Amicus Plato, sed magis amica veritas

locution latine

Amicus Plato, sed magis amica veritas (en grec ancien : Φίλος μεν Πλάτων, φιλoτέρα δε ἀλήθεια) est un proverbe latin signifiant : « Platon m'est cher, mais la vérité m'est encore plus chère ».

Origine modifier

Il provient d'une phrase d'Aristote dans son Éthique à Nicomaque, faisant allusion à son maître et ami Platon, dont il ne partage pas la théorie des Idées :

« Si les amis et la vérité nous sont également chers, c'est à la vérité qu'il convient de donner la préférence[1]. »

Dans le Phédon de Platon lui-même, Socrate formule une phrase assez proche. Il s'adresse à ses interlocuteurs Simmias et Cébès :

« Mais vous, si vous m'en croyez, faisant peu d'attention à Socrate, mais beaucoup plus à la vérité, si vous trouvez que ce que je dis soit vrai, convenez-en ; sinon, opposez-vous de toute votre force, prenant bien garde que je ne me trompe moi-même et vous en même temps, par trop de bonne volonté, et que je ne vous quitte comme l’abeille, qui laisse son aiguillon dans la plaie[2]. »

Postérité modifier

La citation a souvent été utilisée pour s'opposer aux arguments d'autorité, de ce que la vérité ne peut être fondée sur l'autorité que l'on prête à un homme, aussi savant soit-il. Le critère de vérité d'une opinion ou d'une hypothèse n'est pas sa conformité avec la thèse ou l'opinion d'un autre savant, mais réside dans l'examen philosophique, logique.

Du fait de sa force évocatrice, la phrase a souvent été réutilisée dans la littérature occidentale. Parmi d'innombrables usages, Miguel de Cervantes l'utilise dans la bouche de Don Quichotte (Don Quichotte, Deuxième partie, Chapitre LI).

Gilles Deleuze et Félix Guattari l'utilisent dans l'introduction de Qu'est-ce que la philosophie ?. Selon les auteurs, le génie grec a été de quitter la Figure pour aller vers le Concept, c'est-à-dire chercher l'essence des choses. Derrière l'ami, ce n'est pas le rapport avec l'autre qui est cherché, mais l'essence, l'objectité, de ce que c'est qu'un ami. Ainsi, le Grec a été « ami de Platon, mais plus encore ami de la sagesse, du vrai ou du concept »[3].

Une reformulation anti-platonicienne est attribuée à Alfred Tarski : Inimicus Plato, sed magis inimica falsitas (« Platon est mon ennemi, mais l'erreur encore plus »)[4].

Notes et références modifier

  1. Aristote, Éthique à Nicomaque, I, 4, 1096 b 16.
  2. Platon, Phédon, 91b-c, traduction Victor Cousin.
  3. Félix Guattari, Qu'est-ce que la philosophie?, dl 2019 (ISBN 978-2-7073-4536-3 et 2-7073-4536-9, OCLC 1088879378, lire en ligne)
  4. (en) William Kneale (en) et Martha Kneale (en), The Development of Logic, Clarendon Press, , exergue.

Bibliographie modifier

  • (en) Léonardo Taran, «  Amicus Plato sed magis amica veritas. From Plato and Aristotle to Cervantes » dans Antike und Abendland Berlin, vol. 30, no 2, 1984, p. 93-124.
    Ce gros article est disponible aussi dans (en) Léonardo Taran, Collected Papers (1962-1999), Brill Academic Pub, 2001, 727 p. (ISBN 9789004123045).
  • (es) J.M. Carretero, «  « Amicus plato, sed magis amica veritas » (Notas sobre el conflicto amistad-verdad) », dans la revue Diálogo filosófico, vol. 6, no 18, Madrid, 1990, p. 392-400 (ISSN 0213-1196) (Note sur le conflit amitié - vérité).