Wajdi Mouawad

homme de théâtre, metteur en scène, auteur, comédien, directeur artistique, plasticien et cinéaste libano-canadien

Wajdi Mouawad, né le à Deir-el-Qamar au Liban, est un homme de théâtre, metteur en scène, dramaturge, comédien, directeur artistique, plasticien et cinéaste libano-québécois.

Il dirige le Théâtre national de la Colline (Paris) depuis 2016[1], mandat renouvelé le 8 mars 2024[2].

Biographie modifier

Wajdi Mouawad quitte son pays natal, le Liban, en 1978, à l’âge de dix ans à cause de la guerre civile. Sa famille émigre, en France, à Paris, puis au Québec dans la ville de Montréal en 1983[3].

Il entreprend ses études collégiales au collège André-Grasset. Durant sa scolarité, il rejoint la troupe de théâtre de son cégep, puis, encouragé par son professeur de français, entre à l’École nationale de théâtre du Canada dont il sort diplômé en 1991[3].

Débuts au théâtre modifier

De 1990 à 1999, il codirige la compagnie Théâtre Ô Parleur avec Isabelle Leblanc, comédienne dans une des pièces de son frère, Naji Mouawad. Il crée à Montréal de nombreuses mises en scène et adaptations dont Macbeth ou encore L’Exil de son frère. En parallèle, il écrit ses premières pièces, Willy Protagoras enfermé dans les toilettes, Journée de Noces chez les Cromagnons, Alphonse et Les Mains d'Edwige au moment de la naissance. Littoral et Incendies, les deux premiers volets de ce qui deviendra avec le temps une tétralogie intitulée Le Sang des promesses, sont respectivement créés en 1997, au 7e Festival de théâtre des Amériques à Montréal, et en 2003, au Festival d’Avignon.

En 1998, sa création Willy Protagoras enfermé dans les toilettes est élue meilleure production montréalaise par l’Association québécoise des critiques de théâtre[4].

De 2000 à 2004, il dirige le Théâtre de Quat'Sous à Montréal[5]. En 2005 il fonde les compagnies de création Au carré de l’hypoténuse en France et Abé carré cé carré à Montréal avec Emmanuel Schwartz[6].

Reconnaissance modifier

Ses nombreux succès au Canada, tels que Littoral (1997) ou encore Incendies (2003), lui apportent la reconnaissance du public et lui offrent la possibilité de revenir en France. Pendant plusieurs années, il est artiste associé de la scène nationale d'Aubusson dans la Creuse[7], une expérience qui lui inspire notamment son œuvre Silence d'usine : paroles d'ouvriers (entretiens avec d'anciens ouvriers de l'usine Philips à Aubusson, 2004). L’ensemble de son travail est à maintes reprises remarqué et récompensé par des prix. Ainsi, en 2000, il est lauréat du prix littéraire du Gouverneur général du Canada dans la catégorie théâtre.

En 2004, il adapte au cinéma (scénario et réalisation) sa pièce Littoral.

Le , le Molière du meilleur auteur francophone de théâtre lui est attribué pour Littoral, mis en scène par Magali Leiris avec Renaud Bécard, mais il le refuse afin de dénoncer « l’absence de comité de lecture dans les théâtres qui regorgent de textes non lus et qu'on jette à la poubelle »[note 1].

En mars 2006, à Chambéry, en France, il crée Forêts qui, après Littoral et Incendies, constitue le troisième volet d’une tétralogie sur le thème de la transmission et de l’héritage[8].

À partir de septembre 2007, Mouawad occupe le poste de directeur artistique du Théâtre français du Centre national des Arts du Canada à Ottawa. Il renoue également avec le théâtre pour la jeunesse : son texte Assoiffés, mis en scène par Benoît Vermeulen du Théâtre Le Clou (théâtre de création pour adolescents), est créé en 2007.

Durant la saison 2007-2008, il travaille en collaboration avec l’Espace Malraux, scène nationale de Chambéry et de la Savoie, où il crée notamment Seuls, pièce présentée en 2008 au festival d’Avignon.

En 2008, il répond à une commande de Dominique Pitoiset sur la Thébaïde et livre Le soleil ni la mort ne peuvent se regarder en face, joué au TNBA et au Théâtre de la Ville de Paris avec Nadia Fabizio (Cadmos), Nicolas Rossier (Œdipe) et Philippe Gouin (Laïos).

En 2009, un ultime volet, Ciels, est présenté avec le reste de ce qui est devenu une tétralogie : Le Sang des promesses au festival d’Avignon[9], dont il est artiste associé[10]. Il reçoit le grand prix du théâtre de l’Académie française pour l’ensemble de son œuvre dramatique.

Le , le film Incendies, adaptation cinématographique de la pièce éponyme, réalisée par Denis Villeneuve, sort en salle au Québec après avoir été présenté dans plusieurs festivals et remporté de prestigieuses récompenses au cours des mois précédents.

En avril 2016, sur proposition d’Audrey Azoulay (ministre de la Culture et de la Communication), il est nommé par François Hollande à la direction du Théâtre national de la Colline à Paris[11],[12].

Projet : Avoir 20 ans en 2015 modifier

En 2011, Wajdi Mouawad propose à 50 adolescents (sélectionnés par des théâtres) de l’accompagner pour une aventure longue de cinq ans. Ce projet est nommé « Avoir 20 ans en 2015 ». Cinq grandes villes y participent : les 50 jeunes forment cinq groupes de dix personnes provenant de Nantes, Namur, Mons, l'île de La Réunion et Montréal. Outre les jeunes, on compte aussi environ vingt accompagnateurs. Le projet est né d’une réplique d’Incendies, où une grand-mère dit à sa petite-fille :

« Si tu veux t'en sortir, tu dois apprendre à : lire, écrire, compter, parler et penser. »

Chaque verbe est associé à une année et à un voyage dans une ville où tous les jeunes sont invités et se retrouvent : « Lire » à Athènes, « Écrire » à Lyon, « Compter » à Auschwitz, « Parler » au Sénégal, et « Penser » au cours d’un voyage divisé en deux parties : la première dans une ville attribuée aux différents groupes formés pour l'occasion et la seconde à Athènes (Wajdi Mouawad avait pensé à un voyage en mer et a même plaisanté sur le fait que le voyage parfait pour ce verbe aurait été un voyage sur la Lune). Mouawad, les 50 jeunes et les accompagnateurs se retrouvent tous ensemble une fois par an. L’aboutissement du projet n'est pas théâtral ; à la fin, les jeunes sortent simplement d’une aventure littéraire et spirituelle exceptionnelle, enrichis d’un regard profond sur le monde et de souvenirs inoubliables[note 2].

Décorations modifier

Citations modifier

« Il est vrai que je suis acteur et auteur, cinéaste parfois et plasticien, mais cette frénésie ne touche qu'à une chose : mon amour profond du théâtre[15]. »

Controverse modifier

Dans le contexte de #MeTooThéâtre, mouvement social encourageant les femmes à dénoncer les violences sexistes et sexuelles subies dans le milieu du théâtre, Mouawad est l'objet de critiques pour ne pas avoir déprogrammé, malgré la demande du groupe Action Colline[16] appuyée par des collages du collectif Collages Féminicides Paris[17], Bertrand Cantat (condamné pour le meurtre de sa compagne Marie Trintignant) à qui il a confié la réalisation de la bande-son de son spectacle Mère, ni la nouvelle création de Jean-Pierre Baro[note 3], visé par une plainte pour viol déposée par une ancienne collaboratrice et classée sans suite, auquel avait été confiée la mise en scène d’une pièce pour le théâtre de la Colline, le théâtre national de Strasbourg et le théâtre national de Bretagne (Baro finira cependant par « renoncer à sa création car les conditions n'étaient pas sereines »[18],[16],[19],[20],[21],[22]).

Œuvre modifier

Théâtre modifier

En tant qu'auteur dramatique modifier

En tant qu'adaptateur modifier

En tant qu'interprète modifier

En tant que metteur en scène modifier

Textes radiophoniques modifier

  • Loin des chaises
  • Wilfrid
  • William M.
  • Le Chevalier
  • Dans la cathédrale
  • Les trains hurlent quand on tue
  • Les Étrangers du bord du monde

Romans modifier

Essais modifier

  • Seuls - Chemin, texte et peintures, Actes Sud, 2008
  • Le Sang des Promesses : Puzzle, racines, et rhizomes, notes de travail, de mise en scène, etc., Leméac/Actes Sud, 2009 À propos du processus d’écriture et de mise en scène de la tétralogie.
  • Traduire Sophocle, Actes Sud, 2011
  • Le Poisson soi, Éditions du Boréal, 2011
  • Qui sommes-nous ? Fragments d'identité, Éditions universitaires d'Avignon, coll. « Entre-Vues », 2011
  • Participation à l'ouvrage collectif Qu'est-ce que la gauche ?, Fayard, 2017
  • Tout est écriture, avec Sylvain Diaz, Actes Sud, 2017

Opéra modifier

Cinéma modifier

Réalisateur et scénariste modifier

Acteur modifier

Autres modifier

  • Je suis le méchant !, entretiens avec le metteur en scène André Brassard, Leméac, 2004
  • Littoral, projection cinématographique de la pièce de théâtre du même nom, TVA Films, 2004
  • Architecture d’un marcheur, entretiens accordés à Jean-François Côté, Leméac, 2005
  • Chœurs, l’album des chants du chœur antique de la trilogie Des femmes, Actes Sud, 2011
  • « Nous sommes des ordures »[34], L'Orient littéraire, supplément mensuel de L'Orient-Le Jour,

Autres prix modifier

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. Déclaration dans un entretien réalisé par Jacques Téphany en novembre 2008 pour le magazine Cassandre :

    « J'ai seulement profité de la récompense qui m'était proposée pour dénoncer l’absence de comité de lecture dans les théâtres qui regorgent de textes non lus et qu'on jette à la poubelle. »

  2. Wajdi Mouawad a expliqué avoir donné le premier souffle de vie à ce projet car il aurait aimé que l’on fasse la même chose pour lui quand il avait le même âge que ces jeunes.
  3. Directeur en 2018-2019 du Théâtre des Quartiers d'Ivry, centre dramatique national du Val-de-Marne.
  4. Non publié.

Références modifier

  1. « Wajdi Mouawad », sur colline.fr (consulté le )
  2. « Décret du 8 mars 2024 portant nomination du directeur du Théâtre national de la Colline - M. MOUAWAD (Wajdi) », sur Légifrance (consulté le )
  3. a et b « Wajdi Mouawad au sommet de la Colline », sur next.liberation.fr, (consulté le ).
  4. Propos recueillis par Nadia Taïbi, « De la métamorphose : Entretien avec Wajdi Mouawad », Sens-Dessous, no 2007:1,‎ , p. 85-90 (DOI https://doi.org/10.3917/sdes.001.0085)
  5. « Théâtre de Quat'sous », sur Théâtre de Quat'sous (consulté le ).
  6. « Wajdi Mouawad – Ordre national du Québec », sur www.ordre-national.gouv.qc.ca (consulté le )
  7. « Une compagnie associée à la Scène nationale va présenter ses spectacles au théâtre Jean-Lurçat », sur www.lamontagne.fr, (consulté le )
  8. « Le prix Méditerranée à Wajdi Mouawad », sur Ouest-France.fr, (consulté le )
  9. « Ciels », sur Festival d'Avignon, (consulté le )
  10. « Wajdi Mouawad », sur Festival d'Avignon (consulté le )
  11. « Pour Wajdi Mouawad, l’exil s’arrête à Paris », sur Le Monde, (consulté le ).
  12. « Nomination de Wajdi Mouawad à la direction du Théâtre national de la Colline à Paris », sur Les trois coups, (consulté le ).
  13. Décerné par le gouvernement français pour l’ensemble de son œuvre.
  14. « La Gouverneure générale annonce 60 nouvelles nominations au sein de l’ordre du Canada ».
  15. Entretien avec Jacques Téphany pour le magazine Cassandre.
  16. a et b « Théâtre. Wajdi Mouawad, tout sur sa mère et Christine Ockrent », sur L'Humanité, (consulté le ).
  17. « Une première sous tension pour Mère de Wajdi Mouawad au théâtre de la Colline », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  18. « #MeToo au théâtre : un metteur en scène abandonne un projet de création avec trois grands théâtres nationaux », sur Franceinfo, (consulté le )
  19. Libération et AFP, « Wajdi Mouawad refuse de déprogrammer Cantat et Baro au Théâtre de la Colline », sur Libération (consulté le ).
  20. Olivier Ubertalli, « Wajdi Mouawad, Bertrand Cantat, Christine Ockrent et les féministes », sur Le Point, (consulté le ).
  21. « Collaborer avec Bertrand Cantat, le pari trop risqué de Wajdi Mouawad ? », sur Télérama, (consulté le ).
  22. « Wajdi Mouawad refuse de déprogrammer Bertrand Cantat de son spectacle au Théâtre de la Colline », sur Franceinfo, (consulté le ).
  23. Création en 2019 dans une mise en scène de Stanislas Nordey, avec Damien Gabriac et Julie Moreau. Voir sur theatre-quartiers-ivry.com.
  24. « Tous des oiseaux par Wajdi Mouawad lauréat du grand prix de littérature dramatique 2019 » ARTCENA, le .
  25. Voir sur mons2015.eu.
  26. Voir sur theatre-chaillot.fr.
  27. Tous des oiseaux», l’amour sans cage sur Libération 30 novembre 2017.
  28. Voir sur associationcritiquetmd.com.
  29. « Mort prématurée d’un chanteur populaire dans la force de l’âge au Théâtre de la Colline du 13 nov. au 29 déc. 19 », sur franceinter.fr, consulté le 28 novembre 2019.
  30. Voir sur colline.fr.
  31. Voir le site du Centre.
  32. Wajdi Mouawad, lauréat du prix littéraire du 2e roman 2013 sur lecture-en-tete.fr.
  33. Voir sur lireenpoche.fr.
  34. Lire en ligne sur lorientlitteraire.com.
  35. Liste des lauréates et des lauréats du prix littéraire du Gouverneur général.
  36. « Wajdi Mouawad et Stéphanie Lapointe parmi les gagnants des Prix littéraires du GG », sur Voir, (consulté le ).
  37. (de) Schauspiel Stuttgart, « European Drama Award, Laudatories: Thomas Maagh (publisher, Verlag der Autoren), Simon Stephens (jury, writer) In English, German, French with simultaneous translation into English, German, French », sur schauspiel-stuttgart.de (consulté le ).

Annexes modifier

Sur les autres projets Wikimedia :

Bibliographie modifier

  • Charlotte Farcet, Les Tigres de Wajdi Mouawad, Joca Seria, 2009
  • Carole Guidicelli, « Wajdi Mouawad : Incendies : étude d'une œuvre intégrale », NRP-Lycée, Hors série, . Présentation en ligne

Radio modifier

Liens externes modifier