Amédée Greyfié de Bellecombe

personnalité politique française

Amédée Greyfié de Bellecombe, né le à Moûtiers (Tarentaise) et mort le à Brides-les-Bains, comte de Bellecombe, magistrat et homme politique savoyard, partisan de l'Annexion de la Savoie (1860).

Biographie modifier

Origines modifier

Amédée Charles Henri Greyfié de Bellecombe est né le à Moûtiers, dans le département du Mont-Blanc. Le duché de Savoie a été uni à la France révolutionnaire en 1792. Il est le fils de Francisque Greyfié de Bellecombe (1786-1859), membre du conseil d'État (décret Impérial du ), petit-fils de Philibert Greyfié de Bellecombe (1755-1841), syndic puis maire de Moûtiers, vice-roi de Sardaigne, puis conseiller d'État à Turin[1],[2].

Les Greyfié de Bellecombe sont une famille noble savoyarde, originaire d'Annecy[3],[4]. Elle a été anoblie par l'obtention d'une charge au Sénat de Savoie et par lettres patentes du [5].

Marié avec "Anna" Louise Marie Suzanne Costa de Beauregard (1824-1878)[5] :

Un magistrat savoyard modifier

Amédée Greyfié de Bellecombe fait des études de droit à Turin et devient magistrat. Nommé au Parquet de la Cour d'appel de Piémont et à la Chancellerie de Turin, il revient en Savoie vers 1841 et devient Conseiller à la Cour d'appel de Chambéry (Sénat de Savoie) le . Il est révoqué en raison de ses positions conservatrices et de sa défense des congrégations religieuses, lors de l'arrivée au pouvoir du comte de Cavour en 1853 et devient simple avocat. « Au bout d'un an, il allait donner sa mesure dans la défense des Ordres religieux visés par la loi du 28 mai 1855, dite de l'Incamération (la nationalisation des biens ecclésiastiques). Cette loi souleva un tollé à Chambéry. Le Conseil municipal protesta »[1].

Un partisan de l'annexion à la France modifier

Toutefois, le comte Greyfié de Bellecombe est surtout connu pour la période précédant l'Annexion de la Savoie, durant laquelle il défend l'unité du duché et le rattachement à la France impériale. Il s'oppose ainsi au projet de division de la Savoie, avec l'idée que les provinces du Chablais savoyard et du Faucigny et la région de Saint-Julien-en-Genevois reviennent à la Suisse. Il édite ainsi une brochure signée A. Greyfié, intitulée Les Prétentions de la Suisse (édité par le Courrier des Alpes, le )[1]. Le , il obtient un entretien privé avec l'empereur Napoléon III . Ému, il oublia de remettre à l'empereur un dossier contenant les vœux des Savoyards. Il le fait parvenir le 20 , avec une étude sur les besoins de la province de Savoie (qui inspirera le gouvernement impérial). Cette dernière contenait, en sus de la plaidoirie principale sur le maintien indispensable de l'unité de la Savoie , menacée d'être dépecée par les projets d'annexion de la Suisse , trois articles accessoires [6] concernant:

  • La sauvegarde des congrégations religieuses : « ... Nous avons en Savoie quelques communautés religieuses autorisées par d'anciennes dispositions ; quelques-unes d'entre elles ont été inquiétées par une loi de suppression du 29 mai 1855. Elles se sont défendues avec succès , jusqu'ici , devant les tribunaux ; j'ai eu l'honneur d'être leur défenseur aussi heureux que dévoué... ». ( Il paraissait pour lui « très recommandable à tous égards de gagner le soutien du clergé »).
  • L'amélioration des infrastructures pour la Savoie : routes, endiguement de l'Isère, voies de chemin de fer, création d'école d'agriculture, etc.
  • Le maintien de la grande zone franche dans le Nord de la Savoie, stipulée par le traité de Turin de 1816 (art.III). Ainsi, lors du plébiscite, un bulletin « Oui et Zone » a été édité pour la partie Nord du duché concernée.
 
Croquis de M. Moulin, paru dans Le Monde Illustré, journal hebdomadaire, no 155, 31 mars 1860. Commentaire : « Réception de M. Greyfié de Bellecombe et de la députation savoisienne par Leurs Majestés Impériales, dans le salon Louis XIV, aux Tuileries, mercredi 21 mars »

Le mercredi 21 mars, une délégation savoisienne, menée par le comte, est reçue officiellement par Napoléon III, au Palais des Tuileries[7],[8]. Le journaliste Maxime Vauvert relate l'événement dans Le Monde illustré du (p. 214) « Une députation de quarante-et-un conseillers provinciaux et de conseillers municipaux des principales villes de la Savoie[9], a été reçue le jeudi 22 (sic !), par l'empereur, dans le salon Louis XIV, aux Tuileries. L'impératrice et le prince impérial assistaient à cette réception. M. le comte Greyfié de Bellecombe, président de la députation, a présenté à Sa Majesté les adresses de ses concitoyens qui, des bords du lac Léman aux vallées du Mont-Cenis, envoient à sa majesté leurs vœux et leurs espérances ».

Le comte y prononça un discours empreint de ces principes, notamment face à la possibilité d'un démembrement de la Savoie : « ... En approchant de Votre Majesté, un premier sentiment nous domine tous, c'est celui de notre admiration... Une seule préoccupation a pu arrêter jusqu'ici l'élan : c'est la crainte de voir démembrer en faveur de la Suisse... (nous prions Votre Majesté) d'éloigner notre patrie d'un pareil malheur... la Savoie trouvera non seulement la grandeur et la gloire, mais encore la sympathie et la sauvegarde de tous ses intérêts moraux et matériels... Des bords du lac Léman aux vallées du mont Cenis, ceux qu'a honorés le suffrage de leurs concitoyens sont accourus auprès de Votre Majesté, pour lui exprimer la joie que la Savoie éprouvera lorsqu'elle sera tout entière réunie à la France et qu'elle pourra toujours n'avoir qu'un cri : Vive l'Empereur ! Vive la France ! ... »[10].

Le , le Traité de Turin est signé entre « S. M. l'Empereur des Français ayant exposé les considérations qui, par suite des changements survenus dans les rapports territoriaux entre la France et la Sardaigne, lui faisaient désirer la réunion de la Savoie et de l'arrondissement de Nice à la France, et S. M. le Roi de Sardaigne s'étant disposé à y acquiescer » (préambule du traité). Le 25, il est élu pour les collèges de Moûtiers et Saint-Jean-de-Maurienne à la Chambre des députés de Turin. Il faut attendre le plébiscite d'avril pour que la Savoie, par 130 523 voix (sur 135 449 inscrits) devienne française.

Entre politique et magistrature modifier

Le comte entre en politique et se présente lors de l'élection à la députation de 1860. Le , il est élu, avec le soutien du gouvernement impérial, mais sous l'étiquette « Indépendant », dans la 2e circonscription de la Savoie (Albertville - Saint-Jean-de-Maurienne). Distant face aux luttes du pouvoir, il démissionne le , laissant la place à l'avocat Ferdinand Palluel, candidat officiel[11]. La raison, la position de l'empereur sur le pouvoir temporelle du Pape, dans la perspective du Risorgimento. Il reprend ainsi sa carrière d'avocat à Chambéry, obtenant rapidement la fonction de conseiller à la Cour, refusant une place à la Cour de Cassation à Paris. À la suite d'un soutien de Mgr Alexis Billiet, il obtient le titre de Président de la cour d'appel[1]. Il n'arrête pas pour autant sa carrière politique et devient conseiller général du canton de Bozel.

Il fonde, avec l'archevêque André Charvaz et l'abbé Martinet, l'Académie de la Val d'Isère le . Il est élu le à l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Savoie, avec pour titre académique Effectif (titulaire), avant d'en devenir le président de 1864 à 1867 [12].

Amédée Greyfié de Bellecombe meurt le et son corps est inhumé au cimetière de Brides-les-Bains.

Décorations modifier

Notes et références modifier

  1. a b c et d A. Greyfié de Bellecombe, Article « Le comte Greyfié de Bellecombe », Revue de Savoie, Numéro spécial du Centenaire 1860 - 1960, Chambéry, Librairie Dardel, 1/2 trimestre 1960, p. 97-120.
  2. Michel Germain, Personnages illustres des Savoie : "de viris illustribus", Lyon, Autre Vue, , 619 p. (ISBN 978-2-915688-15-3), p. 292.
  3. Histoire de l'annexion de la Savoie à la France, Le Messager, , 354 p., p. 194.
  4. a et b Jean-Marie Mayeur, Christian Sorrel et Yves-Marie Hilaire, La Savoie, t. 8, Paris, Éditions Beauchesne, coll. « Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine », 1996, 2003, 441 p. (ISBN 978-2-7010-1330-5), p. 224-226.
  5. a et b Amédée de Foras, Armorial et nobiliaire de l'ancien duché de Savoie (vol.3), Grenoble, Allier Frères, (lire en ligne), p. 150-151.
  6. Geneviève Dardel, Et la Savoie devint française..., Paris, Librairie Arthème Fayard, , p. 131-137.
  7. Les conseils divisionnaires du duché se réunissent le et décident de l'envoi d'une délégation de 41 savoisiens (nobles, bourgeois, officiers ministériels) favorables à l'Annexion. La délégation menée par le comte Greyfié de Bellecombe, comprend pour la province de Chambéry le député d'Aix Gustave de Martinel, les conseillers provinciaux Louis Bérard, Maurice Blanc, Ernest de Boigne, les barons Frédéric d'Alexandry d'Orengiani et Louis Girod de Montfalcon, ainsi que Charles Bertier, Alexis Falcoz, Pierre-Louis Besson, l'avocat Antoine Bourbon, le docteur Dardel, Jacques Prosper Degaillon, Charles François, Félix Gruat, Pierre Viviand, Savey-Guerraz et le major de la Garde nationale Vuagnat. La province d'Annecy est représentée par les députés Albert-Eugène Lachenal, Joseph Ginet (Rumilly), Hippolyte Pissard (Saint-Julien) et Jacques Replat (Annecy), accompagnés par Claude Bastian (ancien député de Saint-Julien), Dufour, les barons Scipion Ruphy (Annecy) et Jules Blanc (Faverges), François Bétrix (directeur de la Banque de Savoie), le docteur Descotes, Magnin, Masset, Alexis Rollier. À noter que le Chablais, plutôt favorable à un rapprochement avec la Suisse voisine n'envoie que Édouard Dessaix, Félix Jordan, François Ramel et Gustave Folliet. Cité par Régine Boisier/Paul Guichonnet.
  8. Régine Boisier, Adrien : Fils de paysan, appelé l'aristo, La Fontaine de Siloé, , 363 p. (ISBN 978-2-84206-213-2, lire en ligne), p. 190.
  9. Aucun prélat savoyards ne faisait partie de la délégation, l'archevêque de Chambéry, Alexis Billiet restant prudent face à l'attitude de l'empereur vis-à-vis de l'Église.
  10. Geneviève Dardel, Et la Savoie devint française..., Paris, Librairie Arthème Fayard, , p. 116-117.
  11. Il obtient 16 233 voix, sur 17 947 votants et 32 116 inscrits. Face à lui Léon Brunier, que la préfecture n'a pas considéré comme candidat à la suite d'une erreur des services préfectoraux. [PDF] « Fiche « Amédée Greyfié de Bellecombe » », sur www.assemblee-nationale.fr, Assemblée nationale (consulté le ), Dictionnaire des Parlementaires français de 1789 à 1889, tome 3, p. 258.
  12. « Etat des Membres de l'Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Savoie depuis sa fondation (1820) jusqu'à 1909 », sur le site de l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Savoie et « Académie des sciences, belles-lettres et arts de Savoie », sur le site du Comité des travaux historiques et scientifiques - cths.fr.

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • Éloge lu à l'Académie de Savoie par le Comte de Verger, prononcé le , cité par Mémoires de l'Académie de Savoie, 3e série, t.VIII, p. 427–464.
  • Article « Le comte Greyfié de Bellecombe », par A. Greyfié de Bellecombe, p. 97–120, in Revue de Savoie, Numéro spécial du Centenaire 1860 - 1960, Librairie Dardel, Chambéry, 1/2 trimestre 1960.
  • Fiche sur le p. 206 sur le Dictionnaire d'Amboise. Pays de Savoie. Éditions Amboise. 1989. 2e édition.
  • « Amédée Greyfié de Bellecombe », dans Adolphe Robert et Gaston Cougny, Dictionnaire des parlementaires français, Edgar Bourloton, 1889-1891 [détail de l’édition]

Articles connexes modifier

Liens externes modifier