Communauté de biens de l'Église de Jérusalem

La communauté de biens de l'Église de Jérusalem désigne l'apport des chrétiens de Jérusalem à vendre toutes leurs richesses et à partager leurs ressources avec les nécessiteux, rapportés dans les Actes des Apôtres (Ac.2,44-45, Ac.4,32-37). Cette pratique a été suivie principalement par des communautés religieuses de l’Église catholique.

Origines modifier

Les textes sur la communauté de biens modifier

L'expression « ils ont tout en commun » se retrouve presque mot à mot dans les passages Ac.2,44-45 et Ac.4,32-35. Ce sont des résumés formellement, textuellement et conceptuellement étroitement apparentés. L'évangéliste Luc est censé être leur auteur commun[1].

En connexion directe avec le miracle de la Pentecôte et de la première prédication de Simon Pierre, les Actes des Apôtres, 2,42-47 résument les principales caractéristiques de la communauté des premiers chrétiens de Jérusalem :

« Ils sont assidus aux prédications des Apôtres, aux réunions communes, à la fraction du pain et aux prières. Et la crainte est dans toutes les âmes, et beaucoup de prodiges et de miracles se font par les Apôtres. Tous ceux qui croient vivent ensemble, et ils ont tout en commun. Ils vendent leurs terres et leurs biens, et ils en partagent le prix entre tous, selon les besoins de chacun. Chaque jour, tous ensemble, ils fréquentent le temple, et, rompant leur pain dans leurs maisons, ils prennent leur nourriture avec joie et simplicité, louant Dieu et ayant la faveur de tout le peuple. Et le Seigneur ajoute chaque jour au nombre de ceux qui sont dans la voie du salut. »

Le mot grec koinonia (communauté) n'est utilisé par Luc qu'ici. Comme l'affirme la tournure hapanta koina (tout en commun), cela ne signifiie pas seulement une harmonie personnelle, mais aussi une utilisation sociale de la propriété privée. La distribution des recettes des ventes aux nécessiteux est donc une partie intégrante de cette communauté et a le même rang que la prédication apostolique, la fraction du pain (où le sacrement et la nourriture ne sont pas encore séparés), la prière et la mission. Et c'est pourquoi la communauté, comme le dit le v. 47, (« ayant la faveur de tout le peuple ») a la sympathie du peuple juif[2].

Ces traits sont l'effet du Saint-Esprit répandu à la Pentecôte, et de la première prédication de Pierre. Celle-ci annonce centralement la Résurrection de Jésus-Christ, crucifié auparavant pour la faute de tous Ac.2,36. Elle se termine avec l'appel (Ac.2,38-40) : « Pierre leur répondit : "Repentez-vous, et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ pour obtenir le pardon de vos péchés ; et vous recevrez le don du Saint-Esprit. [ … ] Sauvez-vous du milieu de cette génération perverse" ». Là-dessus s'ensuit un baptême de masse des auditeurs. Dans leur communauté de biens, on voit qu'ils ont reçu l'Esprit promis, et qu'ils suivent l'appel à la conversion[3].

Après d'autres succès missionnaires, Ac.4,32-35 revient au thème de la communauté de biens et explique sa nature et son but : « La multitude des fidèles n’a qu’un cœur et qu’une âme ; nul n’appelle sien ce qu’il possède, mais tout est commun entre eux. [ … ] Car il n’y a parmi eux aucun indigent : tous ceux qui possèdent des terres ou des maisons les vendent et en apportent le prix aux pieds des Apôtres ; on le distribue ensuite à chacun, selon ses besoins. » Ainsi, la propriété privée reste formellement acquise, mais chaque baptisé abandonne selon les besoins ses droits de propriété au profit d'autres membres de la communauté. Luc désigne l'état ainsi atteint de la propriété commune par la tournure hapanta koina (tout en commun), analogue à l'idéal d'amitié hellénistique, si bien que la communauté des premiers chrétiens est et doit être aussi un modèle pour les non-juifs[4].

Après ces résumés, suivent des exemples :

  • Ac.4,36–37 : « Un lévite originaire de Chypre, Joseph, surnommé par les apôtres Barnabé (ce qui se traduit Fils de consolation), possède un champ ; il le vend, en apporte l’argent et le dépose aux pieds des Apôtres. »
  • Ac.5,1–11 raconte qu'Ananie et Saphire vendent ensemble un terrain, mais ils en retiennent pour eux-mêmes une partie du prix, et Ananie en apporte le reste aux Apôtres. Pierre lui demande alors : « Ananie, pourquoi Satan a-t-il rempli ton cœur au point que tu mentes au Saint-Esprit et que tu retiennes quelque chose du prix de ce champ ? Ne peux-tu pas sans le vendre, en rester possesseur ? et après l’avoir vendu, n’es-tu pas maître de l’argent ». Avec la conclusion que dans son cœur, ce n’est pas à des hommes qu'il ment, mais à Dieu. « En entendant ces paroles, Ananie tombe et expire ». La même chose arrive à sa femme Saphire, que Pierre confronte avec son acte.

Ces exemples font voir le contraste entre le comportement souhaitable, de consacrer tout le prix de vente d'un bien à la communauté, et celui condamné d'en retenir une partie pour soi. Selon les paroles de Pierre, la vente du terrain et le don sont volontaires, mais la soustraction d'une partie sont pour lui un mensonge à Dieu, parce que le donateur fait faussement croire qu'il donne tout le prix. Par là, il brise la communauté faite par le Saint-Esprit et qui doit venir au secours des nécessiteux. Ainsi, le prix de vente réel ne doit pas être tenu secret lors d'un don volontaire[5], ou un don annoncé à l'avance doit être fait en entier[6]. Les Actes des Apôtres n'évoquent plus la communauté de biens par la suite.

La Bible mentionne que l'Église de Jérusalem s'est retrouvée dans la pauvreté et que Paul de Tarse a organisé une collecte auprès des autres Églises en leur faveur[7].

Textes sur l'égalisation des possessions entre communautés modifier

Selon Ac.6,1–7, la communauté de biens ne garantit pas toujours que tous soient servis : à la distribution quotidienne de nourriture, les veuves de judéo-chrétiens parlant grec sont omises. Une assemblée plénière de la communauté confie la distribution de la nourriture, jusqu'alors effectuée par les Apôtres, à un comité nouvellement élu de sept diacres[8].

Ils montrent qu'il y a là encore des besoins, si bien qu'une égalisation des possessions entre les communautés est introduite. Ac.11,27–30 évoque une telle collecte à Antioche. Selon Gal.2,10, le Concile de Jérusalem (vers 48) décide une collecte permanente pour la communauté originale, que Paul de Tarse veut récolter dans les communautés qu'il a fondées. Une raison probable est une famine qui règne dans la région vers les années 47/48[9]. L'exemple de la communauté de biens de Jérusalem peut stimuler la collecte externe de dons[10].

Paul esquisse dans Rom.15,25–29 le don de ces collectes « pour les pauvres parmi les saints de Jérusalem (cf. Ac.24,17) » et écrit au sujet des donateurs : « [La Macédoine et l’Achaïe] le font volontairement ; aussi bien elles le leur doivent ; car si les Gentils ont part à leurs biens spirituels, ils doivent à leur tour les assister de leurs biens temporels. » Il comprend cette quête pour les pauvres non comme un service caritatif, mais comme un devoir théologique des Gentils convertis, en remerciement pour la mission de salut et pour renforcer leurs liens existants[11].

Dans 2 Cor. 8,1–15, Paul encourage la communauté de Corinthe à poursuivre leur collecte pour la communauté primitive : « Car vous savez la grâce de notre Seigneur Jésus-Christ, qui pour vous se fait pauvre, de riche qu’il est, afin de vous faire riches par sa pauvreté. [ … ] Car il ne faut pas qu’il y ait soulagement pour les autres, et détresse pour vous, mais égalité : dans la circonstance présente, votre superflu supplée à ce qui leur manque, afin que pareillement leur superflu pourvoie à vos besoins, en sorte qu’il y ait égalité, selon qu’il est écrit : "Celui qui recueille beaucoup n’a rien de trop, et celui qui recueille peu ne manque de rien" ». C'est ainsi que Paul reprend l'intention de la communauté de biens — compenser les besoins des pauvres au sein de la communauté chrétienne, et qu'il étend l'image de l'égalisation des possessions entre membres riches et pauvres de la communauté au comportement de toutes les communautés entre elles[12].

Influences modifier

Antiquité tardive modifier

Le christianisme primitif développe une hiérarchie et un point de départ vers une éthique à deux étages, qui exonère la plupart des chrétiens des commandements de Jésus. Les évêques de l'Église sont en même temps de gros propriétaires terriens. Le partage des biens avec les pauvres est laissé aux individus sous forme d'aumônes volontaires. Vers 300 naît en réaction à cet état de choses un monachisme chrétien, qui est surtout ramené à des motifs d'ascèse. L'historie Otto Gerhard Oexle, lui, y voit l'idée de vita communis inspirée par la communauté de biens de l'Église primitive comme raison d'émergence[13]. Les anachorètes suivent l'exemple d'Antoine le Grand, qui donne tous ses biens en 305 et se retire comme ermite dans le désert. Pacôme le Grand fonde vers 325 le premier monastère chrétien cénobitique. Pour lui, l'Église primitive forme un motif déterminant, quoiqu'il n'introduise pas de communauté de biens[14]. Les représentants du cénobitisme se réfèrent à Ac.2,44 et 4,32, pour se distinguer du modèle ascétique et fonder la communautarisation croissante comme forme correcte de la vie commune des chrétiens allant de pair avec la christianisation[15]. Eusèbe de Verceil (283–371) introduit en 340 pour le clergé de sa ville une communauté de vie et de biens selon Ac.2[16].

Pour de nombreux Pères de l'Église, la communauté de biens de l'Église primitive est l'idéal de l'époque apostolique, à partir de quoi ils critiquent le luxe, la corruptibilité, les gains injustes, les intérêts (comme usure) et la cupidité. Et ils ne développent pas de théorie économique[17]. Le prêtre Basile de Césarée, qui vit longtemps auparavant comme anachorète sans possessions, en 368, pendant une forte famine en Cappadoce, prêchant sur la base des textes de Luc dans le Nouveau Testament, exerce une critique virulente à l'égard des riches, qui exploitent le manque de nourriture pour faire monter les prix et restreindre l'offre de biens. Il exige une utilisation immédiate et sans restriction de leurs biens pour le bien général, la baisse des prix et des bas taux d'intérêt. À partir des dons courants, il organise une alimentation des pauvres organisée, et après cette aide immédiate, aménage un habitat pour les pauvres, pourvu dans la durée de nourriture et de soins médicaux. Son idée de base est que toute propriété privée appartient à Dieu, si bien que chaque privilégié n'est que son intendant et administrateur, et qu'il doit mobiliser tous les suppléments de gains au profit des pauvres. Grégoire de Nazianze et Grégoire de Nysse suivent ce principe nommé mécénat[18]. Jérôme de Stridon légitime en 380 le monachisme cénobitique avec l'indication que les judéo-chrétiens d'Alexandrie et ailleurs pratiquent encore pendant des siècles la communauté de biens. Jean Cassien écrit sur Ac.2,44 : « Toute l'Église vivait ainsi alors, tandis qu'aujourd'hui, seuls quelques-uns qui se trouvent dans les monastères vivent cette vie. » Là, il idéalise l'Église primitive à l'opposé de celle de son temps[19].

Quand le christianisme devient religion d'État (380), la communauté de biens n'est plus en vigueur que dans des monastères isolés. La règle de saint Augustin formulée en 397 paraphrase Ac.2 : « C'est ce que nous vous proposons dans le monastère. Le premier but de votre vie commune est de cohabiter dans la bonne entente, et de former un cœur et une âme en Dieu. Donc n'appellez rien vôtre, mais que tout vous appartienne en commun (chap. 1). » Pour saint Augustin, la communauté de biens de l'Église primitive est la norme et le point de départ historique de la coexistence des chrétiens dans leurs communautés de vie (vita communis) et ainsi pour le comportement de tous les chrétiens. Il souligne cette norme en 407 dans des prêches contre les donatistes, auxquels il reproche une position égoïste, seulement intéressée par une perfection éthique personnelle[20].

La règle de saint Benoît (VIe siècle) demande aussi l'abandon de toutes les possessions privées de la part des moines concernés. La communauté de biens fonde ici aussi une économie communautaire et le devoir du travail commun journalier, rigoureusement réglé[21]. L'administration de la propriété commune du monastère incombe exclusivement à l'abbé du monastère, est aussi liée à la hiérarchie de l'ordre, et ne tolère aucune critique de l'Église[22].

Moyen Âge modifier

Les ordres mendiants pratiquent une vive activité d'aumônes, amènent beaucoup de riches à donner de leurs biens et se félicitent en même temps de l'économie capitaliste qui se développe. Leurs conflits avec le clergé influencent les universités et conduisent à la formation d'ordres laïcs dans nombre de villes. Ils contribuent ainsi à la stabilisation du féodalisme médiéval[23].

Les ordres de franciscains fondés au XIe siècle encouragent aussi l'abandon des biens et la propriété communautaire. Surtout les frères mineurs conventuels relient cela plus fort que leurs prédécesseurs à une critique explicite des rapports de richesse et de puissance inégaux au sein de l'Église et de la société. Cependant, les attaques en vue de réaliser un mode de vie du clergé sans possession et un renoncement de l'Église à la richesse sont refusées par les papes[23].

La communauté de biens des ordres mendiants provoque au XIIIe siècle une querelle scolastique sur le rôle de la propriété privée : Thomas d'Aquin justifie la propriété privée et son héritage par le droit naturel, forme à droits égaux de la vie chrétienne en communauté de biens. Par contre, Jean Duns Scot considère la communauté de biens comme la forme normale, et ne convient que d'un droit d'usage sur les biens comme légitime, mais conteste le droit à la propriété privée, et l'interprète comme une composition inventée par les princes[24].

Des formes de critique ecclésiales et sociales de la communauté de biens surgissent souvent à partir du XIVe siècle. Vers 1370, naît aux Pays-Bas le mouvement des frères de la vie commune, qui ne veulent pas construire de nouvel ordre. Bien plus, ils considèrent leur communauté de biens comme un précepte direct de Jésus-Christ, seul « abbé » pour tous les chanoines réguliers. Pour eux, l'Église primitive forme l'exemple, comme enseignement apostolique, de forme de vie obligatoire de tous les chrétiens, clercs ou laïcs, engagés dans l'Église[25].

Période de la Réforme modifier

À partir du XVe siècle, il y a des tentatives pour une réforme radicale de l'Église et de la société, dont les représentants demandent souvent aussi la communauté de biens, et la réalisent parfois sur le plan local ou régional : par exemple les Taborites tchèques (1420) et Hans Böhm (1476).

À partir de 1520, au cours de la réforme protestante, des groupes d'anabaptistes entreprennent de tels essais. Ils sympathisent beaucoup avec les soulèvements de paysans et reprennent en partie leurs demandes pour les villes qu'ils ont réformées, comme Nicholas Storch, Thomas Müntzer et Hans Hergot en Saxe et Thuringe. À Zollikon (Suisse), un cercle autour de Conrad Grebel, Felix Manz et Wilhelm Reublin fonde en 1525, après leur expulsion de Zurich une communauté de biens communale[26].

Les anabaptistes diffusent en 1527 à côté de la Confession de Schleitheim, un ordre de communes qui doit établir la communauté de biens dans les futures communes anabaptistes. Cela comprend l'exigence d'un budget spécial pour secourir les pauvres en cas de malheur aigu. Le chef des paysans, Michael Gaismair, essaie sans succès d'imposer en 1526 au Tyrol un nouvel ordre de possessions fondé sur le christianisme[27]. Hans Hut, un disciple de Müntzer, essaie sans succès d'établir une communauté de biens à Nikolsburg (Moravie) en 1527 contre le baptiste pondéré Balthazar Hubmaïer. Hut comprend la communauté de biens comme un dépassement du péché originel de la cupidité au sens des 7e et 10e commandements. Ses disciples la pratiquent aussi au sein de leurs familles et avec les fugitifs qu'ils accueillent chez eux[28]. Ils fondent d'abord en 1528 à Austerlitz, puis en 1530 à Auspitz une communauté de biens et y représentent un pacifisme radical, incluant le renoncement à l'autodéfense armée.

À la suite des conflits internes sur ces thèmes, Jacob Hutter fonde en 1533 au Tyrol les premières fraternités huttériennes avec des habitations agricoles, des ateliers d'artisanat, des jardins d'enfants et des écoles. Hutter doit certes s'enfuir vers la Moravie dès 1535 ; mais alors que d'autres tentatives disparaissent rapidement, les huttériens peuvent préserver leurs communautés de biens jusqu'à présent. En particulier, entre 1556 et 1578 sous Peter Walpot, de nouvelles fraternités voient le jour. Pendant la forte répression de la Contre-Réforme, ils s'exilent en Hongrie, en Valachie et plus tard en Ukraine. Au XIXe siècle, des fraternités naissent aux États-Unis d'Amérique[29]. D'autres exemples sont les Stäbler, rigoureusement pacifistes, les Gabrieler, fondés par Gabriel Ascherham, les Philipper, fondés par Philipp Plener[30],[31]. Ces essais baptistes sont surtout envisagés comme des prémices d'un nouvel ordre social général attendu, mais ils ne veulent pas l'obtenir par la force. Seule la Révolte de Münster force la communauté de biens et la polygamie comme un devoir de tous les chrétiens de Munster par une nouvelle constitution[32].

En 1525, Martin Luther reproche aux paysans révoltés leur usage abusif de l'Évangile à des fins de changement social, et par là de mélanger les justices céleste et terrestre (Doctrine des deux royaumes). La grâce de Dieu transmise par le baptême est indépendante de la situation sociale. La communauté de biens de Ac.4,32-37 doit être volontaire et ne justifie aucune exigence sur autrui. Contrairement à cela, les paysans veulent conserver leur propriété et se faire une possession commune avec la propriété d'autrui[33].

Le pasteur d'Augsbourg Urbanus Rhegius présente en 1528 la théologie des baptistes et leur conduite de vie dans une polémique suscitée par le conseil de la ville, comme un pervertissement impie des croyants. Il interprète leur communauté de biens comme un simple moyen de procurer une sécurité matérielle à des vagabonds oisifs, comme une envie sociale, et une soif de possession déguisée. Il interprète leur aide aux pauvres comme une chaos déréglé par lequel ils essaient de se soustraire à l'ordre bourgeois[34]. Le réformateur Johan Brentius, par contre, défend en 1528/30 les baptistes poursuivis : ils n'essaieraient, pas plus que les moines de l'Antiquité, de forcer tous les chrétiens à la communauté de biens ; celle-ci ne se laisserait pas mettre au rang de la sédition. Seule la véritable sédition, non celle présumée comme intention pour l'avenir, doit être punie[35]. Jusqu'en 1525 les révoltes de paysans, et jusqu'en 1534 la plupart des communautés baptistes sont combattues par le massacre de dizaines de milliers de leurs adhérents. Cependant les baptistes s'en tiennent fermement à leur foi et à leur manière de vivre, qui est une attaque où ils risquent leur vie, envers la chrétienté médiévale[36].

Temps modernes modifier

Il y a d'autres communautés de biens chez des minorités chrétiennes poursuivies au XVIIe siècle, comme ches les Niveleurs pendant la première révolution anglaise (1642–1649). Leur porte-parole, Gerrard Winstanley fonde directement l'exigence d'exproprier tous les nobles anglais, et de remplacer l'ordre féodal par une propriété communautaire, sur la Bible, sans se référer aux théologiens continentaux. Le pasteur protestant français Jean de Labadie fonde à partir de 1668 dans quelques régions d'Europe du Nord des communautés de maison, qui partagent leurs revenus et leurs propriétés. Ses disciples, les 'Labadistes', émigrent aux États-Unis, achètent un terrain dans le Maryland et y fondent en 1683 une communauté paysanne. Elle est dirigée autoritairement par un « évêque » qui distribue à chacun les tâches du jour. Toute propriété privée est interdite, et la consommation est rationnée. Cette communauté échouerait en 1725 à cause de l'enrichissement personnel de son chef[37].

La quaker anglaise Ann Lee, après une expérience de visionnaire, vécue en 1758 en prison fonde un groupe nommé, d'après leurs danses extatiques Shakers. Les huit personnes du début émigrent en 1770 aux États-Unis et fondent près d'Albany une communauté de vie et de biens fondée sur le célibat, le pacifisme, la spiritualité et l'esprit missionnaire. Le groupe accueille des orphelins et des sans-abris, qui deviennent souvent membres. Jusqu'en 1826, il croît jusqu'à 18 communautés avec environ 6 000 membres, mais redescend jusqu'à quelques personnes en 2000[38].

La communauté russe des Doukhobors fonde vers 1740 en Tauride, sans doute par un quaker avec la permission du Tsar Alexandre Ier de Russie, une communauté de logement, de travail et de biens rigoureusement organisée. Ils punissent de mort les déserteurs et sont de ce fait exilés en Transcaucasie. Après plusieurs vagues de poursuites en raison de leur objection de conscience, Léon Tolstoï réussit à leur obtenir en 1886 la permission d'émigrer vers l'Amérique du Nord[39]. Dans ses écrits tardifs, Tolstoï décrit la société du futur qu'il a espérée, communauté de biens qui supprimerait l'État, l'armée, la propriété privée, le commerce et la division du travail industrielle. Il déclenche ainsi vers 1900 le mouvement tolstoïen qu'il n'a pas fondé, et qui aspire à une anarchie pacifiste[40],[41].

Philipp Jacob Spener, dans son ouvrage Pia desideria (1675) appelle la propriété communautaire l'idéal de vie chrétienne, selon Ac.2; 4. Le théologien Gottfried Arnold développe cet idéal comme critique à l'encontre de l'histoire de l'Église jusqu'alors, dans son « Histoire sans parti de l'Église et des hérétiques » (1699). Depuis lors, la communauté de biens de l'Église primitive reste un modèle pour des piétiste réformateurs sociaux, comme Ernst Christoph Hochmann von Hochenau et Friedrich Christoph Oetinger[42]. Dans son ouvrage « Die güldene Zeit » (1759), Oetinger identifie le Royaume millénaire du Christ avec l'idée païenne de l'Âge d'Or : le XIXe siècle apportera un ordre du monde démocratique, où l'argent, l'État et la propriété privée auront disparu[43]. Son œuvre inspire en 1824 la fondation de la colonie piétiste de Wilhelmsdorf en communauté de biens[44].

Le tisserand influencé par le piétisme Johann Georg Rapp (en) (1757-1847) fonde en 1805 en Pennsylvanie (États-Unis) la communauté agricole des harmonistes (Harmony Society (en)), qui existe sous le nom de New Harmony de 1814 à 1824 dans l'Indiana, puis jusqu'en 1916 sous le nom d'« Économie » à Ambridge (Pennsylvanie). Les membres, initialement environ 800, à la fin encore environ 150 membres vivent dans le célibat, et transmettent tous leurs droits de possession à un comité présidé par Rapp. La communauté se divise en 1832 en raison de conflits de direction et évolue à partir de 1840 en une simple coopérative de production[45] : Old Economy Village (en).

Dans l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours (Mormons) Joseph Smith fonde en 1831 l’United Order of Enoch, dont les membres vivent en communauté de biens. L'ordre influence l'établissement des Mormons dans le Missouri et l'Utah[46].

XXe siècle modifier

Inspirés par les socialistes religieux et les huttériens, auxquels ils ont adhéré au début, le couple Eberhard et Emmy Arnold fondent en 1920 à Sannerz (Hesse) le premier Bruderhof (fraternité). Les fraternités fondent d'autres colonies aux États-Unis, au Paraguay et en Australie, qui pratiquent jusqu'aujourd'hui la communauté de biens[47]. Hans et Wally Klassen, Mennonites émigrés de Russie et tolstoïens, appartiennent à la communauté de Sannerz. En 1923, ils fondent à Sonnefeld (Haute-Franconie) une colonie dont les membres — pour la plupart des quakers — pratiquent la communauté de biens et un végétarisme strict, et élèvent des orphelins[48],[49].

En 1943, Chiara Lubich fonde à Loreto une communauté de vie pour femmes qui font le vœu de pauvreté, de chasteté et d'obéissance quotidienne à Jésus. Il en sort le mouvement des Focolari : tout d'abord mouvement de laïcs catholiques, il devient aujourd'hui interconfessionnel et interreligieux. Une partie de ses membres vit en célibat dans des communautés d'habitation, en exerçant des professions habituelles, mais reversent tous leurs revenus dans une caisse de groupe. Les surplus sont versés à une caisse centrale à Rome, d'où l'on achète des biens nécessaires à la survie, et où on les distribue aux endroits où ils manquent[50].

Après 1945 naissent en Europe des communautés protestantes ou œcuméniques, prenant pour modèle la communauté de biens de l'Église primitive et qui se considèrent donc comme parties de l'Église, et non comme des groupes séparés hors de l'Église (sectes)[51]. Frère Roger, fondateur et premier prieur de la Communauté de Taizé, réformée et œcuménique, y introduit en 1949 une communauté de biens, liée au célibat et à une stricte obéissance[52]. Une forme de vie fondée sur Ac.2 dans le cadre de l'Église orthodoxe est aussi suivie par la Fraternité de Jésus œcuménique, fondée en 1961.

Recherche modifier

Dans la recherche sur le Nouveau Testament, les textes sur la communauté de biens de l'Église primitive sont discutés depuis le XIXe siècle. Les questions posées portent sur leur signification dans leur contexte propre, les analogies contemporaines, les rapports bibliques, leurs formes d'organisation approchées, leur historicité, leur efficacité et leur signification actuelle.

Analogies antiques modifier

La communauté de biens est une utopie sociale répandue dans l'Antiquité longtemps avant la chrétienté[53],[54]. Depuis les Histoires d'Hérodote (v. 460 av.J-C) quelques historiens de l'Antiquité attribuent la communauté de biens à des peuples naturels passés qui ne connaissent pas l'argent comme moyen d'échange. D'autres auteurs les décrivent comme parties de communautés fictives, préhistoriques ou perdues qui auraient réalisé des idéaux éthiques. Ce genre d'utopies projetées dans le passé est courant à l'époque hellénistique comme contre-exemple au présent d'alors[55].

C'est surtout à Pythagore qu'on attribue souvent une société idéale de philosophes qui pratiquerait aussi la communauté de biens. Dans son dialogue Timée (v. 360 av. J.-C.), Platon rapporte à Pythagore la maxime qui nous est parvenue : « Ce qui appartient aux amis est commun[56]. » Aristote rapporte la maxime (Éthique à Nicomaque, 1159b) : « Le bien des amis est commun. » Cette tournure se trouve aussi dans les Codex XII : Sentences de Sextus (~180–200), qu'un auteur anonyme a rassemblées de plus anciennes sources hellénistiques (surtout du platonisme et de la Stoa). Antoine Diogène écrit sur Pythagore (vers 200) : « Il aime les amis hors de la mesure, si bien qu'il défend l'idée que tout est commun entre amis ta ton filon koina, et l'ami est un alter ego[56]. » Jamblique écrit dans son texte Sur la vie pythagoricienne (~300) : « L'origine de la justice est maintenant la communauté, le droit égal et un lien par lequel tous ressentent la même chose comme dans un seul corps et une seule âme, et définissent pareillement le tien et le mien [ … ] Pythagore met cela en œuvre au mieux en tout homme, en supprimant de la manière d'être de ses disciples le lien à la propriété privée, et ainsi en renforçant le sens du bien commun »[57].

Beaucoup de chercheurs supposent que Luc connait l'antique idéalisation des pythagoriciens, et qu'elle influence son style de parole (p.ex. koinonia « un cœur et une âme », hapanta koina « ils ont tout en commun »)[58]. Martin Hengel (1996)[59], Gerd Theißen (2008) et d'autres spécialistes du Nouveau Testament supposent que Luc reprend la tournure hapanta koina littéralement de la sagesse orale hellénistique courante de l'époque[60]. Selon Matthias Konradt (2006), il la reprend de l'éthique de l'amitié hellénistique[61]. Selon Niclas Forster (2007), il stylise sciemment les résumés de Ac.2/4 selon le modèle littéraire alors usuel des communautés idéales[62].

La communauté de biens fait partie de quelques variantes de l'utopie antique de l'Âge d'or. Des auteurs romains comme le poète Virgile voient cet âge né avec l'empereur Auguste (Énéide, 29-19 av. J.-C.). Mais ils abandonnent la caractéristique transmise de la communauté de biens, évidemment parce qu'elle contredit trop clairement la réalité[63]. Par opposition, Ac. 2/4 souligne la communauté de biens dans l'Église primitive : éventuellement en contraste conscient avec l'environnement romain, de même que l'histoire de la naissance de Jésus par Luc avec des titres de noblesse impériaux le désignent comme le (vrai) « sauveur » et porteur de la « paix sur la Terre ». De telles « allusions anti-impériales » sont le trait fondamental du double langage de Luc[64].

Dans l'antiquité judaïque, on connait aussi la communauté de biens. Quelques manuscrits de la mer Morte, la Règle de la communauté ou le Document de Damas (daté de 180 av. J.-C.), décrivent une communauté jusqu'à la fin des temps de « prêtres » qui doivent, selon Éz.44,28 (« Vous ne leur donnerez point de possession en Israël, c’est moi qui suis leur possession. »), donner tous leurs biens à leur entrée dans ce groupe[65]. Ces textes contiennent d'autres parallèles à Ac. 2/4, comme un baptême par l'eau comme condition d'acceptation, un comité de direction de 12 laïcs et 3 prêtres[66]. À la différence d'Ac. 2/4, ils insistent sur l'habitation en commun dans des maisons communes, la formation d'un solide bien commun par versement des salaires dans une caisse commune et un programme d'assistance solidement organisé[67]. On débat pour savoir si le groupe décrit a existé et s'il a vécu dans la colonie historique proche de Qumrân.

Au Ier siècle, les auteurs juifs influencés par l'époque hellénistique présentent les Esséniens supposés de manière analogue aux Pythagoriciens. Flavius Josèphe écrit « Ce sont des contempteurs de la richesse, et leur sens de la communauté est remarquable. Leur loi veut que ceux qui entrent dans la secte se départent de leurs biens au profit de l'ordre, si bien que chez eux, jamais ni la modicité de la pauvreté ni la supériorité de la richesse ne paraît, mais après la mise en commun des possessions de chacun, il n'y a qu'une richesse pour tous comme c'est le cas pour des frères … Les administrateurs du bien commun sont élus, et chacun sans distinction est forcé de servir pour tous »[68].

Philon d'Alexandrie écrit :

« Ils montrent leur amour des hommes par leur bienveillance, leur égalité de droits … et la vie en commun (koinonia) … : tout d'abord, aucune maison n'est la propriété d'une seule personne, sans que cela soit en fait la maison de tous ; car, outre qu'ils vivent en fraternités … leur maison reste ouverte aussi aux membres de la même secte qui viennent d'ailleurs. … Ainsi ils ont une caisse commune pour tous et les dépenses communes. Les vêtements et les vivres sont communs ; et ils ont adopté l'usage des repas communautaires. On ne trouve vraiment nulle part mieux réalisé le partage du même toit, de la même manière de vivre et de la même table. Et la raison pour cela est la suivante : tout ce qu'ils gagnent comme salaire quotidien, ils ne le gardent pas pour eux, mais le déposent devant tous, afin qu'il reste à la disposition commune pour ceux qui veulent s'en servir[69]. »

Ces descriptions typiques d'un idéal valent comme des critiques littéraires de la civilisation. Bien que l'on ne puisse pas prouver une influence directe sur Ac. 2/4, on suppose que Luc connaît la communauté de biens par le judaïsme hellénistique d'alors. Selon Martin Honecker, Ac. 2/4 ne contient cependant aucun reproche contre la richesse et la propriété privée[70].

Références bibliques modifier

Le droit du sol de la Torah part du principe fondamental (Lév.25,23) : « Le pays est à moi, et vous êtes chez moi comme des étrangers et des gens en séjour »[71]. C'est ainsi qu'est fondé le commandement de « l'année du jubilé, » qui exige que les Israélites tombés en esclavage soient affranchis tous les 50 ans, et que chacun retrouve son terrain initialement donné par Dieu. Comme ce commandement est négligé sous les Rois d'Israël (v. 950-586 av. J.-C.), il est entré dans la promesse d'avenir de la prophétie biblique datant de l'exil et d'après l'exil (Is.61,1 sq). Selon Luc 4,18-21, Jésus de Nazareth cite cette promesse à sa première apparition à Capharnaüm et revendique de la remplir[72]. Mais les Romains et les grands propriétaires juifs dépendant d'eux possèdent le territoire d'Israël. C'est pourquoi la communauté de biens de l'Église primitive est interprétée comme un essai d'anticiper l'année du jubilé finale sous la domination étrangère et de la réaliser en partie[73],[74].

Beaucoup de glossateurs interprètent l'expression « qu’un cœur et qu’une âme » (Ac.4,32) comme une allusion au Chema Israël (Dt. 6,5) : « Tu aimeras Yahweh, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta force. » Gerhard Jankowski (1995) en conclut : l'Église primitive a, pour Luc, réalisé le premier des dix commandements précisément par sa communauté de biens. Car tandis que personne ne peut rien appeler sien, mais que tous disposent de tout en commun, ils reconnaitraient à nouveau Dieu comme le seul propriétaire d'Israël (Lév 25,23). C'est pourquoi Luc rapporte les ventes de terrains et souligne le cas d'un lévite : cette tribu de prêtres ne doit pas, selon Dt 18,1 sq, posséder de terrains. Apparemment, l'Église primitive abandonne toute possession de terrains, comme les lévites. Ainsi Luc la présente comme un contre-projet à l'Imperium Romanum fondé sur la grande propriété terrienne, l'esclavage et la force militaire. Ce contre-projet ne peut ainsi être réalisé que dans un tout autre ordre social, auquel les Actes travaillent, avec la prédication de la résurrection de Jésus, même à Rome[75].

Pour beaucoup de spécialistes du Nouveau Testament, le texte de Ac. 4,34 (« Car il n’y a parmi eux aucun indigent … ») fait clairement allusion au commandement de la Torah : « afin qu’il n’y ait pas de pauvre chez toi. » (Dt. 15,4). Pour Luc, la communauté de biens de l'Église primitive remplirait ainsi le but de l'année sabbatique (Dt. 15), qui prévoit une remise de dettes générale pour les pauvres. Mais alors que pour Dt. 15,11 (« Il ne manquera jamais de pauvre au milieu du pays. ») ce but reste inaccessible, Luc ne prend pas en considération ce verset, auquel Jésus même fait allusion (Mc 14,7) : « Car Yahweh te bénira certainement dans le pays que Yahweh, ton Dieu, t’a donné en héritage pour le posséder … » (Dt 15,4)[76],[77],[78]. Michael Schäfers conclut aussi en 1998 : comme l'Église primitive supprime le manque de nécessiteux selon Ac. 4,34, elle remplit l'utopie de la Torah qu'il n'y ait plus de pauvre dans le peuple de Dieu. Sa communauté de biens tente aussi une suppression durable de la pauvreté au sens de Dt. 15,4. Elle dépasse la simple générosité individuelle, qui ne pourrait jamais éliminer la pauvreté. Ce n'est que si l'Église primitive pratiquait réellement la communauté de biens qu'elle serait le modèle pour la diaspora juive témoignée par les sources de l'Antiquité[79].

La plupart du temps, la communauté de biens de l'Église primitive est expliquée comme un effet de Jésus. Jürgen Roloff énumère en 1988 comme influences directes de Jésus : son mépris des possessions (Lc.6,24), son exigence correspondante envers ses disciples (Lc.9,3 ; Lc.12,16–21 ; Lc.16,13&19–31) et son avertissement face aux soucis (Mt. 6,25–33). L'Église primitive suivrait la prédication de Jésus. Avec sa communauté de biens, elle tente de suivre son avertissement contre Mammon, puissance ennemie de Dieu, et introduit la propriété pour la communauté, pour les pauvres, non pour les intérêts propres, qui vous séparent des autres[80]. Peter Stuhlmacher suppose en 2005 que dans l'Église primitive, les commandements de Jésus, et le Décalogue continuent à être valables. Il interprète Ac. 2/4 comme une essai de la part de l'Église primitive d'observer le commandement de Jésus pour l'abandon des possessions (Lc. 12,22–31 ; Mt. 6,25–34). C'est pourquoi elle forme une communauté de vie complètement orientée vers la domination de Dieu[81].

Forme d'organisation modifier

Le débat historico-critique sur ce thème commence au XIXe siècle dans le contexte des conflits sociaux de l'époque. Depuis environ 1830, la communauté de biens de l'Église primitive est invoquée pour justifier les buts du socialisme utopique et interprétée comme coup d'envoi pour une réforme globale de la société, ou révolution sociale : par exemple par Félicité Robert de Lamennais ou Wilhelm Weitling[82].

Friedrich Engels se démarque en 1843 de l'égalité alors favorite en France que « la chrétienté est le communisme » : certes, « quelques passages de la Bible semblent favoriser le communisme, » mais « l'esprit général » des enseignements bibliques contredit celui-ci, et notamment complètement toute « mesure raisonnable » d'ailleurs. Il concède que les révoltés de la guerre des Paysans allemands s'appuient à bon droit sur l'Église primitive : l'oppression et l'injustice qui leur sont faites « tranchent fort sur la communauté des premiers chrétiens et sur les enseignements du Christ, tels qu'ils sont rapportés dans la Bible. » Le chef des insurgés, Thomas Müntzer, ne fait que tirer des « conclusions logiques » des enseignements de Luther, quand il conclut de la Bible que la communauté de biens et la démocratie sont la seule forme de société appropriée pour les chrétiens[83].

Depuis la révolution de Mars (1848), les glossateurs chrétiens ont délimité la communauté de biens de l'Église primitive vis-à-vis du socialisme utopique : Ac. 2,44/4,32 ne signifierait aucun remplacement de la propriété privée par une autre forme de propriété collective. Le diacre Heinrich Merz souligne en 1849 : la propriété est un droit et un devoir pour pouvoir aider les nécessiteux. L'expropriation forcée ne ferait que rendre les riches pauvres, et les pauvres encore plus pauvres. Chacun verserait dans la caisse commune ce qui lui est possible, et actuellement nécessaire, mais conserverait le reste : que ce soit dans la conscience que « Tout vient de Dieu et tout est pour les frères. » Cela dépendrait donc de la disposition intérieure à l'amour. De manière semblable, Gerhard Uhlhorn (1895) souligne : Dans Ac. 2/4, il s'agirait d'un don d'aumône facultatif, spontané, sans règle, à partir de l'amour enthousiaste du temps des débuts[84].

Le prêtre catholique Wilhelm Hohoff proclame depuis 1871 : l'égalité des biens, soit une égalisation communautaire des biens, serait le but du christianisme, sur la base de la charité. Celui-ci serait donc compatible avec le socialisme. C'est pourquoi il devient un représentant précoce du christianisme social[85]. À l'encontre, la plupart des commentateurs catholiques du Nouveau Testament, en connexion avec l'Encyclique Rerum novarum (1891), ne déduisent pas une réforme de la société, mais une obligation sociale liée à la propriété en général. Ils interprètent la communauté de biens comme une forme exacerbée du don des aumônes ou comme une éthique spéciale pour une minorité accomplie sur le plan éthique[86]. Theo Sommerlad (1903) interprète Ac. 2,44 comme « l'institution d'un soutien des pauvres » sans forme définie d'organisation. Les textes du Nouveau Testament ne montrent pas trace d'une association ou d'une administration communautaire de la possession terrienne[87].

Le marxiste Karl Kautsky classe depuis 1895 la chrétienté d'origine comme un lumpenprolétariat de l'Antiquité, comme un mouvement réformiste soutenu par les pauvres sans moyens, des petits ouvriers et des marchands de classe moyenne. Elle réagirait à la pauvreté de masse par une distribution juste des richesses et une administration communautaire des biens. Cependant les chrétiens primitifs auraient vendu ou abandonné entre des mains privées les moyens de production, et ne peuvent donc pas vaincre la pauvreté. Comme ils se limitent à un « communisme de consommation, » et à une gestion commune, avec l'extension de la chrétienté, il leur faut abandonner leur idéal égalitaire orienté sur la famille. C'est pourquoi les chrétiens pourraient collaborer à la construction d'une société sans classes, bien que leur foi soit incompatible avec le socialisme scientifique[88],[89].

Quelques marxistes ont critiqué les thèses de Kautsky, d'autres les reprennent positivement. Ainsi, Rosa Luxemburg écrit en 1905 que les chrétiens primitifs auraient, en raison de l'appauvrissement des masses de la population d'alors, annoncé le partage des riches avec les pauvres, l'égalité sociale et ainsi le communisme, mais limité aux devoirs de possession des baptisés et aux biens de consommation, pas aux moyens de production. Ainsi la domination de classe se serait aussi imposée historiquement dans l'Église. Une victoire durable de la domination de classe correspondrait à l'annonce de Jésus-Christ. L'anticommunisme des prêtres de maintenant s'oppose donc à son enseignement. Seuls les premiers Apôtres seraient « les communistes les plus passionnés. » Et elle cite à ce propos Ac. 4,32-35[90].

La plupart des théologiens et des représentants de l'Église rejettent par la suite cette façon de voir. Ernst Troeltsch contredit Kautsky à partir de 1908 : les chrétiens primitifs n'ont pas de buts de réforme sociale, et ne représentent pas d'intérêts de classe. Ils n'essaieraient d'appliquer le commandement d'amour de Jésus que dans leur propre cercle, mais cela très radicalement au début. Leur communauté de biens ne comprend que la distribution des biens de consommation, et non pas des moyens de production. Il s'agirait d'un « communisme d'amour » fondé sur une solidarité interne des croyants[91]. L'historien de l'Église Hans von Schubert (1919) considère la catégorie de communisme d'amour ou de consommation comme impropre : l'Église primitive n'exerce aucune pression pour administrer les biens de consommation en communauté[92]. Leonhard Ragaz, par contre, fait écho à Troeltsch : l'Église primitive formerait une communauté libre et s'efforcerait de faire un « socialisme du volontariat, » qui correspondrait à l'esprit du Christ[93]. En 1972, Ernst Bloch affirme aussi le concept de communisme d'amour pour la communauté de biens de l'Église primitive.

Heinz-Dietrich Wendland, Wilhelm Schneemelcher, Wolfgang Schrage, Jürgen Roloff et d'autres soulignent par contre que le communisme est incompatible avec l'amour, et n'est pas une catégorie pertinente pour la communauté de biens des chrétiens primitifs. Celle-ci ne considère ni un abandon complet de la propriété ni une communautarisation des moyens de production[94].

Selon Michael Schäfers (1998), la communauté primitive pratique un mélange, conforme à ses possibilités et aux circonstances d'alors, de renoncement individuel à la possession et d'assistance sociale, en vue de surmonter en interne la pauvreté et de créer des rapports égalitaires à la richesse. C'est pourquoi elle soumet la propriété privée à ce but et l'y rend utile, sans toutefois l'abolir par une forme collective de propriété ou un droit de disposition exercé collectivement. Le processus du don volontaire vise une égalisation des biens derrière laquelle les droits de propriété et de disposition doivent s'effacer. Elle comprend et légitime ce nivellement des propriétés comme une expression de la suite de Jésus, en signe d'une attente d'un retour proche[95].

Peter Stuhlmacher (2005) conclut des différences entre Ac. 2 et les textes antiques qui décrivent les communautés de biens et d'approvisionnement solidement organisés : « Il ne s'agit au début à Jérusalem que d'une vie commune sur la base de la spontanéité spirituelle et du volontariat … tout l'intérêt de la vie est dirigé vers la prière et la venue du Seigneur à la fin des temps demandée dans le maranatha (araméen pour Attente du prompt retour du Christ) »[67].

Selon Jürgen Roloff (2010), la communauté de biens réagit au témoignage sur la résurrection des Apôtres et montre son efficacité (Ac. 2,34; 4,33). Ainsi Luc lie les deux aspects indissolublement. Ac. 2 donne un résumé préalable de la communauté de biens, tandis que Ac. 4 décrit son accomplissement concret : « tous ceux qui possèdent des terres ou des maisons les vendent et en apportent le prix aux pieds des Apôtres ; on le distribue ensuite à chacun, selon ses besoins ». De cette manière, Luc élève une pratique limitée dans le temps, qui ne lui est probablement connue que par des exemples isolés, à un modèle historique pour l'Église de tous les temps. Comme les Apôtres, témoins des apparitions du Ressuscité attendent son retour proche, ils engagent les moyens disponibles spontanément pour les nécessiteux, sans organiser d'approvisionnement à long terme[96].

Historicité modifier

Hans Conzelmann (1969) argumente du point de vue critique littéraire contre l'historicité de la communauté de biens : les résumés présentent un renoncement général à la propriété (Ac. 2,44/4,32), tandis que les récits présentés en exemples représentent le renoncement comme un acte spécial d'individualités (Ac. 4,36 sq), donc comme une exception. Les textes antiques sur la communauté de biens des pythagoriciens seraient aussi des tableaux idéaux. Le transfert de propriété et de salaire à l'entrée de la communauté de Qumrân (que Conzelmann considère comme historique) montre justement qu'une communauté de biens ne peut subsister que si la production est aussi organisée en commun. C'est pourquoi Ac. 2/4 est une présentation idéalisée a posteriori ; il n'y a « jamais » de communauté de biens totale[97].

Gerd Theissen (1989), lui, accepte un noyau historique pour la communauté de biens. L'Église primitive reprendrait le proverbe hellénistique « Tout est commun à tous » vraisemblablement en réaction au conflit entre Hébreux et Hellénistes (Ac. 6,1 sq), pour obliger les parties en conflit à partager à droits égaux et à éviter un développement autoritaire[98].

Ulrich Luz (2005) argumente comme suit en faveur de l'historicité : certes, Luc formulerait consciemment les résumés en sorte que leurs motifs de formes de société idéale et d'éthique de l'amitié s'adaptent à la philosophie antique comme aux commandements bibliques de la Torah. Mais il n'inventerait certainement pas la communauté de biens, puisque les repas communs réguliers de la communauté primitive sont sérieusement attestés, en souvenir de la Cène avant la mort de Jésus. Ce genre de repas inclurait aussi toujours une protection sociale d'existence pour les pauvres. Comme la Palestine est alors constamment menacée par les famines, que de nombreux disciples de Jésus proviennent de Galilée, et ne peuvent pas exercer en ville leurs métiers de pêcheurs ou de paysans, que l'Église primitive, centre de la chrétienté d'origine est souvent visitée par d'autres chrétiens, et sert aussi de groupe local de la communauté des esséniens de Jérusalem, il est hautement probable qu'une certaine forme de vie communautaire de cette Église primitive soit historique[99].

Jürgen Roloff (2010) cite des arguments comparables et supplémentaires : beaucoup des membres de Galilée y ont abandonné leurs liens familiaux, leurs logements et leurs métiers, et, pêcheurs ou paysans, ne peuvent guère trouver de travail à Jérusalem. Dans cette situation, il faut que les chrétiens du lieu paient pour leur entretien. Les pharisiens ont établi une assistance aux pauvres, en louant et réunissant les aumônes pour les nécessiteux pendant les repas de fête dans les synagogues. Les chrétiens d'origine de Jérusalem suivraient cet exemple[100].

Efficacité modifier

La communauté de biens est souvent présentée comme la cause de l'appauvrissement de l'Église primitive : la vente des terrains et la consommation du produit des ventes conduirait à la ruine économique. C'est pourquoi l'Église primitive serait poussée ensuite à demander l'aide matérielle de l'extérieur, comme en témoignent les quêtes de Paul. Ainsi la communauté de biens échouerait fatalement et n'est pas un modèle pour le présent. Cette vue est soutenue par Georg Wilhelm Friedrich Hegel, Adolf Stoecker (1881), Friedrich Lahusen (1890), Hans von Schubert (1919), Max Weber, Gotthilf Schenkel (1946), Werner Elert (1949), Martin Robbe (1967), Rudolf Bultmann (1968), Heinz Kreißig (1970), Barry Gordon (1989) et autres[101].

La contradiction vient de Walter Rauschenbusch, représentant du Social Gospel (1907), Leonhard Ragaz (v. 1920), Harmannus Obendink (1949) et Hans Joachim Iwand (1964). Iwand souligne : la communauté de biens est, vue par l'homme, aussi possible ou impossible que l'Incarnation de Dieu. Celui qui croit en Jésus-Christ ne peut pas nier la communauté de biens[102].

Wolfgang Reinhardt (1995) souligne : Luc n'a pas harmonisé les contradictions de la communauté de biens du début, consciemment. L'appauvrissement de la communauté primitive aurait des causes externes, non internes. On ne devrait pas parler de l'échec de la communauté de biens, car déjà Ac. 11,27–30 montre son influence sur d'autres communautés : « Il faudrait plutôt parler d'un élargissement du modèle à tout l'écoumène. » Et il cite en l'approuvant Klaus Haacker : « L'exemple de l'Église primitive fait école en réalité et est transposé dans les actions transrégionales de l'équilibre des charges au sein de l'Église. » L'assistance attractive aux pauvres serait un motif principal de croissance de la chrétienté primitive dans l'Antiquité[103].

Selon Martin Leutzsch (1999), des textes des débuts de la chrétienté (Didachè, Apologie de Justin, Lucien) confirmeraient l'efficacité de la communauté de biens. Des parallèles antiques non-chrétiens montreraient aussi leur applicabilité. Pour Luc, selon Ac. c'est l'histoire d'un succès, et non pas une expérience ratée[104].

Revendication de validité modifier

En 1780, le chirurgien de Lubeck Jakob Leonhard Vogel interprète Ac. 2/4 comme une revendication valable de droits des chrétiens pauvres sur les riches, et un droit de disposition commun de tous les chrétiens[105] :

« Chaque chrétien a selon la relation fraternelle un droit sur les biens de tous les membres de la communauté, et peut en cas de détresse exiger que les membres à l'aise partagent avec lui autant de leurs biens que sa nécessité l'exige. Chaque chrétien peut se servir des biens de ses frères, et les chrétiens qui ont quelque chose ne peuvent pas en dénier le bénéfice et l'usage à leurs frères dans le besoin. Par exemple, un chrétien qui n'a pas de maison peut désirer qu'un autre chrétien qui a 2 ou 3 maisons lui en donne une, et qu'il reste pour autant maitre des maisons. Mais en raison de la communauté d'usage, il doit laisser habiter l'autre dans une des maisons. »

Leutzsch voit dans la plupart des interprétations traditionnelles des essais d'écarter la revendication de validité du modèle de Luc pour les chrétiens d'aujourd'hui. Il dénombre les manières suivantes d'argumenter dans ce sens :

  • Mise en scène historique cohérente : il n'y a de communauté de biens que dans la situation spéciale, non renouvelable, des chrétiens primitifs (et leur attente d'une parousie proche).
  • Mise en scène extra-historique conséquente : elle n'est jamais une réalité historique, simplement une construction idéale de Luc.
  • Contestation du caractère exemplaire : on ne parle de communauté de biens que dans les Actes, le modèle de Jérusalem ne serait déjà dans la chrétienté d'origine qu'un parmi d'autres.
  • Comparaison dans l'histoire des religions : la communauté de biens serait reprise de parallèles extra-chrétiens et ne résulterait pas de l'annonce de Jésus.
  • Limitation de la pertinence et de l'efficacité : la communauté de biens serait un modèle de communauté, non un modèle de société. Selon les Actes, elle n'est même pas pratiquée par tous les chrétiens primitifs, mais seulement sous la direction des premiers Apôtres. Les participants seraient là tombés dans une griserie de la Pentecôte. Elle conduirait à l'appauvrissement de la communauté primitive[106].

Notes et références modifier

  1. Mineshige 2003, p. 218
  2. Mineshige 2003, p. 221
  3. (de) Peter Böhlemann, Jesus und der Täufer : Schlüssel zur Theologie und Ethik des Lukas, Cambridge University Press, (ISBN 0-521-59421-9, lire en ligne), p. 309 (consulté le 21/02/2015)
  4. (de) Gerd Theissen, « Urchristlicher Liebeskommunismus: Zum „Sitz im Leben“ des Topos απαντα κοινα v in: Apg 2,44 und 4,32. », dans Tornd Fornberg, David Hellholm, Texts and Contexts. Biblical Texts in Their Textual and Situational Contexts, Copenhague/Oslo, Scandinavian University Press,‎ , p. 689–711
  5. (de) Walter Schmithals, Die Apostelgeschichte des Lukas. Zürcher Bibelkommentare NT 3.2, Zürich, Theologischer Verlag, (ISBN 3-290-14731-2), p. 56
  6. Mineshige 2003, p. 232–234
  7. Michael Barnett, Janice Gross Stein, Sacred Aid: Faith and Humanitarianism, Oxford University Press, UK, 2012, p. 67
  8. Mineshige 2003, p. 245 sq
  9. (de) Friedrich W. Horn, Das Ende des Paulus, Walter de Gruyter, (ISBN 3-11-017001-9, lire en ligne), p. 29 (consulté le 21/02/2015)
  10. (de) Oscar Cullmann, « Ökumenische Kollekte und Gütergemeinschaft im Urchristentum », dans Oscar Cullmann, Vorträge und Aufsätze 1925–1962, Tübingen, Mohr/Siebeck, (ISBN 3-161-03201-2), p. 600–604
  11. (de) Christoph J. Karlson, « Zum sozio-kulturellen und theologischen Hintergrund der paulinischen Kollekte », dans Frank Adloff, Eckhard Priller, Rupert Strachwitz, Prosoziales Verhalten, Lucius & Lucius, (ISBN 978-3-828-20507-9, lire en ligne), p. 24–27 (consulté le 21/02/2015)
  12. Schäfers 1998, p. 133
  13. (de) Michael Borgolte, Sozialgeschichte des Mittelalters: Eine Forschungsbilanz nach der deutschen Einheit, München, Oldenbourg Wissenschaftsverlag, (ISBN 3-486-64447-5, lire en ligne), p. 340 (consulté le 21/02/2015)
  14. (de) Hans J. Milchner, Nachfolge Jesu und Imitatio Christi, Lit Verlag, (ISBN 3-8258-6948-2, lire en ligne), p. 224 (consulté le 21/02/2015)
  15. Meyer 1998, p. 243, n.3
  16. Schwaiger 2003, p. 132
  17. (de) Martin Honecker, « Geld II », dans Gerhard Müller, Horst Balz, Theologische Realenzyklopädie, Berlin, Walter de Gruyter, (ISBN 3-11-013898-0, lire en ligne), p. 283 (consulté le 21/02/2015)
  18. Meyer 1998, p. 110–120
  19. (de) Georg Holzherr, Die Benediktsregel: Eine Anleitung zu christlichem Leben, Freiburg, Paulusverlag, (ISBN 978-3-7228-0635-8, lire en ligne), p. 71 & n.29 (consulté le 21/02/2015)
  20. Meyer 1998, p. 264–267
  21. (de) Jürgen Kocka et Claus Offe, Geschichte und Zukunft der Arbeit, Campus Verlag, (ISBN 3-593-36487-5, lire en ligne), p. 71 (consulté le 21/02/2015)
  22. (de) Thomas Schilp, Norm und Wirklichkeit religiöser Frauengemeinschaften im Frühmittelalter (Pietismus Und Neuzeit), Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, (ISBN 3-525-35452-5, lire en ligne), p. 119 (consulté le 21/02/2015)
  23. a et b (de) Anton Grabner-Haider, Johann Maier et Karl Prenner, Kulturgeschichte des späten Mittelalters: Von 1200 bis 1500 n. Chr, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, (ISBN 978-3-525-53038-2, lire en ligne), p. 47 sq (consulté le 21/02/2015)
  24. Schäfers 1998, p. 207 & n.97
  25. (de) Gerhard Faix, Gabriel Biel und die Brüder vom gemeinsamen Leben: Quellen und Untersuchungen zu Verfassung und Selbstverständnis des Oberdeutschen Generalkapitels, Tübingen, Mohr/Siebeck, (ISBN 3-16-147040-0, lire en ligne), p. 144 (consulté le 21/02/2015)
  26. (de) Werner O. Packull, Die Hutterer in Tirol: frühes Täufertum in der Schweiz, Tirol und Mähren, Universitätsverlag Wagner, (ISBN 3-7030-0351-0), p. 57 sq
  27. (de) Heinold Fast, « Huttersche Brüder », dans Theologische Realenzyklopädie, t. 15, Berlin, Walter de Gruyter, (ISBN 3-11-008585-2, lire en ligne), p. 753 (consulté le 21/02/2015)
  28. (de) « Täufer/Täuferische Gemeinschaften », dans Horst Balz et al., Theologische Realenzyklopädie, t. 32, Berlin, Walter de Gruyter, (ISBN 3-11-016712-3, lire en ligne), p. 604 (consulté le 21/02/2015)
  29. (de) Hans-Jürgen Goertz, Religiöse Bewegungen in der Frühen Neuzeit, München, Oldenbourg Wissenschaftsverlag, (ISBN 3-486-55759-9, lire en ligne), p. 27 (consulté le 21/02/2015)
  30. Plümper 1972
  31. (de) Grete Mecenseffy, « Ursprünge und Strömungen des Täufertums in Österreich », Mitteilungen des Oberösterreichischen Landesarchivs, no 14,‎ , p. 77–94
  32. Seebaß et Dingel 1997, p. 157
  33. Seebaß et Dingel 1997, p. 46
  34. (de) Hellmut Zschoch, Reformatorische Existenz und konfessionelle Identität, Tübingen, Mohr/Siebeck, (ISBN 3-16-146376-5, lire en ligne), p. 258 (consulté le 21/02/2015)
  35. Seebaß et Dingel 1997, p. 289
  36. (de) Jürgen Moltmann, Ethik der Hoffnung, Gütersloh, Gütersloher Verlagshaus, (ISBN 978-3-579-01929-1, lire en ligne), p. 40 sq (consulté le 21/02/2015)
  37. Schempp 1969, p. 29
  38. (de) Cornna Dahlgrün, Christliche Spiritualität: Formen und Traditionen der Suche nach Gott, Berlin, Walter de Gruyter (ISBN 3-110-17802-8), p. 26-28
  39. Schempp 1969, p. 175 sq
  40. (de) Günter Bartsch, Kommunismus, Sozialismus, Anarchismus: von Mazdak bis Mao - von Saint Simon bis Saragat - von Godwin über Bakunin bis zu den Anarchos von heute, vol. 72, coll. « Schriftenreihe der Bundeszentrale für politische Bildung » (ISSN 0435-7604), p. 45
  41. (de) Michael Walter, Tolstoi nach seinen sozialökonomischen, staatstheoretischen und politischen Anschauungen, Druck von Schulthess, , p. 85 sq
  42. (de) Ulrich Bräker, Sämtliche Schriften : Kommentar und Register, t. 5, München, Beck, (ISBN 3-406-43539-4, lire en ligne), p. 244 (consulté le 21/02/2015)
  43. (de) Hans-Joachim Mähl, Die Idee des goldenen Zeitalters im Werk des Novalis, Tübingen, , 2e éd., p. 236–244
  44. (de) Jobst Reller, Seelsorge, Gemeinde, Mission und Diakonie: Impulse von Ludwig Harms aus Anlass seines 200. Geburtstages, Lit Verlag, (ISBN 3-825-81942-6, lire en ligne), p. 19, n.12 (consulté le 21/02/2015)
  45. (en) Robert P. Sutton, Communal Utopias and the American Experience Religious Communities, 1732-2000, Greenwood, (ISBN 0-275-97554-1, lire en ligne), p. 37-46 (consulté le 21/02/2015)
  46. Schempp 1969, p. 171
  47. (de) Robert Friedmann, « Bruderhof », dans Global Anabaptist Mennonite Encyclopedia Online (GAMEO) (lire en ligne)
  48. Schempp 1969, p. 126
  49. (de) Edith Hanke, Prophet Des Unmodernen: Leo N. Tolstoi als Kulturkritiker in der deutschen Diskussion der Jahrhundertwende, Max Niemeyer, (ISBN 3-484-35038-5), p. 145
  50. (de) Oswald Eggenberger, Kirchen Sekten Religionen, Zürich, Theologischer Verlag, (ISBN 3-290-17215-5, lire en ligne), p. 44 (consulté le 21/02/2015)
  51. (de) EKD, Die evangelischen Kommunitäten : Bericht des Beauftragten des Rates der EKD für den Kontakt zu den evangelischen Kommunitäten 1997 (lire en ligne) (consulté le 21/02/2015)
  52. Schwaiger 2003, p. 127
  53. Klauck 1989
  54. (de) Vincenco Petracca, Gott oder das Geld. Die Besitzethik des Lukas, Francke, (ISBN 3-7720-2831-4), p. 261–273
  55. (de) Marek Winiarczyk, Die hellenistischen Utopien, Berlin, Walter de Gruyter, (ISBN 978-3-110-26381-7, lire en ligne), p. 150 (consulté le 21/02/2015)
  56. a et b (de) Christoph Riedweg, Pythagoras. Leben, Lehre, Nachwirkung. Eine Einführung, München, Beck, (ISBN 3-406-48714-9, lire en ligne), p. 56 (consulté le 21/02/2015)
  57. Cité selon Forster 2007, p. 358
  58. Mineshige 2003, p. 225, n. 44
  59. (de) Martin Hengel, Studien zum Urchristentum, Tübingen, Mohr/Siebeck, (ISBN 978-3-16-149509-0), p. 360
  60. (de) Gerd Theißen, Die Weisheit des Urchristentums, München, Beck, (ISBN 978-3-406-57743-7, lire en ligne), p. 168 (consulté le 21/02/2015)
  61. (de) Matthias Conradt, « Gott oder Mammon », dans Christoph Sigrist, Diakonie und Ökonomie, Zürich, Theologischer Verlag, (ISBN 3-290-17388-7, lire en ligne), p. 126 (consulté le 21/02/2015)
  62. Forster 2007, p. 367
  63. (de) Stefan Schreiber, Weihnachtspolitik: Lukas 1-2 und das Goldene Zeitalter, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, (ISBN 3-525-53392-6, lire en ligne), p. 33 (consulté le 21/02/2015)
  64. (de) Frank Kürschner-Pelkmann, Von Herodes bis Hoppenstedt: Auf den Spuren der Weihnachtsgeschichte, tredition, (lire en ligne), p. 387 (consulté le 21/02/2015)
  65. (de) Otto Betz, Jesus - der Herr der Kirche: Aufsätze zur biblischen Theologie II., Tübingen, Mohr/Siebeck, (ISBN 3-161-45505-3, lire en ligne), p. 12 (consulté le 21/02/2015)
  66. (de) Erich Grässer, Forschungen zur Apostelgeschichte, Tübingen, Mohr/Siebeck, (ISBN 3-161-47592-5, lire en ligne), p. 126 (consulté le 21/02/2015)
  67. a et b Stuhlmacher 2005, p. 205
  68. Cité selon (de) Gottfried Orth, Siehst du den Balken nicht? Soziale Gerechtigkeit, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, (ISBN 3-525-61038-6, lire en ligne), p. 56 (consulté le 21/02/2015)
  69. Cité selon Stuhlmacher 2005, p. 204
  70. (de) Grundriss der Sozialethik, Berlin, (lire en ligne), p. 478 (consulté le 21/02/2015)
  71. (de) Martin Honecker, Grundriss der Sozialethik, Berlin, Walter de Gruyter, (ISBN 3-110-14474-3, lire en ligne), p. 475 (consulté le 21/02/2015)
  72. (de) Martin Hengel et Anna M. Schwemer, Der messianische Anspruch Jesu und die Anfänge der Christologie, Tübingen, Mohr/Siebeck, (lire en ligne), p. 209 (consulté le 21/02/2015)
  73. (de) Herbert Stettberger, Nichts haben - alles geben? Eine kognitiv-linguistisch orientierte Studie zur Besitzethik im lukanischen Doppelwerk, Freiburg, Herder, (ISBN 3-451-28532-0), p. 102
  74. (de) Kim Tan, Das Erlassjahr-Evangelium: Ein Unternehmer entdeckt Gottes Gerechtigkeit, Neufeld Verlag, (ISBN 3-937-89699-6, lire en ligne), p. 140 (consulté le 21/02/2015)
  75. (de) Gerhard Jankowski, « … und hatten alles gemeinsam (Apg 4,32) », dans Kuno Füssel, Franz Segbers, … so lernen die Völker des Erdkreises Gerechtigkeit. Ein Arbeitsbuch zu Bibel und Ökonomie, Salzburg, (ISBN 3-702-50324-2), p. 139–146
  76. (de) Jacob Jervell, Kritisch-exegetischer Kommentar über das Neue Testament. Die Apostelgeschichte : Neuauslegung, t. 3, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, (ISBN 3-525-51627-4, lire en ligne), p. 192 & n.495 (consulté le 21/02/2015)
  77. (de) Daniel Marguerat, Lukas, der erste christliche Historiker: Eine Studie zur Apostelgeschichte, Zürich, Theologischer Verlag, (ISBN 978-3-290-17472-9, lire en ligne), p. 264 (consulté le 21/02/2015)
  78. Mineshige 2003, p. 225 & n.50
  79. Schäfers 1998, p. 133 et n.229
  80. Roloff 2010, p. 95
  81. Stuhlmacher 2005, p. 203, 205
  82. (de) Hans Jürgen Goertz, Alles gehört allen. Das Experiment der Gütergemeinschaft vom 16. Jahrhundert bis heute, München,
  83. (de) Friedrich Engels, « Fortschritt der Sozialreform auf dem Kontinent : Manchester, 1843 », dans Karl Marx, Friedrich Engels, Werke, Berlin-Est, Dietz Verlag, 1981i, p. 487-489
  84. Leutzsch 1994, p. 79 sq
  85. (de) Klaus Kreppel, Entscheidung für den Sozialismus: die politische Biographie Pastor Wilhelm Hohoffs 1848–1923, Neue Gesellschaft, (ISBN 3-87831-182-6), p. 39
  86. Leutzsch 1994, p. 81
  87. (de) Theo Sommerlad, Das Wirtschaftsprogramm der Kirche des Mittelalters, Leipzig, , p. 23 sq cité par Schäfers 1998, p. 129, n.232
  88. (de) Karl Kautsky, Die Sozialdemokratie und die katholische Kirche,
  89. (de) Karl Kautsky, Der Ursprung des Christentums,
  90. (de) Rosa Luxemburg, « Kirche und Sozialismus : Citation partielle », dans Jürgen Hentze, Internationalismus und Klassenkampf: Die Polnischen Schriften, Luchterhand, (lire en ligne), p. 47 (consulté le 21/02/2015)
  91. (de) Ernst Troeltsch, Die Soziallehren der christlichen Kirchen und Gruppen,
  92. (de) Hans von Schubert, Christentum und Kommunismus,
  93. (de) Leonard Ragaz, « Unser Sozialismus », Neue Wege, no 11,‎ , p. 583 sq
  94. Discussion présentée dans (de) Martin Leutzsch, Erinnerung an die Gütergemeinschaft, Würzburg, (lire en ligne), p. 81-86 (consulté le 21/02/2015)
  95. Schäfers 1998, p. 129sq
  96. Roloff 2010, p. 88 sq
  97. (de) Hans Conzelmann, Grundrisse zum Neuen Testament : Geschichte des Urchristentums, t. 5, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, , 6e éd. (1re éd. 1969) (ISBN 3-525-51354-2, lire en ligne), p. 24 sq (consulté le 21/02/2015)
  98. (de) Gerd Theißen, Von Jesus zur urchristlichen Zeichenwelt: Neutestamentliche Grenzgänge im Dialog, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, (ISBN 978-3-525-55023-6, lire en ligne), p. 30 (consulté le 21/02/2015)
  99. (de) Ulrich Luz, « Biblische Grundlagen der Diakonie », dans Günter Ruddat, Gerhard Schäfer, Diakonisches Kompendium, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, (ISBN 3-525-62379-8, lire en ligne), p. 25 sq (consulté le 21/02/2015)
  100. Roloff 2010, p. 90
  101. Leutzsch 1994, p. 80-92
  102. Leutzsch 1994, p. 86
  103. (de) Wolfgang Reinhardt, Das Wachstum des Gottesvolkes, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, (ISBN 3-525-53632-1, lire en ligne), p. 177 (consulté le 21/02/2015)
  104. Leutzsch 1994, p. 92
  105. (de) Jakob Leonhard Vogel, Altertümer der ersten und ältesten Christen, Hamburg, , p. 47 sq cité dans (de) Rosa Luxemburg, Kirche und Sozialismus, (lire en ligne) (consulté le 21/02/2015)
  106. Leutzsch 1994, p. 88 sq

Voir aussi modifier

Articles connexes modifier

Bibliographie modifier

  • (de) Eberhard Arnold, « Sie hatten alles gemein », dans Friedrich Siegmund-Schultze, Die soziale Botschaft des Christentums für unsre Zeit dargestellt in Ansprachen von Männern und Frauen verschiedener Richtungen und Parteien, , 2e éd., p. 22-26
  • (de) Niclas Forster, Das gemeinschaftliche Gebet in der Sicht des Lukas, David Brown, (ISBN 90-429-1900-0, lire en ligne) (consulté le 21/02/2015)
  • (de) Hans-Jürgen Goertz (dir.), Alles gehört allen. Das Experiment Gütergemeinschaft vom 16. Jahrhundert bis heute, München, Beck, (ISBN 3-406-09289-6)
  • (de) Friedrich W. Horn, « Die Gütergemeinschaft der Urgemeinde », Evangelische Theologie, no 58,‎ , p. 370–383
  • (de) Hans-Josef Klauck, « Gütergemeinschaft in der klassischen Antike, in Qumran und im Neuen Testament. », dans Hans-Josef Klauck, Gemeinde – Amt – Sakrament. Neutestamentliche Perspektiven, Würzburg, Echter, (ISBN 3-429-01182-5), p. 69–100
  • (de) Martin Leutzsch, « Erinnerung an die Gütergemeinschaft. Über Sozialismus und Bibel », dans Richard Faber, Sozialismus in Geschichte und Gegenwart, Würzburg, Königshausen & Neumann, (ISBN 3-884-79731-X, lire en ligne) (consulté le 21/02/2015)
  • (de) Ulrich Meyer, Soziales Handeln im Zeichen des „Hauses“: Zur Ökonomik in der Spätantike und im früheren Mittelalter, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, (ISBN 3-525-35455-X, lire en ligne), p. 243, n.3 (consulté le 21/02/2015)
  • (de) Kiyoshi Mineshige, Besitzverzicht und Almosen bei Lukas: Wesen und Forderung des lukanischen Vermögensethos, Tübingen, Mohr/Siebeck, (ISBN 3-16-148078-3, lire en ligne) (consulté le 21/02/2015)
  • (de) José Porfirio Miranda, Der Kommunismus der Bibel, Münster, Edition ITP-Kompass, (ISBN 978-3-981-35626-7)
  • (de) Hans-Dieter Plümper, Die Gütergemeinschaft bei den Täufern des 16. Jahrhunderts, Göppingen, Alfred Kümmerle,
  • (de) Jürgen Roloff, Das Neue Testament Deutsch (NTD) : Die Apostelgeschichte, t. 5, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, (ISBN 978-3-525-51361-3, lire en ligne) (consulté le 21/02/2015)
  • (de) Michael Schäfers, Prophetische Kraft der kirchlichen Soziallehre? Armut, Arbeit, Eigentum und Wirtschaftskritik, Münster, LIT Verlag, (lire en ligne) (consulté le 21/02/2015)
  • (de) Hermann Schempp, Gemeinschaftssiedlungen auf religiöser und weltanschaulicher Grundlage, Tübingen, Mohr/Siebeck, (ISBN 3-16-529272-8, lire en ligne) (consulté le 21/02/2015)
  • (de) Georg Schwaiger, Mönchtum, Orden, Klöster: Von den Anfängen bis zur Gegenwart. Ein Lexikon, München, Beck, (ISBN 3-406-49483-8, lire en ligne), p. 132 (consulté le 21/02/2015)
  • (de) Gottfried Seebaß et Irene Dingel, Die Reformation und ihre Außenseiter. Gesammelte Aufsätze und Vorträge, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, (ISBN 3-525-58165-3, lire en ligne) (consulté le 21/02/2015)
  • (de) Peter Stuhlmacher, Biblische Theologie des Neuen Testaments : Grundlegung. Von Jesus zu Paulus, t. 1, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, (ISBN 3-525-53146-X, lire en ligne) (consulté le 21/02/2015)
  • (de) Manfred Wacht, « Gütergemeinschaft », dans Theodor Klauser, Reallexikon für Antike und Christentum, t. 13, Stuttgart, Anton Hiersemann, , col. 47–79