, font celz (Comment, dit le fils du roi, donc tous les hommes meurent ? Oui vraiment...) » (lire en ligne).
  6. a b c et d Le certificat d'origine avec dédicace authentifiant la rédaction corrigée est daté de 1307. Il figure dans les mss. B3 (en ligne), B4 (en ligne) et B5 :
    « Voici le livre que monseigneur Thiebault, chevalier, seigneur de Cepoy, que Dieu absolve, requit qu'il en eut la copie de sire Marco Polo ... pour honneur et révérence au très excellent et puissant prince Monseigneur Charles, fils du roi de France et comte de Valois ... Ce fut fait l'an mille trois cent et sept. »
    – Ce certificat d'origine a été publié la première fois par Mardsen, p. lxvii en 1818 puis par Pauthier, p. 1.
    N.B. Ce qui « fut fait en 1307 au mois d'août » est la rédaction corrigée à l'origine des mss. B, et non « la toute première copie » sur parchemin luxueux officiellement remise plus tard à Charles de Valois, probablement en mars 1312 (J. Petit, p. 236 et 238).
  7. a et b Des récits ou informations non inclus dans la compilation initiale se trouvent dans les mss. suivants (voir Dutschke 1993, p. 281) :
    V1 : Berlin, Deutsche Staatsbibliothek, Ham. 424.VB : Venice, Museo Civico Correr, Dona dalle Rose 224.VB1 : Rome, Bibl. Apost. Vaticana, Barb. latin 5361.VB2 : London, British Library, Sloane 251.
    L : Ferrara, Bibl. Comunale Ariostea, MS Cl. II, 336.L1 : Venice, Museo Civico Correr, Cicogna 2048.L2 : Wolfenbuttel, Herzog-August-Bibl., Weissenb. 41.L3 : Antwerp, Museum Plantin-Moretus, M 16.14.L4 : Bloomington, Ind. Univ., Lilly Lib., Allen (s.n.)ms. Z et Ramusio enfin.
    - Un exposé des innovations de plusieurs de ces rédactions est donné par l'édition digitale de Ca' Foscari : Ramusio e la tradizione del “Milione”.
  8. a et b Éditions du ms. F : Société de géographie 1824. – Benedetto 1928. – Eusebi-Burgio 2018. – Blanchard et al., 2019.
    - Gabriella Ronchi, Le Divisament dou Monde - Il Milione nelle redazioni toscana e franco-italiana, Milan: Mondadori, 1982.
  9. a et b Les codes “FA”, “FB” et “FC” sont une réminiscence de la codification de Benedetto en “FGA”, “FGB” et “FGC” voulant signifier, à tort, que ces mss. étaient issus d'un « remaniement » par un copiste nommé Grégoire.
    - Ph. Ménard a supprimé ces préfixes inutiles (voir ci-dessus).
  10. a b et c Édition des mss. A1 et A2 : Firmin Didot / Pauthier, 1865 (comporte aussi des variantes de B4).
  11. a et b Éditions du ms. B4 : Badel 1998 (Pauthier, 1865, met aussi en lumière les variantes intéressantes du ms. B4).
  12. a et b Éditions du ms. B1 : Ph. Ménard 2001-2008.
  13. a et b Arlima.
  14. L'édition digitale Ca'Foscari publie face à face le texte de Ramusio et celui du codex Z pour les comparer (lire en ligne).
    - Cette présentation montre que dans Z manquent 59 des 132 chapitres des deux premières parties de Ramusio (manquent : ses ch. I-1, 2, 7, 10, 13, 15, 17, 19, 21, 24, 32, 34-37, 40, 42-51, 54-55 – ch. II-1, 2, 6-8, 10-11, 20-21, 31, 34-42, 44-46, 49, 53-55, 62-64, 67-68).
  15. Le Prologue (ch. 1 à 18[n 5])est réduit à quelques mots. Ne dit rien des deux voyages. Prétend faussement que Marco vécut en Asie depuis son enfance (“ab infancia sua”) et qu'il serait allé en Chine en partant de Boukhara. Puis il omet : l'histoire de Gengis Khan et des Mongols. Leurs conquêtes, leurs coutumes, leur ville (Karakorum). La Sibérie jusqu'à l'océan Arctique. Les faits du Grand Khan et empereur de Chine Khubilai : sa guerre, son portrait, ses femmes, ses fils, ses villes (dont Pékin). Ses fêtes et chasses somptueuses. Ses charités. Son gouvernement et ses ministères. Son papier-monnaie. Il omet encore la bataille contre les éléphants du roi de Birmanie. La remontée vers Pékin et la descente par le Shandong, ainsi que l'important ch. 138 sur l'empire Song et sa conquête. Quant aux missions des Polo en Chine, il omet : l'ambassade au pape des parents Polo et leur rôle dans l'importation des perrières (ch. 7 et 145), le succès et la titularisation de Marco (ch. 15-16) ainsi que ses diverses missions (sauf celle à Yangzhou, ch. 143, où Z dit de façon ambiguë qu'il y eut « officium prefecture »).
  16. Dans l'Édition digitale Ca'Foscari, sans les titres et les sous-titres, R comporte moins de 81 000 mots, alors que ms. F comporte près de 105 000 mots.
  17. Les enluminures du manuscrit A2 sont visibles en ligne aux folios 1r , 2r, 2v , 3r, 3v, 4r, 4v, 5r, 6r, 7r, 8r, 9r, 10r, 10v, 11v, 12r, 12v, 13v, 14v, 15v, 16v, 18r, 18v, 20v, 21v, 23r, 80r, 82r, 83r, 84r, 85r, 86v, 87r, 88r, 89v, 91r, 92 ?r, 93v, 95v, 17r, 19v, 22v, 24r, 25v, 26r, 27r, 28r, 29v, 30v, 31v, 33r, 34r, 36r, 37r, 38r, 39r, 40r, 41r, 42r, 44r, 45r, 46v, 47v, 49r, 50r, 51r, 52v, 54r, 55v, 58r, 59r, 59v, 61r, 62v, 64r, 67r, 69r, 71r, 72r, 73v, 74v, 76v, 78r.
  18. Miniatures en ligne sur la Boldeian.
  19. Le ms. A3 est considéré comme déviant par rapport aux autres mss. A.
    - Benedetto 1928, p. lxxiii : A3 et D doivent dériver du même modèle ... ils aggravent identiquement les erreurs. ... La valeur propre du ms. A3 est quasiment nulle. Cette copie est pleine d'absurdités ; les noms géographiques et les parties techniques sont volontairement évités ... lacunes importantes.
    - Il a été proposé de le reclasser avec D (Huang Thi, Édition critique de la version française du Livre de Marco Polo, thèse de l'École des Chartes, cote: AB/XXVIII/413, 1967, p. 55).
    - A3 et D mentionnent fautivement le prénom Marco au ch. 145 sur Xiangyang (Saianfu).
  20. Édition des 50 premiers ch. du ms. A4 : Jean-François Kosta-Théfaine, Étude et édition du manuscrit de New York du Devisement du Monde de Marco Polo (référence en ligne).
  21. Édition du ms. TA1 : Ruggero M. Ruggieri, Il Milione, Florence: Olschki, 1986.

Autres notes

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  1. La Sibérie et le Grand Nord russe étaient soumis aux Mongols[1]
  2. Ouvrages importants avant M. Polo : Villehardouin, La conquête de Constantinople, 1213 ; Latini, Le livre du trésor, 1265. – La Vie de saint Louis de Joinville est postérieure : 1309, de même les Chroniques de Froissart : 1380. – La Chronique de France tenue à l'abbaye de Saint-Denis n'est traduite en français qu'à partir des années 1270 et restera rédigée en latin jusqu'en 1340. – Quant aux « romans » courtois, c'étaient des épopées versifiées et non en prose.
  3. Le nombre de chapitres est restreint dans beaucoup de mss. qui souvent omettent la quatrième partie.
    - Quant au mode de numérotation des chapitres, il varie selon les éditions. Pour une table comparative, voir Moule & Pelliot, p. 504-507 (en ligne).
  4. Rustichello da Pisa est le nom admis depuis l'édition du Livre par L. F. Benedetto, Il Milione en 1928.
    Antérieurement, en Italie, il était nommé Rusticiano ; ainsi, entre autres, par Vincenzo Lazari (I viaggi di Marco Polo, Venise, 1847) et dans The New Arthurian Encyclopedia (J. L. Norris, art. « Rusticiano da Pisa », Garland, New York, 1991, p. 392, lire en ligne).
  5. a b c d et e Sauf indication contraire, les numéros de chapitre sont ceux du ms. A1 tels que repris par Pauthier, par Ph. Ménard et, jusqu'au ch. 165, par Eusebi. Cette numérotation va de 1 à 200.
  6. Après le Corridor du Wakhan (ch. 49), les Polo passent plutôt par le Petit Pamir selon Nicolas Severtzov, Les anciens itinéraires à travers le Pamir, Paris, Bulletin de la Société de géographie, 1890 (en ligne).
  7. a et b Attention au mot merveille : il ne signifiait autrefois que 'étonnant' ou 'extra-ordinaire' et non surnaturel (ce qui est surnaturel est un « miracle »), et il n'était pas forcément positif : au ch. 107, le roi d'Or « moult se merveilles » quand ses écuyers lui mettent l'épée sous la gorge.
    Blanchard et al., 2018, Introduction : « Même si le mot merveille et ses dérivés sont fréquents dans le texte [il n'a pas le] sens que lui assigne la critique littéraire : un surnaturel assumé comme tel ».
  8. Avoir seigneurie, dans Livre, signifie avoir pouvoir ; exemple : un cavalier est seigneur de son cheval ; ch. 73 : « la seigneurie est aux chrétiens » signifie que des cadres chrétiens administrent pour le khan ; ch. 80 : « celui qui a seigneurie de 100 hommes a table d'argent » ; ch. 95 : « les grandes seigneuries » sont les ministères du gouvernement ; passim : les villes chefs-lieux ont seigneurie sur celles de leur circonscription.
  9. En ancien français, devisement signifie « Description, récit, narration » selon le DMF, ou selon Godefroy : « Division, partage, stipulation, parole, conte, entretien ».
  10. a et b Ch. 18 : le Grand Khaan « les chargea de messagerie au pape et au roi de France et au roi d'Angleterre, et au roi d'Espagne, et aux autres roys de crestienté ».
    - Le Livre était une façon de remplir cette mission.
  11. Thibaut de Cepoy signe un traité avec Venise en décembre 1306 (J. Petit, 1897, p. 232). Sa rencontre avec M. Polo, spécialiste de l'Orient, s'inscrit dans le cadre de ses négociations en vue de sa campagne de Grèce.
    - Cette campagne menée officiellement pour le compte de Charles de Valois, en fait financée principalement par le gouvernement de Paris et partiellement par l'évêché de Chartres (J. Petit, 1897, p. 233), sera un échec en dépit de la gloire de ce personnage : Grand arbalétrier de France, héros en Guyenne et en Flandre, il avait même été annoncée à Venise par une bulle du pape datée de janvier 1306 (voir Henri Moranvillé, Les projets de Charles de Valois sur l'Empire de Constantinople, Bibliothèque de l'école des chartes, 1890, t. 51, p. 68-69 ; en ligne).
  12. a et b Le certificat d'origine des ms. B nous apprend qu'outre la copie officielle donnée à Charles de Valois, Jean de Cepoy a donné d'autres copies « à ses amis qui l'en ont requis » ; dès 1312 Mahaut d'Artois en achète une pour elle (J.-M. Richard, Une petite nièce de saint Louis, Mahaut d'Artois, Paris: Champion, 1887, p. 101, lire en ligne).
  13. Benedetto en 1928 reléguait les mss. A, B, C, D au rang de « remaniement » non autorisé dû à un copiste nommé Grégoire par cet artifice : une lecture erronée d'un mot de l'incipit, contrescris (recopier)   lu contrefais, justifiant de placer devant les codes A, B, C, D le préfixe "FG" signifiant “français contrefait par Grégoire”[92].
    Pourtant, il reconnaissait que les mss. A, B, C, D constituent « la plus belle famille de manuscrits marcopoliens que nous possédions aujourd’hui[93] ».
  14. Sur Thibaut de Cepoy, brillant capitaine de Philippe le Bel, voir J. Petit, 1897.
    - Thibaut reste de 1306 à 1308 en Italie, y est rejoint par son frère et son fils, Jean de Cepoy, lequel jouera ensuite un rôle majeur dans la diffusion du Livre en France.
  15. a b et c Dans les premières traductions en français, on note cette erreur dès les premières lignes du ch. 1 : la ville de Soudak/Soldadie placée en Arménie ! Cette erreur se retrouve dans les éditions en latin de Gerard Leeu (1484), du Novus Orbis (1532) et d'Andreas Müller (1671), et sera reprise, comme d'autres erreurs manifestes, dans les traductions françaises plus tardives : non seulement dans le Faux Bergeron de 1735 mais même dans l'édition d'Eugène Muller en 1888. – Cette erreur était apparemment dans le texte même de Pipino (on la trouve dans les éditions de Prasek, p. 7 et de Ca' Foscari).
  16. « Das is der edel Ritter Marcho Polo von Vendig der grost landfahrer, der uns beschreibt die grossen wunder der welt die er selber gesehen hat. Von dem aufgang bis zu dem nydergang der sonne der gleychen vor nicht meer gehort seyn. »
  17. Dédicacé « À S. E. le Ministre de l'Éducation publique Pietro Fedele (en) qui a facilité la mise en œuvre de cette recherche, noblement sensible à la finalité scientifique et nationale qui l'a inspirée. »
    - Pietro Fedele, membre du Grand Conseil fasciste mussolinien, avait financé ses voyages en Europe pour étudier les manuscrits.
  18. a et b Attention : chez Pauthier et Yule les sigles A, B et C correspondent respectivement aux ms. A1, A2 et B4.
  19. Les additions de Ramusio ne sont pas toujours fiables. Ainsi (ch. 36, Ramusio I.15) : « Ormus, che è posta in isola vicina alla terra (Ormuz qui est située sur une île près du continent) », alors qu'il s'agissait de l'Ormuz ou Hormos encore sur le continent (Yule-Cordier 1903, p. 110).
    - Pour une appréciation raisonnée des additions et modifications opérées par Ramusio, voir Yule-Cordier 1903, Introduction, p. 97 et suivantes (lire en ligne).

Références

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  1. a et b Stephen Pow, The Mongol Empire’s Northern Border: Re-evaluating the Surface Area of the Mongol Empire, Genius loci, Laszlovszky 60, Budapest: Archaeolingua, 2018 (lire en ligne).
  2. Ph. Ménard 2001-2008, vol. 1, p. 89-90.
  3. Jusqu'à 1298. Ch. 75 (lire en ligne).
  4. Ch. 92 (lire en ligne).
  5. a et b Ph. Ménard 2001-2008, vol. 1, p. 96.
  6. Rédaction de Ramusio : « Ces dames sont très talentueuses (molto valenti) et ont un grand savoir-faire en flatteries et caresses, et en paroles vives accordées à chaque genre de personne ; en sorte que les étrangers qui les ont goûtées une fois demeurent comme hors d'eux, et tellement épris de leur douceur et agréments qu'ils ne peuvent jamais les oublier... » (ch. II-68 [§24], lire en ligne).
  7. Cocasse : notamment la couvade (ch. 119). Piquantes : mœurs d'origines tibétaines (Hami, ch. 58 - Tibet, ch. 114 - Xichang, ch. 116).
  8. (en) Leonardo Olschki : « Cette interprétation romanesque de Polo comme commerçant médiéval doit être réexaminée à la lumière des faits … il est très difficile de découvrir chez Marco Polo un commerçant au sens professionnel ou romanesque du mot. Il ne se présente jamais comme tel dans son livre » (Marco Polo's Asia, Berkeley: University of California, 1960, p. 97, lire en ligne).
  9. (en) John Larner : « Qui chercherait dans ce livre la narration d'un explorateur héroïque serait sérieusement déçu … On peut conclure que son livre n'est pas l'œuvre d'un marchand vénitien sur le commerce en Orient » (Marco Polo and the Discovery of the World, New Haven: Yale University, 1999, pp. 68, 74).
  10. Jacques Heers : ‘Marco Polo acquiert en Chine d'autres expériences, et même une personnalité... qui se démarque bien de l'image traditionnelle du négociant occupé de commerce’ (Marco Polo, Fayard, 1983, p. 226).
  11. Luciano Petech : « sa carrière ne fut pas vraiment celle d'un marchand, mais plutôt d'un administrateur, ou si l'on veut, d'un gentilhomme au service de Qubilai. Il ne parle presque jamais de ses affaires » (Les marchands italiens dans l'empire mongol, Journal asiatique, t. 250, 1962, p. 552).
  12. Charles Athanase Walckenaer :Vies de personnages célèbres, et Histoire générale des voyages, Paris, Lefrèvre, 1826, tome 1, p. 52 (lire en ligne).
  13. Le Livre de Marco Polo, ch. 21 (lire en ligne).
  14. Le Livre de Marco Polo, ch. 101 (lire en ligne).
  15. Le Livre de Marco Polo, ch. 59 (lire en ligne).
  16. Ph. Ménard 2001-2008, vol. 1, p. 92.
  17. Luciano Petech, Marco Polo e i dominatori mongoli della Cina, in Sviluppi scientifici de L. Lanciotti, Florence: Olschki, 1975, p. 24.
  18. a et b Ch. 16 : « Marco Polo demeura dans l'entourage du seigneur bien 17 ans, toujours allant et venant de çà et de là en messagerie par diverses contrées, là où le seigneur l'envoyait » (lire en ligne).
  19. a et b Petech 1975, p. 24 : les Envoyés (Chū shǐ, 出使) du Palais impérial avaient « qualité et prérogatives d'émissaire impérial, avec droit d'utiliser les relais impériaux et droit d'exiger l'obéissance de l'autorité locale ».
  20. a et b (it) Ramusio 1559, II.8 (lire sur wikisource avec traduction automatique par Google).
  21. Pauthier, p. XIII (lire en ligne).
  22. Ph. Ménard 2001-2008, vol. 4, p. 34.
  23. Ch. 145 : « Si dist messire Nicolas Pol et messire Maffe au Grant Kaan, qu'ilz feroient se il lui plaisoit engins par lesquelz ilz feroient tant que la cité se rendroit... » (lire en ligne).
  24. Pauthier, tome 2, p. 576.
  25. Chapitre 189 : « n'ont nulles oreilles mais là où l'oreille doit estre, a un petit cornet ». – « Il faudrait dire “sans pavillon de l’oreille” : en effet, le conduit auditif, l’oreille moyenne et l’oreille interne subsistent... J’ai en effet trouvé, au Musée de l’école vétérinaire de Lyon, une tête de mouton chez qui les deux pavillons de l’oreille étaient absents, mais, sous la peau, des deux côtés, le cartilage conchylien était représenté par une petite lame roulée en anneau de 1 cm de long » (Felix Regnault, Lapin né avec absence d'un pavillon d'oreille, Bulletins et Mémoires de la Société d'anthropologie de Paris, VIe série, tome 2, 1911, p. 185 ; en ligne). »
  26. Ph. Ménard 2001-2008, vol. 6, p. VIII-IX.
  27. Ramusio 1559, ch. II.62 : « Cette espeditione, exécutée si promptement, augmenta la réputation et le crédit de ces deux frères vénitiens auprès du Grand Khan et de toute la cour. »
  28. Pauthier, p. 511 trouve 295 T d'argent fin (65 520 000 francs à 4,5 g d'argent fin).
  29. Évaluation haute des recettes du royaume de France sous Louis IX par Natalis de Wailly : 235 285 livres parisis, équivalant à 23,8 T d'argent fin (Les dépenses et recettes ordinaires de saint Louis, 1855, p. LXXVI ; lire en ligne).
  30. Démonstrations par Pauthier 1865, p. 510, et par Vogel 2013, p. 365, ch. 6.
  31. Atrocité confirmée par d'Ohsson et Pétis de la Croix.
  32. Morris Rossabi : “exagération destinée à renforcer son ego et à le présenter comme une figure plus importante de l'histoire des Yuan qu'il ne le fut réellement” (lire en ligne).
  33. Moule & Pelliot, p. 26 : “faute grave sinon mensonge”.
  34. Yule-Cordier 1903: “sans aucun doute une énorme exagération” (lire en ligne).
  35. Lire en ligne.
  36. Pauthier, p. 510.
  37. Vogel 2013, p. 365, ch. 6.
  38. Pauthier, p. 512.
  39. Particulièrement Frances Wood dans Did Marco Polo go to China?, ouvrage réfuté.
  40. Philippe Ménard, Discussion des idées fausses récemment avancées, (en ligne).
  41. Jacopo d'Aqui dans son Chronicon imaginis mundi (c. 1335) : « Non scripsi mediantem de his quœ vidi ». — Cité par Pauthier, t. 2, p. 767 (en ligne).
  42. Chapitre 18 : Avant leur départ de Chine, le Grand Khan « les chargea de messagerie au pape et au roi de France et au roi d'Angleterre, et au roi d'Espagne, et aux autres rois de chrétienté ».
  43. Ch. 8 : « partout où ils allaient, ils étaient servis et honorés de tout ce que besoin leur était et qu'ils pouvaient commander. Et avaient cela par la table de commandement du Seigneur qu'ils avaient. »
    -Voir le ch. 80 pour la description des différentes tables de commandement.
  44. Beau palais, lits bien fournis de riches draps de soie, un roi y serait bien reçu : lire en ligne.
  45. Bertold Spüler, La situation de l'Iran à l'époque de Marco Polo, dans Oriente Poliano, Istituto italiano per il Medio ed Estremo Oriente, Rome, 1957 p. 121.
  46. Heers 1984, p. 126 et suivantes.
  47. Le Livre de Marco Polo, ch. 16 (lire en ligne).
  48. Constantin de Skatschkoff, Le Vénitien Marco Polo et les services qu'il a rendus en faisant connaître l'Asie, Journal asiatique, août-sept. 1874, p. 137 : « que Marco Polo ait fait une foule de descriptions d'après des écrits chinois, c'est ce dont je suis persuadé ; car, en Chine, jusqu'à présent, dans les très anciennes descriptions de l'Inde et des pays d'outre-mer, on ne trouve ni plus ni moins de renseignements que dans le livre de Marco Polo » (lire en ligne).
  49. Yule-Cordier 1903, Introduction, p. 120, où est aussi reproduit un dessin des Nuages de Magellan que M. Polo avait décrit à d'Abano.
    - Pietro d'Abano, Conciliator... (Conciliateur des différences entre philosophes et médecins), 1310 (lire en ligne l'édition attribuée à Bergomense, Venise, 1496, figurant aussi le dessin des Nuages de Magellan).
  50. (en) Leonardo Olschki, Marco Polo's Asia, Berkekey, Université of California, , p. 147 (en ligne).
  51. (en) Stephen Haw, Marco Polo's China : A Venetian in the real of Khubilai Khan, New York, Routledge, (présentation en ligne), p. 127.
  52. Heers 1984, Il cite comme justification Polycarpe Chabaille (de) et Francis Carmody qui ont étudié Li Livres dou Tresor de Brunetto Latini ; Enrico Narducci pour La Composizione Del Mondo de Restoro d'Arezzo, 1859 ; Charles-Victor Langlois pour La Connaissance de la nature et du monde d'après des écrits français, 1927.
  53. ‘The most noble and famous travels of Marcus Paulus, one of the nobilitie of the state of Venice, into the east partes of the world, as Armenia, Persia, Arabia, Tartary, with many other kingdoms and provinces’ (lire en ligne).
  54. Il Milione est l'abréviation de : Libro di messer Marco Polo da Vinegia che si chiama Melione (Livre de Marco Polo de Venise surnommé Million).
    - Apostolo Zeno : « Le titre Milione a été donné improprement au Livre de Marco Polo. C'était un surnom appliqué à lui-même et qui passa ensuite aux descendants de sa Maison » (annotation de Biblioteca dell'eloquenza italiana di monsignore Giusto Fontanini, vol. 2, 1753, p. 186 ; en ligne).
  55. Voir ses œuvres sur Arlima.
  56. Latini,Li Livre dou Tresor (1265) : “Et si quelqu'un demandait pourquoi mon livre est écrit en langue romane selon le langage des Français, puisque nous sommes Italien, je dirais que c'est pour deux raisons : l'une, car nous sommes en France, et l'autre parce que ce parler est plus agréable et plus commun à toutes gens” (lire en ligne).
  57. a et b Censure notamment de l'histoire jugée hétérodoxe des Rois mages selon une tradition iranienne au ch. 30.
  58. Libri, Histoire des sciences mathématiques en Italie, tome 2, Paris, Renouard, 1838, p. 119 (en ligne).
    - Libri cite comme autres œuvres italiennes écrites en français : Li livres dou tresor de Brunetto Latini, Les Estoires de Venise de Martino Canal, le Traité des vices et des vertus par Guillaume de Florence, le traité Régime du corps d'Aldebrandin de Sienne.
    - Voir aussi : Wikipedia: Les auteurs italiens et le français.
  59. Pauthier, p. LXXXIII : « librum in vulgari gallico composuit »..
  60. Jean Lebeuf, L'état des sciences en France, depuis la mort du roy Robert, arrivée en 1031, jusqu'à celle de Philippe le Bel, arrivée en 1314, Paris, Lambert et Durand, 1741, p. 177 (en ligne).
  61. Baldelli Boni, 1827, p. XII-XVIII, CXXIIII, CXXV, CXXXI et passim.
    - Pour une vue de l'ignorance où l'on était avant Baldelli Boni, voir De la Langue Originale de cette Histoire dans la préface au Livre rédigée par André Müller Greiffenhag et publiée sous le nom de Bergeron, t. 2, en 1735 (en ligne).
  62. Baldelli Boni, 1827, p. 12, où est épinglé cette bévue amusante : le traducteur au ch. 22 rend « David melic, qui veut dire en français David roi » par « David Melic, cioè a dire in francesco David re », alors qu'il aurait dû traduire in italiano ; répétition de la même bévue aux ch. 30, 40, 46, 49, 63, 85, 150, 151 et 170.
  63. D'Avezac, Un mot sur la langue en laquelle a été écrite la relation originale de Marc Polo, Bulletin de la Société de géographie de Paris, 1841, pp. 117-120 (en ligne).
  64. Encyclopédie 1842, p. 315.
  65. Barthélemy Saint-Hilaire, Le Livre de Marco Polo (recension de l'édition Firmin Didot-Pauthier, Journal des savants, janvier 1867, p. 9, lire en ligne).
  66. a et b Paulin Paris 1850, p. 139 : « Mauvais patois français ».
    - Ph. Ménard, 1998, p. 350 : « à chaque phrase les mots se trouvent estropiés, les règles de la déclinaison et de la conjugaison bafouées ».
    - Ph. Ménard, 2005, p. 409 : « Les mots sont fréquemment déformés. Le copiste juxtapose allègrement un substantif pluriel et un adjectif singulier ou vice versa. Les désinences verbales sont particulièrement maltraitées. »
    - Blanchard et al., 2018, Introduction : « la langue du manuscrit (F) prend une totale liberté vis-à-vis des usages de la langue française de son époque » ; « la gestion des pronoms personnels est plutôt anarchique » et les « formes verbales passablement exotiques ».
  67. Vincenzo Lazari : « nos terminaisons (italiennes) et parfois nos mots reviennent souvent parmi les phrases françaises » (I Viaggi di Marco Polo Veneziano, Venise, 1847, p. XXXVI, en ligne).
  68. Ph. Ménard, 2005, p. 409 : « Le fond du texte est constitué par du français, mais l’œuvre est parsemée de traits italiens. »
  69. Andreose, Franco-Italian tradition, 2015, « the work was first written (in) an Old French heavily sprinkled with morphological as well as lexical Italianisms ».
  70. J. Petit, 1897, p. 231 et suivantes.
  71. Sous la plume du père jésuite Charles Cahier traduisant une critique « d'un docte Italien, et fort bon patriote » (J. Bianconi), publiée dans les Études religieuses, historiques et littéraires, t. 8, Paris: Douniol, 1866, p. 396 (lire en ligne).
  72. Benedetto 1928, p. XI, “La redazione franco-italiana”.
  73. Voir Data BnF et Lorenzo Renzi et Alvise Andreosi, Manuale di linguistica e filologia romanza, Bologne: Mulino, 9e édition: 2015.
  74. Andreose, Franco-Italian tradition, 2015, p. 277 : « what we can say with certainty is that the label of ‘Franco-Italian’ appears to be unfit ».
  75. Simon Gaunt 2013, p. 15 : « ‘Franco-Italian’ is in some respects a misleading designation for the language of BnF fr. 1116 (though the text is in a form of French mixed with Italian, and the manuscript itself is from Italy) ».
  76. Benedetto 1928, p. XXX.
  77. Concina, fragments, « si erano originati un testimone franco-veneto (F) ».
  78. Andreose, Franco-Italian tradition, 2015.
  79. Andreose, Concina, 2015, p. 32.
  80. Philippe Ménard, Deux nouveaux folios inédits d’un fragment franco-italien du 'Devisement du monde' de Marco Polo, Medioevo romanzo : 2, 2012, p. 258 : « L’appellation “frammento franco-veneto” donnée sans justification par C. Concina paraît discutable. Il n’y a pas ici prolifération de traits de la scripta vénitienne. »
  81. Le Roman du roi Artus, dont on remarque que les premiers mots sont quasi identiques à ceux du ms. F).
  82. Sur le scriptorium pisan de Gênes :
    - Florent Coste, La connaissance des langues mène-t-elle à la sagesse ?, dans Chandelier et Robert, Savoirs profanes dans les ordres mendiants en Italie (XIIIe-XVe siècle), École française de Rome, 2023, pp. 581-603, § 26 sq. (lire en ligne).
    - F. Zinelli, The French of Italy between Structuralism and Trends of Exoticism, dans Morato et Schoenaers, Medieval Francophone Literary Culture Outside France, Tunrhout, 2019, p. 62‑63.
  83. Paulin Paris 1850.
  84. Paulin Paris 1850, p. 141 : « Les phrases obscures et les contradictions nées de la rapidité d’une première rédaction furent même soumises à la décision souveraine de Marco Polo ».
  85. Voir Pauthier : p.xcv: Tatar - p.28 note 4 - p.40 n.1 - p.52 n.1 - p.80 n.6 - p.95 n.2 - p.97 n.1 - p.111 n.6 - p.130 n.2 - p.214 n.3 - p.217 n.4 - p.275 n.5 - p.311 n.1 - p.386 n.2 - p.389 n.m - p.409 n.1 - p.527 n.5 - p.587 n.6 - p.703 n.2.
  86. Pauthier, p. xciii : « Trompé par la notoriété qu'on lui avait donnée (ms. B4), en laissant les deux autres dans l'oubli, nous l'avions d'abord entièrement copié pour le publier, lorsque, en voulant le collationner avec les manuscrits (A1) et (A2), nous nous aperçûmes que ces deux derniers, quoique plus anciens, et d'un style en apparence plus vieilli, lui étaient de beaucoup supérieurs ; ce qui nous fit recommencer complétement notre tâche. ».
  87. Yule-Cordier 1903, p. 94 de l'Introduction : Le ms. B4 “représente une forme plus ancienne de l'œuvre que” A1 et A2..
  88. B maintient des inexactitudes corrigées dans A1 et A2, dont : Le prénom Marco à Xiangfan (ch.145). Tartar au lieu de Tatar (passim). Langue turquoise au lieu de tartoise (ch.7). Le roi de Géorgie toujours appelé David (ch.22). Larrons (voleurs) au lieu de barons (ch.84). Des coquillages au cou des chiens (!) pour des cauris monnaie (ch.117). Celui de qui traite ce livre (ch.143). Le port de Fuzhou confondu avec celui de Quanzhou (ch.155). Un soi-disant fleuve qui est la mer Rouge (ch.188).
  89. Luigi Foscolo Benedetto (it).
  90. Benedetto-Ricci, lire en ligne.
  91. « Schéma simplifié » de cette théorie dans Gadrat 2010, p. 65.
  92. Benedetto 1928, p. xxxiv : un « rimaneggiamento » et une « espèce de traduction (una specie di traduzione) ».
  93. Note préliminaire sur le problème du texte, posthume, 2016, p. 175 (en ligne).
  94. Ph. Ménard, Le prétendu “remaniement” attribué à Grégoire, 1998.
    - Ménard, Académie, 2005, p. 420-421 : « Contrairement à ce qu'a soutenu Benedetto, la version française n'est pas un remaniement. La théorie de Benedetto se fonde sur une faute de lecture des manuscrits (‘contrescris’ lu ‘contrefais’) … La signification du passage est exactement le contraire de ce que Benedetto prétendait y trouver ».
  95. a et b (it) Federica Ferrarin, Un nuovo tassello della vita di Marco Polo: inedito ritrovato all'Archivio, Université Ca' Foscari de Venise, cfNEWS, 18/11/2019 : Cette découverte « offre un support documentaire à l'hypothèse séduisante qu'après son retour à Venise de sa captivité génoise, Marco Polo s'est consacré à la révision de l'œuvre en collaboration avec des dominicains ; révision dont serait le témoin la rédaction latine dite Z, que de nombreux témoignages suggèrent avoir été produite à Venise dans un cadre dominicain » (lire en ligne).
  96. Ramusio 1559, « tutta Italia in pochi mesi ne fu ripiena » (lire en ligne).
  97. Gadrat 2010.
  98. Dutschke 1993, ch. 2 : Contemporary reaction: truth or tale ?, p. 43.
  99. Christine Gadrat-Ouerfelli, Traduction, diffusion et réception du Livre de Marco Polo, Thèse de doctorat, Paris: EPHE, 2010, t. 1, p. 439.
  100. Lire en ligne § [4].
  101. Yule-Cordier 1903, p. 120.
  102. Lopez 1977, p. 450.
  103. Lopez 1977, p. 453.
  104. Lopez 1977, p. 455.
  105. a et b Racine 2012, ch. De Marco Polo à Christophe Colomb, p. 48.
  106. John Wood, John Wood, A personal Narrative of a Journey to the Source of the River Oxus, 1841, p. 230-231 et 237 (lire en ligne).
  107. Voir la description détaillée des manuscrits A, B, C et D dans Ph. Ménard 2001-2008, vol. 1, pp. 40-49)
  108. Luigi Foscolo Benedetto (it), Note préliminaire sur le problème du texte, posthume, 2016, p. 175 (en ligne).
  109. Ménard, Académie, 2005, p. 412-413 : « recomposition du texte... abrègements notables... christianisation du texte... juge sévèrement les croyances religieuses de l’Asie »..
  110. Dutschke 1993, p. 277 et suivantes.
  111. La rédaction "TA2" d'Antonio Lanza (éd. Riuniti, 1982) est sur Wikisource. Selon sa préface, cette édition « reproduit le texte établi par Bertolucci Pizzorusso (1975) avec quelques interventi ».
  112. Pauthier, p. XC.
  113. Charles-Victor Langlois, Marco Polo, dans Histoire littéraire de la France, tome 35, Paris, 1921, p. 254 (en ligne).
  114. Pauthier analyse une cinquantaine de ces modifications (index p. 815 sous ‘Société de géographie’), notamment p. XCV (tatar) et pp. 22 n.3 (supprime une exagération, idem 32 n.6) ; 27 n.3 ; 28 n.4 ; 39 n.1 (toujours David) ; 52 n.1 (ordre de Tabriz) ; 97 n.1 (Mulette) ; 111 n.6 (aigles) ; 215 n.3 ; 275 n.5 (barons) ; 311 n.1 (ch. supplémentaire). – Tome 2, pp. 389 n.4 et m ; 472 h (suppression Marco) ; 527 n.5 (Kayteu); 587 n.6 ; 703 n.2.
  115. Pauthier, p. 591 (lire en ligne).
  116. Ménard, Académie, 2005, p. 419 : « Les autres manuscrits ont, à titre exceptionnel, un nombre insignifiant de miniatures de très petit format. On peut citer trois manuscrits de la version latine de Pipino ».
  117. Marie-Thérèse Gousset, Le Livre des merveilles du monde, Paris, Bibliothèque de l'image, .
  118. Ménard, Académie, 2005, p. 419 : « les personnages sont peints dans les tenues et les attitudes du XVIe siècle (mais) l’enlumineur ne manque pas de talent créateur et aussi de poésie fantastique ».
  119. Philippe Ménard, L'illustration du Devisement du Monde de Marco Polo - Étude d'iconographie comparée, dans Métamorphoses du récit de voyage, Paris: Moureau, 1986, p. 17-31.
  120. Ménard, Académie, 2005, p. 43 : « dénuées de poésie et d'exotisme ».
  121. Ménard, Académie, 2005, p. 419 (miniatures en ligne, f° 71 à 263).
  122. Pour une description des manuscrits en français, voir Ph. Ménard 2001-2008, p. 40 du 1er volume
  123. Rédactions comparées et éditées par Ca' Foscari : Ramusio e la tradizione del ‘Milione’) :
    ms. F, la compilation initiale,
    L : concis mais meilleure rédaction latine, contient des additions,
    P : latin de Pipino, abrégé, religieux,
    R : Ramusio, imprimé, 1559,
    V : vénitien tardif mais enrichi d'éléments nouveaux, ms. unique, V1, Berlin,
    VA : vénitien, lombard ou émilien, 5 mss. dont 1 fragmentaire, élagué et censuré, source de Pipino et le plus traduit en diverses langues,
    VB : vénitien, 2 mss. et un fragment, met davantage en scène M. Polo,
    Z : latin, ms. dit Zelada, de Tolède.
  124. Voir Pauthier p. 467 et p. 472.
  125. Analyse critique par Ph. Ménard, 2008, qui affirme : « La traduction de Moule ne donne pas le texte de Marco Polo, je me permets de le contester fermement et absolument, elle offre un texte recomposé et imaginé, c'est un texte de Moule, c'est du Moule ».
  126. Voir la description de ces mss. p. 509
  127. Alvaro Barbieri : « Le fait d'avoir traité F et Z comme des sources indépendantes lui fait répéter Z quand il ne fait que traduire F, et donne une fausse impression de richesse et complétude. Mais il y a pire : il arrive que Moule intègre comme apport original de Z des leçons qui ne sont que des mésinterprétations de F. Z est ainsi pressé jusqu'à l'os : rien n'est laissé, tout converge pour donner un texte hypertrophié qui devient une espèce de collection de variantes. Cette grave erreur rédactionnelle n'a pas empêché l'édition “Moule & Pelliot” de devenir Le Marco Polo intégral par excellence, du moins pour les orientalistes français et anglo-saxons. On comprend facilement que la griffe “Pelliot” dut représenter une sorte de marque de garantie pour les sinologues et les historiens de l'exploration de l'Extrême-Orient » (Studi sul Milione, Véronne: Fiorini, 2004, p. 87-88).
  128. Page xii : « Lorsque Benedetto traduisait en italien (son édition de 1928), il intégra souvent des variantes de la famille FG (Cepoy) des manuscrits. Le présent volume représente globalement la traduction anglaise de sa version en italien moderne ».
    - Version en italien moderne de Benedetto : Il libro di messer Marco Polo ... ricostruito criticamente e per la prima volta integralmente tradotto in lingua italiana, Milan: Treves-Treccani, 1932.
  129. Subrepticement corrigé. Les fautes nombreuses du manuscrit « il semble les cacher à ses lecteurs » (Ph. Ménard, en ligne). « À vrai dire une mauvaise édition : corrections multiples, en bonne part tacites » (Frankwalt Möhren, en ligne sous MPolRustB).
  130. Eyrès : « Bergeron n'avait donné que les voyages d'Ascelin, de Rubrusquis, de Plan Carpin ... C'est ainsi que tous les jours encore on attribue à Pierre Bergeron les extraits pitoyables qui remplissent la plus grande partie du Recueil de voyages faits principalement en Asie dans les XII, XIII, XIV et XVe siècles, recueil que Van der Aa, libraire à Leyde, fit imprimer en 1729 et duquel Neaulme de la Haye, ayant racheté le fonds, fit modifier le titre en 1735 » (Nouvelles annales des voyages, t. 1, Paris, Gide, 1839, p. 352 ; en ligne).
  131. Andreæ Mülleri Greiffenhag (1630?-1694), Marci Pauli Velneti, Historici fidelisimi... de Regionibus Orientalibus, Berlin, 1671 (en ligne : textecouverture).
    - Texte basé sur la traduction en latin de Pipino (copie P2, Berlin, Staatsbibliothek, ms. lat. qu. 70, en ligne).
  132. Oury Goldman, La boutique du libraire dans l'économie des savoir au XVIe siècle, Le Verger, 2021, p. 16.
  133. Novus orbis regionum ac insularum (Bâle, 1532) est une compilation de textes géographiques publiée par Simon Grynaeus ; le Livre de Marco Polo y est nommé Marci Pauli Veneti De Regionibus Orientalibus (lire en ligne).
    - Cette édition du Novus Orbis semble avoir été une retraduction d'une nième copie du latin de Pipino en portugais (le Livro de Marco Paulo, 1502, selon Arlima).
    - Voir Arthur A. Tilley, Studies in the French Renaissance, 1932, pp. 29-31, et Lisa Pochmalicki, Marco Polo in the Novus Orbis, Digital Philology, n° 11.2, 2022, p. 335.
  134. Yule (Introduction, p. 96) : Tout à fait inutile comme Texte... Les éditions françaises publiées au milieu du XVIIe siècle sont des ‘traductions’ de Grynaeus, donc de cinquième main : français—italien—latin de Pipino—portugais?—latin de Grynaeus—français !

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