Évrard de Frioul

saint carolingien
Évrard de Frioul
Titre de noblesse
Marquis de Frioul
-
Prédécesseur
Successeur
Biographie
Naissance
Entre et Voir et modifier les données sur Wikidata
Lieu inconnuVoir et modifier les données sur Wikidata
Décès
Sépulture
Activité
Famille
Père
Unroch (en) (?) ou Bérenger de Toulouse (?)Voir et modifier les données sur Wikidata
Mère
Engeltrude (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Fratrie
Conjoint
Gisèle (après )Voir et modifier les données sur Wikidata
Enfants
Adahard (en)
Ingeltrude (d)
Bérenger Ier de Frioul
Unroch III de Frioul
Heilwis de Frioul (d)
Hatwige von Friaul (d)
Judith von Friaul (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Autres informations
Étape de canonisation
Fête

Évrard de Frioul (aussi écrit Eberhard ou Everard et en latin Everardus, Eberardus ou Ebehardus[1]) ou saint Évrard, né vers 805-810 et mort autour de 866-69 est un personnage militaire, culturel et politique très important de l'Empire carolingien. Il fut nommé duc de Frioul et marquis de Trévise[2] par l'empereur Lothaire, canonisé après sa mort. Les historiens lui donnent différents titres : marquis de Frioul, duc de Frioul, saint Évrard ou simplement Évrard de Frioul. Il est le fondateur de l'abbaye Saint-Calixte à Cysoing. Il serait le fils d'Unroch (aussi appelé Hunrok ou Henri 1)[2], comte de Ternois, issu de la famille des Unrochides et signataire du testament du roi Charlemagne[3] et d'Ingeltrude de Paris, fille de Bègue, comte de Paris[4]. Cependant, certaines sources remettent en question la parenté du marquis de Frioul. Il aurait été marié à Gisèle (vers 820-874), fille de Louis le Pieux et de Judith, avec qui il a dix enfants[5].

Évrard de Frioul était un homme extrêmement pieux, possédait une immense bibliothèque regroupant divers ouvrages religieux ainsi que des livres de loi, témoignant de sa grande culture ainsi que de ses nombreuses richesses[5]. Ses possessions d'après son testament, vers la fin de sa vie en 867, s'étendaient du Frioul à la Flandre Occidentale, en passant par l'Alémanie et la Lotharingie[5].

Saint de l'Église catholique romaine, la Saint Évrard est fêtée, surtout localement, le 16 décembre[6],[7].

Famille modifier

Parenté équivoque modifier

La majorité des sources historiques nous affirment que le père d'Evrard de Frioul était Unroch (ou Hunrok) I, comte de Ternois (aussi appelé Henri I), de la lignée des Unrochides[2]. Une autre source indique que le père d'Évrard aurait été Bérenger, fils du comte Unroch, qui serait donc plutôt le grand-père du marquis de Frioul[1]. Certains historiens donnent comme père à Evrard, Carloman, frère de Charlemagne, ce qui expliquerait la naissance princière et la puissance établie du noble qu'était Évrard de Frioul[8] (mais cela modifierait entre autres choses, son âge, Carloman Ier étant mort en 771). Une majorité d'historiens s'entendent sur le fait que la mère d'Évrard serait Ingeltrude de Paris[réf. nécessaire]. On peut cependant lire à certains endroits que sa mère serait plutôt Buzelin, fille de Didier, roi des Lombards.

 
Gisèle, l'église abbatiale et saint Évrard.

Descendance modifier

Avec Gisèle, fille de Louis le Pieux, il eut les dix enfants suivants[9],[10] :

Biographie modifier

Jeunesse modifier

Évrard de Frioul fut élevé auprès de l'empereur Charlemagne et de son fils Louis le Pieux. Il fit son éducation à L'École du Palais, fondée par Charlemagne et dirigée par le prêtre Alcuin. Il y apprit le Trivium et le Quadrivium[1]. Il commence donc assez tôt à s'instruire ainsi qu'à former sa piété. C'est sans doute à L'École du Palais que saint Évrard commence à accumuler divers livres qui composeront sa riche bibliothèque dont il parlera avec tant de détails dans son testament[1].

 
Carte de l'Italie byzantine et lombarde.

Exploits militaires modifier

Dès que son âge le lui permet, il participe à de nombreuses expéditions militaires : il va chasser les Sarrasins sur les côtes de l'Italie et aide aussi aux guerres contre les peuples Slaves et Avares qui se rebellent contre l'Empire[1]. Au cours de ces expéditions, et grâce à moult services rendus, il se lie d'amitié avec Louis le Pieux, empereur d'Occident. Il est nommé duc de Frioul et marquis de Trévise quelques années plus tard. Les sources sont incertaines quant à qui aurait donné ces titres à Évrard. Il s'agirait soit de Louis le Pieux, empereur, ou de son fils, Lothaire Ier, roi d'Italie et coempereur.

En 840, l'empereur Louis le Pieux meurt et une guerre violente éclate entre les enfants de celui-ci : Lothaire Ier, Louis le Germanique et Charles le Chauve. Évrard de Frioul agit en tant que médiateur à la fin de la guerre en 841 et est envoyé comme médiateur par Lothaire, chargé de faire un partage équitable du territoire[1].

En 842, il retourne hâtivement à la Marche de Frioul pour combattre les Sarrasins venus d'Afrique. Ces barbares menacent l'Italie et vont même jusqu'à piller Rome en 846. Le duc de Frioul devient un des chefs de la résistance[1].

« Dans cette lutte contre les ennemis de l'Église, le comte Évrard ne se montrait pas seulement guerrier courageux et chef habile. Il suivait la grande tradition de Charlemagne. Il s'efforçait de convertir les ennemis vaincus. Il leur faisait annoncer l'Évangile et travaillait lui-même à les instruire »[1]

Le marquis de Frioul sort vainqueur de la guerre contre les Sarrasins en 851.

Testament modifier

Sa bibliothèque et ses richesses modifier

En 864, Évrard de Frioul rédige un testament avec sa femme Gisèle. Cette archive est un des rares testaments de l'époque carolingienne qui aient été transmis. Et, fait encore plus inusité, c'est un testament de couple. À la lecture de celui-ci, on peut comprendre qu'Évrard et sa femme possédaient une riche collection d'objets précieux : vaisselle, mobilier, objets d'art, bijoux ainsi qu'une impressionnante bibliothèque. Un tel testament nous donne une image claire de l'importance politique du couple d'Évrard de Frioul et de sa femme Gisèle ainsi qu'une fenêtre sur le rythme de vie vécu par le couple.

Évrard possédait d'abord des livres bibliques, des livres sacrés, un Évangile et plusieurs psautiers. Sa bibliothèque comprenait aussi des livres d'exégèse et de patristique, des livres liturgiques, des livres de spiritualité et de morale. À côté de ces ouvrages qui témoignent d'une grande culture religieuse, Évrard possédait des livres historiques et juridiques : le code de Théodose, le bréviaire d'Alaric, une collection de lois franques, ripuaires, lombardes, alamanes et bavaroises ainsi qu'une collection canonique : la bibliothèque d'Évrard était celle d'un haut fonctionnaire qui avait le souci de juger tel que les livres de lois le prescrivaient. Évrard possédait aussi des ouvrages à usage pratique, comme un Livre des gloses, les Synonymes d'Isidore de Séville en trois exemplaires ou encore le traité d'Art militaire de Végèce, un livre de médecine et une cosmographie[5].

Évrard n'était pas simplement amateur de livres, il était aussi extrêmement instruit pour l'époque. D'abord, avoir une collection d'une cinquantaine d'ouvrages aussi variée à l'époque était signe d'une certaine érudition, mais les relations du marquis avec plusieurs lettrés de l'époque nous le prouvent. Sedius Scottus[Qui ?] lui envoie des poèmes de circonstances, Loup de Ferrières lui fait copier les lois barbares et fait orner le manuscrit des portraits des rois carolingiens, Gottschalk et Anastase le Bibliothécaire trouvent asile à la cour de Frioul[12].

Dans son testament, le duc de Frioul indique clairement qu'il y a une division entre son propre trésor et celui de sa chapelle.

C'est d'abord leur fils Adalard qui hérite de Cysoing. Puis, après sa mort, c'est leur autre fils Raoul qui devient l'abbé du monastère. Il finit par le léguer à l'Église de Reims et c’est la fin du règne des Hunrochides sur le territoire de Cysoing . Leur fils Bérenger, futur roi d'Italie, reçoit, entre autres, des biens en Condroz et Hesbaye. Parmi ceux-ci, le curtis d'Hildina, que plusieurs auteurs ont identifié comme étant devenu la vieille seigneurie d'Hosdent, aujourd'hui le petit hameau d'Hosdent-sur-Mehaigne.

Abbaye de Cysoing modifier

 
Église St-Calixte St-Évrard à Cysoing.

Vers 833, Évrard de Frioul s'installe avec sa femme Gisèle sur le Fisc Royal de Cysoing, donné par l'empereur Louis le Pieux. Le domaine est déjà connu puisque les reliques de saint Arnoul y sont conservées. Ils font construire un monastère sur le territoire et fondent ce qui fut d'abord l'abbaye de Cysoing et qui devint (lors de l'acquisition des reliques de saint Calixte) l'abbaye Saint-Calixte de Cysoing. Les travaux du monastère sont longs et ils ne se terminent qu'après la mort du marquis de Frioul. Évrard de Frioul et sa femme prirent soin du monastère tout au long de leur vie en y collectionnant de nombreux manuscrits et en faisant de nombreuses donations. Le duc fait entre autres venir de Brescia en 854 les reliques du saint pape Calixte, cadeau du pape Léon IV transporté sur les épaules de fidèles[13].

Fin de sa vie modifier

On sait peu de choses sur le reste de la vie d'Évrard de Frioul après sa victoire sur les Sarrasins en 851. En 867, il rédige son testament dans son château à Maniastre, dans son comté de Trévise. Il meurt autour de 866-869 au même endroit[14]. Après la mort de son mari, Gisèle termine la construction du monastère, travail de longue haleine, et entreprend certains aménagements de l'abbaye. Elle exige ensuite que la dépouille de son mari soit rapportée d'Italie pour y être inhumée. Elle y parvient avec l'aide de leur fils Hunroch : Évrard de Frioul est inhumé dans l'église, près de l'autel nouvellement aménagé. En 870 et 874, elle fait connaître son désir d'y reposer après sa mort[13].

Notes et références modifier

  1. a b c d e f g et h Société d'Émulation de Roubaix, Mémoires de la société d'émulation de Roubaix, Paris, (lire en ligne).
  2. a b et c Clément François, L'Art de vérifier les dates des faits historiques, des chartes, des chroniques, et autres anciens monuments, depuis la naissance de notre seigneur, Desprez, , 991 p. (lire en ligne).
  3. Philip Grierson, « La maison d'Evrard de Frioul et les origines du comté de Flandre », Revue du Nord, vol. 24, no 96,‎ , p. 241–266 (ISSN 0035-2624, DOI 10.3406/rnord.1938.1796, lire en ligne, consulté le ).
  4. Call, Michel L., The royal ancestry bible : a 3,400 pedigree chart compilation (plus index and appendix) containing royal ancestors of 300 colonial American families who are themselves ancestors of 70 million Americans, M.L. Call, (ISBN 1-933194-22-7 et 9781933194226, OCLC 63170983, lire en ligne).
  5. a b c et d Régine, Le Jan, « Identifier les parents : le mode de dénomination », dans Famille et pouvoir dans le monde franc (VIIe – Xe siècle) : Essai d'anthropologie sociale, Paris, Publications de la Sorbonne, , 571 p. (ISBN 2-85944-268-5 et 978-2-85944-268-2, OCLC 407438044, lire en ligne).
  6. Cyrille Jean Destombes, Les vies des saints et des personnes d'une éminente piété, des diocèses de Cambrai et d'Arras, Dechristé, 1868, [1].
  7. Nominis : Saint Evrard.
  8. Guérin, Paul, Les petits Bollandistes : Vie des Saints, Paris, Bloud & Barral, (lire en ligne).
  9. (de) Julius Schlosser, Schriftquellen zur Geschichte der karolingischen Kunst, Wien : C. Graesser, (lire en ligne).
  10. Régine Le Jan 2003.
  11. Giovanni Antonio Bianchi, Traité de la puissance ecclésiastique..., traduit par Adolphe Charles Peltier, 1857, p. 269.
  12. Pierre Riché, « Les collections des aristocrates laïcs carolingiens (résumé) », Bulletin de la Société Nationale des Antiquaires de France, vol. 1971, no 1,‎ , p. 132–134 (ISSN 0081-1181, DOI 10.3406/bsnaf.1973.8022, lire en ligne, consulté le ).
  13. a et b (en) Krause, Jens-Uwe,, Die Stadt in der Spätantike : Niedergang oder Wandel? : Akten des internationalen Kolloquiums in München am 30. und 31. Mai 2003, Stuttgart, Steiner, , 492 p. (ISBN 3-515-08810-5, 9783515088107 et 3515083537, OCLC 180918682, lire en ligne).
  14. De Courcelles et Jean-Baptiste Pierre, Histoire généalogique et héraldique de france, des grands dignitaires de la couronne, et des maisons princières de l'Europe, Paris, Treuttel et Wurtz, 1822-1833.

Annexes modifier

Bibliographie modifier

  • Édouard Favre, « La famille d'Évrard marquis de Frioul dans le royaume franc de l'ouest », dans Études d'histoire du Moyen Âge, dédiées a Gabriel Monod, Paris, Léopold Cerf/Félix Alcan libraire, (lire en ligne), p. 155-162
  • Philip Grierson, « La maison d'Evrard de Frioul et les origines du comté de Flandre », Revue du Nord, t. 96,‎ , p. 241-266 (lire en ligne)

Liens externes modifier