Challenge Yves du Manoir
Sport | Rugby à XV |
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Création | 1931 |
Disparition | 1996 |
Organisateur(s) | Fédération française de rugby à XV |
Éditions | 53 |
Périodicité | annuelle |
Lieu(x) |
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Statut des participants |
professionnels, semi-pros et essentiellement amateurs |
Plus titré(s) | RC Narbonne (9) |
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Le challenge Yves du Manoir est une compétition de rugby à XV entre clubs français, créée le par le Racing Club de France.
Origine du nomModifier
Ce challenge porte le nom d'Yves du Manoir, ancien joueur de rugby du Racing Club de France, international et capitaine de l'Équipe de France, mort dans un accident d'avion en janvier 1928, à l'âge de 23 ans.
HistoireModifier
Contexte rugbystiqueModifier
Après la belle époque (1890-1914) et la Première Guerre mondiale pendant laquelle le championnat de France de Rugby est interrompu entre 1914 et 1919, le rugby français s'organise. La Fédération française de rugby (F.F.R.) est fondée le en prenant la suite du comité rugby de l'Union des sociétés françaises de sports athlétiques (U.S.F.S.A.). Elle adopte le nom de Fédération française de rugby le , le lendemain de la victoire française à Colombes dans la revanche de la finale qui a vu les Californiens, surnom donné à l'équipe américaine composée essentiellement d'étudiants des universités californiennes, remporter le titre olympique.
Le Stade toulousain connaît sa première période de domination du rugby français en remportant cinq titres de champion de France en six ans, de 1922 à 1927. C’est alors le règne de la « Vierge Rouge », comme on surnomme le club rouge et noir à la suite de son titre de 1912 au cours de laquelle l’équipe reste invaincue pendant toute la saison. L'USA Perpignan remporte deux fois le championnat en 1921 et 1925.
Hors du terrain, les années 1920-30 sont des années de crise pour le championnat. Le titre de champion de France attise les convoitises et entraîne des dérives : violence sur les terrains où les matches s'enlisent souvent dans des guerres de tranchées interminables (le ballon quitte rarement les pieds des avants, les trois-quart-aile finissant parfois des matches sans avoir touché un seul ballon) et accusations d’amateurisme marron rythment les saisons de plus en plus souvent.
En décembre 1930, quelques clubs dénoncent le professionnalisme déguisé pratiqué par certaines équipes où un patron peut salarier ses joueurs dans son entreprise. Quillan est ainsi le premier club en France, et sans doute au monde, à adopter le professionnalisme, 70 ans avant sa reconnaissance officielle[Note 1] par le Board. L'embauche factice des stars de Perpignan et d'ailleurs par Jean Bourrel[1],[2], roi de la chapellerie, fait la gloire du club dans une ville de trois mille habitants : on retrouvera Quillan en finale du championnat trois ans de suite (1928, 1929, 1930) et champion en 1929. Il précipita le rugby français dans l'abîme : en effet, la guerre qui opposa le club de la Haute Vallée à Perpignan et à Lézignan fut l'une des causes majeures de la rupture des relations décidée par les Britanniques en 1931[3].
Dix clubs font sécession et fondent en décembre 1930 l’Union française de rugby amateur (U.F.R.A.), qui se targue de rester fidèle aux idéaux de fair play et d’amateurisme du rugby, et demande à la Fédération française de remettre de l’ordre dans sa maison[4]. Sept d’entre eux sont d’anciens champions de France, mais ils sont exclus du championnat. Cette exclusion provoque la sécession de 14 clubs au total : Aviron bayonnais, Biarritz olympique, Stade bordelais, AS Carcassonne (demi-finaliste 1930), FC Grenoble, SAU Limoges, FC Lyon, Stade nantais, Section paloise (demi-finaliste 1930), US Perpignan, Stade français et Stade toulousain qui sont rejoints en janvier 1931 par un nouveau club, l’US Narbonne, et le Stadoceste tarbais, quart de finaliste en 1930.
Le rugby en France, à ce moment-là, n'est plus qu'un vaste champ de bataille où quelques industriels désireux d'affirmer leur pouvoir achètent les joueurs et démoralisent la discipline[5].
Création de la compétitionModifier
Le journal L'Auto (L'Équipe, aujourd'hui) annonce, le 21 septembre 1931, la création d'un nouveau challenge organisé par le Racing qui portera le nom de l'ancien rugbyman Yves du Manoir, en hommage à son esprit, sa loyauté, sa bravoure et son respect. On peut lire dans ses colonnes[6] et dans celles du Figaro du lendemain qui reprend l'information[7] :
« Pour donner plus d'intérêt aux matches amicaux, le Racing Club de France a décidé d'organiser un challenge qui portera le nom du regretté Yves du Manoir. Ce seul patronage suffit à indiquer dans quel esprit doit être disputée cette compétition : correction et loyauté avant tout. Le règlement spécifie qu'aucun joueur ne pourra être remplacé au cours du match. Ceci, afin d'éviter l'allure décousue de certaines rencontres où ont lieu de perpétuels va-et-vient entre la touche et le terrain. Pour cette année, le nombre des clubs participants est limité à sept. Ils ont été choisis parmi les meilleurs de France ainsi qu'on peut en juger par la liste suivante : Agen, Béziers, C.A.S.G., AS Monferrandaise, R.C.F., Lyon O.U., S.A. Bordelais. Chaque club doit se déplacer trois fois et recevoir trois fois. Le classement est obtenu par la méthode anglaise : 2 points pour un match gagné, 1 point pour un match nul. Le tournoi se déroulera du 4 octobre au 31 janvier. »
Les clubs qui le disputent sont invités par le Racing Club de France qui, lors de la création de l'épreuve, fut aidé essentiellement par deux autres clubs de 1re division « loyalistes » et encore liés à la F.F.R., le CA Bègles et l'AS Montferrand, alors que la dissidence de l'U.F.R.A. battait son plein.
Comme les participants sont invités par le Racing, il n’y a aucune pression relative à une éventuelle relégation et, afin de favoriser encore le jeu, les règles interdisent de tenter les coups de pied placés pour les buts (pénalités ou transformations), ce qui réduit d'autant les temps morts. En plus de la recherche d'un jeu agréable, le fair-play est également un élément mis en avant. Paradoxalement, le Racing ne gagnera jamais « son » challenge.
Avènement du professionnalismeModifier
Le championnat 1995-1996 voit le passage au professionnalisme[8] depuis qu'en août 1995, l'International Rugby Board a gommé de ses statuts toute référence à l'amateurisme. Le rugby devient alors un métier pour environ 600 joueurs qui signent un contrat professionnel avec leurs clubs, et voit le début de la réduction du nombre de clubs évoluant dans l'élite. Le bon niveau du championnat de France, ainsi resserré, est démontré par les premières victoires du Stade toulousain et du CA Brive en Coupe d'Europe, respectivement en 1996 et 1997. La création de la Coupe d'Europe augmente toutefois le nombre de matchs que doivent disputer les clubs et le « Trophée Du-Manoir » a de plus en plus de mal à trouver sa place dans le calendrier.
Devenu Coupe de France Yves-du-Manoir lors de la saison 1996-1997, le trophée est alors directement géré par la F.F.R.. Les clubs engagés en Coupes d'Europe entrent désormais dans la compétition à compter des seizièmes de finale. Le challenge devient ensuite la « Coupe de la Ligue » en 2001, puis le « Challenge Sud-Radio » en 2003.
Depuis 2004, ce tournoi annuel, labellisé par la F.F.R., est ouvert aux écoles de rugby pour les catégories mini-poussins, poussins, benjamins et minimes. Le classement est fait en fonction du résultat de toutes les équipes de chaque club engagé. Les clubs participants sont « invités » par le Racing club de France, et choisis parmi les clubs ayant remporté le Challenge Yves du Manoir, version seniors, et sur la « bonne tenue » de leurs équipes. Il est « la » référence des rencontres de jeunes sous le nom de « Tournoi national des écoles de rugby ».
Renaissance en Première Division FédéraleModifier
Le Challenge Yves du Manoir fait son retour[pas clair] lors de la saison 2018-2019 dans le cadre du Championnat de France de Fédérale 1. La compétition est disputée à l'issue de la phase régulière et permet aux équipes non-qualifiées pour le Trophée Jean Prat (qui attribue les deux billets d'accession à la Pro D2), de jouer une phase finale. Seize équipes se disputent le trophée, soit les clubs classés de la troisième à la sixième position des quatre poules de Fédérale 1, les deux premiers de chaque poule étant qualifiés pour le Jean Prat[Note 2].
PalmarèsModifier
De 1932 à 1939Modifier
C'est Agen qui s'empare de la première couronne en 1932[5].
Année | Vainqueur | Finaliste | Score |
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1932 | SU Agen | Lyon OU | (par poule) |
1933 | Lyon OU | SU Agen | (par poule) |
1934 | Stade toulousain et RC Toulon | 0-0 | |
1935 | USA Perpignan | AS Montferrand | 3-3 et 6-0 |
1936 | Aviron bayonnais | USA Perpignan | 9-3 |
1937 | Biarritz olympique | USA Perpignan | 3-0 |
1938 | AS Montferrand | USA Perpignan | 23-10 |
1939 | Section paloise | RC Toulon | 5-0 |
Interruption de 1940 à 1951Modifier
Le challenge est interrompu en 1940 en raison de la guerre mais n'est pas rétabli à la fin de la guerre du fait que la Coupe de France a pris le relais depuis 1943. Créée en fait en 1906, la Coupe de France reprend son essor en 1943 (zone occupée), en même temps que la nouvelle formule du championnat de France durant la guerre. 200 clubs sont inscrits alors et se rencontrent par élimination directe, les meilleures équipes de 1re division faisant leur entrée lors des derniers tours… à l'image du déroulement de la Coupe de France de football, la popularité est considérable en France. Les finales se succèdent de façon irrégulière entre les deux capitales du Sud-ouest, Bordeaux et Toulouse.
Le climat de la finale de 1951 (un derby entre Tarbes et Lourdes) est si détestable que les Anglais, qui ne voient pas cette épreuve d'un très bon œil, en demandent à mots couverts l'interdiction.
Rétablissement de 1952 à 1996Modifier
Le Président de la F.F.R. de l'époque s'exécute sans coup férir (la France vient tout juste de réintégrer avec difficultés le Tournoi des Cinq Nations quatre ans auparavant), au prétexte d'un calendrier annuel trop chargé pour les clubs (le championnat est d'ailleurs désormais joué par matches simples la même année). Moins attaché à la victoire, le Challenge Yves du Manoir renaît de ses cendres dès la saison suivante, après 12 années d'absence.
Le challenge s'arrête en 1996 et fusionne définitivement avec la Coupe de France pour devenir la Coupe de France Yves-du-Manoir.
Tournoi national des écoles de rugby depuis 2004Modifier
En 2004, le Challenge Yves du Manoir est labellisé par la F.F.R. « Tournoi national des écoles de rugby ».
- USA Perpignan : vainqueur en 2004
- Stade rochelais : vainqueur en 2009[Note 3]
- Stade toulousain : vainqueur en 2005, 2006, 2007, 2008, 2011, 2012
- RC Suresnes : vainqueur en 2010
StatistiquesModifier
Clubs les plus titrésModifier
Rang | Club | Titres Premier-Dernier |
Finales perdues Première-Dernière |
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1 | RC Narbonne | 9 1968-1991 |
3 1967-1992 |
2 | FC Lourdes | 6 1953-1981 |
1 1977 |
3 | US Dax | 5 1957-1982 |
2 1968-1988 |
4 | AS Béziers | 4 1964-1977 |
5 1961-1981 |
5 | SU Agen | 4 1932-1992 |
4 1933-1987 |
6 | Stade toulousain | 4 1934-1995 |
2 1971-1984 |
7 | ASM Clermont | 3 1938-1986 |
6 1935-1994 |
8 | USA Perpignan | 3 1935-1994 |
5 1953-1996 |
9 | Stade montois | 3 1960-1962 |
1 1966 |
10 | Section paloise | 2 1939-1952 |
5 1948-1996 |
11 | RC Toulon | 2 1934-1970 |
3 1939-1983 |
12 | Aviron bayonnais | 2 1936-1980 |
0 - |
13 | FC Grenoble | 1 1987 |
3 1969-1990 |
14 | CA Brive | 1 1996 |
2 1963-1974 |
15 | Lyon OU | 1 1933 |
1 1932 |
16 | Biarritz olympique | 1 1937 |
1 1989 |
17 | SC Mazamet | 1 1958 |
1 1955 |
18 | US Cognac | 1 1965 |
0 - |
19 | RC Nice | 1 1985 |
0 - |
20 | CA Bègles-Bordeaux | 0 |
2 1991-1995 |
21 | Racing CF | 0 - |
1 1952 |
22 | SC Graulhet | 0 - |
1 1976 |
23 | Castres Olympique | 0 - |
1 1993 |
Vainqueurs individuelsModifier
- L'arrière Jean-Michel Benacloï (5/5) : 1968, 1973, 1974, 1978, 1979 (Narbonne).
- Henri Ferrero (4/4) : 1973, 1974, 1978, 1984 (Narbonne).
- Le pilier Jean-Claude Pinéda (4/6) : 1984, 1989, 1990, 1991 (Narbonne), finaliste en 1982 et 1992.
- L'arrière Jacques Gourgues et les trois-quarts Christian Darrouy et Guy Boniface, du Stade montois, ont aussi participé à 5 finales de ce challenge, en remportant 3 d'affilée en 1960, 1961 et 1962.
- Seul Narbonne réussit aussi un autre triplé, en 1989, 1990 et 1991.
- André Abadie fut également 5 fois finaliste.
- Ils ont remporté le Challenge du Manoir avec deux équipes différentes : Henri Domec, Didier Codorniou
- En 1953, trois Abadie (deux piliers palois et le talonneur lourdais André Abadie) s'affrontèrent en finale.
- Ce fut également le cas des frères Dominique et Thomas Mantérola en demi-finale du challenge 1958.
Notes et référencesModifier
NotesModifier
- En août 1995, l'International Rugby Board a gommé de ses statuts toute référence à l'amateurisme et le rugby devient un sport professionnel
- « Pour les seize équipes classées de la 3e à la 6e places de chaque poule à l’issue de la phase qualificative, la compétition ne sera pas terminée puisque le Challenge Yves Du Manoir va renaître avec un format classique de phase finale (1/8e et quarts de finale en aller-retour, demi-finales et finale sur terrain neutre)[9]. »
- Ce trophée clôture une année bien remplie qui a vu cette équipe de benjamins remporter le très prestigieux tournoi national du Challenge Yves-du-Manoir à Colombes, sur les terres du Racing Métro, devant les Stadistes toulousains [lire en ligne].
RéférencesModifier
- Espéraza, « Une grande figure de la haute vallée de l'Aude : Jean Bourrel », sur patrimoine-quillan.com, (consulté le 3 janvier 2013)
- Quand Quillan travaillait du chapeau
- J.-L. L., « Club historique : Quillan, premier club pro du monde », sur https://www.ladepeche.fr/, (consulté le 18 juillet 2014)
- "La légende du Tournoi", H. Garcia (2005), p. 46
- Les riches heures du rugby, p. 19
- Le Challenge Yves du Manoir, L'Auto, .
- Article du Figaro du 22 septembre 1931 : le challenge Yves du Manoir [lire en ligne].
- La professionnalisation du rugby français. Pouvoir économique et lien social, sur corpsetculture.revues.org
- « Fédérale 1 : Nouvelle formule », sur Fédération française de rugby, (consulté le 14 mars 2019)
AnnexesModifier
BibliographieModifier
- François Duboisset, Les riches heures du rugby, 2002, Éditions Mango Sport
- Henri Garcia, La fabuleuse histoire du rugby, 2001, Éditions Minerva, Genève, Suisse
- Jean Mérillon, Le challenge Yves Du Manoir, 1990, édition Chiron
VidéosModifier
- Finale 1967 : Lourdes- Narbonne
- Finale 1968 : Narbonne - Dax
- Finale 1973 : Narbonne - Béziers
- Finale 1974 : Narbonne - Brive
- Finale 1978 : Narbonne - Béziers
- Finale 1979 : Narbonne - Montferrand
- Finale 1982 : Dax - Narbonne
- Finale 1984 : Narbonne - Stade Toulousain
- Finale 1989 : Narbonne - Biarritz
- Finale 1990 : Narbonne - Grenoble
- Finale 1991 : Narbonne - Bègles
- Finale 1992 : Agen - Narbonne
Liens externesModifier
- Challenge Yves du Manoir sur un site d'une société canadienne
- Challenge Yves du Manoir et Coupe de France