Camille Folliet

prêtre catholique français

Camille Folliet est un religieux et résistant français. Né le à Annecy, mort pour la France des suites de ses blessures le .

Camille Folliet
Nom de naissance Camille Folliet
Naissance
Annecy
Décès (à 37 ans)
Aix-les-Bains
Nationalité Drapeau de la France France
Profession
Autres activités
Formation
Grand Séminaire d'Annecy
Distinctions

Biographie modifier

Né dans une famille de commerçant de la rue Sommeiller à Annecy, il est le quatrième des huit enfants de Johanny Folliet et de Julia Dunoyer. Il fait ses études chez les frères de l'école des Cordeliers et entre au Collège de Rumilly, dont le Supérieur est un oncle maternel.

En 1926, il passe son bac et entre la même année au Grand Séminaire d'Annecy. Son frère Jean, moine bénédictin de l'Abbaye d'Hautecombe, dira que « sa vocation fut réfléchie et consciente »[réf. nécessaire].

Son conseiller et guide spirituel est le Chanoine Francis Mugnier. Il profite de ses vacances pour venir au presbytère de La Clusaz où il est accueilli par le père Jean Premat, curé de la paroisse. Là, il peut participer aux activités paroissiales, s'occupant de la chorale qu'il accompagne à l'orgue. Son cursus est interrompu par deux fois, la première pour faire son service militaire comme sergent radio au 28e Génie de Montpellier et la seconde pour remplacer un professeur malade pendant trois mois au Collège de Thônes. Il écrit aussi à cette époque à un ami de la famille, Monseigneur Raoul Harscouët, évêque de Chartres, pour lui confier ses états d'âme de jeune séminariste.

Il est ordonné prêtre le , en la Cathédrale d'Annecy par Monseigneur Florent du Bois de la Villerabel, Évêque d'Annecy.

Nommé vicaire à Ugine, le , il organise des camps pour les jeunes au bord du Lac d'Annecy, à Menthon-Saint-Bernard, ou au Lac d'Aiguebelette.

Aimant la musique et jouant du piano à bretelles, de l'harmonium et de l'orgue, il crée une section de la Jeunesse ouvrière chrétienne. Il se fait l'apôtre de la justice sociale, pendant le conflit de 1934 à l'usine d'Ugine. En 1936, il organise des réseaux de solidarité. Les salaires des ouvriers d'Ugine sont multipliés par deux, parfois par trois. Puis en 1938, nouveau conflit, marche arrière du patronat. S'il approuve les initiatives sociales d'André Pringolliet, il regrette profondément son anticléricalisme. Dans ces temps difficiles, il aime à se retirer à l'Abbaye de Tamié, parfois quelques jours, plus souvent quelques heures seulement.

C'est à l'automne de 1940 qu'il quitte Ugine pour venir à Annecy s'installer dans l'immeuble du passage de la Cathédrale que le Chanoine Clavel a baptisé de Maison du Peuple. Prêtre de terrain, il peut compter dans son action sur l'aide et l'appui de ses confrères l'abbé Paul Chevallier à Cluses, le Père Albert Simond à Évian et l'abbé Jean Rosay à Douvaine, l'abbé Abel Jacquet, curé de Juvigny et l'abbé Neyroud, curé de Savigny. Dans cette maison, il réserve deux pièces à deux organisations de secours aux juifs, les Unions chrétiennes de jeunes et la Sixième (Éclaireurs israélites de France dans la clandestinité).

Il ouvre au 12 rue de la Filaterie la Maison des chômeuses, où l'on dispense des formations. Puis, il crée des jardins ouvriers pour venir en aide aux plus démunis, au-dessus du Monastère de la Visitation. Il invite les jeunes à héberger des juifs. Il va de réunion en réunion, ne ménageant ni son temps ni son énergie. Toujours à l'écoute des autres.

Avec le STO, il va héberger et faire fuir les jeunes insoumis vers la Suisse et les maquis. Sa position est très claire, il ne faut pas partir en Allemagne. Il se situe dans la pensée des Cahiers du Témoignage chrétien du père Pierre Chaillet. Son action pour la protection des réfractaires au STO, de la JOC, allait lui drainer une foule de jeunes venus des quatre coins de France. Alphonse Métral est inquiet et rencontre Camille car Vichy veut contrôler le mouvement des jocistes. Il va à Dingy-en-Vuache informer le mouvement des Réfractaires que la Résistance va recevoir un premier parachutage au Col des Saisies, alors recouvert de deux mètres de neige. C'est lui qui met les jeunes en contact avec les premiers résistants de la future Armée Secrète de Thônes. C'est le début de ce qui allait devenir le Camp de Manigod, avec à sa tête le futur préfet Revillard. Toujours en liaison avec le secrétariat général de la JOC, installé dans la résidence d'été du cardinal Pierre Gerlier à Sainte-Foy-lès-Lyon. Il donne ses rendez-vous à 6 heures du matin dans l'église où il célèbre la messe.

Son action étant repérée par la police spéciale, il est contraint de rentrer dans la clandestinité. En liaison avec les chefs de la Résistance, il va contribuer au développement des camps de maquisards de la Vallée de Thônes qui donneront naissance un an plus tard à celui des Maquis des Glières. Ce sont les anciens du 27e Régiment des Chasseurs Alpins qui assurent l'encadrement. Camille est très mobile, toujours par monts et par vaux. Il diffuse les Cahiers de notre jeunesse et Les Cahiers du Témoignage chrétien du Père Chaillet et de son collaborateur Joseph Rovan qui se retrouve chez Camille, le jour de son arrestation et ils prennent la fuite par un escalier de service, Les petites ailes de France de François de Menthon, Dernière colonne, Coq enchainé, Franc-Tireur, Libération Nationale et Combat. Jeanne Brousse collabore avec lui. Elle est employée à la Préfecture d'Annecy, ce qui facilite l'obtention de faux papiers.

Il est arrêté par l'OVRA, la Gestapo italienne le , en gare d'Annecy à la descente du train provenant de La Roche-sur-Foron à 18 heures trente[1]. Il est conduit à la Caserne de Galbert. La veille, le Général Delestraint, chef de l'État-Major de l'Armée Secrète, est arrêté à Paris. Puis le , les Allemands arrêteront à Lyon : Jean Moulin, Raymond Aubrac, André Lassagne, Bruno Larat, les colonels, Albert Lacaze et Émile Schwarzfeld. Maître Louis Volland est présent et s'interpose dans l'arrestation brutale du prêtre, il est embarqué aussi. Il en sortira 18 jours plus tard. L'abbé s'est vite préoccupé de déchirer et d'avaler un papier compromettant pendant le transfert. Son gardien lève la crosse de son arme, mais hésite à frapper l'ecclésiastique, car les passants crient. Le lendemain, le domicile de ses parents est perquisitionné. L'affaire fait grand bruit et remonte à Vichy. Il subit un interrogatoire musclé. Il est emmené à Chambéry, enfermé dans les soutes à munitions de la Caserne Curial. C'est là qu'il commence à écrire ses Croquis, qu'il achèvera au Bourget-du-Lac.

Du soupirail de sa geôle, il voit la Croix du Nivolet. Puis un court séjour à la caserne Hoche à Grenoble. Il y rencontre Jean Ouvrard. Ils doivent être jugés avec des maquisards capturés à la Montagne des Princes (Droisy) et au maquis des Dents de Lanfon. Un garde italien lui crache au visage pour avoir discuté la manière inhumaine de traiter les prisonniers.

Le 30 juillet, ils passent devant le tribunal. Les avocats n'ayant pas connaissance des dossiers, les résistants prennent entre deux et quatre ans de prison. Marie Blandin, Jacques Étienne, Pétrel, Jean Ouvrard et Camille Folliet écopent de dix ans pour soutien à des bandes armées combattant les forces italiennes. Camille proteste, écrit au roi d'Italie, Victor-Emmanuel III d'Italie.

Le lendemain du jugement, ils partent en train pour Coni. La foule leur crie dessus mais s'arrête en voyant une femme et un prêtre dans la colonne des prisonniers. Il va rester là du 31 juillet au 28 août pour aller à la Casa penale au pénitencier de Fossano. Ici la vie est infecte, paillasse, pleine de vermine, tinette au centre de la pièce, déborde tous les matins, Camille est en soutane et c'est pour lui une véritable humiliation d'être là dans ce cloaque. La dignité dont il fera preuve impressionne tous ses codétenus. Il y fait la connaissance de Emilio Sereni, un des dirigeants du parti communiste italien d'origine juive, ayant fait de la résistance en France, ayant échappé sept fois au peloton d'exécution. L'aumônier italien lui ayant remis du vin pour qu'il puisse célébrer la messe et s'étant rendu compte qu'il le partageait avec les prisonniers, on lui retira sa soutane, car il fut également pris à écrire en dissimulant ses objets sous son vêtement. Il portera la tenue de bagnard matricule 256 et ne pourra plus célébrer la messe. Puis les événements se précipitèrent, c'est la révolte dans la prison, un caporal pressé de s'enfuir laisse la porte ouverte, Italo Nicoletto, homme fort du Parti communiste italien enfermé avec l'abbé, met son pied pour empêcher que la porte se referme et tout le monde se précipite dehors. Camille veut se cacher dans l'église. Il est repris une heure plus tard. Il écrit à un cardinal romain pour obtenir le statut de prisonnier de guerre et lui demande d'intervenir auprès de l'évêque de Fossano pour cela. Il est le seul français au milieu de trois cents Yougoslaves. Pour être bien avec les autorités de ce pays, les italiens font libérer les Yougoslaves, Camille profite de l'aubaine et de l'intervention du délégué de la Croix-Rouge, auprès de la Gestapo de Venise. Le , il est libre.

Son évêque lui conseille de prendre un peu de distance et d'aller faire un stage au Séminaire de la Mission de France à Lisieux. Il y arrive le . Il manque d'action et part pour la Mission de Paris qui vient d'être créée. Il est embauché comme prêtre ouvrier à l'usine BMW d'Argenteuil. Il soutient et anime un groupe de jeunes résistants qui ont fondé la Nouvelle Jeunesse Française. Puis il se joint aux résistant sur les barricades de Paris, boulevard Saint-Michel du 19 au 24 août. Sautant par-dessus celles-ci pour porter l'extrême-onction aux mourants. Il y retrouve son ami Pistre au PC de l'Hôtel des Pyrénées rue de Seine. Et voulant porter les armes, il quitta sa soutane pour faire le coup de feu au Carrefour de la Mort au croisement du Boulevard Saint-Michel et du Boulevard Saint-Germain.

Le , il est sur le front des Alpes à Bourg-Saint-Maurice, à l'automne, il est à Cluses et à Chedde, avec son ami Pierre Metay. Il prend le temps de sauver son oncle Léon à qui il était reproché d'avoir eu des complaisances pour l'occupant. Il accepte d'être l'aumônier du bataillon de la Division Alpine. En décembre, il est l'aumônier dans l'armée de Libération de la demi brigade des FFI, chasseurs du 27e, du 7e et du 13e en Tarentaise dans la Division Alpine constituée par Jean Valette d'Osia à partir d'éléments FTP et AS. Il est sous les ordres du Colonel de Galbert, le fils de celui qui a donné son nom à la caserne d'Annecy. Son PC est à Bourg-Saint-Maurice et Roger Frison-Roche, l'alpiniste écrivain y est officier de liaison. Il y refuse tout grade et tout galon, il veut être que l'abbé. Il écrit à Monseigneur Léon-Albert Terrier, compatriote, ancien évêque de Moutiers et alors évêque de Bayonne. Il profite des petits moments de répit pour retravailler à son Chemin de Croix et à ses Croquis.

Le 13e Bataillon de Chasseurs Alpins (BCA) est passé à l'offensive, et une action est menée sur un front étendu : le Roc Noir, La Redoute, le mont Valezan. Le péril est grand, l'abbé du 13e BCA demande à Camille Folliet de se joindre à lui. Il se trouve au Roc Noir en ce samedi matin du . Les cris des blessés sont insoutenables. L'abbé rejoint la 1re Compagnie. Il bondit malgré les recommandations du Capitaine Calderini. Une rafale claque. Il approche du blessé qu'il est parti secourir. Puis l'abbé ressent une douleur sur son bras, il crie. Les copains ont vu. Une poignée de volontaires va aller le chercher. Le prêtre a le bras fracassé, Frison-Roche le descend sur La Rosière. Ne voulant pas être évacué, l'abbé sera pourtant contraint d'accepter. Puis il sera conduit en urgence de Bourg-Saint-Maurice à l'hôpital d'Aix-les-Bains. La gangrène l'envahit. L'infection gagne tout son corps. Il souffre atrocement et regrette simplement de ne pas pouvoir conduire sa mission à son terme. Il pousse son dernier soupir le lundi à 18 heures, un mois avant la Victoire.

Les jocistes, (Jeunesse ouvrière chrétienne), font la veillée funèbre toute la nuit dans la cathédrale auprès de la dépouille de Camille, son cercueil recouvert du drapeau et des fanions de nombreux mouvements d'Action Catholique, des syndicats CFTC et CGT, du Parti Communiste et du Parti Socialiste.

Monseigneur Auguste Cesbron, évêque d'Annecy, célèbre les funérailles de Camille le et prononce l'éloge panégyrique du héros savoyard.

Les funérailles grandioses du martyr sont célébrés en présence d'une centaine de prêtres en tenue liturgique et de plusieurs milliers de personnes. D'un détachement de chasseurs alpins, d'un groupe d'éclaireurs skieurs descendu du front de la Haute Tarentaise, où Camille fut mortellement blessé, le préfet Irénée Revillard[Note 1], les présidents des Comités de Libération de Haute-Savoie et de Savoie, des Officiers des Unités des Alpes, des groupes de maquisards d'Armée Secrète, FTP, des mouvements de réseaux clandestins ayant dirigé des juifs et maquisards vers la Suisse. Le Chanoine Duval, futur Cardinal d'Alger, préside l'Eucharistie. Ses fonctions de Vicaire Général des Œuvres l'avaient conduit à être en rapport avec le défunt. Au cimetière Monsieur Volland fit un discours au nom de l'Association des Premiers Résistants et le Colonel de Galbert en fit un au nom des Unités du front des Alpes dont l'abbé était l'aumônier.

Écrits modifier

  • Le sens du Maquis, in Courrier Savoyard N°I, paru le
  • Croquis de Prison et chemin de Croix Inachevé, Suite à l'Inachevé - éd. Gardet, Annecy, 1985., réédition, 1999. 80 p. Bois gravé et ornements de E. Bernhardt. (ISBN 2-7049-0051-5)

Décorations modifier

Iconographie modifier

Hommages modifier

  • du Courrier Savoyard - Essor Savoyard - Le Républicain Savoyard - Courrier Français du Témoignage chrétien - Revue des Amis du Val de Thônes no 9 &10, 1984.
  • Dom Jean Folliet, O.S.B.La vie exemplaire et la mort de l'abbé Camille Folliet in Postface de l'ouvrage de son frère, Croquis de Prison et chemin de croix inachevé.

Bibliographie modifier

  • Hyacinthe Vulliez, Camille Folliet : prêtre et résistant, Annecy Paris, Vieil Annecy Atelier, , 185 p. (ISBN 978-2-708-23593-9)
  • Michel Germain (préf. Marie-José Chombart de Lauwe), Mémorial de la déportation : Haute-Savoie, 1940-1945, Montmélian, La Fontaine de Siloe, , 351 p. (ISBN 978-2-842-06091-6, lire en ligne), p. 22-23.
  • Michel Germain, Les maquis de l'espoir, éd. La Fontaine de Siloè, (4 volumes) 1993-1995.
  • Christian Sorel, Dictionnaire du monde religieux, 1996.
  • Simone Mollier-Carroz, Histoire d'Ugine, Académie Salésienne, 1975.

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. Irénée Revillard (1905-1976) est préfet de Haute-Savoie de septembre 1944 à mars 1948.

Références modifier

  1. Rapport no 3753 du Commissaire de Police d'Annecy au Préfet de Haute-Savoie, le 11 juin 1943.
  2. Site Mémoire des Hommes
  3. Comité Français pour Yad Vashem

Voir aussi modifier

Articles connexes modifier

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