Céramique de Sultanabad

La céramique de Sultanabad, désignée parfois sous le terme de céramique « dite de Sultanabad », est une céramique à décor peint sous glaçure incolore[1] développée à l'époque de la domination mongole sur l'Iran au XIIIe siècle et XIVe siècle sous le règne des Ilkhanides.

Type de décor avec glaçures bleu : Bol aux quadrupèdes[2].
Type de décor avec effets de grisailles : Bol au lièvre et aux phoenix[3].

Découverte modifier

C'est à Sultanabad (aujourd'hui appelée Arak), située sur la route reliant Hamadan à Ispahan, que l'on a retrouvé de nombreuses pièces de ce type, sans que nous disposions d'éléments permettant d'affirmer que cette céramique était produite sur place : en effet, on n'y a découvert aucune trace de fours, mais, selon Soustiel[4], les spécialistes ont conservé cette appellation car elle présente l'avantage de la commodité pour désigner ce type de production[5]. Au début des années 2010, des recherches montrent que la question de l'origine n'est pas encore tranchée[6].

Le décor modifier

On trouve généralement deux types de décors[7] :

- Un décor dessiné en noir avec des effets ombrés de grisaille, appliqué sur un engobe blanc, avec des glaçures bleu pâle ou turquoise ;

- Un engobe blanc qui disparaît sous un engobe verdâtre ou gris, avec un décor peint en noir et des effets de grisaille, et l'apparition de motifs en léger relief (à partir d'un engobe blanc).

Le revers des pièces est très souvent constitué de grandes arcatures blanches et noires.

Les motifs décoratifs comprennent des éléments végétaux, et selon les cas, des animaux ou des personnages. Les éléments végétaux peuvent former un fond tapissant une grande partie de la pièce avec de petites feuilles échancrées (feuilles de lotus par exemple) , arrondies ou triangulaires, souvent disposées en semis, pouvant être stylisées et se transformer ainsi en ocelles. Les animaux, au corps souvent marqués de points, peuvent être réels (lièvres, oies, capridés...) ou imaginaires (phénix, harpies,..). Les personnages ont un visage typiquement mongol, et occupent une place centrale, leurs vêtements sont également marqués de points.

Quelques œuvres modifier

Expansion géographique du style modifier

 
Vase à inscription poétique de style « pseudo Sultanabad », Syrie ou Égypte, première moitié du XIVe siècle, inventaire MAO 618, musée du Louvre, Paris

Certaines coupes[13] retrouvées à Saray-la-Neuve[14], dominée alors par la Horde d'or, ressemblent à la céramique de Sultanabad mais le résultat est moins élaboré[15].

Le style de Sultanabad est repris dans des productions du XIVe siècle à l'époque mamelouke dans la région de l'Égypte et de la Syrie. Le vase ci-contre (Musée du Louvre) en est un exemple : le bandeau calligraphique, en écriture arabe de style thuluth, n'est pas caractéristique de l'art iranien ; il en est de même pour les deux frises de palmettes entrelacées au-dessus et en-dessous du bandeau. Par contre, on retrouve des caractéristiques de la céramique de Sultanabad : arcatures à la base, feuilles dentelées sur le col, engobe gris...)[16]. Les deux types de production étant assez semblables, le sujet était encore discuté au début des années 2010[17],[18].

Bibliographie modifier

  • Jean Soustiel, La céramique islamique, Fribourg/Paris, Office du livre (Fribourg) et Dilo (Paris), Collection Le Guide du connaisseur, , 427 p. (ISBN 2-7191-0213-X).
  • Markus Hattstein et Peter Dellus (trad. de l'allemand), Arts et Civilisations de l'Islam, Cologne, Könemann, , 639 p. (ISBN 3-8290-2556-4).

Notes et références modifier

  1. Soustiel 1985, p. 198.
  2. Première moitié du XIVe siècle, Cincinnati Art Museum.
  3. Première moitié du XIVe siècle , Cincinnati Art Museum.
  4. Soustiel 1985, p. 192.
  5. Soustiel précise cependant que "paradoxalement, la majorité des pièces de l'Iran Ilkhanide ont bien été relevées au voisinage de Sultanabad" (Soustiel 1985, p. 192).
  6. Voir par exemple (en) Javad Neyestani, Mohammad Jafar Hatamian et Hossein Sedighian, « Was Sultān Abād pottery really produced in Sultān Abād? », International Journal of Humanities, vol. 19, no 3,‎ , p. 95-109 (lire en ligne).
  7. Soustiel 1985, p. 200.
  8. Fin XIIe siècle - début XIIIe siècle , pate siliceuse, décor moulé et peint sous glaçure, Inventaire AR 2012-109. Le pied est exempt d'engobe et de glaçure. Le lièvre, de profil, tête retournée, est entouré de rinceaux de fleurs de lotus et de fleurettes. La fleur de lotus était un emblème mongol de royauté.
  9. Première moitié du XIVe siècle , céramique siliceuse, engobée et peinte sous glaçure, hauteur 12 cm, diamètre 25.3 cm, Inventaire : OA 8177.
  10. a et b Première moitié du XIVe siècle , The Madina Collection of Islamic Art, gift of Camilla Chandler Frost (M.2002.1.173), hauteur 10.95 cm, diamètre 22.86 cm.
  11. a et b XIVe siècle , The Nasli M. Heeramaneck Collection, gift of Joan Palevsky (M.73.5.215), dimensions : 21.5 x 10.2 cm.
  12. a et b Première moitié du XIVe siècle .
  13. L'une d'entre elles (première moitié du XIVe siècle , diamètre 19.4 cm) est visible au musée de l'Ermitage (Hattstein et Dellus 2000, p. 404)
  14. Appelée aussi Saraï Berke, elle a été construite dans les années 1330 par le khan Özbeg avant d'être choisie pour capitale (et remplacer "Saraï l'ancienne") par son fils Djanibeg (Hattstein et Dellus 2000, p. 404).
  15. Hattstein et Dellus 2000, p. 404.
  16. Soustiel 1985, p. 224.
  17. (en) Rosalin Wade Haddon, « What is Mamluk Imitation Sultanabad? », Al-Rafidan, vol. 32,‎ , p. 276-293 (lire en ligne).
  18. Rosalin Wade Haddon, « Mongol Influences on Mamluk Ceramics in the Fourteenth Century », dans Doris Behrens-Abouseif (dir.), "The Arts of the Mamluks in Egypt and Syria – Evolution and Impact", V&R Unipress et Bonn University Press, 2012 (ISBN 978-3-89971-915-4), p. 95-114.

Voir aussi modifier