Canal de Roubaix

canal français

Canal de Roubaix
Illustration.
Géographie
Pays France
Coordonnées 50° 40′ 20″ N, 3° 07′ 22″ E
Début Marque canalisée à Wasquehal (lieu-dit Triest)
Fin Canal de l'Espierres à Wattrelos à la frontière franco-belge
Traverse Nord
Caractéristiques
Longueur 12 km au sens strict ou 20 km y compris la Marque canalisée (7,5 km). Au total en comprenant l’embranchement de Croix et le canal de Tourcoing 23 km
Gabarit Freycinet
Mouillage 2,20 m (avec un tirant d'eau admis de 1,80 m)
Hauteur libre 3,50 m
Infrastructures
Écluses 12 dont 2 sur la Marque canalisée
Histoire
Année début travaux 1823
Année d'ouverture 1877


Le canal de Roubaix est situé sur la Communauté urbaine de Lille dans le Nord de la France. Sa longueur est de 12,2 km entre la Marque (rivière) et la frontière avec la Belgique. Le canal de Roubaix et son prolongement en Belgique par le canal de l'Espierres, relient la Deûle à l’Escaut.

Localisation modifier

Le canal de Roubaix fait partie des voies navigables du Nord de la France, il raccorde la Deûle au canal de l'Espierres qui est lui-même relié à l’Escaut (Belgique). Il traverse les communes de Wattrelos (où il rejoint le canal de l'Espierre), Leers, Roubaix, Tourcoing, Croix, Marcq-en-Barœul, Marquette-lez-Lille (où il rejoint la Deûle), et Wasquehal (où il rejoint la Marque).

Plan du canal de Roubaix modifier

Historique modifier

 
Le canal de Roubaix vers 1936, peint par Charles-Henry Bizard (1887-1954), tableau conservé au musée de Roubaix..

Projet modifier

Imaginé par Vauban dès 1699 pour relier la Marque à l’Escaut, demandé officiellement en 1813 par le maire de Roubaix Étienne Roussel-Grimonprez, le projet de loi relatif au canal de Roubaix est adopté par la Chambre des Députés, le 15 avril 1825 et présenté à la Chambre des Pairs le 3 mai suivant[1].

Construction et ouverture (XIXe siècle) modifier

Sa construction débute le avec la pose de la première pierre par le roi Charles X, à l’écluse de Marquette. Le canal servira pour l’industrie textile locale en développement : approvisionnement en charbon, en eau, en matières premières (importation de balles de laine et coton) et expédition des produits finis[2],[3]. Le projet initial de parcours direct comprenait un souterrain à Croix, à l’emplacement de l’actuel parc Barbieux (la partie croisienne du parc est cédée à la ville de Roubaix en 1919)[4],[5].

Premiers tronçons modifier

Deux tronçons de ce projet sont réalisés :

  • En 1828, la canalisation de la Marque de la Deûle au pont de la passerelle à Wasquehal et un embranchement jusqu’au pont du Breucq à Croix et un peu au-delà. La branche de Croix existe encore. Seule la partie terminale d’environ 300 mètres à l’est du pont du Breucq (route D 24, rue du professeur Perrin à Croix) qui longeait la rue Le Nôtre à Croix a été comblée dans les années 1960.

De son côté la Belgique construit, le canal de l'Espierre de 1840 à 1843 afin de pouvoir relier la Deûle et l’Escaut.

Les travaux du tronçon central sont abandonnés en 1845 à la suite d’éboulements. L’achèvement du canal est décidé sur ce même tracé en 1861 à ciel ouvert avec échelles d’écluses et non plus de souterrain. Le projet est encore modifié en 1866 pour permettre un passage par la ville de Tourcoing qui n’accepte de participer au financement qu’à cette condition.

Par suite du changement de tracé du canal de Roubaix, plusieurs parcelles de Wasquehal sont expropriées par jugement du tribunal de Lille du [6].

Ouverture sur son tracé actuel modifier

Le canal est ouvert en 1877 sur son parcours actuel contournant le centre de Roubaix par le nord et rejoignant la Marque canalisée près de l'impasse du Triest à Wasquehal, 400 m en aval du confluent entre les parties canalisée et non canalisées de la Marque et la branche de Croix définitivement en impasse.

La partie en impasse à Roubaix de la place du Galon d’eau jusqu’à l’emplacement de l’actuel Eurotéléport, surnommée «le Vieux canal», est comblée en 1881 pour réaliser le boulevard Gambetta. Le parc Barbieux est aménagé à partir de 1878 sur les terrains vallonnés issus des terrassements du tronçon central du projet de parcours direct abandonné et le boulevard de Paris, actuel boulevard du Général-de-Gaulle, est ouvert sur les terrains réservés pour ce projet.

L’embranchement du canal de Tourcoing de 1,5 km de longueur, du pont du Fresnoy à la rue du port est ouvert en 1892[7].

Déclin et fermeture (XXe siècle) modifier

Le canal endommagé au cours des deux guerres mondiales (destruction des écluses par l'armée allemande lors de sa retraite de 1918, obstructions lors des combats de la résistance en 1944) est reconstruit et rouvert en 1920 puis en 1948. Un projet de canal à grand gabarit lancé dans les années 1960 est abandonné vers 1975.

Le canal n'étant pas éclairé de nombreuses personnes perdront la vie chaque année en tombant dans les eaux du canal comme Thomas et Alphonse Cierpisz, en 1938, qui meurent noyés en allant travailler à bicyclette[8].

La fonction de transport de cette voie d'eau décline à la suite de la fermeture des industries locales de filature dans les années 1970-1980.

Le canal est fermé en 1985 et n'est plus entretenu, ce qui crée une source de nuisances[9].

Des élus locaux envisagent de le remblayer pour construire une voie urbaine rapide, mais ce projet sera abandonné à la suite de la mobilisation de riverains[10].

Réhabilitation (XXIe siècle) modifier

La mobilisation d'une quarantaine d'acteurs locaux et nationaux de Belgique et de France aboutit à une première tranche de travaux visant la réouverture entre 2002 et 2003. C'est notamment l'association Collectif Canal qui a porté durant de nombreuses années le projet de remise en navigation et de favoriser le tourisme fluvial. Après études, la Commission européenne décide de soutenir financièrement le projet transfrontalier de remise en navigation à travers les programmes FEDER et Interreg. Blue Links, un projet européen de travaux de 37 millions d’euros sur trois ans, est mis sur pied pour rouvrir les canaux à la navigation de plaisance en 2008[11], [3]

En 2005, l’Établissement Public Voies navigables de France entreprend les travaux de curage pour permettre la remise en navigation du canal. Il adjuge les travaux à l'entreprise Ghent Dredging : celle-ci réalise le curage de 150 000 m3 permettant au canal de « respirer » à nouveau en passant d'un tirant d'eau allant parfois jusqu'au débord, vers le gabarit 1,90 m/2,20 m, symboliquement nécessaire lors du passage des 38 m d'antan (spits). En plus de la requalification des 13km de berges, 14 ponts et 13 écluses ont été modernisés.

Les travaux se sont terminés, côté France, en 2009 et le canal de Roubaix a été rouvert officiellement à la circulation fluviale le [12],[3].

Écluses du canal de Roubaix modifier

Marque canalisée modifier

Deux écluses se trouvent sur la Marque canalisée, l'écluse n° 1 de Marquette seule accessible à la navigation commerciale, l'écluse n° 2 de Marcq-en-Baroeul ouverte uniquement à la navigation de plaisance.

De la Marque canalisée à la Belgique modifier

Dix écluses se trouvent sur le canal de Roubaix proprement dit de la Marque à la frontière, l'écluse du Triest, l'écluse du Plomeux, l'écluse du Noir Bonnet, l'écluse du Cottigny, l'écluse de la Masure, l'écluse de l’Union, l'écluse du Nouveau Monde, l'écluse du Calvaire, l'écluse du Galon d’eau et l'écluse du Sartel.

Écluses abandonnées modifier

Au centre de Wasquehal, à l'entrée du port du Dragon, se trouve l'écluse numéro 3bis de Wasquehal[13] qui est non comprise dans le projet Blue Links et qui fait partie du projet de parcours direct abandonné au milieu du XIXe siècle. Cette écluse comportait jusqu'au début des années 1980, un pont-levis pour laisser passer les péniches. On peut remarquer l'indication de la distance vers Roubaix de 4,6 kilomètres sur la plaque d'éclusière fixé sur l'ancienne maison éclusière. La partie de la Marque située entre le port du Dragon et le pont de la Passerelle (qui donne sur la rue de la Passerelle à Wasquehal) est appelé Marque urbaine.

Une écluse abandonnée, dite Écluse de l'embranchement de Croix[14], se situe dans le port du Dragon. Après cette écluse, l'embranchement rive gauche mène au terminus de Croix et l'embranchement rive droite constitue la rivière la Marque qui remonte via Villeneuve-d'Ascq jusqu'à sa source (Mons-en-Pévèle).

Ponts du canal de Roubaix modifier

32 ponts ou passerelles enjambent le canal dont 6 ponts levant.

Faune et flore modifier

 
Crevette d'eau douce du canal de Roubaix.

Dans les années 1880, les teinturiers qui contaminent le canal ont du construire des bassins et épurer leurs eaux résiduaires. En 1888, le canal est contaminé au niveau de la branche de Croix par les teintureries installées sur le bord du canal. Les égouts des villes de Croix et de Flers (actuel quartier du Sart à Villeneuve-d'Ascq) se déversent dans le bras mort de la branche de Croix[15]. Le noir Ruisseau[16] qui relie la marque rivière et le canal de Roubaix, entre Wasquehal et Flers est pollué par les industries tel que Hannart. Il est préconisé en 1888, pour la branche de Croix, d'agrandir la Petite Marque et de créer un barrage à Wasquehal.

Le canal a connu un pic de pollution de métaux lourds, à la suite d'une contamination provenant du canal de la Deûle au début des années 1970 (dans les années 1960, le canal de la Deûle est une des rivières les plus polluées du monde[17]). Cette pollution a diminué ensuite, car à partir de 1976, de nouvelles populations de poissons ont été constatées. La baisse de fréquentation du canal a aussi entraîné moins d'éclusées et donc moins de consommation d'eau, ce qui a été bénéfique pour la faune et la flore. La Deûle, comme la Lys, la Scarpe et l'Escaut est victime de pollution chronique importante. La communauté urbaine accuse les entreprises industrielles qui sont implantées. En Effet, à Don, à l'entrée de la communauté urbaine de Lille, chaque litre d'eau de la Deûle contient 39 milligrammes de matières en suspension, et à Deûlémont, c'est-à-dire à la sortie de cette communauté, chaque litre en contient 185 milligrammes. L'industrie est accusée de ne pas entreprendre une action méthodique pour traiter elle-même ses eaux usées[18].

Dans les années 70, la métropole lilloise a failli se doter d’un vrai poumon vert. En effet, un projet qui devait assouvir le besoin de verdure des habitants tout en préservant la ressource en eau de la métropole lilloise était présentait. Cela devait se concrétiser par la création du Parc de la Deûle mais le projet est enterré dans sa forme initiale. L'OREAM, l'Organisme régional d'étude et d'aménagement d'aire métropolitaine, avait imaginé la création d'un espace vert, qui relierait Lille-Roubaix-Tourcoing, au bassin minier[19]. Le Parc de la Deûle s'ébauchera finalement dans les années 1990 mais se concentre uniquement autour de trois communes (Santes, Houplin-Ancoisne et Wavrin), sous la forme d'un syndicat mixte.

Des frayères ont été installées dans les années 2010[20].

Un rapport de l'Anses de février 2013 précise néanmoins que les poissons prélevés dans la Deûle et le Canal de Roubaix, ont un taux de dioxines, furanes et PCB « non conforme »[21].

Aménagements autour du canal actuel modifier

Voie verte modifier

Les anciens chemins de halage de cette liaison sont aménagés en voie verte d'une longueur de 42,5 km, d'une largeur de 3 m à surface "stabilisée" revêtue de sable de Marquise ou asphaltée sur quelques tronçons, généralement sur une rive, sur les deux rives sur les parties urbaines à Roubaix constituant la « véloroute du canal de Roubaix» reliée à la «véloroute de la Deûle» qui est un élément de l'Eurovéloroute 5. Les rives de l'embranchement de Croix et du canal de Tourcoing ont également été aménagées pour les cyclistes et les piétons. Cette véloroute en grande majorité en site propre comporte de courts tronçons sur voies ouvertes à la circulation et la traversée d'un important rond-point à Roubaix. Ces voies d'eau réaménagées constituent une coulée verte dans un environnement urbain comprenant une grande partie de parcours arborés. La véloroute traverse également des friches industrielles en cours de requalification, notamment l'écoquartier de l'Union à Roubaix[22] et le site PCUK à Wattrelos.

Plans de la véloroute du canal de Roubaix

Commerces et habitations modifier

Les aménagements des berges permettent la réhabilitation des anciennes maisons éclusières comme celle du Cottighy à Wasquehal qui est transformée en Goguette [23], celle du Plomeux, devenue une habitation et celle du Triest devenue le siège de l'association Kayak Wasquehal Club. Ces zones aménagées permettent aussi, l’installation de parcours santé.

Vestiges et friches industrielles modifier

De nombreuses friches et vestiges se trouvent sur les berges du Canal de Roubaix comme des anciennes usines ou des ponts de chemins de fer.

Photos anciennes modifier

Dans la culture populaire modifier

Problématique sociale et territoriale modifier

À l'occasion de la Mi-Carême 1901, le groupe d'amis de l'Estaminet du Capreau à Wasquehal, tenu par Jules Delbecque chante sur l'air de la Faridondaine, la Faridondon, la chanson, Les Boers du Capreau qui dénonce entre autres la construction du Grand Boulevard, qui sera ouvert en 1911, et du creusement du Canal de Roubaix. Les habitants du Capreau craignent des mesures d’expropriation, comme le laisse supposer une partie du chant "Au Capreau, y n’a ps d’mines d’or, Ch’est pos comm’ au Transvaal, Mais si plaisot à nous milords, D’printe l’rue Nationale, Faudrot pou mette’ opposition, Printe des rinforts à l’Planque au Riz." Cette identification aux Boers s’effectue durant les premières phases d’urbanisation des terres entre Lille et Roubaix, à la faveur de l’apparition de ces deux éléments de structuration de la métropole que sont le Grand Boulevard et le Canal de Roubaix. Elle renvoie donc à une problématique sociale et territoriale liée à l’industrialisation de la région et exprimée dans La Croix du Nord du [25].

Au cinéma modifier

Bibliographie modifier

  • Emile Moreau, Etude sur les travaux publics de la ville de Roubaix. 1re partie, Question des eaux, Roubaix, 1874. Accessible en texte intégral sur NordNum.

Voir aussi modifier

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Articles connexes modifier

Notes et références modifier

  1. Projet de loi relatif au canal de Roubaix, adopté par la Chambre des Députés, le 15 avril 1825 et présenté à la Chambre des Pairs le 3 mai suivant. (books.google.fr)
  2. De la navigation intérieure du département du Nord, et particulièrement du canal de la Sensée. (bn-r.fr)
  3. a b et c Connaissez-vous l’histoire du Canal de Roubaix ?, lillemetropole, consulté le 5 avril 2022
  4. Le canal - Flanerie roubaisienne, canalderoubaix, consulté le 5 avril 2022
  5. Patrimoine. Le parc Barbieux à Roubaix, le joli résultat d'un raté..., actu.fr, 6 mars 2021
  6. L'Écho théâtral de Roubaix du . (gallica.bnf.fr)
  7. « laissez-vous conter le canal de Roubaix », sur bn-r.fr (consulté le )
  8. [PDF]Journal de Roubaix du 28/10/1938 (bn-r.fr)
  9. « BlueLinks / Histoire et patrimoine/ Histoire » (consulté le )
  10. « Le canal de Roubaix rendu à la navigation et à la promenade » (consulté le )
  11. "Blue Links, Liens bleus d'Europe" est un programme de travaux pour la remise en navigation des canaux de la liaison Deûle – Escaut, qui comprend la Marque canalisée, le canal de Roubaix, en région Nord de la France, et le canal de l’Espierre dans le Hainaut et les Flandres occidentales en Belgique. Le canal réhabilité offrira de nouvelles possibilités de développement d’activités de tourisme et de loisir, étroitement liées au renouvellement urbain sur un territoire étendu.
  12. Marc Grosclaude, « Le canal de Roubaix a fait entendre les sirènes de sa renaissance », La Voix du Nord, (consulté le )
  13. Projet de Loi portant fixation du Budget Général de l'exercice 1882, Volume 2. (google.fr/books)
  14. Guide officiel de la navigation intérieure. (google.fr/books)
  15. Rapports et délibérations-Conseil général du Nord 1888 (gallica.bnf.fr)
  16. Contexte : P31 - Cadastre napoléonien Wasquehal - 1876 (archivesdepartementales.lenord.fr)
  17. Ensemble pour la Nature-La lutte contre les grandes pollutions (nord-nature.org)
  18. Un égout à ciel ouvert (lemonde.fr)
  19. Comment, dans les années 70, la métropole lilloise a failli se doter d’un vrai poumon vert. (lavoixdunord.fr)
  20. A la recherche du poisson perdu, 20minutes, 12 septembre 2014
  21. Avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail - Avis spécifique au bassin Artois-Picardie : Bilan du plan national PCB (2008-2010), Anses, 20 février 2013
  22. Zoom sur l’EuroVelo 5 : le canal de Roubaix à vélo, citycle, 23 septembre 2019
  23. Wasquehal: bientôt une Goguette dans l’ancienne maison éclusière du Cottigny (lavoixdunord.fr)
  24. Les tracteurs du canal, ateliers-memoire, 22 avril 2023
  25. Sociabilités et imaginaires coloniaux dans le Nord de 1870 à 1918 (docplayer.fr)

Liens externes modifier