Bayézid II

sultan ottoman de 1481 à 1512
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Bayezid II
Illustration.
Le sultan Bayezid II
Titre
8e sultan ottoman

(30 ans, 11 mois et 2 jours)
Prédécesseur Mehmed II
Successeur Sélim Ier
Biographie
Dynastie Dynastie ottomane
Nom de naissance بايزيد بن محمد
Date de naissance
Lieu de naissance Didymotique (Empire ottoman)
Date de décès (à 64 ans)
Lieu de décès près de Didymotique (Empire ottoman)
Père Mehmed II
Mère Gülbahar Hatun (en)
Fratrie Zizim, Mustafa, Gevherhan
Conjoint Nigar Hatun, Şirin Hatun, Gülruh Hatun, Bülbül Hatun, Hüsnüşah Hatun, Gülbahar Hatun, Muhtereme Hatun
Enfants Abdullah, Ahmed, Korkut, Sélim Ier , Şehinşah, Alemşah, Mehmed, Mahmud, Aynışah, Ayşe, Sofiyye Fatma, Gevhermülük, Hatice, Hundi, Hümaşah, Iladi, Kamerşah, Selçukşah, Şehzade Şah, Sultanzade
Religion Islam

Signature de Bayezid II
Liste des sultans de l'Empire ottoman

Bayezid II, connu en France sous le nom de Bajazet II (né le à Dimetoka, aujourd'hui Didymotique - mort le à Chekmece (en), près de Dimetoka), fut le huitième sultan ottoman, de 1481 lorsqu'il succéda à son père Mehmed II, à 1512 lorsqu'il laissa le trône à son fils Sélim Ier.

Bajazet II eut huit épouses, huit fils (Mahmud, Ahmed, Seyidsah, Sélim, Mehmed, Korkud, Abdullah et Alimsah — Ahmed étant le successeur désigné) et six filles.

Biographie modifier

Jeunesse modifier

Bajazet II, fils de Mehmed II et de Gülbahar Hatun[1], naît le à Dimetoka, en Thrace[2].

À l'âge de sept ans, il fut nommé gouverneur de la ville d'Amasya, centre culturel d'Anatolie centrale depuis le règne des Seldjoukides, où il reste pendant 27 ans, jusqu'à la mort de son père[1]. Son conseiller s'appelait Hadım Ali Paşa (en). Il s'illustre dans la défense de la frontière orientale de l'Empire, notamment contre les Aq Qoyunlu de Ouzoun Hassan[1]. Le , il combattit dans la bataille d'Otlukbeli.

Bayezid n'entretenait pas des bonnes relations avec son père et avec le grand vizir Karamani Mehmed Pacha, qui favorisaient son frère cadet Djem ou Cem en turc, surnommé Zizim par les Européens[1]. Bayezid accueillait, lui, des opposants à la politique de son père à Amasya[1].

Lutte contre son frère Djem modifier

À la mort de Mehmed II, le grand vizir Karamani Mehmed Pacha envoya des courriers prévenir Zizim et Bayezid[1]. Les ennemis de Mehmed Pacha, soutenus par les janissaires, interceptèrent le courrier destiné à Djem et assassinèrent le grand vizir[1]. Korkud, un fils de Bayezid alors âgé de onze ans, fut nommé régent en attendant l'arrivée de son père à Constantinople[1]. Bayezid arriva à Constantinople le et fut proclamé sultan deux jours plus tard[3].

Bayezid vainquit son frère, pourtant soutenu par l'Émirat karamanide, à deux reprises, en 1481 et en 1482[1]. Ce dernier chercha alors le soutien du Sultanat mamelouk d'Égypte, puis se réfugia auprès des chevaliers de l'ordre des Hospitaliers de Saint Jean de Jérusalem à Rhodes[1]. À défaut de pouvoir faire assassiner son frère, Bayezid paya une pension de 45 000 ducats d'or par année aux chevaliers afin qu'ils le gardent prisonnier[1]. Le prince ottoman passa le reste de sa vie prisonnier en Aquitaine à Bourganeuf dans la tour Zizim construite à son intention, puis à Naples où il mourut en 1495[4]. Il servit de moyen de pression sur le sultan pour les souverains occidentaux et fut au centre de différents plans de croisades dont aucun n'aboutit[1]. Cette menace retint toutefois Bayezid d'intervenir en Méditerranée occidentale et en Europe[1]. Certaines sources[Lesquelles ?] laissaient entendre que Bajazet serait parvenu à le faire empoisonner.

Règne modifier

 
Bajazet II

Renforcement de l'empire et guerres sur plusieurs fronts modifier

L'Empire ottoman connut de nombreuses guerres pendant le règne de Bajazet. Il prit l'Herzégovine sous son contrôle direct en 1483.

Son règne vit la reprise des guerres contre la Moldavie[1]. La principauté de Moldavie, dirigée par Étienne III depuis 1457, avait attaqué à plusieurs reprises la principauté de Valachie, vassale de l'Empire ottoman, sous le règne de Mehmed II[1]. En 1484, Bayezid s'empara, avec l'aide des troupes de Valachie et du khanat de Crimée, des villes de Kilia et de Cetatea Alba[1]. La Moldavie dut alors se reconnaître vassale des Ottomans et payer un tribut annuel[1].

En 1485, il entra en conflit avec les Mamelouks d’Égypte à propos des territoires des Émirats des Ramazanides et des Dulkadirides[1]. Pendant la guerre, les Mamelouks parvinrent à restaurer leur influence vers le nord jusqu'à Adana[1]. Les Ottomans durent se résigner à la conclusion d'une paix en mai 1491, paix qui dura jusqu'à la mort de Bayezid. Ce n'est qu'en 1516-1517 que l'Empire ottoman s'emparera de ces territoires[1].

Avec la construction de nouveaux bateaux[1] et le recrutement de corsaires expérimentés, les frères Arudj et Khayr ad-Din Barberousse entre autres, Bayezid se dota d'une force navale qu'il opposa avec succès aux Vénitiens. Il leur prit les villes de Coron, Lépante, Modon et Durazzo entre 1499 et 1502[1]. Il conduisit lui-même le siège de Modon. En 1503, il signa un traité avec Venise, cette dernière ne conservant que quelques positions éparses en Morée et acceptant de payer un tribut annuel de 10 000 pièces d'or à l'Empire ottoman[1].

L'Empire ottoman affronta également le royaume de Hongrie, qui accepta de signer la paix en 1503.

Sur le front perse, la bataille de Shurur (tr) (1502) avait amené au pouvoir le chah Ismaïl, le chef d'un groupe religieux chiite soutenu par les Qizilbash[1]. Celui-ci représentait un danger pour le sultan à cause de la propagande chiite dans les régions kurdes, mais Bayezid était réticent à l'affronter[1]. En 1507, Ismaïl affronta les Dulkadirides, alliés de l'Empire ottoman[1]. Trois ans plus tard, en 1510, le frère d'Ismaïl menaça Trébizonde à la tête d'une armée[1]. Sélim Ier, fils de Bayezid et gouverneur de Trébizonde, défit alors les Perses en utilisant les forces destinées à maintenir la frontière orientale, s'attirant les foudres de son père[1].

Politique intérieure modifier

En 1488, il fonda le complexe du sultan Bajazet II (en) à Edirne, hôpital médical et psychiatrique, aujourd'hui musée de la médecine.

Il autorisa en 1492 les Juifs d'Espagne, forcées de se convertir ou d'émigrer, à s'établir en Turquie, accueillant ainsi 200 000 Juifs. Il envoya la marine turque en Espagne pour les recueillir. Les sources juives lui prêtent une phrase ironique à propos du roi Ferdinand d'Espagne : « Pouvez-vous appeler sage et intelligent un tel souverain ? Il appauvrit son pays et enrichit le mien »[5].

En 1509, Constantinople fut en grande partie détruite par un tremblement de terre. Une politique systématique de peuplement turc fut menée dans la ville et dans toute l'Europe balkanique, faisant également appel à des non-Turcs et à des non-musulmans, de façon à donner à la ville un aspect et une activité dignes d’une grande capitale.

Les dernières années du règne de Bajazet II sont marquées par les progrès de l’administration turque.

Les traités de paix avec ses voisins lui donnèrent les moyens de combattre les rébellions des tribus turcomanes en Anatolie. Malgré cela, les rebelles parvinrent à tuer le grand vizir Ali Pacha au cours des combats.

Épris de savoir, Bajazet apprit l'arabe, le persan, la théologie, la philosophie et les mathématiques. Amateur de poésie, il recevait les poètes les plus réputés. Il rendit aux institutions religieuses les biens que son père avait confisqués au profit de l'État, ce qui lui a valu le surnom de Sofu (le Pieux). Il fit enlever toutes les peintures que des artistes italiens avaient exécutées au cours du règne de Mehmed II.

Lutte avec ses fils modifier

Bayezid avait apanagé ses fils : Ahmed, l'aîné, à Amasya ; Sélim à Trébizonde ; et Korkud à Antalya. Quant à Soliman, le fils de Sélim, il disposait de l'apanage de Crimée. L'aîné devait succéder à Bayezid, mais son incapacité à maintenir l'ordre en Anatolie incita son frère Sélim à agir préventivement[1]. Ce dernier demanda, sans succès, un poste plus proche de Constantinople, puis se rendit en Crimée près de son fils[1]. En 1511, à la tête d'une armée de 3000 hommes, Sélim se rendit à Édirne, où Bayezid résidait depuis le tremblement de terre de 1509[1]. À la même période, les troupes impériales commandées par Korkud furent battues par les Qizilbash en Anatolie. Bayezid proposa alors une nouvelle province, mais Sélim se méfia et tenta de prendre le pouvoir[1]. Il fut toutefois battu par Bayezid le 3 août 1511 près de Corlu et dut se réfugier en Crimée auprès de son fils[1],[6].

Ahmed espéra alors que Bayezid abdiquerait en sa faveur et se rendit à Constantinople, mais les Janissaires lui interdirent d'entrer dans Constantinople. Sélim, de son côté, en profita pour revenir de Crimée. Sous la pression des Janissaires, Bayezid dut nommer Sélim chef des armées, et fut finalement contraint à l'abdication le [1]. Il mourut un mois plus tard en se réfugiant à Dimetoka[1]. En , Sélim défit son frère Ahmed près de Yenişehir, dans l'actuelle province de Bursa, et le fit exécuter[7].

Bibliographie modifier

  • Olivier Bouquet : Pourquoi l'Empire ottoman ? : Six siècles d'histoire, 2022, Éditeur Folio; édition illustrée (ISBN 2072941431)

Notes et références modifier

  1. a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t u v w x y z aa ab ac ad ae af ag ah et ai (en) Gábor Ágoston et Bruce Alan Masters, Encyclopedia of the Ottoman Empire, New York, Facts On File, (ISBN 978-1-4381-1025-7, 1-4381-1025-1 et 978-0-8160-6259-1, OCLC 435911915, lire en ligne), p. 82-84
  2. (en) Raşit Gündogdu, The Sultans of the Ottoman Empire, Rumuz Yayınları, , 262 p. (ISBN 9786055112158), p. 53
  3. (en) « The Cambridge History of Islam », sur Google Books (consulté le ).
  4. « Coronavirus. À la rencontre d'un confiné célèbre du XVe siècle : le prince Zizim », sur France 3 Nouvelle-Aquitaine (consulté le )
  5. Esther Benbassa et Aron Rodrigue, Histoire des Juifs sépharades: de Tolède à Salonique, Seuil, 2002, p. 85.
  6. Jean-Michel Sallmann, Géopolitique du XVIe siècle (1490-1618), (Nouvelle histoire des relations internationales, t. 1) , Paris, Le Seuil, "Points histoire", 2003, p. 76
  7. Sallmann, op. cit. p. 79

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