Comitat (Hongrie)

département de la Hongrie

Le comitat (hongrois : vármegye, [ˈvaːrmɛɟɛ] ; latin : comitatus) est la subdivision politique intermédiaire entre l'État et les localités en Hongrie. De 1950 à 2022, la notion de département (en hongrois : megye, [ˈmɛɟɛ]) lui est privilégiée.

Comitat
Administration
Pays Drapeau de la Hongrie Hongrie
Type collectivité territoriale
Division supérieure région (regió)
Division inférieure districts (járás)
Nombre de subdivisions 19
Joupan (ispán)
Création
Localisation
Localisation de Comitat
Carte des comitats hongrois.

Au nombre de 19 aujourd'hui, mais de 64 jusqu'en 1918, on y ajoute traditionnellement Budapest, qui bénéficie cependant d'un statut particulier. Les comitats maillent le territoire hongrois de manière contigüe. En raison de la centralisation politico-administrative de la Hongrie, les compétences des collectivités comitales (vármegyei önkormányzat) restent très limitées. Celles-ci concernent les services qui s'appliquent sur l'ensemble du territoire comital, les établissements scolaires secondaires (collèges), les établissements médicaux spécialisés ainsi qu'un rôle de coordination de l'aménagement du territoire. De plus, elles ne s'appliquent pas aux villes de droit comital qui disposent de leur propre conseil comital (vármegyei közgyűlés) superposée au conseil local. Le comitat correspond au niveau NUTS 3 de la nomenclature d'unités territoriales statistiques européenne.

Étymologie

modifier

Le nom « comitat » vient du latin comitatus et a la même étymologie que les mots comte et comté.

Histoire

modifier

Les origines du régime comital

modifier

Le régime comital médiéval remontant aux origines de la Hongrie concernait aussi bien le royaume de Hongrie proprement dit que ses deux entités vassales, la Croatie-Slavonie au Sud-Ouest, et la Transylvanie à l'Est. Il est aboli en 1784 lors de l'établissement des nouveaux Bezirke par l'empereur Joseph II d'Autriche.

 
L'organisation administrative du Royaume de Hongrie après la réforme Josephienne (1782-1785)

Le régime comital du royaume de Hongrie après le Compromis austro-hongrois

modifier

La réforme administrative de 1876 supprime les particularités locales héritées du féodalisme et établit 72 nouveaux comitats, avec des limites simplifiées pour rendre l'administration de l'État plus efficace dans les pays de la Couronne de Saint-Étienne issus du Compromis austro-hongrois de 1867, soit les deux royaumes associés de Hongrie (64 comitats) et de Croatie-Slavonie (8 comitats).

 
Les 64 comitats des pays de la Couronne de Saint-Étienne en 1891

Les 64 comitats du royaume de Hongrie

modifier
Nom du comitat Siège Pays actuel Sup.
(km²)
Pop.[1] Dens.
  Abaúj-Torna Kassa / Košice   Hongrie
  Slovaquie
3 317 202 282 61
  Alsó-Fehér Nagyenyed / Aiud   Roumanie 3 646 221 618 61
  Arad Arad / Arad   Hongrie
  Roumanie
6 048 414 388 69
  Árva Alsókubin / Dolný Kubín   Slovaquie 2 018 78 745 39
  Bács-Bodrog Zombor / Sombor   Hongrie
  Serbie
11 079,4 812 385 73
  Baranya Pécs   Hongrie
  Croatie
5 177 352 418 68,1
  Bars Aranyosmarót / Zlaté Moravce   Slovaquie 2 724 178 500 65,5
  Békés Gyula   Hongrie 3 670 298 710 81,4
  Bereg Beregszász / Berehove   Hongrie
  Ukraine
3 786 236 611 62,5
  Beszterce-Naszód Beszterce / Bistrița   Roumanie
  Bihar Nagyvárad / Oradea   Hongrie
  Roumanie
  Borsod Miskolc   Hongrie
  Brassó Brassó / Brașov   Roumanie
  Csanád Makó   Hongrie
  Csík Csíkszereda / Miercurea-Ciuc   Roumanie
  Csongrád Szentes   Hongrie
  Esztergom Esztergom   Hongrie
  Slovaquie
  Fejér Székesfehérvár   Hongrie
Fogaras Fogaras / Făgăraș   Roumanie
  Gömör és Kis-Hont Rimaszombat / Rimavská Sobota   Hongrie
  Slovaquie
  Győr Győr   Hongrie
  Hajdú Debrecen   Hongrie
  Háromszék Sepsiszentgyörgy / Sfântu Gheorghe   Roumanie
  Heves Eger   Hongrie
  Hont Ipolyság / Šahy   Hongrie
  Slovaquie
  Hunyad Déva / Deva   Roumanie 7 809 350 135 45
  Jász-Nagykun-Szolnok Szolnok   Hongrie
  Kis-Küküllő Dicsőszentmárton / Târnăveni   Roumanie 1 724 116 091 67
  Kolozs Kolozsvár / Cluj   Roumanie 5 006 286 687 57
  Komárom Komárom / Komárno   Hongrie
  Slovaquie
  Krassó-Szörény Lugos / Lugoj   Roumanie
  Liptó Liptószentmiklós / Liptovský Mikuláš   Slovaquie
Máramaros Máramarossziget / Sighetu Marmației   Roumanie
  Ukraine
Maros-Torda Marosvásárhely / Târgu Mureș   Roumanie
  Moson Mosonmagyaróvár   Hongrie
  Autriche
Nagy-Küküllő Segesvár / Sighișoara   Roumanie
  Nógrád Balassagyarmat   Hongrie
  Slovaquie
Nyitra Nyitra / Nitra   Slovaquie
Pest-Pilis-Solt-Kiskun Budapest   Hongrie
  Pozsony Pozsony / Bratislava   Slovaquie
Sáros Eperjes / Prešov   Slovaquie
  Somogy Kaposvár   Hongrie
Sopron Sopron   Hongrie
  Autriche
  Szabolcs Nyíregyháza   Hongrie
  Slovaquie
  Szatmár Nagykároly / Carei   Hongrie
  Roumanie
  Szeben Nagyszeben / Sibiu   Roumanie
  Szepes Lőcse / Levoča   Slovaquie
  Pologne
3 668 172 867 47
Szilágy Zilah / Zalău   Roumanie
Szolnok-Doboka Dés / Dej   Roumanie
Temes Temesvár / Timișoara   Serbie
  Roumanie
  Tolna Szekszárd   Hongrie
Torda-Aranyos Torda / Turda   Roumanie
  Torontál Nagybecskerek / Zrenjanin   Hongrie
  Serbie
Trencsén Trencsén / Trenčín   Slovaquie
  Turóc Turócszentmárton / Martin   Slovaquie 1 123 55 700 49,6
  Udvarhely Székelyudvarhely / Odorheiu Secuiesc   Roumanie
  Ugocsa Nagyszőlős / Vynohradiv   Ukraine
  Ung Ungvár / Oujharad   Hongrie
  Ukraine
  Slovaquie
3 230 161 989 50,2
  Vas Szombathely   Hongrie
  Slovénie
  Autriche
  Veszprém Veszprém   Hongrie
  Zala Zalaegerszeg   Hongrie
  Croatie
  Zemplén Sátoraljaújhely   Hongrie
  Slovaquie
  Zólyom Besztercebánya / Banská Bystrica   Slovaquie 2 634 133 700 51

Entre parenthèses, le siège du comitat :

Le régime comital du royaume de Hongrie après le traité de Trianon

modifier
 
Comitats et districts du royaume de Hongrie (1941-1944)
Nom du comitat Siège Superficie
(km²)
Population Population
densité
Localités
  Abaúj-Torna
  Bács-Bodrog
  Baranya
Bars és Hont
  Békés
  Bereg
Beszterce-Naszód
  Bihar
  Borsod
Csanád, Arad és Torontál
  Csík
  Csongrád
  Esztergom
  Fejér
  Gömör és Kis-Hont
Győr, Moson és Pozsony
  Hajdú
  Háromszék
  Heves
  Jász-Nagykun-Szolnok
Kolozs
  Komárom
Máramaros
Maros-Torda
  Nógrád
Nyitra és Pozsony
Pest-Pilis-Solt-Kiskun
  Somogy
Sopron
  Szabolcs
  Szatmár
Szilágy
Szolnok-Doboka
  Tolna
  Udvarhely
  Ugocsa
Ung
  Vas
  Veszprém
  Zala
  Zemplén

Le régime comital hongrois depuis 1950

modifier

1950 : Réforme territoriale et adoption du modèle soviétique

modifier

En 1950, la Hongrie adopte une réforme administrative d'inspiration soviétique visant à rationaliser la structure territoriale du pays. Cette réorganisation, accompagnée d'une restructuration des districts, établit le système des conseils populaires et remplace les 25 comitats et 14 villes à statut municipal par 19 départements (megye) et la ville de Budapest. L'objectif est d'équilibrer la répartition de la population et des superficies, tout en instaurant un modèle de gouvernance centralisé.

Cette transformation repose sur plusieurs textes législatifs, dont la loi XX de 1949, qui établit les principes fondamentaux de l'organisation territoriale et confie au Conseil des ministres la gestion du découpage administratif, et la loi XXVI de 1949, qui entraîne l'intégration de 7 villes départementales et 16 grandes communes dans le Grand Budapest. Un décret gouvernemental (4.343/1949 du 14 décembre) définit la nouvelle nomenclature des départements et confie au ministre de l'Intérieur l'organisation détaillée de la transition, mise en œuvre par deux décrets ministériels (29 janvier et 12 mars 1950), entraînant une application en deux étapes. En parallèle, la loi I de 1950 sur les conseils locaux établit le cadre des nouveaux organes du pouvoir d'État et place le Conseil municipal de Budapest sur un pied d'égalité avec les conseils départementaux.

Toutefois, la réforme ne s'applique pas immédiatement partout. Dans les départements de Komárom et Nógrád, les nouvelles préfectures ne deviennent effectives qu'en 1952, entraînant le maintien temporaire des anciens chefs-lieux : Balassagyarmat reste la capitale de Nógrád jusqu'à son transfert à Salgótarján, tandis qu'Esztergom conserve ce rôle jusqu'à son remplacement par Tatabánya. Certains services de l'État, comme les tribunaux départementaux, conservent également leur siège historique pendant plusieurs décennies, le tribunal de Komárom n'étant déplacé d'Esztergom à Tatabánya que dans les années 1980, tandis que ceux de Békés et Nógrád restent encore aujourd'hui à Gyula et Balassagyarmat.

Évolutions et ajustements après 1950

modifier

Si la réforme de 1950 marque une rupture majeure, le découpage territorial reste largement inchangé pendant plus d'un demi-siècle, une stabilité inédite dans l'histoire administrative hongroise. Seuls quelques ajustements sont effectués : en 1962, le chef-lieu de Csongrád est transféré de Hódmezővásárhely à Szeged ; en 1956, Bakonycsernye passe de Veszprém à Fejér ; et en 1978, Keszthely et son district sont rattachés à Zala après leur séparation de Veszprém.

Des modifications interviennent également dans le statut des villes. En 1954, Debrecen, Miskolc, Pécs et Szeged sont érigées en villes à statut départemental, les plaçant hors de la juridiction de leur département, avant que cette disposition ne soit abrogée en 1971 et remplacée par un statut de « ville départementale » (megyei város), étendu à Győr. En 1989, Kecskemét, Nyíregyháza et Székesfehérvár obtiennent ce même statut, qui est toutefois supprimé en 1990.

1990 : Réorganisation territoriale dans la Hongrie post-communiste

modifier

La loi LXV de 1990 sur les collectivités locales transforme profondément l'administration hongroise. Elle vise à établir une démocratie locale en réduisant le pouvoir des départements, qui perdent leur capacité à lever des impôts et sont cantonnés à un rôle de coordination et de gestion de services publics. Cette transition entraîne un changement d'identité pour plusieurs départements : Győr-Sopron devient Győr-Moson-Sopron, Szolnok devient Jász-Nagykun-Szolnok, Komárom devient Komárom-Esztergom, et Szabolcs-Szatmár devient Szabolcs-Szatmár-Bereg.

Un nouveau statut de « ville à statut départemental » (megyei jogú város) est créé, offrant une large autonomie sans séparation administrative. Son adoption se fait progressivement : 20 villes obtiennent ce statut en 1990, suivies de 2 en 1994, 1 en 2006 et 2 en 2022. Aujourd'hui, toutes les capitales départementales (sauf Budapest) ainsi que sept autres grandes villes en bénéficient.

Après 1990, les modifications territoriales restent limitées. Le plus visible concerne Veszprém, qui perd 11 communes au profit de Győr-Moson-Sopron entre 1992 et 2002 (Csikvánd, Gyarmat, Szerecseny en 1992 ; Bakonypéterd et Lázi en 1999 ; Bakonygyirót, Bakonyszentlászló, Fenyőfő, Románd, Sikátor et Veszprémvarsány en 2002). D'autres ajustements ont lieu, notamment en 1996, avec le transfert de Dunafalva de Baranya à Bács-Kiskun, celui de Tiszaug de Jász-Nagykun-Szolnok à Bács-Kiskun en 1999, ainsi que le rattachement de Szárliget de Fejér à Komárom-Esztergom. En 2013, Balatonvilágos est transférée de Veszprém à Somogy.

2023 : Retour au terme « comitat »

modifier

La 11e modification de la Loi fondamentale (Alaptörvény), entrée en vigueur le 1er janvier 2023, marque un retour symbolique à la terminologie historique. Le terme « département » (megye) est abandonné au profit du mot « comitat » (vármegye), restaurant ainsi une tradition millénaire dans l'administration hongroise. Cette modification introduit une nouvelle appellation pour les préfets, désormais désignés sous le titre historique d'« ispán » (en français joupan, équivalent médiéval du gouverneur de comitat sous la monarchie hongroise).

Selon ses détracteurs, cette réforme est avant tout symbolique et déconnectée des enjeux réels du pays, détournant l'attention des problèmes économiques et sociaux. Ils dénoncent également une volonté du gouvernement Orbán de renforcer une rhétorique nationaliste, en réintroduisant un terme associé à l'ancienne Hongrie royale et à l'aristocratie féodale, ce qui serait perçu comme anachronique dans un État moderne et membre de l'Union européenne. D'autres voix critiquent le coût administratif engendré par ce changement, notamment la mise à jour des documents officiels et des enseignes institutionnelles, jugée superflue en période de difficultés économiques.

Liste des comitats hongrois

modifier
 
Les 19 comitats institués par la loi 65 de 1990 (20 avec Budapest).
Nom du comitat Siège Superficie
(km²)
Population[2] Population
densité
Localités
  Bács-Kiskun Kecskemét 8 445 511 419 60.6 120
  Baranya Pécs 4 430 368 135 83.1 301
  Békés Békéscsaba 5 631 347 058 61.6 75
  Borsod-Abaúj-Zemplén Miskolc 7 247 660 549 91.1 355
  Budapest Budapest 525 1 759 407 3 350.2 23
  Csongrád-Csanád Szeged 4 263 404 459 94.9 60
  Fejér Székesfehérvár 4 359 418 487 96.0 108
  Győr-Moson-Sopron Győr 4 208 455 217 111.3 182
  Hajdú-Bihar Debrecen 6 211 534 974 86.1 82
  Heves Eger 3 637 299 219 82.3 119
  Jász-Nagykun-Szolnok Szolnok 5 582 376 334 67.4 75
  Komárom-Esztergom Tatabánya 2 265 297 914 131.5 76
  Nógrád Salgótarján 2 546 193 946 76.2 129
  Pest Budapest 6 390 1 234 541 193.1 186
  Somogy Kaposvár 6 036 309 115 51.2 244
  Szabolcs-Szatmár-Bereg Nyíregyháza 5 936 563 075 94.9 228
  Tolna Szekszárd 3 703 223 618 60.4 108
  Vas Szombathely 3 336 253 689 76.0 216
  Veszprém Veszprém 4 493 344 302 76.6 217
  Zala Zalaegerszeg 3 784 275 027 72.7 257

Les villes de droit comital

modifier

Chaque chef-lieu de comitat est une ville de droit comital (megyei jogú város) et il s'y ajoute cinq autres villes de plus de 50 000 habitants :

Les collectivités des minorités à l'échelon comital

modifier

Il existe 13 minorités nationales, ethniques et religieuses reconnues officiellement par la loi en Hongrie. La loi de 1993 leur donne le droit de voter à l'échelle nationale ainsi qu'à l'échelon de chaque collectivité territoriale (comitats et localités) pour leurs propres représentants. Ces derniers forment des collectivités des minorités (kisebbségi önkormányzat) qui disposent de compétences particulières pour fixer le calendrier de leurs fêtes et célébrations, contribuer à la préservation de leurs traditions et participer à l'éducation publique. Ces collectivités particulières peuvent ainsi gérer des théâtres publics, des bibliothèques, des institutions scientifiques et artistiques, attribuer des bourses d'études et dispenser de services en direction de leur communauté (aides juridiques notamment).

Voir aussi

modifier

Articles connexes

modifier

Notes et références

modifier

Références

modifier
  1. Population de l'entité au début du XXe siècle
  2. Population en 2016