Charles de Montferrand

baron français
Charles de Montferrand
Charles de Montferrand, maire de Bordeaux. Dessin d'après François Clouet (vers 1570).
Fonction
Maire de Bordeaux
-
Biographie
Naissance
Vers 1535
Lieu inconnuVoir et modifier les données sur Wikidata
Décès
Nationalité
Statut

Charles II ou Charles Gaston de Montferrand est un baron français tué le au siège de Gensac, gouverneur puis maire de Bordeaux de 1573 à sa mort[1]. Il s'illustre par sa brutalité et son avidité lors des guerres de Religion en Guyenne.

Biographie modifier

Charles Gaston de Montferrand naît vers 1535. Il est le fils de Françoise d'Aydie et de Charles Ier († 1548), dont il hérite les titres de baron de Montferrand, de Langoiran et de Frespech. Il est fait chevalier de l'Ordre de Saint-Michel[2].

En 1561 il se met au service de Blaise de Monluc, gouverneur de Guyenne, fervent ennemi des Protestants et particulièrement intolérant et brutal. Monluc l'impose en 1569 comme gouverneur de Bordeaux[1]. Élu maire en 1573 par les jurats à l'instigation de Monluc, il reçoit mandat de « houspiller les jurats, entraver le Parlement, mater les huguenots »[1].

Début octobre 1572, l'onde de choc de la Saint-Barthélémy atteint Bordeaux : Montferrand entraîne[Note 1] le peuple (six compagnies conduits par le jurat Pierre de Lestonnac, 300 hommes de pied coiffés d'un bonnet rouge[3]) à s'en prendre aux protestants de la ville. Il montre aux jurats une liste nominative de personnes à exécuter, prétendument sur ordre du roi, déclenchant massacre et pillages[4]. Lui-même assassine les conseillers au Parlement Jean Guilloche de La Loubière[5] et Pierre de Sevyn, un prêtre catholique malade soupçonné d'hérésie, et plusieurs secrétaires et huissiers. Le massacre dure trois jours, l'appât du gain et les vengeances personnelles contribuant au lourd bilan. Montferrand se vante peu après d'« d'avoir fait égorger 264 huguenots dans la seule journée du  », mais déclare le 9 octobre devant le Parlement qu'il « n'a tué le jour de l'exécution par lui faite le 3 octobre que dix à douze hommes »[1].

Le Parlement — pourtant catholique — dénonce ses massacres et l'accord passé entre le maire et Monluc pour se partager les rançons des prisonniers protestants[1].

Charles de Montferrand reçoit pour mission d'exécuter la condamnation à mort par contumace de son frère cadet, Guy de Montferrand dit « Langoiran », chef militaire de la Réforme en Guyenne, rescapé des massacres de la Saint-Barthélémy. Il mène probablement cette tâche sans grande conviction, et son frère lui échappe.

Les huguenots reprennent les armes et occupent Blanquefort en juin 1573, puis cerné par Monluc au siège de Gensac. Montferrand venu en renfort est abattu d'un « coup d'arquebuse au travers du corps »[6] par un assiégé protestant le .

Il meurt sans avoir eu d'enfant de sa femme Marguerite de Montferrand — une cousine éloignée épousée le 29 décembre 1557 — et, dit-on, peu regretté de celle-ci qui vivait séparée de lui au château de son père à Cancon[2]. La baronnie passe entre les mains de son frère cadet Guy, l'un des chefs... du parti protestant[7]. Sa dépouille est rapatriée à Bordeaux le et enterrée dans la cathédrale Saint-André de Bordeaux[1].

Descriptions modifier

Pour Boscheron des Portes, c'était « un gentilhomme de province, distingué par sa naissance, ne manquant pas de valeur militaire, mais en même temps un des hommes les moins faits pour les emplois qui exigent l'empire de soi-même et la fermeté d'âme dans les mauvais jours. Ses mœurs étaient corrompues et son désintéressement nul. Avec de pareils vices, Montferrand était fatalement prédisposé à commettre de grandes fautes dans les circonstances critiques où il allait se trouver »[8].

Pour l'historien d'origine protestante Camille Jullian «  il est malicieux, orgueilleux, fourbe, débauché, avide et cruel. Le seigneur de Montferrand mit pendant six ans ses titres de gouverneur et de maire au service des plus villes passions et des plus sombres vengeances »[9].

Agrippa d'Aubigné le nomme « le pitoyable Montferrand, impitoyable gouverneur de Bordeaux »[10].

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. Avec le jurat Pierre de Lestonnac, un prédicateur défroqué nommé La Godine, et le prédicateur Émond Auger qui pourtant vilipende sa tiédeur dans ses sermons : « l'épée de Montferrand tenait au fourreau ».

Références modifier

  1. a b c d e et f Histoire des maires de Bordeaux, Bordeaux, Les Dossiers d'Aquitaine, , 523 p. (ISBN 978-2-84622-171-9, lire en ligne), pages 150-151
  2. a et b « Charles de Montferrand », sur roglo.eu (consulté le )
  3. Paul Butel, Vivre à Bordeaux sous l'Ancien Régime, Perrin (réédition numérique FeniXX), , 346 p. (ISBN 978-2-262-06028-2, lire en ligne)
  4. Arlette Jouanna, La Saint-Barthélemy. Les mystères d'un crime d'État (24 août 1572), Editions Gallimard, , 528 p. (ISBN 978-2-07-274888-2, lire en ligne)
  5. Francois Eudes de Mezerai, Histoire de France depuis Faramond jusqu' au regne de Louis le Juste, enrichie de plusieurs ... antiquitez ... des portraits au naturel des rois, des reines et des dauphins ... et d'un recueil des medailles ... Nouvelle edition reveue et augmentee par l'auteur d'un volume de l'origine des Francois, Thierry, (lire en ligne), p. 261
  6. Jean-Antoine Roucher, Collection universelle des mémoires particuliers relatifs à l'histoire de France : Contenant les Mémoires de Messire Blaise de Montluc, Maréchal de France; commençant en 1521, & finissant en 1574 : XVIe Siècle. 23, (lire en ligne), p. 55
  7. « Château de Langoiran, XIIIe siècle - Historique. », sur www.richesheures.net (consulté le )
  8. Boscheron des Portes, Histoire du Parlement de Bordeaux
  9. Camille Jullian, Histoire de Bordeaux
  10. Agrippa d' Aubigné, Œuvres complètes de Théodore Agrippa d'Aubigné : Notice. I. Biographie. II. Appréciation littéraire. Bibliographie. Notes et variantes. 1891, A. Lemerre, (lire en ligne)